Publié : lun. 27 mars 2006 11:03
En historienne,vis à vis des photographies montrant Mgr à coté du dictateur croate,je dirai qu'il faut faire attention à l'arbre qui cache la foret.Voici un autre point de vue: 7/10/1998(www.amb-croatie.fr/actualites).
HORIZONS-DÉBATS
Mgr Stepinac et les deux douleurs de l'Europe
par Alain Finkielkraut
Ah, qu'il est doux d'être juif en cette fin de XXe siècle ! Nous ne sommes plus les accusés de l'Histoire, nous en sommes les chouchous. L'esprit du monde nous aime, nous honore, nous défend, prend en charge nos intérêts; il a même besoin de notre imprimatur. Les journalistes dressent des réquisitoires sans merci contre tout ce que l'Europe compte encore de collaborateurs ou de nostalgiques de la période nazie. Les Églises se repentent, les États font pénitence, la Suisse ne sait plus où se mettre et les Serbes nous dédient la destruction de la ville de Vukovar comme si nous étions leur belle et qu'ils avaient toréé pour nous.
Suis-je un mauvais coucheur ? Malgré l'émotion que ne peuvent manquer de provoquer certains actes de contrition authentiques et courageux, je n'éprouve pas une joie sans mélange à être aussi universellement courtisé. Je souhaiterais, par exemple, que ces nouveaux amis si démonstratifs soient tous également des amis scrupuleux de la vérité. La colère médiatique suscitée par la béatification du cardinal Stepinac m'irait droit au cœur s'il avait servilement soutenu le régime oustachi. Or tel n'est pas le cas.
La colère médiatique suscitée par la béatification du cardinal Stepinac m'irait droit au cœur s'il avait servilement soutenu le régime oustachi.
Or tel n'est pas le cas
Il suffit de se renseigner pour le savoir. Auprès des autorités de Zagreb ? Non. Auprès des historiens anglo-saxons (comme le fait remarquer Georges-Marie Chenu, les recherches sur la Yougoslavie sont peu développées en France) et auprès des juifs de Croatie. Une telle enquête apprend que, dès avril 1941, l'archevêque de Zagreb a protesté contre la législation antiserbe et antijuive promulguée par le régime, qu'il a organisé la fuite d'enfants juifs vers la Hongrie et vers la Palestine, qu'il en a caché beaucoup d'autres et que ses homélies étaient suffisamment tranchantes pour être reprises par les partisans et diffusées par la radio de Londres.
Voici ce qu'il déclarait en chaire lors de la fête du Christ-Roi, le 24 octobre 1942 : "Tous les hommes de toutes les races sont les enfants de Dieu ; tous sans distinction, qu'ils soient tziganes, noirs, européens civilisés, juifs ou fiers aryens, ont le même droit de dire : « Notre Père qui êtes aux cieux ». Pour cette raison, l'Église catholique a toujours condamné, et continue de le faire, toute injustice et toute violence commises au nom des théories de classe, de race ou de nationalité. On ne peut exterminer les tziganes ou les juifs parce qu'on considère qu'ils sont une race inférieure."
Pourquoi les actuels avocats de la cause juive, si nombreux et si fervents, n'ont-ils pas songé à s'informer en s'adressant aux juifs qu'ils prétendaient défendre ? Parce que ce ne sont pas les juifs qui les intéressent, surtout lorsqu'ils habitent l'arrière-cour de l'Europe. Ce qui les intéresse, c'est de se trouver beaux dans le miroir de l'antifascisme.
DOSSIER
L'ENGAGEMENT DES INTELLECTUELS FRANÇAIS PENDANT LA GUERRE
En 1941, l'évêque de Mostar s'appelait Alojzije Misic. Épouvanté par la violence des oustachis dans son diocèse, il interdit à son clergé de donner l'absolution à quiconque avait participé à des massacres de Serbes et, dès l'arrivée de Pavelic au pouvoir, il dénonça à Stepinac "le règne du carnage" qui venait de s'instaurer en Croatie. "Les hommes sont égorgés, assassinés, jetés vivants du haut des falaises, écrivait-il. Dans la ville de Mostar elle-même, ils ont été attachés par centaines, emmenés dans des wagons et tués comme des bêtes." En 1948, la justice de Tito s'abattit sur l'évêque Misic comme elle l'avait fait sur le cardinal Stepinac deux ans auparavant : il fut condamné à onze ans de prison pour collaboration avec l'État oustachi.
Ce n'est pas un des moindres crimes du communisme, en effet, que d'avoir manipulé l'enfer et transformé l'antifascisme en instrument d'oppression. Le fascisme, c'est le mal ; or tous nos ennemis sont mauvais ; donc tous nos ennemis sont fascistes : c'est parce qu'ils ont vécu cinquante ans sous la férule de ce syllogisme implacable que les Croates ont tant de difficultés aujourd'hui à faire la part des choses et à distinguer l'indispensable mémoire du mensonge déconcertant. Croit-on qu'on les y aide en redonnant vie et crédit au discours des manipulateurs ?
Mais qui se préoccupe d'aider réellement la Croatie, au besoin contre son gouvernement, à affronter son passé, à examiner sans complaisance la part d'ombre et même d'horreur de son histoire au lieu de ne connaître que ses griefs et de toujours se plaindre ? Qui pense à unifier l'Europe autrement que par l'économie, c'est-à-dire à faire en sorte que les deux grands malheurs du siècle cessent d'être exclusifs l'un de l'autre ? Notre époque est trop appliquée à prendre la pose pour se soucier de répondre aux vrais défis de la mémoire et du présent.
Alain Finkielkraut est professeur à l'École polytechnique.
Il a publié "Comment peut-on être croate?", Gallimard, 1992.
REFLEXION
Les protestations du cardinal Stepinac
Les soupçons de collaboration de l'archevêque de Zagreb avec le régime oustachi pendant la guerre ne sont pas fondés.
par Georges-Marie Chenu,
ancien ambassadeur de France en Croatie.
La béatification par le Pape du cardinal Stepinac, archevêque de Zagreb durant la Seconde Guerre mondiale, suscite en France des réactions contrastées. « Figure emblématique de la résistance croate au fascime et au communisme » pour les uns, le prélat mort en résidence surveillée en 1960 est accusé par d'autres, au mieux de « complicité passive » avec « le génocide de centaines de milliers de Serbes, juifs et Tsiganes par le régime oustachi ». A Paris, le bureau européen du centre Wiesenthal a demandé au Saint-Père de suspendre sa décision jusqu'aux conclusions d'une enquête impartiale comportant accès aux archives vaticanes.
DOSSIER
L'ENGAGEMENT DES INTELLECTUELS FRANÇAIS PENDANT LA GUERRE
Les recherches historiques sur la Yougoslavie royale puis communiste de 1919 à 1991 étant peu développées en France, c'est aux historiens anglo-saxons qu'il faut s'adresser pour savoir si Alojzije Stepinac a soutenu l'Etat indépendant croate _ mis en place en avril 1941 par l'Axe et dirigé par Ante Pavelic _, s'il a encouragé les conversions forcées des orthodoxes et fermé les yeux sur des crimes fascistes.
Au contraire, les faits montrent que l'archevêque de Zagreb n'est pas resté passif. Dès l'adoption, en avril 1941, d'une législation anti-serbe et anti-juive, il protesta par écrit auprès du ministre de l'intérieur. Après le premier massacre collectif de Serbes, il écrivit son indignation à Pavelic (mai 1941). En novembre, la Conférence des évêques dénonça la procédure des conversions collectives.
Les démarches écrites étant sans effet _ notamment une lettre à Pavelic de juillet 1941 sur les déportations de Serbes _, l'archevêque fit connaître son hostilité à l'action du gouvernement dans des sermons, prononcés le plus souvent dans sa cathédrale, à partir de mai 1942 et ensuite à de nombreuses occasions. Des extraits de ses homélies (contre « l'ordre nouveau », les « discriminations raciales », etc.), qui ont peu d'équivalents en Europe occupée, furent repris par les partisans et diffusés par la radio de Londres. Pourquoi Mgr Stepinac n'a-t-il pas rompu avec éclat avec un régime qu'il condamnait ? A l'envoyé du gouvernement en exil, Stanislav Rapotec, l'archevêque répondit, en avril 1942, que « s'il l'avait fait, il n'aurait plus été capable d'aider qui que ce soit ». « Il connaissait les terribles représailles des oustachis. En août 1941, le chanoine Lontchar, qui expliquait aux curés l'opposition des évêques aux conversions forcées, fut condamné à mort : il fut sauvé par le représentant du Saint-Siège à Zagreb auprès de la hiérarchie catholique et non pas de Pavelic.
Ayant choisi de résister au sein des institutions, Mgr Stepinac participa jusqu'à la fin à une vie protocolaire mais en « commandeur » qui, chaque fois qu'il pouvait s'exprimer, rappelait les principes dont devaient s'inspirer des responsables se disant chrétiens. Choix délicat et risqué, propre à entretenir des ambiguïtés. Mgr Stepinac était pour un Etat croate mais pas pour un régime oustachi !
En aucun cas on ne peut s'appuyer sur sa condamnation à seize ans de travaux forcés, en octobre 1946, pour prétendre que Mgr Stepinac a collaboré avec Pavelic qui, d'ailleurs, le détestait. Ce fut un procès politique destiné à ruiner l'autorité d'un prélat qui refusait une Eglise croate indépendante de Rome proposée par Tito en juin 1945 et qui condamnait très fort l'athéisme d'Etat. L'accusation brandit un faux et écarta des témoins en mesure de prouver que le prévenu avait sauvé des milliers de vies humaines, notamment juives et serbes.
Notre ignorance de l'histoire contemporaine des Balkans est si grande, les clichés si tenaces, les passions si fortes, qu'une recherche historique collective est indispensable. Mais à la condition d'être scientifique, c'est-à-dire d'être conduite hors des pressions, de porter aussi sur l'avant-guerre ainsi que tous les acteurs, et non pas sur une seule personnalité et une seule communauté, et enfin d'accéder à toutes les archives. Sont en jeu des événements qui ont broyé des centaines de milliers d'êtres humains, l'honneur d'un homme, la vérité et la justice.
A propos de Mgr Stepinac, on doit écouter un témoin français. Le jour de la fête du Christ-Roi, en octobre 1942, l'archevêque, du haut de sa chaire, « avait flétri la doctrine nationale-socialiste en matière de race ». Le 6 novembre, Georges Geyraud, notre consul général à Zagreb, envoya à Vichy ce commentaire : « Cette expression solennelle de la réprobation qu'inspire à Mgr Stepinac le régime, s'ajoute aux protestations et représentations que le jeune et intrépide archevêque de Zagreb, au risque de représailles contre sa personne, multiplie auprès des pouvoirs publics. » (Archives du Quai d'Orsay.) Mgr Stepinac est accusé par les uns de complicité avec le régime oustachi pro-nazi, tandis que d'autres affirment qu'il a sauvé des milliers de vies humaines, notamment juives et serbes.
La Croix, 06/10/1998
MIDI MOINS SEPT
« Mgr Stepinac avait condamné le racisme des oustachis ».
Le rôle de l'archevêque de Zagreb entre 1941 et 1945 fait l'objet de trop de simplifications.
INVITE : Joseph Krulic, Historien.
Bruno Frappat : La visite de Jean-Paul II en Croatie et la béatification du cardinal Stepinac suscitent des controverses. Pouvez-vous resituer l'histoire récente de ce pays de 4,8 millions d'habitants ?
Joseph Krulic : La Croatie a proclamé son indépendance en juin 1991. Elle a connu une guerre très dure pendant sept mois en 1991-1992 et, à la suite d'un nouveau conflit, a récupéré en août 1995 la totalité de son territoire. Ce qui caractérise les Croates, dans l'ensemble des peuples de langue serbo-croate, c'est le rattachement à la catholicité.
_ Avec l'affaire Stepinac, on a l'impression, si on lit la presse française, que Jean-Paul II s'est mis dans un mauvais pas. Il aurait béatifié un « collabo », un archevêque proche des nazis...
_ Mgr Stepinac a sûrement été béatifié pour son rôle de martyr après 1945, plus que pour son rôle antérieur. En mai 1945, les partisans communistes de Tito entrent à Zagreb mais c'est en septembre que le cardinal Stepinac est emprisonné : il avait été reçu par Tito qui lui avait demandé de créer une Eglise nationale séparée du Saint-Siège. Il avait refusé. Mgr Stepinac et les autres évêques croates publièrent une lettre critiquant la politique du régime sur la liberté religieuse, la confiscation des biens ecclésiastiques, les persécutions, les meurtres de prêtres, etc.
_ C'est à la suite de cela qu'il est condamné
_ Il ne recouvrera jamais la pleine liberté. Il quittera sa prison de Leplogova _ où Tito avait lui-même été emprisonné avant guerre _ au début de 1952 et sera nommé cardinal par Pie XII. Il restera en résidence surveillée dans son village natal jusqu'à sa mort, en 1960.
_ Quel a été son comportement lorsque la Croatie vivait sous le régime fasciste des oustachis ?
_ Contrairement à ce qui est dit parfois, Stepinac a critiqué en privé, et par des lettres, le dictateur Pavelic qui, lui-même, le détestait. A deux occasions au moins, le 25 octobre 1942 et le 14 mars 1943, en chaire, à la cathédrale de Zagreb, il a condamné la politique raciste à l'égard des juifs et des Tsiganes. Il est vrai que le mot Serbe ne figure pas dans ces sermons. Ses propos avaient été cités par la BBC, ce qui mit en rage des dirigeants oustachis.
_ Le voyage de Jean-Paul II peut-il faciliter la réconciliation des communautés ?
_ Avec la communauté juive de Zagreb, la réconciliation est en grande partie faite, y compris grâce à des initiatives du président croate : il a présenté quasiment des excuses publiques pour la période 1941-1945. Avec les Serbes, la réconciliation est beaucoup plus difficile. Il n'est pas évident qu'ils comprennent la béatification du cardinal Stepinac.
La Croix, 06/10/1998
BEATIFICATION
Jean-Paul II en Croatie
Samedi 3 octobre, une foule émue a assisté à la béatification du cardinal Stepinac. Le Pape n'a pas évoqué les polémiques autour du cardinal et de la seconde guerre mondiale. Il a placé sa béatification sous le signe de la fidélité à l'unité de l'Eglise.
MARIJA BISTRICA, SPLIT
Guillaume Goubert, envoyé spécial.
Pour l'immense majorité des catholiques croates, la sainteté du cardinal Alojzije Stepinac ne fait aucun doute. C'est devant une foule émue que Jean-Paul II, samedi matin au sanctuaire marial de Marija Bistrica, a béatifié l'ancien archevêque de Zagreb, mort en 1960 alors qu'il était en résidence surveillée, quatorze ans après avoir été condamné comme « traître et ennemi de la patrie » par le régime communiste yougoslave.
Hors de Croatie, le cardinal Stepinac ne fait pas la même unanimité. Du côté de la Serbie et de certaines associations juives, on met en cause son attitude pendant la Seconde Guerre mondiale. On l'accuse d'avoir été complice des déportations, des exécutions et des conversions forcées de Serbes et de juifs menées par le régime oustachi, inféodé à l'Allemagne nazie, et qui proclama l'indépendance de la Croatie en 1941.
Jean-Paul II n'a pas voulu, à l'occasion de cette béatification, engager un travail de purification de la mémoire sur les responsabilités qui furent celles de catholiques croates dans les exactions d'alors. Ce qui, d'une certaine façon, l'a empêché de rappeler _ pour défendre sa mémoire _ ce que fit le cardinal Stepinac face aux crimes du régime oustachi.
« Il n'a pas eu peur des chaînes »
En effet, l'archevêque de Zagreb qui avait initialement approuvé, en 1941, la création de l'Etat indépendant de Croatie, ne resta pas inerte vis-à-vis des autorités. Il dénonça en chaire ce que subissaient juifs et Serbes. Il donna des instructions à son clergé pour sauver des vies (voir nos éditions du 3 octobre).
Tout cela, Jean-Paul II ne l'a évoqué qu'implicitement dans son homélie de la messe de béatification : « En la personne du nouveau bienheureux, se résume, pour ainsi dire, toute la tragédie qui a frappé les populations croates au cours de ce siècle marqué par les trois grands maux du fascisme, du nazisme et du communisme. (...) Significatives, à cet égard, sont les paroles que le nouveau bienheureux prononça en 1943, durant le second conflit mondial lorsque l'Europe se trouvait prise dans l'étau de violences inouïes : « Quel système soutient aujourd'hui l'Eglise catholique alors que le monde entier est en train de combattre pour un nouvel ordre mondial ? En condamnant les injustices, tous les massacres d'innocents, les incendies de villages pacifiques, la destruction du travail des pauvres, nous répondons : l'Eglise soutient ce système qui est aussi vieux que les dix commandements de Dieu. Nous sommes pour le système (...) qui a été inscrit par le doigt du Dieu vivant dans la conscience des hommes. »
Pour Jean-Paul II, le message essentiel du cardinal Stepinac qui a conduit à sa béatification tient en son engagement pour l'indépendance et l'unité de l'Eglise. Rendant hommage à celui qui refusa de prendre la tête d'une Eglise nationale comme le lui demandait le régime titiste, le Pape déclarait dimanche à Split : « Il a accompli sa mission d'évangélisateur en souffrant pour l'Eglise et il a scellé par la mort son message de foi. Il a préféré la prison à la liberté pour défendre la liberté et l'unité de l'Eglise. Il n'a pas eu peur des chaînes afin que ne soit pas enchaînée la parole de l'Evangile. »
G. G.
Je pense qu'il faut se pencher plus amplement sur les écrits de cet éveque,les photos ne suffisent pas. Il est plus facile de combattre une idéologie lorsqu'on est loin de celle-ci que lorsque l'on s'y trouve entre ses crocs.Mgr a combattu à l'intérieur de l'arene,en essayant de court-circuiter spirituellement et physiquement un régime qu'il désapprouve .Tout en s'affichant publiquement à coté de ce régime,il le combattait avec les moyens du bord.Il me semble que c'est Staline qui avait dit "Le Pape?Combien de divisions?"
Cette politique d'infiltration est bien plus dangereuse et d'autant plus ingrate à la fin de la guerre si on se contente du paraitre.Un exemple:les résistants français endossant le manteau de la collaboration pour pouvoir infiltrer les officines ennemies et communiquer aux réseaux FFI de si précieuses informations stratégiques. Il y avait le risque d'etre "harakiri" après la victoire des Alliés par la population et les résistants de la dernière heure(ma grand-mère en a connu de ces gens tournant au gré du vent cassaque à cette époque)s'il n'y avait personne, où plus de preuves pour affirmer que vous étiez résistant.
A lire et à méditer face aux clichés,aux raccourcis de tout genre sur l'Eglise de France durant la 2de guerre mondiale:LESOURD.P.PAILLAT.C.Dossier secret.L'Eglise de france,T2,De la Révolution à nos jours,éditions Presses de la Cité,1968,594p.
PP527-530.
" Tout ce que nous venons d'exposer démontre à notre avis impartialement que,sous ses divers aspects,l'Eglise de la France occupée a eu,de multiples manières,une attitude et une action patriotiques sans faiblesse et parfois héroique.
Ceux qui en doutent et essayent de jeter la suspicion sur tel ou tel éveque sont ceux qui ne tiennent pas compte de la désinformation des paroles et des écrits par les propagandes soit de vichy soit des Allemands.Voulant ou essayant toutes d'avoir l'Eglise avec elles,elles n'hésitaient pas à isoler des phrases,dénaturer,mutiler des textes pour compromettre malgré eux,prélats ou ecclésiastiques.Et ceux qui,sans remonter aux sources utilisent les yeux fermés,sans controle les produits de ces propagandes commenttent de mauvaises actions et présentent un visage déformé de l'Eglise de la france occupée.Des conversations privées,des boutades,isolées elles aussi,de ce qui avait précédé ou suivi ont été utilisées de la sorte ou parfois données comme étant des interviews.(...).De meme,la propagande de Vichy a intentionnellement exagéré dans le sens d'un cléricalisme politique les moindres manifestations religieuses auxquelles était melé le gouvernement du Maréchal.Alors que l'épiscopat évitait avec soin toute inféodation,la propagande agissait comme s'il y avait inféodation,et en propageait la rumeur.Il faut donc etre très prudent quand on porte un jugement sur l'action de l'Eglise pendant l'occupation ou lorsqu'on interprete tel ou tel extrait d'un document épiscopal,ou lorsqu'on met en cause tel ou tel personnage ecclésiastique comme par exemple Mgr Mayol de Lupé,aumonier de la L.V.F dont les faits et les gestes compromettants pour l'Eglise ont été présentés comme ceux d'un éveque qu'il n'était pas,ne figurant meme pas dans la liste officielle des prélats dans l'Annuaire pontifical et n'ayant jamais reçu de mandat officiel de la hiérarchie pour exercer ses fonctions d'aumonier."
Déclaration du cardinal Liénart(eéveque de Lille),"l'un des plus éminents prélats de cette France occupée" illustrant cette politique :
(...)."Je n'évoquerai ici que les protestations renouvelées contre les exécutions d'otages,les condamnations à mort,la déportation d'hommes et de femmes,le massacre d'Ascq.
"Je sais bien que notre résistance a paru timide aux yeux de certains,parce que nous ne l'avons pas accompagnée de protestations publiques retentissantes.Mais le pasteur qui défend sin troupeau a mieux à faire que de crier au loup;il l'affronte et lui arrache ses victimes.Nous avons préféré n'ameuter personne et remplir simplement notre devoir.
"D'autres ont courageusement lutté pour délivrer le sol de la patrie.Nous avons lutté pour sauver son ame.Ce n'était pas moins nécessaire et nous pensons qu'ainsi nous avons pas moins bien servi la France".
Les brebis galeuses(pretres antisémites,tortionnaires,etc)ne doivent pas occulter celles qui ont agi avec honneur et droiture.Si des présidents saluent celui de Chine est-ce pour autant qu'ils approuvent sa dictature,son régime oppressif policier? certes pas.En faculté on m'a appris à penser par moi-meme,ce n'est guère aisé car nul n'est totalement objectif et puis c'est un travail toujours remis à plat avec les études,les documents qui apparaissent régulièrement.Mais c'est la condition sinequanum pour etre impartial.Je pense que dans le cas de cet éveque,une question de prime abord s'impose :à qui profite le crime?
Meme question pour Mihailovic... .
La Révolution française avait tout interet à ce que la monarchie=dictature,despotisme afin de pouvoir se légitimer aux yeux de la population ,aussi ses bains de sang ,ses mariages républicains au bord des berges de la Loire n'étaient que justice face aux "brigands"
:horrible adversaires de la Liberté chérie!Donc attention aux manipulations des faits, des textes... .En enluminure comme en Histoire,en sciences politiques il a souvent une deuxième voire une troisième lecture... qui expliquent bien des choses.
Kenavo et merci encore pour l'exposition simple des événements dans cette poudrière que sont les Balkans.
HORIZONS-DÉBATS
Mgr Stepinac et les deux douleurs de l'Europe
par Alain Finkielkraut
Ah, qu'il est doux d'être juif en cette fin de XXe siècle ! Nous ne sommes plus les accusés de l'Histoire, nous en sommes les chouchous. L'esprit du monde nous aime, nous honore, nous défend, prend en charge nos intérêts; il a même besoin de notre imprimatur. Les journalistes dressent des réquisitoires sans merci contre tout ce que l'Europe compte encore de collaborateurs ou de nostalgiques de la période nazie. Les Églises se repentent, les États font pénitence, la Suisse ne sait plus où se mettre et les Serbes nous dédient la destruction de la ville de Vukovar comme si nous étions leur belle et qu'ils avaient toréé pour nous.
Suis-je un mauvais coucheur ? Malgré l'émotion que ne peuvent manquer de provoquer certains actes de contrition authentiques et courageux, je n'éprouve pas une joie sans mélange à être aussi universellement courtisé. Je souhaiterais, par exemple, que ces nouveaux amis si démonstratifs soient tous également des amis scrupuleux de la vérité. La colère médiatique suscitée par la béatification du cardinal Stepinac m'irait droit au cœur s'il avait servilement soutenu le régime oustachi. Or tel n'est pas le cas.
La colère médiatique suscitée par la béatification du cardinal Stepinac m'irait droit au cœur s'il avait servilement soutenu le régime oustachi.
Or tel n'est pas le cas
Il suffit de se renseigner pour le savoir. Auprès des autorités de Zagreb ? Non. Auprès des historiens anglo-saxons (comme le fait remarquer Georges-Marie Chenu, les recherches sur la Yougoslavie sont peu développées en France) et auprès des juifs de Croatie. Une telle enquête apprend que, dès avril 1941, l'archevêque de Zagreb a protesté contre la législation antiserbe et antijuive promulguée par le régime, qu'il a organisé la fuite d'enfants juifs vers la Hongrie et vers la Palestine, qu'il en a caché beaucoup d'autres et que ses homélies étaient suffisamment tranchantes pour être reprises par les partisans et diffusées par la radio de Londres.
Voici ce qu'il déclarait en chaire lors de la fête du Christ-Roi, le 24 octobre 1942 : "Tous les hommes de toutes les races sont les enfants de Dieu ; tous sans distinction, qu'ils soient tziganes, noirs, européens civilisés, juifs ou fiers aryens, ont le même droit de dire : « Notre Père qui êtes aux cieux ». Pour cette raison, l'Église catholique a toujours condamné, et continue de le faire, toute injustice et toute violence commises au nom des théories de classe, de race ou de nationalité. On ne peut exterminer les tziganes ou les juifs parce qu'on considère qu'ils sont une race inférieure."
Pourquoi les actuels avocats de la cause juive, si nombreux et si fervents, n'ont-ils pas songé à s'informer en s'adressant aux juifs qu'ils prétendaient défendre ? Parce que ce ne sont pas les juifs qui les intéressent, surtout lorsqu'ils habitent l'arrière-cour de l'Europe. Ce qui les intéresse, c'est de se trouver beaux dans le miroir de l'antifascisme.
DOSSIER
L'ENGAGEMENT DES INTELLECTUELS FRANÇAIS PENDANT LA GUERRE
En 1941, l'évêque de Mostar s'appelait Alojzije Misic. Épouvanté par la violence des oustachis dans son diocèse, il interdit à son clergé de donner l'absolution à quiconque avait participé à des massacres de Serbes et, dès l'arrivée de Pavelic au pouvoir, il dénonça à Stepinac "le règne du carnage" qui venait de s'instaurer en Croatie. "Les hommes sont égorgés, assassinés, jetés vivants du haut des falaises, écrivait-il. Dans la ville de Mostar elle-même, ils ont été attachés par centaines, emmenés dans des wagons et tués comme des bêtes." En 1948, la justice de Tito s'abattit sur l'évêque Misic comme elle l'avait fait sur le cardinal Stepinac deux ans auparavant : il fut condamné à onze ans de prison pour collaboration avec l'État oustachi.
Ce n'est pas un des moindres crimes du communisme, en effet, que d'avoir manipulé l'enfer et transformé l'antifascisme en instrument d'oppression. Le fascisme, c'est le mal ; or tous nos ennemis sont mauvais ; donc tous nos ennemis sont fascistes : c'est parce qu'ils ont vécu cinquante ans sous la férule de ce syllogisme implacable que les Croates ont tant de difficultés aujourd'hui à faire la part des choses et à distinguer l'indispensable mémoire du mensonge déconcertant. Croit-on qu'on les y aide en redonnant vie et crédit au discours des manipulateurs ?
Mais qui se préoccupe d'aider réellement la Croatie, au besoin contre son gouvernement, à affronter son passé, à examiner sans complaisance la part d'ombre et même d'horreur de son histoire au lieu de ne connaître que ses griefs et de toujours se plaindre ? Qui pense à unifier l'Europe autrement que par l'économie, c'est-à-dire à faire en sorte que les deux grands malheurs du siècle cessent d'être exclusifs l'un de l'autre ? Notre époque est trop appliquée à prendre la pose pour se soucier de répondre aux vrais défis de la mémoire et du présent.
Alain Finkielkraut est professeur à l'École polytechnique.
Il a publié "Comment peut-on être croate?", Gallimard, 1992.
REFLEXION
Les protestations du cardinal Stepinac
Les soupçons de collaboration de l'archevêque de Zagreb avec le régime oustachi pendant la guerre ne sont pas fondés.
par Georges-Marie Chenu,
ancien ambassadeur de France en Croatie.
La béatification par le Pape du cardinal Stepinac, archevêque de Zagreb durant la Seconde Guerre mondiale, suscite en France des réactions contrastées. « Figure emblématique de la résistance croate au fascime et au communisme » pour les uns, le prélat mort en résidence surveillée en 1960 est accusé par d'autres, au mieux de « complicité passive » avec « le génocide de centaines de milliers de Serbes, juifs et Tsiganes par le régime oustachi ». A Paris, le bureau européen du centre Wiesenthal a demandé au Saint-Père de suspendre sa décision jusqu'aux conclusions d'une enquête impartiale comportant accès aux archives vaticanes.
DOSSIER
L'ENGAGEMENT DES INTELLECTUELS FRANÇAIS PENDANT LA GUERRE
Les recherches historiques sur la Yougoslavie royale puis communiste de 1919 à 1991 étant peu développées en France, c'est aux historiens anglo-saxons qu'il faut s'adresser pour savoir si Alojzije Stepinac a soutenu l'Etat indépendant croate _ mis en place en avril 1941 par l'Axe et dirigé par Ante Pavelic _, s'il a encouragé les conversions forcées des orthodoxes et fermé les yeux sur des crimes fascistes.
Au contraire, les faits montrent que l'archevêque de Zagreb n'est pas resté passif. Dès l'adoption, en avril 1941, d'une législation anti-serbe et anti-juive, il protesta par écrit auprès du ministre de l'intérieur. Après le premier massacre collectif de Serbes, il écrivit son indignation à Pavelic (mai 1941). En novembre, la Conférence des évêques dénonça la procédure des conversions collectives.
Les démarches écrites étant sans effet _ notamment une lettre à Pavelic de juillet 1941 sur les déportations de Serbes _, l'archevêque fit connaître son hostilité à l'action du gouvernement dans des sermons, prononcés le plus souvent dans sa cathédrale, à partir de mai 1942 et ensuite à de nombreuses occasions. Des extraits de ses homélies (contre « l'ordre nouveau », les « discriminations raciales », etc.), qui ont peu d'équivalents en Europe occupée, furent repris par les partisans et diffusés par la radio de Londres. Pourquoi Mgr Stepinac n'a-t-il pas rompu avec éclat avec un régime qu'il condamnait ? A l'envoyé du gouvernement en exil, Stanislav Rapotec, l'archevêque répondit, en avril 1942, que « s'il l'avait fait, il n'aurait plus été capable d'aider qui que ce soit ». « Il connaissait les terribles représailles des oustachis. En août 1941, le chanoine Lontchar, qui expliquait aux curés l'opposition des évêques aux conversions forcées, fut condamné à mort : il fut sauvé par le représentant du Saint-Siège à Zagreb auprès de la hiérarchie catholique et non pas de Pavelic.
Ayant choisi de résister au sein des institutions, Mgr Stepinac participa jusqu'à la fin à une vie protocolaire mais en « commandeur » qui, chaque fois qu'il pouvait s'exprimer, rappelait les principes dont devaient s'inspirer des responsables se disant chrétiens. Choix délicat et risqué, propre à entretenir des ambiguïtés. Mgr Stepinac était pour un Etat croate mais pas pour un régime oustachi !
En aucun cas on ne peut s'appuyer sur sa condamnation à seize ans de travaux forcés, en octobre 1946, pour prétendre que Mgr Stepinac a collaboré avec Pavelic qui, d'ailleurs, le détestait. Ce fut un procès politique destiné à ruiner l'autorité d'un prélat qui refusait une Eglise croate indépendante de Rome proposée par Tito en juin 1945 et qui condamnait très fort l'athéisme d'Etat. L'accusation brandit un faux et écarta des témoins en mesure de prouver que le prévenu avait sauvé des milliers de vies humaines, notamment juives et serbes.
Notre ignorance de l'histoire contemporaine des Balkans est si grande, les clichés si tenaces, les passions si fortes, qu'une recherche historique collective est indispensable. Mais à la condition d'être scientifique, c'est-à-dire d'être conduite hors des pressions, de porter aussi sur l'avant-guerre ainsi que tous les acteurs, et non pas sur une seule personnalité et une seule communauté, et enfin d'accéder à toutes les archives. Sont en jeu des événements qui ont broyé des centaines de milliers d'êtres humains, l'honneur d'un homme, la vérité et la justice.
A propos de Mgr Stepinac, on doit écouter un témoin français. Le jour de la fête du Christ-Roi, en octobre 1942, l'archevêque, du haut de sa chaire, « avait flétri la doctrine nationale-socialiste en matière de race ». Le 6 novembre, Georges Geyraud, notre consul général à Zagreb, envoya à Vichy ce commentaire : « Cette expression solennelle de la réprobation qu'inspire à Mgr Stepinac le régime, s'ajoute aux protestations et représentations que le jeune et intrépide archevêque de Zagreb, au risque de représailles contre sa personne, multiplie auprès des pouvoirs publics. » (Archives du Quai d'Orsay.) Mgr Stepinac est accusé par les uns de complicité avec le régime oustachi pro-nazi, tandis que d'autres affirment qu'il a sauvé des milliers de vies humaines, notamment juives et serbes.
La Croix, 06/10/1998
MIDI MOINS SEPT
« Mgr Stepinac avait condamné le racisme des oustachis ».
Le rôle de l'archevêque de Zagreb entre 1941 et 1945 fait l'objet de trop de simplifications.
INVITE : Joseph Krulic, Historien.
Bruno Frappat : La visite de Jean-Paul II en Croatie et la béatification du cardinal Stepinac suscitent des controverses. Pouvez-vous resituer l'histoire récente de ce pays de 4,8 millions d'habitants ?
Joseph Krulic : La Croatie a proclamé son indépendance en juin 1991. Elle a connu une guerre très dure pendant sept mois en 1991-1992 et, à la suite d'un nouveau conflit, a récupéré en août 1995 la totalité de son territoire. Ce qui caractérise les Croates, dans l'ensemble des peuples de langue serbo-croate, c'est le rattachement à la catholicité.
_ Avec l'affaire Stepinac, on a l'impression, si on lit la presse française, que Jean-Paul II s'est mis dans un mauvais pas. Il aurait béatifié un « collabo », un archevêque proche des nazis...
_ Mgr Stepinac a sûrement été béatifié pour son rôle de martyr après 1945, plus que pour son rôle antérieur. En mai 1945, les partisans communistes de Tito entrent à Zagreb mais c'est en septembre que le cardinal Stepinac est emprisonné : il avait été reçu par Tito qui lui avait demandé de créer une Eglise nationale séparée du Saint-Siège. Il avait refusé. Mgr Stepinac et les autres évêques croates publièrent une lettre critiquant la politique du régime sur la liberté religieuse, la confiscation des biens ecclésiastiques, les persécutions, les meurtres de prêtres, etc.
_ C'est à la suite de cela qu'il est condamné
_ Il ne recouvrera jamais la pleine liberté. Il quittera sa prison de Leplogova _ où Tito avait lui-même été emprisonné avant guerre _ au début de 1952 et sera nommé cardinal par Pie XII. Il restera en résidence surveillée dans son village natal jusqu'à sa mort, en 1960.
_ Quel a été son comportement lorsque la Croatie vivait sous le régime fasciste des oustachis ?
_ Contrairement à ce qui est dit parfois, Stepinac a critiqué en privé, et par des lettres, le dictateur Pavelic qui, lui-même, le détestait. A deux occasions au moins, le 25 octobre 1942 et le 14 mars 1943, en chaire, à la cathédrale de Zagreb, il a condamné la politique raciste à l'égard des juifs et des Tsiganes. Il est vrai que le mot Serbe ne figure pas dans ces sermons. Ses propos avaient été cités par la BBC, ce qui mit en rage des dirigeants oustachis.
_ Le voyage de Jean-Paul II peut-il faciliter la réconciliation des communautés ?
_ Avec la communauté juive de Zagreb, la réconciliation est en grande partie faite, y compris grâce à des initiatives du président croate : il a présenté quasiment des excuses publiques pour la période 1941-1945. Avec les Serbes, la réconciliation est beaucoup plus difficile. Il n'est pas évident qu'ils comprennent la béatification du cardinal Stepinac.
La Croix, 06/10/1998
BEATIFICATION
Jean-Paul II en Croatie
Samedi 3 octobre, une foule émue a assisté à la béatification du cardinal Stepinac. Le Pape n'a pas évoqué les polémiques autour du cardinal et de la seconde guerre mondiale. Il a placé sa béatification sous le signe de la fidélité à l'unité de l'Eglise.
MARIJA BISTRICA, SPLIT
Guillaume Goubert, envoyé spécial.
Pour l'immense majorité des catholiques croates, la sainteté du cardinal Alojzije Stepinac ne fait aucun doute. C'est devant une foule émue que Jean-Paul II, samedi matin au sanctuaire marial de Marija Bistrica, a béatifié l'ancien archevêque de Zagreb, mort en 1960 alors qu'il était en résidence surveillée, quatorze ans après avoir été condamné comme « traître et ennemi de la patrie » par le régime communiste yougoslave.
Hors de Croatie, le cardinal Stepinac ne fait pas la même unanimité. Du côté de la Serbie et de certaines associations juives, on met en cause son attitude pendant la Seconde Guerre mondiale. On l'accuse d'avoir été complice des déportations, des exécutions et des conversions forcées de Serbes et de juifs menées par le régime oustachi, inféodé à l'Allemagne nazie, et qui proclama l'indépendance de la Croatie en 1941.
Jean-Paul II n'a pas voulu, à l'occasion de cette béatification, engager un travail de purification de la mémoire sur les responsabilités qui furent celles de catholiques croates dans les exactions d'alors. Ce qui, d'une certaine façon, l'a empêché de rappeler _ pour défendre sa mémoire _ ce que fit le cardinal Stepinac face aux crimes du régime oustachi.
« Il n'a pas eu peur des chaînes »
En effet, l'archevêque de Zagreb qui avait initialement approuvé, en 1941, la création de l'Etat indépendant de Croatie, ne resta pas inerte vis-à-vis des autorités. Il dénonça en chaire ce que subissaient juifs et Serbes. Il donna des instructions à son clergé pour sauver des vies (voir nos éditions du 3 octobre).
Tout cela, Jean-Paul II ne l'a évoqué qu'implicitement dans son homélie de la messe de béatification : « En la personne du nouveau bienheureux, se résume, pour ainsi dire, toute la tragédie qui a frappé les populations croates au cours de ce siècle marqué par les trois grands maux du fascisme, du nazisme et du communisme. (...) Significatives, à cet égard, sont les paroles que le nouveau bienheureux prononça en 1943, durant le second conflit mondial lorsque l'Europe se trouvait prise dans l'étau de violences inouïes : « Quel système soutient aujourd'hui l'Eglise catholique alors que le monde entier est en train de combattre pour un nouvel ordre mondial ? En condamnant les injustices, tous les massacres d'innocents, les incendies de villages pacifiques, la destruction du travail des pauvres, nous répondons : l'Eglise soutient ce système qui est aussi vieux que les dix commandements de Dieu. Nous sommes pour le système (...) qui a été inscrit par le doigt du Dieu vivant dans la conscience des hommes. »
Pour Jean-Paul II, le message essentiel du cardinal Stepinac qui a conduit à sa béatification tient en son engagement pour l'indépendance et l'unité de l'Eglise. Rendant hommage à celui qui refusa de prendre la tête d'une Eglise nationale comme le lui demandait le régime titiste, le Pape déclarait dimanche à Split : « Il a accompli sa mission d'évangélisateur en souffrant pour l'Eglise et il a scellé par la mort son message de foi. Il a préféré la prison à la liberté pour défendre la liberté et l'unité de l'Eglise. Il n'a pas eu peur des chaînes afin que ne soit pas enchaînée la parole de l'Evangile. »
G. G.
Je pense qu'il faut se pencher plus amplement sur les écrits de cet éveque,les photos ne suffisent pas. Il est plus facile de combattre une idéologie lorsqu'on est loin de celle-ci que lorsque l'on s'y trouve entre ses crocs.Mgr a combattu à l'intérieur de l'arene,en essayant de court-circuiter spirituellement et physiquement un régime qu'il désapprouve .Tout en s'affichant publiquement à coté de ce régime,il le combattait avec les moyens du bord.Il me semble que c'est Staline qui avait dit "Le Pape?Combien de divisions?"
Cette politique d'infiltration est bien plus dangereuse et d'autant plus ingrate à la fin de la guerre si on se contente du paraitre.Un exemple:les résistants français endossant le manteau de la collaboration pour pouvoir infiltrer les officines ennemies et communiquer aux réseaux FFI de si précieuses informations stratégiques. Il y avait le risque d'etre "harakiri" après la victoire des Alliés par la population et les résistants de la dernière heure(ma grand-mère en a connu de ces gens tournant au gré du vent cassaque à cette époque)s'il n'y avait personne, où plus de preuves pour affirmer que vous étiez résistant.
A lire et à méditer face aux clichés,aux raccourcis de tout genre sur l'Eglise de France durant la 2de guerre mondiale:LESOURD.P.PAILLAT.C.Dossier secret.L'Eglise de france,T2,De la Révolution à nos jours,éditions Presses de la Cité,1968,594p.
PP527-530.
" Tout ce que nous venons d'exposer démontre à notre avis impartialement que,sous ses divers aspects,l'Eglise de la France occupée a eu,de multiples manières,une attitude et une action patriotiques sans faiblesse et parfois héroique.
Ceux qui en doutent et essayent de jeter la suspicion sur tel ou tel éveque sont ceux qui ne tiennent pas compte de la désinformation des paroles et des écrits par les propagandes soit de vichy soit des Allemands.Voulant ou essayant toutes d'avoir l'Eglise avec elles,elles n'hésitaient pas à isoler des phrases,dénaturer,mutiler des textes pour compromettre malgré eux,prélats ou ecclésiastiques.Et ceux qui,sans remonter aux sources utilisent les yeux fermés,sans controle les produits de ces propagandes commenttent de mauvaises actions et présentent un visage déformé de l'Eglise de la france occupée.Des conversations privées,des boutades,isolées elles aussi,de ce qui avait précédé ou suivi ont été utilisées de la sorte ou parfois données comme étant des interviews.(...).De meme,la propagande de Vichy a intentionnellement exagéré dans le sens d'un cléricalisme politique les moindres manifestations religieuses auxquelles était melé le gouvernement du Maréchal.Alors que l'épiscopat évitait avec soin toute inféodation,la propagande agissait comme s'il y avait inféodation,et en propageait la rumeur.Il faut donc etre très prudent quand on porte un jugement sur l'action de l'Eglise pendant l'occupation ou lorsqu'on interprete tel ou tel extrait d'un document épiscopal,ou lorsqu'on met en cause tel ou tel personnage ecclésiastique comme par exemple Mgr Mayol de Lupé,aumonier de la L.V.F dont les faits et les gestes compromettants pour l'Eglise ont été présentés comme ceux d'un éveque qu'il n'était pas,ne figurant meme pas dans la liste officielle des prélats dans l'Annuaire pontifical et n'ayant jamais reçu de mandat officiel de la hiérarchie pour exercer ses fonctions d'aumonier."
Déclaration du cardinal Liénart(eéveque de Lille),"l'un des plus éminents prélats de cette France occupée" illustrant cette politique :
(...)."Je n'évoquerai ici que les protestations renouvelées contre les exécutions d'otages,les condamnations à mort,la déportation d'hommes et de femmes,le massacre d'Ascq.
"Je sais bien que notre résistance a paru timide aux yeux de certains,parce que nous ne l'avons pas accompagnée de protestations publiques retentissantes.Mais le pasteur qui défend sin troupeau a mieux à faire que de crier au loup;il l'affronte et lui arrache ses victimes.Nous avons préféré n'ameuter personne et remplir simplement notre devoir.
"D'autres ont courageusement lutté pour délivrer le sol de la patrie.Nous avons lutté pour sauver son ame.Ce n'était pas moins nécessaire et nous pensons qu'ainsi nous avons pas moins bien servi la France".
Les brebis galeuses(pretres antisémites,tortionnaires,etc)ne doivent pas occulter celles qui ont agi avec honneur et droiture.Si des présidents saluent celui de Chine est-ce pour autant qu'ils approuvent sa dictature,son régime oppressif policier? certes pas.En faculté on m'a appris à penser par moi-meme,ce n'est guère aisé car nul n'est totalement objectif et puis c'est un travail toujours remis à plat avec les études,les documents qui apparaissent régulièrement.Mais c'est la condition sinequanum pour etre impartial.Je pense que dans le cas de cet éveque,une question de prime abord s'impose :à qui profite le crime?
Meme question pour Mihailovic... .
La Révolution française avait tout interet à ce que la monarchie=dictature,despotisme afin de pouvoir se légitimer aux yeux de la population ,aussi ses bains de sang ,ses mariages républicains au bord des berges de la Loire n'étaient que justice face aux "brigands"
:horrible adversaires de la Liberté chérie!Donc attention aux manipulations des faits, des textes... .En enluminure comme en Histoire,en sciences politiques il a souvent une deuxième voire une troisième lecture... qui expliquent bien des choses.
Kenavo et merci encore pour l'exposition simple des événements dans cette poudrière que sont les Balkans.