Encyclique pascale 2008 du patriarche Paul de Serbie

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Claude le Liseur
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Encyclique pascale 2008 du patriarche Paul de Serbie

Message par Claude le Liseur »

Epître pascale 2008 du patriarche Paul de Serbie, traduite du serbe en français par M. Slobodan Despot, vice-président de la paroisse orthodoxe serbe de Lausanne (Suisse)


L’Eglise orthodoxe serbe à ses enfants spirituels, Pâques 2008.

Paul par la grâce de Dieu Archevêque orthodoxe de Peć, Métropolite de Belgrade et de Karlovci et Patriarche de Serbie, avec tous les hiérarques de l’Eglise orthodoxe serbe, aux prêtres, aux moines et à tous les enfants de notre sainte église: bénédiction, miséricorde et paix de Dieu le Père, et de Notre Seigneur Jésus-Christ, et de l’Esprit Saint, avec notre joyeuse salutation pascale: Christ est ressuscité! En vérité il est ressuscité!

Aujourd’hui, tout s’emplit de lumière: le ciel, la terre et le monde inférieur. Aussi que toute la création fête la Résurrection du Christ, car c’est par elle qu’elle s’affermit.

Par ces mots du grand poète de l’Eglise, nous vous souhaitons une joyeuse Fête de la Résurrection du Christ et vous saluons, chers enfants spirituels, par cette exclamation toute-joyeuse: Christ est ressuscité! Après le Vendredi Saint, jour de la plus grande tragédie de l’humanité, mais également de la gloire de Dieu, où l’homme s’est fait le juge impitoyable de l’Amour Divin, où il a condamné à mort le Dieu-Homme Christ, où le mensonge, la tromperie et l’illusion ont voulu jubiler devant le Christ crucifié, où le ciel, la terre et le monde inférieur ont eu honte des crimes du genre humain et où les ténèbres ont tout envahi — voici le Jour du Passage du Dieu-Homme Christ de la mort vers la vie, de l’obscurité de la tombe à la lumière du Jour. Voici le Jour des jours, le Temps des temps, où le Seigneur Ressuscité a rompu les chaînes du péché, de la mort et du diable, dont l’humanité, et avec elle la nature tout entière, étaient liées! Voici le Jour de notre liberté et de notre joie! La Résurrection du Christ a vaincu l’injustice séculaire que le péché et la mort infligeaient à l’être humain. Le saint apôtre Paul, dans son exaltation pascale, lance la question triomphante: Mort, où est ton aiguillon? Mort, où est ta victoire? Nulle part! Car l’aiguillon de la mort est brisé, l’enfer vidé et ses esclaves libérés. La Lumière du monde, tel le Soleil de la vie nouvelle, a rayonné du fond de son tombeau, de même qu’avant la Passion elle avait rayonné du Mont Thabor. Que toute la création célèbre la Résurrection du Christ, car le faible et l’impuissant devient fort et puissant, et s’affermit. Dans la Résurrection du Christ, tout l’univers s’est transformé. C’est pourquoi elle est la recréation du monde et la renaissance de l’homme, issue cette fois de la Vie même que le Christ ressuscité offre au monde et aux hommes. «Je suis la Voie, la Vérité et la Vie», dit le Seigneur. Le Christ Ressuscité s’est manifesté aux femmes myrophores et aux apôtres effrayés, qui s’étaient dispersés par crainte des Juifs, il les a rassemblés autour de soi et les a consolidés dans la foi par ces paroles: «N’ayez crainte! J’ai vaincu le monde!», un monde qui venait, quelques jours plus tôt, de le condamner et de le mettre en croix. De la même manière, aujourd’hui et toujours, il nous rassemble tous autour de Lui et nous parle de même: «N’ayez crainte, car J’ai vaincu le monde!» Voyant et éprouvant Sa gloire de Ressuscité, nous Le célébrons et clamons à la face du monde: «Christ est ressuscité, nations! Christ est ressuscité, célébrez! Christ est ressuscité, croyez!» Car «nous prêchons ce que nos yeux ont vu et que nos mains ont touché», ainsi que le dit le saint apôtre et évangéliste Jean le Théologien, «afin que vous aussi, croyants, ayez la vie éternelle». Notre foi est la foi de l’expérience résurrectionnelle. Nous savons et c’est pourquoi nous croyons. La connaissance acquise par l’expérience est la plus grande confirmation de la foi. Avant Sa passion, Sa descente au tombeau et Sa Résurrection, le Seigneur a emmené trois de ses disciples sur une haute montagne. C’était le Mont Thabor. Là, dans le mystère de sa Transfiguration, il leur dévoila le secret de Son être divino-humain, que Sa Résurrection allait attester par l’expérience, pour eux et pour le monde entier. La manifestation de la puissance et de la gloire divines s’accompagna de la lumière de la grâce incréée qui est en Christ et que le monde a reçue à travers sa Résurrection. Un monde sans Christ est un monde de ténèbres. Un monde avec le Christ Ressuscité est un monde de lumière éternelle, de lumière qui éclaire chaque recoin de notre âme et de notre être. C’est pourquoi nous sommes les enfants de la lumière. De Lui, Lumière de la Vie, nous avons nous aussi reçu la lumière qui éclaire le monde. C’est pourquoi le Seigneur nous dit: «Que votre lumière éclaire ainsi les hommes, qu’ils voient vos oeuvres et qu’ils glorifient votre Père qui est aux cieux.» Le Christ Ressuscité est la Pierre d’angle de notre foi et de notre vie. Il est en même temps la Pierre d’angle et la Tête divino-humaine de notre sainte Eglise. Nul n’a posé d’autre pierre, ni ne peut en poser. Lorsque les disciples demandèrent à saint Jean Baptiste s’il était celui qui devait venir ou s’ils devaient en attendre un autre, il leur répondit: «Je ne suis pas digne de délacer ses sandales!» Ainsi parla le saint Prophète, Précurseur et Baptiste du Seigneur, Jean, qui posa sa main sur la tête du Sauveur. Si lui, le plus grand de ceux qui sont issus d’un ventre de femme, peut parler ainsi, comment est-il possible que quiconque se proclame la tête visible de l’Eglise, le vicaire infaillible du Fils de Dieu sur terre? Dieu nous en garde! Notre sainte Eglise, avec ses prêtres et son peuple de fidèles, demeure ferme dans la foi résurrectionnelle et christique des saints prophètes, apôtres, martyrs et propagateurs de la foi. En même temps, nous sommes une Eglise à qui Dieu donne la force d’être une Eglise du dialogue avec tous les hommes et toutes les nations, les invitant tous à partager l’illumination par la lumière du Christ Ressuscité. Nous ne nous renfermons pas en nous-mêmes, pas plus que nous ne renfermons le Christ dans les bornes étroites de notre raison. Au contraire, nous témoignons de la Lumière devant le monde et devant les autres hommes, nous témoignons de la Vérité à l’instar des saints apôtres, des propagateurs de la foi, des martyrs et des bienheureux. C’est par quoi le monde nous reconnaît comme enfants du Christ, car ainsi que le dit le saint apôtre Paul: «C'est pourquoi je supporte tout à cause des élus, afin qu'eux aussi obtiennent le salut qui est en Jésus-Christ» (Tim. 2:10) Nous qui vivons deux mille ans après la Résurrection, que représente à nos yeux la Résurrection du Christ? N’est-ce qu’un souvenir? N’est-ce qu’une simple célébration ou quelque chose de bien plus élevé et de plus profond. La grâce de la Résurrection du Christ est la source intarissable du salut de l’homme et du monde en tout temps et en tout lieu C’est une transformation absolue et totale de l’homme et du monde, apportée par le Dieu-Homme Christ à travers son Avènement et sa Résurrection. La Résurrection du Christ possède donc la même force, la même puissance pour Ses contemporains et pour nous qui Le célébrons vingt siècles plus tard. Le saint apôtre Paul nous convainc qu’avec le Christ nous vivrons éternellement, car «par un seul acte de justice (la Résurrection), la justification qui donne la vie s'étend à tous les hommes.» (Rom. 5:18). «…car Christ ressuscité des morts ne meurt plus; la mort n'a plus de pouvoir sur lui… Ainsi vous-mêmes, regardez-vous comme morts au péché, et comme vivants pour Dieu en Jésus-Christ.» (Rom. 6:8-11). La Résurrection sauve à la fois le passé, le présent et l’avenir.
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En ces jours de joie pascale, en ces temps de grâce divine offerte à tous et à chacun, nous ne pouvons oublier l’injustice et la violence infligées par les puissants de ce monde à notre Kosovo-Métochie, à la Serbie et à tout le peuple serbe. Le Kosovo et la Métochie font partie intégrante de la vie de chaque Serbe orthodoxe, de même que chaque Serbe est indéfectiblement lié au Kosovo et à la Métochie. C’est justement en sachant cela que les responsables de cette injustice historique ont voulu nous infliger la blessure la plus profonde, la douleur et la souffrance les plus indicibles — une douleur et une souffrance qui nous renvoient à la passion unique, rédemptrice, de notre Seigneur au Golgotha. Le Kosovo-Métochie n’est pas qu’une question de territoire pour la Serbie. Avant tout, par-dessus tout, c’est la question de notre être spirituel, car nous sommes nés et avons grandi, vécu et mûri en tant que personnes et en tant que peuple avec le Kosovo-Métochie, vivant et mourant avec le testament du Kosovo: «Le royaume terrestre est provisoire, le céleste dure toujours et à jamais!» C’est pourquoi la question du Kosovo-Métochie est aussi profondément liée, existentiellement, psychologiquement et mystiquement, à chacun de nous. Les puissants de ce monde le savent bien, et ils essaient justement de blesser et de châtier collectivement le peuple orthodoxe serbe; ils veulent le briser et le terrasser, en faire une masse informe, lui arracher le coeur de la poitrine... Nous soumettant à la volonté et à l’enseignement du Christ, nous dévoilons leur iniquité, leur hypocrisie, analogues en plus d’un trait au lavage des mains de Pilate dans le sang du Juste. Ayant le Kosovo-Métochie dans notre coeur, vivant dans le souci permanent de nos frères et soeurs et de tous ceux qui y souffrent, portant le Kosovo-Métochie vivant, jour et nuit, en nous-mêmes, nul ne nous l’a arraché ni ne peut nous l’arracher. La patrie de l’homme est son coeur, dit le poète. Nous avons installé le Kosovo-Métochie dans nos coeurs. Nous appelons tous les Serbes orthodoxes à accomplir dans sa totalité le testament du Kosovo, qui est le testament du saint prince Lazare. Si nous maintenons ce testament, nul ne nous prendra le Kosovo-Métochie, ni en ce monde ni dans l’autre, de même que nul n’a pu prendre au peuple juif sa ville sainte de Jérusalem. Nous exhortons tout le monde, depuis les hommes politiques et les savants jusqu’aux fils et aux filles les plus humbles et les plus jeunes de notre Patrie, à mériter et préserver devant Dieu, par notre travail et notre vie honnête, le Kosovo-Métochie. Que les savants défendent le Kosovo-Métochie par leurs travaux scientifiques! Que les artistes, par leur créativité, expriment la beauté et l’essence de notre Kosovo-Métochie! Que les sportifs vouent leurs succès au Kosovo-Métochie! Que Kosovo-Métochie soit, pour chaque parent, l’un des premiers mots qu’il murmurera à l’oreille de son enfant nouveau-né! Que chaque laboureur consacre son premier sillon au Kosovo-Métochie! Que chaque ouvrier offre la première heure de son travail au Kosovo-Métochie! Que chaque homme politique consacre sa première pensée et tout son effort sur le plan international à la défense du Kosovo-Métochie! Que chaque pasteur spirituel élève sa première prière à Dieu en l’honneur du Kosovo-Métochie! C’est l’appel à une lutte incessante qui sera agréable à Dieu, c’est une prière qu’Il exaucera, car nous ne remettons pas la question du Kosovo-Métochie entre les mains des hommes versatiles et de leurs intérêts, mais nous la remettons à Dieu et à Son jugement. De même que le Psalmiste chanta jadis Jérusalem conquise et dévastée, nous chantons dans l’esprit du testament de Kosovo: si je t’oublie, Kosovo, si je t’oublie, Métochie, que la droite de Dieu m’oublie à son tour! Que ma langue adhère à mon palais si je ne pense pas à toi, si je ne mets pas le Kosovo-Métochie au commencement de ma joie. Chers enfants spirituels, nous vivons les temps difficiles de la mondialisation, des temps où les droits fondamentaux de l’être humain sont foulés aux pieds: le droit de l’humain à vivre, le droit de l’enfant à naître, le droit du parent à éduquer et guider son enfant le droit de la mère à être la mère soucieuse de son enfant et l’épouse de son mari, le droit de l’homme à être humain! Nous voyons se crer une monstrueuse civilisation globale fondée sur une morale pervertie, dépourvue du levain du sens éternel de la vie humaine. Une telle civilisation, aussi longtemps qu’elle sera opposée au Christ Ressuscité et à Sa douce connaissance, ne pourra survivre. Ayant cela en vue, soyons sages et prudents en nous approchant de la table malsaine des mets de ce monde. N’y prenons que ce qui, aux yeux du Christ, est digne de notre vocation et de notre dignité. Rejetons tout ce qui est pseudocivilisé, dévoyé et inhumain, de même que le Christ a rejeté l’offre du tentateur dans la Montagne des tentations: si tu t’inclines devant moi, tout ce que tu vois sera à toi! Nous connaissons la bonne réponse: Il est écrit: tu ne serviras que ton Dieu et ne t’inclineras que devant Lui Seul! Nous saluons en particulier nos frères en diaspora: aux Etats-Unis d’Amérique, au Canada, en Australie, dans les pays de l’Asie, de l’Afrique et de l’Europe. Nous les saluons et les invitons à s’unir et s’entendre dans Jésus le Christ Ressuscité, et à ne plus jamais permettre qu’on les divise et les dresse les uns contre les autres. Nous saluons nos frères et soeurs dans la Republika Srpska, en Bosnie-Herzégovine, en Croatie, au Monténégro, en Slovénie et dans l’Ancienne république yougoslave de Macédoine. Nous saluons toute l’Eglise de Dieu disséminée dans l’oecumène et tous les hommes de bonne volonté. Nous les exhortons tous à la paix, à la concorde et au bon témoignage devant les autres. Renouvelons-nous avec le Christ Ressuscité et illuminons le monde par le bien et la vertu! Rassemblés dans la sainte Liturgie de notre sainte Eglise, dans le bien et le bon témoignage de la Vérité, que le frère embrasse le frère, et saluons-nous les uns les autres, ainsi que le ciel et la terre, par l’exclamation toute-joyeuse: Christ est ressuscité! En vérité il est ressuscité!

Délivré au Patriarcat de Serbie, à Belgrade, à Pâques 2008. Vos intercesseurs devant le Seigneur Ressuscité: l’Archevêque de Peć, Métropolite de Belgrade et Karlovci et Patriarche serbe PAUL avec tous les hiérarques de l’Eglise orthodoxe serbe.
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