Ngjallja!

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Claude le Liseur
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Ngjallja!

Message par Claude le Liseur »

Rappelons que l'Albanie était devenue en 1967 le premier Etat athée du monde. Toute pratique religieuse y était bannie. L'Eglise orthodoxe y était morte, morte avec ses évêques et ses prêtres disparus dans les prisons et les camps, morte avec ses églises détruites ou transformées en cinémas. Plus aucun lieu de culte ne fonctionnait plus. L'Albanie avait franchi le pas que ni l'Union soviétique, ni la Chine de Mao n'avaient osé franchir. Seul le Cambodge des Khmers rouges fut aussi radical, mais cela ne dura que quatre ans. En Albanie, il n'y eut aucune religion autre que le marxisme pendant vingt-trois ans.

En décembre 1990, le pouvoir communiste, qui vivait ses derniers mois, autorisa les premières liturgies depuis 1967. En janvier 1991, le patriarcat oecuménique nomma exarque d'Albanie l'évêque Anastase (Yannoulatos), né au Pirée le 4 novembre 1929, qui avait exercé les fonctions d'archevêque d'Afrique orientale au sein du patriarcat d'Alexandrie. (L'évêque Anastase devait témoigner par la suite que, jamais, il n'avait vu en Afrique orientale une pauvreté aussi grande que celle qu'il découvrit en arrivant en Albanie.)

L'exarque Anastase arriva en Albanie le 16 juillet 1991. A cette date, il restait 22 prêtres orthodoxes encore en vie en Albanie, la plupart très âgés, derniers restes d'une Eglise qui avait compté 440 prêtres soixante ans plus tôt. 335 prêtres étaient morts, pour la plupart de mort violente, entre 1967 et 1990. Pratiquement aucun baptême n'avait été célébré pendant vingt-trois ans. (Le fait de baptiser quelqu'un pouvait entraîner l'exécution.)

Le 18 août 1991, à Sarandë, l'exarque Anastase ordonna prêtre Kristo Papas, qui devint ainsi le premier prêtre ordonné en Albanie depuis la suppression de la religion en 1967, et le premier prêtre de l'Eglise ressuscitée d'Albanie.

Le 24 juin 1992, le synode du patriarcat oecuménique décida de restaurer l'Eglise autocéphale d'Albanie qui avait existé de 1937 à 1967. Le 2 août 1992, l'exarque Anastase fut intronisé comme premier archevêque de Tirana et de toute l'Albanie depuis vingt-cinq ans.

A cause de sa nationalité grecque, et malgré son soin de célébrer en langue albanaise et de restaurer une Orthodoxie albanaise, l'archevêque Anastase se heurta à l'hostilité des partisans du président Sali Berisha (qui avait fait adhérer l'Albanie à l'Organisation de la conférence islamique). On rédigea un projet de Constitution qui réservait la direction des institutions religieuses sur le sol albanais aux Albanais de souche. L'approbation de cette Constitution aurait signifié le départ de l'archevêque et la deuxième mort de l'Eglise d'Albanie. Le 6 novembre 1994, la Constitution de Berisha fut repoussée par référendum par 53,8% de non. L'Eglise d'Albanie était sauvée.

En 1998, le synode de l'Eglise d'Albanie fut enfin reconstitué - au bout de trente-et-un ans - avec les quatre évêques nécessaires à l'existence d'une Eglise autocéphale. Il s'agit de deux Grecs, l'archevêque Anastase (Yannoulatos) de Tirana et l'évêque Ignace (Triantis) de Bérat (près de la moitié des orthodoxes d'Albanie sont des Grecs), et de deux Albanais, les évêques Jean (Pelushi) de Korça et Côme (Qirio) d'Argyrokastro / Gjirokaster (décédé depuis).

De juillet 1991 à juin 2001, l'Eglise orthodoxe d'Albanie a construit 80 nouvelles églises, en a relevé 70 de leurs ruines et en a réparé 140. 5 monastères sont revenus à la vie. L'Eglise d'Albanie dispose maintenant de 290 paroisses, contre 330 avant 1967.

En outre, l'Eglise a fondé un séminaire à Dürres, un lycée et plusieurs hôpitaux et dispensaires.

120 nouveaux prêtres ont été ordonnés depuis l'ouverture du séminaire en 1996. Le nombre des baptisés orthodoxes est maintenant estimé à 170'000, soit 5% de la population.

Résurrection!
panayiotis
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Message par panayiotis »

c'est une belle résurection
apostolos
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merci

Message par apostolos »

Excellent historique! Merci Claude.

Le sujet de votre message signifie-t-il "résurrection" en albanais?
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Oui, ngjallja signifie résurrection en albanais, et c'est aussi le nom de la revue officielle de l'Eglise d'Albanie.

Quand l'archevêque Anastase est venu en Albanie, les premiers mots qu'il a appris ont été: "Krishti u ngjall, Zoti eshte me ne, lavdi Zotit!" - "Christ est ressuscité, Dieu est avec nous, gloire à Dieu!"

A son arrivée à l'aéroport de Tirana, 30 ou 40 fidèles l'attendaient. Une d'entre elles, une femme nommée Tefta Kuge, a raconté plus tard ses impressions en disant: "Un évêque dans notre pays! Je me suis sentie comme si le Christ lui-même était venu en Albanie!"

Comme dit l'archevêque Anastase: "La Résurrection n'est pas au-delà de la Croix. Elle est dans la Croix."
Claude le Liseur
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Re: Ngjallja!

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit :
De juillet 1991 à juin 2001, l'Eglise orthodoxe d'Albanie a construit 80 nouvelles églises, en a relevé 70 de leurs ruines et en a réparé 140. 5 monastères sont revenus à la vie. L'Eglise d'Albanie dispose maintenant de 290 paroisses, contre 330 avant 1967.

En outre, l'Eglise a fondé un séminaire à Dürres, un lycée et plusieurs hôpitaux et dispensaires.

120 nouveaux prêtres ont été ordonnés depuis l'ouverture du séminaire en 1996. Le nombre des baptisés orthodoxes est maintenant estimé à 170'000, soit 5% de la population.
La proportion d'orthodoxes en Albanie a encore légèrement augmenté au cours des dernières années. Je citais une estimation de 5% de la population en 2003. Au recensement de 2011, on était monté à 6,75% (cf. http://www.orthodoxie.com/ , information du 22 décembre 2012). L'Eglise d'Albanie a été assassinée, elle est ressuscitée, elle vit, elle fleurit, elle vivra encore, "et la dernière gloire de cette maison sera plus grande que la première" (Aggée 2,9).
Nikolas
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Re: Ngjallja!

Message par Nikolas »

Claude le Liseur a écrit :
Claude le Liseur a écrit :
De juillet 1991 à juin 2001, l'Eglise orthodoxe d'Albanie a construit 80 nouvelles églises, en a relevé 70 de leurs ruines et en a réparé 140. 5 monastères sont revenus à la vie. L'Eglise d'Albanie dispose maintenant de 290 paroisses, contre 330 avant 1967.

En outre, l'Eglise a fondé un séminaire à Dürres, un lycée et plusieurs hôpitaux et dispensaires.

120 nouveaux prêtres ont été ordonnés depuis l'ouverture du séminaire en 1996. Le nombre des baptisés orthodoxes est maintenant estimé à 170'000, soit 5% de la population.
La proportion d'orthodoxes en Albanie a encore légèrement augmenté au cours des dernières années. Je citais une estimation de 5% de la population en 2003. Au recensement de 2011, on était monté à 6,75% (cf. http://www.orthodoxie.com/ , information du 22 décembre 2012). L'Eglise d'Albanie a été assassinée, elle est ressuscitée, elle vit, elle fleurit, elle vivra encore, "et la dernière gloire de cette maison sera plus grande que la première" (Aggée 2,9).
cher Claude,

je suis fort étonné de vous voir cité ce chiffre du recensement de 2011 sans plus d'information, alors que l'article d'où vous tirez cette information s'intitule : "L’Eglise orthodoxe d’Albanie dénonce le recensement 2011 des fidèles orthodoxes de ce pays, comme « absolument inexact et inacceptable »"
http://www.orthodoxie.com/actualites/le ... more-41126

En effet dans un long communiqué l'Eglise d'Albanie dénonce ce chiffre comme étant inexact et le recensement effectué de manière non scientifique et non réglementaire. Le nombre d'orthodoxe étant beaucoup plus élevé selon le communiqué.
Claude le Liseur
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Re: Ngjallja!

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit : La proportion d'orthodoxes en Albanie a encore légèrement augmenté au cours des dernières années. Je citais une estimation de 5% de la population en 2003. Au recensement de 2011, on était monté à 6,75% (cf. http://www.orthodoxie.com/ , information du 22 décembre 2012). L'Eglise d'Albanie a été assassinée, elle est ressuscitée, elle vit, elle fleurit, elle vivra encore, "et la dernière gloire de cette maison sera plus grande que la première" (Aggée 2,9).
L'interpellation de Nikolas me contraint à me départir d'une discrétion dans laquelle je souhaitais me cantonner pour ne pas critiquer les évêques d'une Eglise martyre et renaissante. Alors, s'il faut vraiment parler de cette controverse, voici mon opinion.

L'information donnée par http://www.orthodoxie.com renvoie à un communiqué de l'Eglise d'Albanie qui estime que le recensement est une grossière sous-estimation. Je n'ai trouvé dans le communiqué aucun argument qui invalide le recensement de 2011. En gros, l'argumentation se limite à dire que tous ceux qui n'ont pas voulu indiquer leur religion au recensement sont des orthodoxes. On est toujours dans l'extrapolation des chiffres d'avant la deuxième Guerre mondiale où il y avait 20% d'orthodoxes en Albanie. Curieusement, le communiqué de l'Eglise d'Albanie ne s'en prend pas au fait que le recensement ne trouve plus que 57% de musulmans là où il y en avait 68% avant la guerre - alors, si j'applique le raisonnement de nos évêques, pourquoi une partie de ceux qui n'ont pas voulu indiquer leur religion ne seraient-ils pas des musulmans?

Comme si le communisme n'était pas passé par là.

Le recensement tchèque, que j'ai déjà cité sur le forum, a aussi montré que le catholicisme romain s'était effondré à 10% de la population tchèque alors qu'il était majoritaire avant guerre.

Le consensus des observateurs extérieurs est qu'il n'y avait plus d'orthodoxes en Albanie dans les années 1980 et que le pourcentage était remonté à 5% au cours des dix ans qui avaient suivi le rétablissement de l'Eglise d'Albanie.

Les protestations de l'Eglise d'Albanie contre les résultats du recensement sont, sauf preuve du contraire, à mettre au même niveau que, naguère, la revendication par Mgr Hilarion (Alfeyev) de 120 millions de fidèles pour le patriarcat de Moscou... alors qu'aucune estimation sérieuse ne trouve plus de 100 millions d'orthodoxes dans le monde entier.

J'ai été définitivement vacciné contre l'inflation statistique - surtout celle venant de mon "camp" politique, religieux, ou linguistique - à l'époque où j'ai voyagé dans un pays qui avait adhéré à la Francophonie pour des raisons politiques et où l'on avait justifié a posteriori cette adhésion en faisant accroire que la langue française aurait été répandue dans ce pays. Toutes proportions gardées, je me suis senti dans la peau d'un Anton Ciliga ou d'un André Gide voyageant en Union soviétique dans les années 1930 et se rendant compte que toutes les statistiques qui étaient répandues sur ce pays à l'étranger étaient fausses. Je parcourais de long en large un pays où presque personne ne parlait français et je constatais en même temps que tous les livres publiés dans les pays francophones, que l'écrasante majorité des sites Internet - y compris celui de l'ambassade de France dans le pays en question -, presque toutes les revues (y compris un bulletin qui aurait dû être bien informé comme Défense de la langue française) publiaient des statistiques qui correspondait à une proportion de locuteurs du français cinquante ou cent fois supérieure à celle que je pouvais estimer à la louche (je tiens à préciser que, dans une différence de 1 à 100 ou même de 1 à 50, il n'y a plus de marge pour le "bruit" statistique). Personne ne parlait français dans telle localité qui était censée compter 500 professeurs de français. Par la suite, je me rendis compte que tous les francophones qui avaient voyagé dans ce pays faisaient la même observation que moi. Je me souviens encore d'une discussion qui eut lieu des années plus tard, au cours de laquelle, avec un ami et confrère dont la mère était native du pays en question, nous faisions remarquer à une tierce personne qu'il n'y avait pour ainsi dire pas de francophones dans ce pays-là, et notre interlocuteur (qui n'y avait jamais mis les pieds) de nous répondre que nous avions forcément tort puisque toutes les statistiques disaient le contraire. Je me suis rendu alors compte qu'il était possible de lancer les chiffres les plus insensés (qu'on y réfléchisse: une multiplication par 50 ou 100 par rapport à la réalité, c'est énorme!) et qu'il y aurait toujours des gens pour le croire.

Cette expérience m'a vacciné à jamais contre la jactance statistique et l'exagération des chiffres. J'ai déjà eu l'occasion, sur le présent forum, de parler de la page Wikipédia consacrée au nombre de locuteurs du français dans le monde, qui est un vrai condensé de ces exagérations presque dignes d'un plan quinquennal soviétique.

Mais, par la suite, je me suis rendu compte qu'il n'y avait pas que les ambassades de France et l'Organisation internationale de la Francophonie pour manipuler les chiffres. Cela vaut aussi sur le plan religieux. Quand vous aurez fait l'expérience de rencontrer de nombreux ressortissants de tel ou tel pays abusivement présenté comme orthodoxe à 80% et de n'entendre, de discussion en discussion, que des explications sur le fait que leur tradition familiale était le communisme, et pas l'Orthodoxie (ce qui n'empêchait pas tel ou tel d'entre eux de mener sans état d'âme une carrière de capitaliste), vous commencerez sans doute à avoir des doutes.

J'invite certains francophones à faire des voyages dans les pays qui connurent le communisme ou à fréquenter un peu plus les immigrés originaires des anciens pays communistes (et pas seulement ceux de ces immigrés qui fréquentent encore les églises). On ne traverse pas sans dommage une telle épreuve. Pour une Pologne ou une Roumanie où la vie religieuse a pu se maintenir quasi-intacte sous le communisme, combien de régions, voire de pays entiers, où elle avait pris fin à peu près entièrement? Je pense qu'il faudrait ouvrir les yeux sur les ravages qui ont été perpétrés par le communisme et ne pas s'illusionner qu'il n'y a pas de traces.

Il semble qu'une grande partie de nos hiérarchies ne comprenne toujours pas que la force de l'Orthodoxie ne réside pas dans le fait d'aligner des divisions fantômes, mais dans la vie spirituelle, et elle seule. La seule utilité des chiffres, c'est de nous donner des tendances: la religion a vraiment fait un retour en force en Albanie et en Russie, et ce n'est pas le cas du tout en République tchèque.
Claude le Liseur
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Re: Ngjallja!

Message par Claude le Liseur »

C'est comme le dernier recensement hongrois qui a trouvé 16'000 orthodoxes en Hongrie au lieu du chiffre de 40'000 répété depuis des décennies. Soit on part du principe que le recensement est faux parce qu'il ne correspond pas à nos attentes. Soit on admet cet effondrement de l'Orthodoxie en Hongrie - à comparer avec une progression incontestable et considérable en Russie et en Albanie - et on devra en tirer la conclusion qu'il est la conséquence des mêmes erreurs pastorales que l'on a vues en Europe occidentale et essayer de corriger ces erreurs.

Ce n'est pas parce que les chiffres ne sont pas conformes à nos attentes qu'il faut les balayer, car, je le répète, ils nous donnent des tendances.
Claude le Liseur
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Re: Ngjallja!

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit : Ce n'est pas parce que les chiffres ne sont pas conformes à nos attentes qu'il faut les balayer, car, je le répète, ils nous donnent des tendances.

Ce que je veux dire, c'est que les statistiques, lorsqu'elles sont crédibles (par exemple résultats d'un recensement plutôt que déclaration triomphaliste d'un évêque dans un colloque oecuménique où chacun aligne ses troupes), nous donnent une photographie de la situation à un instant t, mais nous permettent aussi de faire des projections.

Ainsi, il n'y a sans doute guère plus de 25% de baptisés orthodoxes en Russie à l'heure actuelle, mais si la tendance se poursuit, il y en aura 60 ou 70% dans quelques décennies, parce que les générations élevées dans l'athéisme d'Etat vont disparaître et vont être remplacées par des générations dans lesquelles le baptême des enfants est de nouveau généralisé (nous ne pouvons toutefois pas en déduire quel sera leur degré réel de pratique religieuse). Ce mouvement ne pourrait être brisé que par un bouleversement majeur du style nouvelle persécution religieuse. En revanche, si la tendance se produit, l'Orthodoxie pourrait bien disparaître de Hongrie - sauf bouleversement majeur du type nomination sur place d'un missionnaire extraordinaire comme le fut saint Gorazd (Pavlik) en Tchécoslovaquie. En Russie, la tendance au déclin de l'Orthodoxie a été renversée par le bouleversement sans équivalent que fut l'ère de Gorbatchev; aucun évènement n'est venu jusqu'à ce jour freiner le déclin séculaire de l'Orthodoxie en Hongrie.

De même, il n'y a peut-être que 20% de francophones dans la population du Burkina-Faso, mais si la tendance se poursuit, ce chiffre tendra vers 100%, parce que le taux de scolarisation augmente de génération en génération, et que cette tendance ne pourrait là aussi être retournée que par un bouleversement majeur et improbable qui supposerait la réunion de deux conditions dont la réalisation n'apparaît pas crédible - à savoir apparition d'une marionette du type Paul Kagame et que cette marionette reçoive un soutien financier massif des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne. En revanche,dans quelques décennies, la connaissance du français tendra vers zéro en Allemagne, en Grèce, en Pologne, en Roumanie, ou en Russie, tout simplement par disparition de cette langue du système scolaire, sauf à supposer un bouleversement majeur et tout à fait improbable qui serait la réunion de deux conditions dont la réalisation n'apparaît pas crédible - à savoir réapparition d'une deuxième langue étrangère dans le système scolaire (et ce d'une manière qui dépasse le symbole, comme les deux heures par semaine consacrées aux langues autres que l'anglais au lycée en Grèce) et intérêt soudain de la population scolarisée pour des langues et des cultures autres que la langue anglaise et la culture anglo-américaine.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, dans un pays donné, une langue peut passer de 0 à 100% de la population en un siècle ou un siècle et demi - ou de 100% à zéro; une religion peut passer de 20 à 70% en un siècle - ou de 70% à 20%. Mais la démographie a plus d'un point commun avec les mathématiques financières: si vous capitalisez sur un siècle, la différence entre 0,5% d'intérêts et 1% d'intérêts devient énorme; si vous faites des calculs démographiques sur un siècle, une baisse de quelques points du taux d'accroissement naturel peut faire passer d'un doublement de la population à une division par deux.

Une augmentation de la proportion d'orthodoxes en Albanie de 5% à 7% en huit ans peut paraître modeste. Cela représente pourtant une augmentation relative de 40% en huit ans - pour une Eglise qui, contrairement à d'autres confessions, ne reçoit pas de soutien financier de l'extérieur. 40% en huit ans, cela veut dire un doublement en dix-sept ans. On imagine sur un siècle, si la tendance se poursuit...
Nikolas
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Re: Ngjallja!

Message par Nikolas »

Merci de ce nécessaire rappel.
Je trouvais en effet curieux cette référence à des statistiques de l'entre-deux guerres, bien qu'il n'y ait pas eu d'autres recensements depuis, pour établir une critique des données du recensement de 2011 comme si le communisme n'était pas passé par là, comme vous ditez.
Cela n'empèche pas l'Eglise d'Albanie de critiquer aussi le recensement sur sa méthodologie, qu'il juge non rigoureuse.
Mais comme vous le dites la tendance est à la hausse et nous pousse une fois de plus à dire : gloire à Dieu !!!
Claude le Liseur
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Re: Ngjallja!

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit : dim. 23 déc. 2012 19:17 C'est comme le dernier recensement hongrois qui a trouvé 16'000 orthodoxes en Hongrie au lieu du chiffre de 40'000 répété depuis des décennies. Soit on part du principe que le recensement est faux parce qu'il ne correspond pas à nos attentes. Soit on admet cet effondrement de l'Orthodoxie en Hongrie - à comparer avec une progression incontestable et considérable en Russie et en Albanie - et on devra en tirer la conclusion qu'il est la conséquence des mêmes erreurs pastorales que l'on a vues en Europe occidentale et essayer de corriger ces erreurs.

Ce n'est pas parce que les chiffres ne sont pas conformes à nos attentes qu'il faut les balayer, car, je le répète, ils nous donnent des tendances.

Les mystères des "bouquets de chaînes de télévision" qui varient de commune à commune font que, depuis mon déménagement, je capte trois chaînes hongroises auxquelles je ne comprends rien, si ce n'est qu'on sent assez vite que le gouvernement de ce pays fait un maximum d'efforts pour rompre avec l'athéisme de la période communiste et encourager le renouveau des différentes confessions chrétiennes. En effet, il semble que sur Duna TV, le dimanche matin, l'émission de vingt-cinq minutes donnée aux catholiques romains soit suivie d'une émission orthodoxe de dix minutes (ce que je trouve généreux à l'égard d'une confession qui ne représente plus que 0,16% de la population ) et d'une émission méthodiste de cinq minutes. D'après leur site Internet, il y a aussi des émissions luthériennes et calvinistes, mais là, l'effectif plus conséquent fait que ce n'est pas une surprise.
Je suppose qu'il y a quand même plus de méthodistes en Suisse qu'en Hongrie, mais je n'ai jamais vu une émission méthodiste sur aucune chaîne suisse. A vrai dire, je sais qu'il y a beaucoup plus d'orthodoxes en Suisse qu'en Hongrie, et je n'ai pas non plus vu d'émission orthodoxe. D'où cette impression que le gouvernement hongrois, à travers la télévision publique, veut encourager le retour au christianisme, même en aidant des confessions très minoritaires sur son sol.
A vrai dire, je n'ai pas l'impression, puisque mon "bouquet" comprend aussi les principales chaînes russe et serbe, que les 20-25% d'orthodoxes de Serbie et de Russie se voient même offrir par leur télévision publique les dix minutes d'émission dominicale que la télévision publique hongroise accorde à ses 0,16% d'orthodoxes. Tito pas mort ?
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