Filioque : deux approches (d'après Mgr Kallistos)

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Thomas M.
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Message par Thomas M. »

Valentine remarque que si l’amour entre Père et Fils établit une nouvelle personne, il n’y a pas de raison d’arrêter la série qui pourrait se continuer à l’infini. Augustin rejette comme absurde mais sans le justifier.
La justification c'est la Révélation biblique, tout simplement...

En Christ,

Thomas M.
Alexis Woronine
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Filioque : deux approches (d'après Mgr Kallistos)

Message par Alexis Woronine »

Je suis sidéré par la qualité des échanges sur, non pas "un" sujet fondamental pour tout orthodoxe, mais sur LE sujet basique, fondamental pour tout orthodoxe, sujet qui comme par hasard causa la séparation du Patriarcat de Rome du reste de l'orthodoxie.

Non seulement les références sont nombreuses mais l'écriture et l'esprit des auteurs permet de voir dans quels méandres la mauvaise foi peut s'insinuer lorsqu'elle tente de prendre en défaut la vraie Foi et la sincérité de ceux qui La défendent.

Une fois de plus il me revient à l'esprit cet adage maladroitement mémorisé mais qui en toute circonstance se vérifie : il ne sert à rien d'avoir de la méméoire lorsqu'on défend la Vérité, puisque chaque réponse autre que la bonne est forcément mauvaise; il n'est donc plus nécesaire de se souvenir de l'infinité des mauvaises puisque ne retenir que la juste, bonne et vraie suffit à en voir toutes celes qui lui sont différentes.

C'est ce que "Wladimir" n'a pas oublié mais qu'il feint, dans un suprême effort, de contourner en évoquant du vrai avec du faux, du faux avec du vrai, du vrai avec etc.

Cela nous vous rappelle personne?...

Merci Anne-Geneviève, Claude, Jean-Claude, Antoine et tous ceux que j'oublie (mais ce n'est pas grave puisque comme eux je n'ai pas besoin d'avoir de la mémoire)

A Woronine
Anne Geneviève
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Message par Anne Geneviève »

Suite du résumé de l’article de Valentine.

Question clef : « la capacité de « spirer » l’Esprit Saint vient-elle de la Divinité ou d’une personne spécifique ? Et si c’est d’une personne spécifique, laquelle ? »

Les catholiques romains, dit-il, ne savent que répondre. Dans un cadre augustinien, cette capacité est liée à la Divinité, d’où deux options : ou l’Esprit Saint n’est pas Dieu, ou il a le pouvoir de se « spirer » lui-même. L’option 1 est la négation de la divine Trinité, la 2 une absurdité.

Ainsi le filioque n’est qu’une tentative d’expliquer l’inexplicable par la sagesse humaine. « C’est compliqué, confus et s’enracine en un dieu conçu par l’homme (néoplatonicien) plutôt que dans le Dieu d’Abraham, Isaac, Jacob et Moïse, le Dieu de Jésus Christ. » Alors que l’attitude orthodoxe est de recevoir la révélation avec humilité et de reconnaître que Dieu est « au delà de toute intellection » comme le dit saint Jean Damascène.

Après cette magistrale analyse de l’augustinisme, Valentine passe à un autre ordre de critique du filioque.

Il remarque que, dans le paganisme grec, ce qui est premier en Dieu, c’est sa nature. De même ariens et nestoriens pensent qu’en Dieu la nature précède son existence en tant que Trinité. On décèle la même pensée dans la structure des manuels de dogmatique en occident : d’abord l’existence de Dieu, puis sa nature, puis ses attributs ou qualités, tout cela traité avant l’existence de la Trinité. Ce qui « suppose a priori que le principe ‘ontologique’ de Dieu réside non dans une personne mais dans la substance, ‘l’être’ de Dieu » en quoi résiderait son unité.

« C’est une distorsion de la théologie patristique » pour laquelle la « ‘cause’ de l’être et de la vie de Dieu ne réside pas dans une substance divine mais dans la personne du Père (son hypostase). » Dieu n’est pas lié à une nécessité ontologique. « Dieu existe parce que le Père existe, Lui qui par amour librement et éternellement engendre le Fils et librement et éternellement ‘spire’ l’Esprit Saint. »

Valentine démontre ensuite que l’ajout du filioque est arbitraire. Il a été fait sans consulter les Eglises d’orient et en violation des décisions du concile d’Ephèse.

Puis qu’il s’agit d’une nouveauté. Je suis un peu plus dubitative sur ce passage puisqu’il reprend les actes du onzième concile de Tolède (675) sans soupçonner une possible interpolation. Mais il remarque, et c’est important, que le langage de ces actes est exactement celui d’Augustin. Il énumère ensuite ce que nous connaissons, les Libri Carolini écrits en réponse au 7e concile œcuménique de 787, le concile de Francfort, une assemblée d’Aachen en 809 qui a établi que « la foi dans le filioque est nécessaire au salut », la demande faite au pape (Aachen 810) d’autoriser l’ajout du filioque et le refus de Léon III. Autres étapes connues : l’acceptation par Rome en 1014, le rôle d’Humbert de Moyenmoutiers en 1054 et ce que Valentine nomme « révolution papale » (1075-1122) précédant le concile de Latran de 1215. Qu’on me permette encore une incise. L’une des rares faiblesses de cet article, c’est peut-être, dans ce résumé historique, de minimiser le rôle d’Hildebrand par rapport à celui d’Innocent III.
Après quoi, dit Valentine, « le filioque devient une routine dans l’Eglise de Rome ». Routine dont il donne quelques exemples à des dates clefs, concile de Lyon, concile de Florence, Catéchisme romain d’avant 1994, Vatican I, jusqu’au nouveau catéchisme romain de 1994 qui « met la pédale douce » sur le filioque.
Valentine souligne toutefois les limites de cet éloignement du filioque, notant qu’à cause du dogme de l’infaillibilité, le catholicisme romain « est incapable de répudier ses discours antérieurs, même après les avoir reconnus comme des erreurs ». Il note aussi que des expressions comme « l’Esprit Saint procède éternellement des deux » (le Père et le Fils) restent problématiques pour les orthodoxes. C’est le moins qu’on puisse dire !
A suivre.
"Viens, Lumière sans crépuscule, viens, Esprit Saint qui veut sauver tous..."
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Thomas M. a écrit :
Valentine remarque que si l’amour entre Père et Fils établit une nouvelle personne, il n’y a pas de raison d’arrêter la série qui pourrait se continuer à l’infini. Augustin rejette comme absurde mais sans le justifier.
La justification c'est la Révélation biblique, tout simplement...

En Christ,

Thomas M.
Heureux de trouver sous votre plume une référence à la Révélation biblique, laquelle exclut expressément le Filioque, comme vous le savez (cf. Jn 15, 26).
Anne Geneviève
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Message par Anne Geneviève »

Suite et fin de l’article de Valentine

Après les chapitres déjà résumés, Valentine pose des « réponses aux arguments en faveur du filioque », sous forme de dialogue : un argument, une réponse.

Argument 1 : « Comme le Père envoie l’Esprit extérieurement dans le monde dans le temps, le Fils de manière interne procède du Père dans la Trinité. Comme l’Esprit est extérieurement envoyé dans le monde par le Fils aussi bien que par le Père, il procède en interne des deux, Père et Fils, dans la Trinité. C’est pourquoi l’Esprit est nommé ‘Esprit du Fils’ (Gal. 4,6) et pas uniquement l’Esprit du Père. »
Réponse : Cette expression, Esprit du Fils, ne parle pas de l’origine existentielle de l’Esprit Saint comme en Jean 15,26. Nous recevons l’Esprit Saint envoyé par le Fils mais son origine ultime est le Père.

Argument 2 : s’appuie sur Jean 16,15 ; si tout ce qui est au Père est donné au Fils, de même la capacité de faire procéder l’Esprit Saint.
Réponse : Ce « tout » a des limites : le Père ne peut donner au Fils sa Paternité, ce serait absurde. « Parce qu’ils font de la substance divine la source de la Sainte Trinité, ils ne peuvent comprendre la nature de cette paternité qui fait du Père la source du Fils et de l’Esprit Saint. »

Argument 3 : Jean 20, 22 : « Et ayant dit cela, Il souffla sur eux et leur dit : recevez l’Esprit Saint. »
Réponse : « Cet argument ignore la différence entre l’origine éternelle de l’Esprit Saint et son envoi temporel dans le monde. »

Argument 4 : Jean 1,3 : « Toutes choses ont été faites par Lui… », cf credo de Nicée. La création est l’œuvre du Père et du Fils. Et selon Genèse 1, 1-3, on voit que les trois personnes de la Trinité sont impliquées dans la création.
Réponse : On trouve effectivement cet argument dans les raisonnements cathos, sous la forme : toute la création est faite par le Fils comme un principe ; donc aussi l’envoi de l’Esprit Saint. Mais l’Esprit saint n’est pas une créature ! Il est éternellement Dieu !
Incise de ma part : si des théologiens cathos utilisent cet argument, ont-ils conscience de reprendre un discours arien ?

Argument 5 : si on nie la double procession, comment distinguer le Fils de l’Esprit ? On distingue le Père du Fils par ce que le Père engendre et le Fils est engendré, l’être du second dérive de l’être du premier. Si le Fils dérive du Père et l’esprit dérive aussi du Père, en quoi diffèrent-ils ? On peut certes arguer de ce que le Fils s’est incarné et pas l’Esprit mais ce n’est pas une réponse car la distinction des personnes divines doit résider dans la nature de la divinité, non dans la relation de Dieu à sa création.
Réponse : C’est encore une tentative pour expliquer Dieu par la sagesse humaine. Seule réponse possible, celle de saint Jean Damascène : « Nous avons appris qu’il y a une différence entre engendrement et procession mais la nature de cette différence est au delà de notre compréhension. »

Argument 6 : Dans le credo, l’Esprit est distingué comme donateur de vie, mais qu’est ce que ça signifie ? Quelle différence entre un chat mort et un chat vivant ? Un cadavre a les mêmes parties qu’un corps vivant mais dans le vivant elles interagissent, chaque organe remplit sa fonction pour le bien de l’ensemble. La vie d’un organisme, c’est la colle qui unit les parties en un système intégré. Dans l’Eglise, l’Esprit donne à chaque membre une fonction pour la vie de l’ensemble du Corps du Christ et les dons nécessaires pour l’accomplir. Référence épître aux Corinthiens. Le seul don accordé à tous, c’est la charité qui maintient l’unité de l’ensemble. Avant la création, l’Esprit est le lien d’amour et d’unité entre le Père et le Fils et donc procède du Père et du Fils.
Réponse : deux erreurs : subordonner l’Esprit à un lien d’amour entre le Père et le Fils ; faire de l’Esprit Saint un membre de l’Eglise. L’Esprit Saint est Dieu. Une troisième erreur plus subtile : l’idée que la vie dépend de son rôle ou de son but. 1. Dieu, l’esprit Saint ne dépend de rien ; 2. le don de vie reçu par les hommes du Donateur de Vie est un don libre.

Argument 7 : Chez un créateur humain, l’idée précède l’expression. Matt 11, 17 : « Nul ne connaît le Fils, sauf le Père, et nul ne connaît le Père, sauf le Fils et ceux à qui il l’a révélé. » Des théologiens en déduisent que le Père n’est conscient de Lui-même qu’en contemplant son image dans le Fils. Comme chez un créateur, la réponse appréciative dépend de l’idée révélée dans l’expression et non dans l’idée seule, au niveau divin, l’esprit saint procède non seulement du Père mais du Père et du Fils.
Réponse : Vrai au niveau humain, ne s’applique pas à Dieu. Introduire en Dieu une limitation (le Père n’est conscient qu’en…) devrait faire tinter nos sonnettes d’alarme. C’est encore projeter la sagesse humaine. Et c’est la négation de l’auto-conscience de Dieu, ce qui est un blasphème. De plus, le Fils et l’Esprit ne sont pas des créations.

Suivent un certain nombre de citations patristiques sur l’Esprit Saint. Mais comme elles sont données en anglais, je préfère ne pas me hasarder à les retraduire (double traduction, double trahison). Donc, je donne simplement les références, traduites selon le titre anglais qui n’est pas forcément celui des éditions du Cerf.
Tertullien, Contre Praxeas, 4, 1.
Origène, Commentaire de Jean, 2, 6.
Saint Maxime le Confesseur, Questions à Thalassium, 63.
Saint Grégoire « the Wonderworker », Confession de Foi
Didyme l’Aveugle, Le Saint Esprit, 37
Saint Athanase, A Sérapion de Thmuis
Saint Epiphane de Salamine, L’homme bien ancré, 8, 75.
Saint Epiphane de Salamine, Panarion, 62,4.
Saint Basile le Grand, Du Saint Esprit, 18, 45.
Saint Grégoire de Nysse, Contre Eunome, 1.
Saint Grégoire de Nysse, Lettre à Ablabius
Saint Cyrille d’Alexandrie, Trésor de la sainte et Consubstantielle Trinité, thèse 34.
Saint Cyrille d’Alexandrie, Lettres 3, 4, 33
Saint Cyrille d’Alexandrie, Les douze anathèmes, erreur 9.
Saint Jean Damascène, Exposé de la foi orthodoxe, 8.
Saint Jean Damascène, Exposé de la foi orthodoxe, 12
Saint Jean Damascène, Dialogue contre les manichéens, 5

Voilà. J’ai conscience que mon résumé ne vaut pas l’original mais s’il pouvait donner à certains l’envie d’aller voir l’original, je n’aurais pas travaillé en vain.
"Viens, Lumière sans crépuscule, viens, Esprit Saint qui veut sauver tous..."
Thomas M.
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Message par Thomas M. »

Merci à Anne Geneviève pour ce travail de synthèse remarquable.

En Christ,

Thomas M.
Antoine
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Message par Antoine »

XB!

J.Ratzinger a écrit :A la différence des mots « Père » et « Fils », le nom de l'Esprit Saint, la troisième personne divine, n'est pas l’expression d'une spécificité ; il désigne au contraire ce qui est commun à Dieu. Or c'est justement là qu'apparaît ce qui est « propre » à la troisième personne : elle est « ce qui est en commun », l'unité du Père et du Fils, l'Unité en personne. Le Père et le Fils sont un dans la mesure où ils vont au-delà d'eux-mêmes ; ils sont un dans cette troisième personne, dans la fécondité du don. De telles affirmations ne pourront jamais être autre chose que des approches ; nous ne pouvons reconnaître l’Esprit que dans ses effets. Par conséquent l'Ecriture ne décrit jamais l'Esprit Saint en soi ; elle ne parle que de la manière dont il vient vers l'homme et dont il se différencie des autres esprits…
Cardinal Joseph Ratzinger, Pape Benoît XVI.
"Le Dieu de Jésus Christ", Fayard 1977, p. 116

A la différence des mots « Père » et « Fils », le nom de l'Esprit Saint, la troisième personne divine, n'est pas l’expression d'une spécificité
Si l'Esprit Saint n'est pas l'expression d'une spécificité alors on ne voit pas en quoi le Père et le Fils auraient eux une spécificité. C'est la notion même de distinction des personnes qui disparaît.Et le Père et le Fils sont plus Dieu que l'Esprit puisque l'Esprit n'est que la résultante de la relation des deux autres personnes.

il désigne au contraire ce qui est commun à Dieu. Or c'est justement là qu'apparaît ce qui est « propre » à la troisième personne : elle est « ce qui est en commun », l'unité du Père et du Fils, l'Unité en personne.
Si L'esprit est une personne alors ce qui est en commun à Dieu en devient une quatrième. Cela n'a aucun sens car ce qui est commun c'est la nature Divine que partagent les trois hypostases. Si l'Esprit n'est que ce qui est commun au Père et au Fils alors l'Esprit n'est plus une hypostase mais une nature. Cela n'a non plus aucun sens.
Le Père et le Fils sont un dans la mesure où ils vont au-delà d'eux-mêmes
Un anthropomorphisme très curieux. Qu'est-ce que cela pourrait bien vouloir dire que Dieu n'est Dieu que dans la mesure où il va au-delà de lui-même. Dieu ne va pas au-lelà de lui-même sinon cela signifierait que quelque chose le dépasse. Dieu, n'est pas "monos" ,Dieu est Dieu en tant qu'il est Trine. Qu'est-ce que cela pourrait vouloir dire que la nature dépasse l'hypostase en devenant elle même hypostase? Depuis quand y aurait -il une nature qui s'enhypostasierait dans l'Esprit et qui serait donc le garant de la nature des deux autres hypostases? Que devient l'engendrement du Fils et la spiration de l'Esprit fondements de la théologie trinitaire du credo?
ils sont un dans cette troisième personne, dans la fécondité du don.
L'Esprit ne se donne donc pas. Il est la marchandise du don. Il n'a aucune distinction au sein de la Trinité; Il n'a pas d'hypostase propre.Il est simplement don du Père et du Fils.

De telles affirmations ne pourront jamais être autre chose que des approches
Oui, mais on n'est pas pour autant obligé d'enseigner des approches fausses et contraires à toute la théologie. Pauvre Pape qui n'a rien compris et qui n'est pas prêt de comprendre, étiquette papale oblige...
Le filioque: une mauvaise expression de la foi qui est devenue ensuite une expression de la mauvaise-foi!

Laissons maintenant les Pères rectifier les élucubrations du Pape:

"Grégoire de Naziance: Oraison sur le baptème.

1 - Je n'ai pas commencé de penser à l'Unité que la Trinité me baigne dans sa splendeur. Je n'ai pas commencé de penser à la Trinité que l'Unité me ressaisit. Lorsqu'un des Trois se présente à moi, je pense que c'est le tout, tant mon œil est rempli, tant le surplus m'échappe; car dans mon Esprit trop borné pour comprendre un seul, il ne reste plus de place à donner au surplus. Lorsque j'unis les Trois dans une même pensée, je vois un seul flambeau, sans pouvoir diviser ou analyser la lumière unifiée.

St Basile

2 - Nous ne comptons pas en composant, allant de l'un au multiple par augmentation, disant un, deux, trois, ou le premier le second, le troisième. Car je suis le Dieu premier et je suis plus que cela. (Is XLIV, 6) Jamais jusqu'à ce jour on n'a dit: le second Dieu, -mais adorant le Dieu de Dieu , confessant l'individualité des hypostases sans diviser la nature en multitude, nous demeurons dans la monarchie.

Théodoret de Cyr

3 - Pour la philosophie profane il n'y a aucune différence entre l'ousia et l'hypostase. Car l'ousia signifie ce qui est et l'hypostase ce qui subsiste. Mais suivant la doctrine des pères, il y a entre l'ousia et l'hypostase la même différence qu'entre le commun et le particulier."

Grégoire de Naziance Oraison sur la Sainte Lumière

4 - N'être pas engendré, être engendré, procéder, caractérisent le Père , le Fils et le Saint Esprit, de manière à sauvegarder la distinction des trois hypostases dans l'unique nature et majesté de la Divinité. Car le Fils n'est pas le Père, puisqu'il n'y a qu'un seul Père, mais il est ce qu'est le Père. Le Saint Esprit bien qu'il procède De Dieu n'est pas le Fils, puisqu'il n'y a qu'un Fils unique, mais il est ce qu'est le Fils.Un sont les Trois en divinité et le Un est Trois en personnalités.

St Jean Damascène: La Foi orthodoxe

5 - Les personnes ou hypostases humaines sont isolées et non les unes dans les autres; tandis qu'en la Sainte Trinité tout au contraire.... les hypostases sont les unes dans les autres.

6 - Les personnes sont unies non pour se confondre , mais pour se contenir l'une l'autre; et il existe entre elles une circumincession sans aucun mélange ni confusion, en vertu de laquelle elles ne sont ni séparées ni divisées en substance.

7 - Le mode de la génération et le mode de la procession sont incompréhensible.... Nous avons appris qu'il y a une différence entre la génération et la procession mais nullement quel est ce genre de différence.

Grégoire de Naziance

8 - La nature une dans les Trois - c'est Dieu; quant à l'unité- c'est le Père de qui les autres procèdent et vers lequel ils se ramènent sans se confondre, mais en coexistant avec Lui, sans être séparés par le temps, par la volonté ou par la puissance.


St Siméon le nouveau théologien
Hymnes vol1 p245


9 - Si Dieu était privé de l'un des deux , soit du Fils soit de l'Esprit, il ne serait plus le Père, il ne serait même plus vivant, séparé de l'Esprit qui à tous donne la Vie et l'être

St Jean Dmascène

10 - Le père a l'être par lui-même et il ne tient d'un autre rien de ce qu'il a. Au contraire, il est la source et le principe pour tous de leur nature et de leur manière d'être... Donc tout ce qu'ont le Fils et L'Esprit et leur être même, ils le tiennent du père. Si le Père n'était pas, ni le Fils ne serait, ni l'Esprit. Si le Père n'avait pas quelque chose, ni le Fils ne l'aurait, ni l'Esprit. C'est grâce au Père que le Fils et l'Esprit ont tout ce qu'ils ont...


11 - Chacune des personnes contient l'unité par sa relation aux autres, non moins que par sa relation à soi-même.
christianc
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Message par christianc »

Excusez moi Antoine j'ai du lire machinalement, ou peut être mon intérêt personnel pour cette question n' était il pas "réveillé", il s'agit effectivement de la justesse dans la formulation du Mystère de la Trinité.
Ludovic
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Message par Ludovic »

Antoine a écrit :
L'Esprit ne se donne donc pas. Il est la marchandise du don. Il n'a aucune distinction au sein de la Trinité; Il n'a pas d'hypostase propre.Il est simplement don du Père et du Fils.
Cependant, dans la liturgie catholique, la préface du dimanche de la Sainte Trinité (aujourd'hui) confesse l'hypostase du Saint-Esprit :

"Vraiment, il est juste et bon de te rendre gloire, de t'offrir notre action de grâce, toujours et en tout lieu, à toi, Père très saint, Dieu éternel et tout-puissant. Avec ton Fils unique et le Saint-Esprit, tu es un Seul Seigneur, dans la trinité des personnes et l'unité de leur nature. Ce que nous croyons de ta gloire, parce que tu nous l'as révélé, nous le croyons pareillement, et de ton Fils et du Saint-Esprit : et quand nous proclamons notre foi au Dieu éternel et véritable, nous adorons en même temps chacune des personnes, leur unique nature, leur égale majesté."

Qu'en pensez-vous ?
Anne Geneviève
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Message par Anne Geneviève »

Ludovic a écrit :Antoine a écrit :

Citation:
L'Esprit ne se donne donc pas. Il est la marchandise du don. Il n'a aucune distinction au sein de la Trinité; Il n'a pas d'hypostase propre.Il est simplement don du Père et du Fils.



Cependant, dans la liturgie catholique, la préface du dimanche de la Sainte Trinité (aujourd'hui) confesse l'hypostase du Saint-Esprit :

"Vraiment, il est juste et bon de te rendre gloire, de t'offrir notre action de grâce, toujours et en tout lieu, à toi, Père très saint, Dieu éternel et tout-puissant. Avec ton Fils unique et le Saint-Esprit, tu es un Seul Seigneur, dans la trinité des personnes et l'unité de leur nature. Ce que nous croyons de ta gloire, parce que tu nous l'as révélé, nous le croyons pareillement, et de ton Fils et du Saint-Esprit : et quand nous proclamons notre foi au Dieu éternel et véritable, nous adorons en même temps chacune des personnes, leur unique nature, leur égale majesté."

Qu'en pensez-vous ?
Qu’aucune hérésie n’est à l’abri de devoir assumer ses propres contradictions ! Surtout entre l’explicite et l’implicite ou conséquences logiques de ses propositions.
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Antoine
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Message par Antoine »

Ludovic je ne comprends pas à quoi vous jouez: J'ai commenté un texte du cardinal Ratzinger devenu Benoit XVI.
Il est clair que pour Ratzinger l'Esprit Saint est la résultante de la relation entre le Père et le Fils. Les catholiques font de cette résultante à la fois une hypostase et une propriété hypostatique ce qui n'a aucun sens. Personne ne conteste qu'ils croient en la Trinité mais la Trinité en laquelle ils croient n'est pas celle de la Révélation. Ce ne sont donc pas les mots d'Esprit Saint qui seront à critiquer mais ce qu'ils mettent sous ce vocable. Les Ariens ont aussi une Trinité mais dans laquelle le Fils est créé et ne peut donc être consubstantiel au Père.

Vous opposez un texte liturgique dans lequel on adore l'Esprit Saint comme personne de la Trinité:
Avec ton Fils unique et le Saint-Esprit, tu es un Seul Seigneur, dans la trinité des personnes et l'unité de leur nature.[...]
et quand nous proclamons notre foi au Dieu éternel et véritable, nous adorons en même temps chacune des personnes, leur unique nature, leur égale majesté.

Cette phrase peut-être reprise dans un texte liturgique orthodoxe mais elle n'explique pas ce qu'est l'hypostase de l'Esprit Saint.
Cette phrase n'entre donc pas dans le débat.

En revanche quand le texte que vous citez affirme:
[...]Ce que nous croyons de ta gloire, parce que tu nous l'as révélé, nous le croyons pareillement, et de ton Fils et du Saint-Esprit [...] Alors il y a une belle entourloupe propagandiste! Vous me direz où et à qui le Père a révélé que, dans les relations intra trinitaires, l'Esprit Saint procède de Lui et du Fils! Aux Franks? Au pape? A Ratzinger personnellement? La phrase est très sibylline, car elle ne parle que de la Gloire; mais elle parle aussi de Révélé et nous savons tous que la Trinité latine est une construction intellectuelle bancale au service de la puissance papale.

A la conclusion d' Anne Geneviève qui vous répond << Qu’aucune hérésie n’est à l’abri de devoir assumer ses propres contradictions ! Surtout entre l’explicite et l’implicite ou conséquences logiques de ses propositions.>> je ne vois pas ce que l'on peut ajouter. Le filioque n'est pas un problème orthodoxe. Nous, nous l'ignorons. Il est anathématisé par l'Eglise depuis 1200 ans et nous avons déjà reproché à Kallistos Ware dans cette rubrique ses tentatives compromettantes de trouver un sens orthodoxe là où il n'y a qu'hérésie sur laquelle le rite du Baptème nous enjoint de cracher.


Ensuite, par mesure de clarté pour le lecteur qui passe et prend à la volée un message vous pourriez dire : Antoine dit que pour Ratzinger alias Benoit XVI, <<L'Esprit ne se donne donc pas. Il est la marchandise du don. Il n'a aucune distinction au sein de la Trinité; Il n'a pas d'hypostase propre. Il est simplement don du Père et du Fils. >>
Cela évitera que l'on me fasse endosser une absurdité théologique...
Pascal-Yannick
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Message par Pascal-Yannick »

J'ai parcouru le fil relatif au filioque et il m'a beaucoup aide a comprendre la portee de cette inovation qui m'a toujours indisposee.Cependant avant de decouvrir ce forum le principal argument, je dirai pretexte, occultant le debat etait l'approche historique selon laquelle 1054 etait une fabrication et que jusqu'au sac de Constantinople la concelebration se poursuivait.A cet egard j'ai lu votre intervention, Antoine,sur St Marc d'Ephese et reprennez moi si je vous ai mal compris:selon lui la raison pour laquelle les "byzantins" n'avaient pas rompu radicalement etait le rapport numerique a l'avantage des latins.Facteur qui aurait pu se solder par un bain de sang.Si je vous ai bien interprete, jusqu'ou s'etendait cette reserve des "byzantins"?(possibilite de concelebration eucharistique ou pas?) Je sais que les phenomenes historiques ne sont pas blancs ou noirs par ailleurs le but de mon interrogation n'est pas de sous entendre que l'Orthodoxie s'est compromise.
Consecutivement a cette hypothese, sur le lien suivant: http://christophe.levalois.free.fr/fichier/dialogue.pdf intitule Du dialogue de charite au dialogue de verite une interrogation me vient a l'esprit:que repondre a ceux qui affirment que la "date de 1054 a ete fabriquee pour prouver le schisme"? ensuite qu' "il y a toujours eu une interaction entre le politique et le theologique.Des evenements politiques surgissent comme des divergences theologiques."

Merci pour vos lumieres.

PS:Mon clavier n'a pas d'accents.Pardonnez-moi d'ecorcher cette belle langue.
Et la Vérité vous rendra libre
Anne Geneviève
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Message par Anne Geneviève »

1054 est une étape dans un processus de rupture qui en a connu plusieurs. Ce n'est peut-être pas la plus décisive.
A mon sens, l'essentiel était dit sur le plan théologique lorsque saint Photios a mis l'accent sur l'hérésie du filioque dans les années 860. La rupture définitive est intervenue avec le sac de Constantinople en 1204 et la tentative de latinisation forcée de l'Eglise de Grèce, ce qui a amené de la part du patriarche de Constantinople en exil à Nicée l'excommunication des Latins et de ceux qui les aident, en 1216. Mais on peut placer sans grand risque le schisme au IXe siècle.
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Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

Oui, une originalité de l’hérésie “catholique” par rapport aux autres hérésies qui ont marqué l’histoire de l’Église est que ce processus s’est développé très progressivement. À la suite de l’usurpation du siège romain par le parti des protégés de Charlemagne (mais cette prise du pouvoir a été laborieuse et a demandé beaucoup de temps) se sont développées un certain nombre d’altérations canoniques, liturgiques et dogmatiques qui ont construit tout un type de culture profondément étranger à l’esprit de la Tradition orthodoxe. Et encore ce type de culture ne s’est-il imposé que très lentement dans les diverses Églises locales de langue latine. On en a déjà longuement parlé sur ce Forum. Le sommet de l’aberration a été me semble-t-il atteint avec Pie XII.

La Byzance de ses dernières décennies, dont l’empire se réduisait à un petit confetti, a connu des défaillances depuis le concile de Florence. Alors que dira-t-on des défaillances du monde et de la culture orthodoxe, qui n’était pas seulement captive de la cruelle turcocratié, mais aussi théologiquement tétanisée par le prestige (usurpé) de la science occidentale ?
Jean-Louis Palierne
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Stephanopoulos
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Message par Stephanopoulos »

C'est bien la première fois que j'entend dire que "1054 est une construction artificielle d'historiens". De plus il n'y a pas de nom, ni de date et aucune autre preuve qui pourraient appuyer de tel propos!

En effet, ont-ils rêvé les témoins (le clergé et le peuple) qui ont vu les légats du pape déposer leur bulle sur l'autel de Sainte-Sophie le 16 juillet 1054?
Est-ce une invention, le fait que le Patriarche Cérulaire a renouvellé le manifeste de saint Photios de 867 lors d'un synode, la même année, à la suite de quoi il lance l'excommunication contre les latins?

De plus, en quoi est-ce-que les mots "contact" et "dialogue" sont-ils équivalent au mot "communion"?

N' y a-t-il pas rupture dès le moment où un patriarche ou un pape adopte une hérésie, même s'il n'y a pas un patriarche pour le déclarer par écrit?
Stephanopoulos
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