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Publié : lun. 21 juil. 2008 7:50
par Jean-Mi
Glicherie a écrit :Simplement, tout en dénonçant les agissements déplorables de certains hierarques roumains, vous laissez penser, en tout cas je l'ai pris ainsi, que l'Eglise Roumaine dans son ensemble est affligée volontairement des même tares. Hors, ce n'est pas ce que beaucoup de roumains vivent, qui ne sont pas oecumenistes ni philetistes. En tout cas c'est mon opinion, je conçois que la votre puisse différer.
D'autant qu'il y en a comme moi, qui sont même franchement anti-oecumenistes.
j'ai quelques relations roumaines qui sont en effet du côté du Christ et pas du côté du vatican et de ses "sbires en costard de prélat byzantin"
Ils ne se présentent cependant pas comme majoritaires chez eux, hélas.

Et puis je me demande si un évêque ultra-oecuméniste aurait pu être élu patriarche (élection façon vatican et pas façon patristique bien entendu) et recevoir l'approbation publique de la majorité du peuple si ce même peuple n'était pas déjà majoritairement lui aussi uniatisé?

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Et ça ne date pas d'hier.. Que scandait la foule roumaine lorsque Theoctist et Jipitou ont "bénit" ensemble ce groupe si différent des foules Orthodoxes ayant suivit saint Marc d'Éphèse? "Unitate" - comme si l'Église n'était pas unie dans la Foi, comme si le Christ était divisé.. A force de s'entendre répéter par le même clergé les mêmes discours "pour l'unité," par ce même clergé qui vient de diviser encore un peu plus l'Orthodoxie avec son quasi schisme aux USA, la foule qui n'est plus nourrie spirituellement finit par gober les fadaises. L'Esprit a été chassé au loin, ça aide.

Le poisson pourrit certes par la tête, mais il communique sa pourriture à l'ensemble. Et on n'a jamais vu une bonne pomme dans un panier de pommes pourries soudain réussir à purifier les mauvaises...
L'effort n'est jamais populaire. Le candidat proposant le chemin ascétique sera toujours mis de côté en faveur de celui proposant le chemin médiatique. Au bout du parcours, le gouffre. Mais en attendant, l'herbe semble si verte... Je croirai à autre chose les concernant le jour où je verrai une manifestation d'un million de Roumains exigeant qu'on fiche à la porte de l'Église les hiérarques concélébrant avec les hérétiques, pas avant. Heuu, j'avoue.. j'exagère .. de nouveau!

Ca doit être l'esprit de la fête, on va être une grande foule pour notre fête nationale, ça me met dans la joie

bonne et sainte journée à toutes et tous, en ce jour où nous fêtons aussi saint Antimond, Apôtre des Morins (Flandre côtière, 6ième siècle), et la moniale sainte Sévère (+ 660), soeur de saint Modoald de Trêves.

Publié : lun. 28 sept. 2009 22:33
par Claude le Liseur
Claude le Liseur a écrit :J’ai sous les yeux l’ouvrage « Fiecare în rândul cetei sale ». Pentru o teologie a neamului, éditions Christiana, Bucarest 2003, livre publié avec la bénédiction de Mgr Laurent, alors évêque de Caransebeş et aujourd’hui métropolite de Sibiu. L’éditeur des contributions qui constituent le livre, Răzvan Codrescu, écrit en quatrième de couverture :
« Cartea de faţă încearcă să ofere câteva repere solide cu privire la “interpretarea teologică a naţiunii” (D. Stăniloae). Am optat în subtitlu pentru sintagma “teologia neamului”, socodtind că acest cuvânt, deşi de origine maghiară, exprimă mai exact înlăuntrul limbii române statutul ontologic şi dimensiunea mistică a entităţii etnice sau nationale. »
Voilà, je trouve sous la plume d’un auteur roumain l’opposition entre naţiune et neam, mais si je la reprends dans une traduction française en jouant sur l'opposition entre nation et ethnie pour rendre le plus exactement possible les nuances du vocabulaire roumain, alors je suis un traducteur mensonger et un désinformateur!

(...)

Chose intéressante, je retrouve cette distinction à propos de l'idéologie de Sun Yat-sen (1866-1925), le père de la République chinoise:

«L'expression chinoise minzuzhuyi est souvent traduite par «nationalisme», mais cette traduction ne rend qu'approximativement son contenu. Min signifie «peuple, population», et zu «lignée, parenté, clan, race». C'est pourquoi il n'est pas très satisfaisant de traduire minzu par «nation», qui ne rend pas l'aspect de lien de sang ou racial. Or, cet aspect joue un grand rôle dans la doctrine de Sun. Certes le concept de nation remonte au latin nasci - naître -, mais son histoire montre, comme celle des nations elles-mêmes, que l'idée d'une communauté d'origine y est d'une importance secondaire, voire - comme dans le cas de la nation américaine - malvenue.
Sun essaie au contraire de fonder la nation chinoise de façon non historique sur des forces naturelles: la plus grande force naturelle qui conditionne le développement d'une race est la parenté de sang (xuetong), l'appartenance des Chinois à une race. Dans le cas de la Chine, race et nation sont, pour Sun, identiques.» (Werner Meissner [traduit de l'allemand en français par Geneviève Barman], «Le mouvement des idées politiques et l'influence de l'Occident», in Marie-Claire Bergère, Lucien Bianco et Jürgen Domes e.a., La Chine au XXe siècle. Tome I, d'une révolution à l'autre 1895-1949, Fayard, Paris 1989, p. 338.)

Je pense que c'est un intéressant résumé de la distinction entre nation et ethnie, entre communauté fondée sur l'acquis (l'histoire, le sang versé, les institutions..) et communauté fondée sur l'inné (la langue, le sang reçu...), entre différents types de nationalismes, résumé d'autant plus intéressant que le professeur Meissner écrit en allemand, langue qui connaît, avec Nation / Volk, un couple semblable à nation / ethnie, naţiune / neam, opposition que l'on doit sans doute retrouver dans bien d'autres langues (encore que le sens de Volk soit à géométrie variable et se soit bien affadi depuis 1945, pour des raisons bien compréhensibles).

Il est tout de même ahurissant que des francophones fassent semblant de ne pas comprendre ces distinctions, alors qu'il leur suffirait de se détourner quelques instants de leur omphaloscopie parisianiste pour découvrir qu'il existe pas trop loin de chez eux (mais c'est vrai que c'est à 500 kilomètres de Paris.. le bout du monde) un pays que l'on considérait il y a encore une vingtaine d'années comme un des plus vigoureusement nationalistes de toute l'Europe, alors qu'il est précisément constitué de plusieurs ethnies. Les Romands, bien qu'incontestablement de culture et d'ethnie françaises, n'ont jamais, à aucun moment dans leur histoire, éprouvé la tentation de se détacher de la nation suisse dans laquelle ils sont un élément minoritaire pour se rattacher à la nation voisine dans laquelle leur ethnie est majoritaire. Quant aux Alémaniques, quoiqu'incontestablement de culture et d'ethnie allemandes, leur hostilité à l'Allemagne est bien connue. Et, il y a encore peu, ces groupes dissemblables par la langue étaient soudés par un nationalisme très fort - aujourd'hui en voie de dissolution dans la grande soupe mondialiste.

M. Codrescu, que je citais plus haut, rappelle que le mot neam est d'origine magyare, contrairement à l'autre terme de la paire, qui est d'origine latine. Or, les Hongrois disent précisément que «la nation réside dans la langue»: nyelvében él a nemzet (le voilà, le mot à l'origine de neam!) (cf. Claude Hagège, Dictionnaire amoureux des langues, Plon / Odile Jacob, Paris 2009, p. 542). Voici donc un nationalisme à l'opposé du nationalisme suisse, puisqu'il est fondé en premier lieu sur la langue. Il n'en est pas moins respectable.


Il y a donc plus que des nuances entre nation et ethnie, de même qu'il y a plus que des nuances entre ethnie et tribu. C'est tout le but du décervelage mondialiste que de nous marteler une série d'équations nationalisme = ethnicisme = tribalisme = racisme, aucune des équations individuelles n'étant d'ailleurs valide.
A cet égard, c'est probablement la mauvaise foi et la volonté d'être dans le vent - «idéal de feuille morte», disait Gustave Thibon - plus que l'ignorance de la langue grecque (bien réelle, hélas!, volontaire et proprement barbare) qui expliquent pourquoi, voici quelques années, les porte-parole auto-proclamés de l'Orthodoxie en France s'obstinaient à raconter que l'Orthodoxie avait condamné le nationalisme... alors que le mot phylétisme - qui a été effectivement condamné - se traduit littéralement par tribalisme... et que le tribalisme n'est pas le nationalisme.

Mais il faut un sens de la nuance qui n'est plus de mise quand il s'agit de se faire bien voir, au risque de se perdre. A moins de mieux connaître la langue grecque que Monseigneur Hiérothée, métropolite de Naupacte, qui a écrit d'intéressantes pages sur le sujet?

Publié : mer. 30 sept. 2009 22:49
par Anne Geneviève
Innée, la langue ????? Le sang reçu, certes, mais la langue !

Publié : jeu. 01 oct. 2009 12:13
par Claude le Liseur
Anne Geneviève a écrit :Innée, la langue ????? Le sang reçu, certes, mais la langue !
Innée en ce sens qu'elle suppose la transmission au sein du foyer, la transmission des parents aux enfants. Un nationalisme fondé sur la langue est fondé sur la langue parlée au sein du foyer.

Publié : sam. 03 oct. 2009 21:17
par Anne Geneviève
Je parlerais en ce cas plutôt de tradition que d'innéité puisqu'il faut une transmission familiale et un apprentissage.

Au delà de cette réaction, je partage entièrement votre distinction entre ethnie et nation et je la crois essentielle à l'heure où les questions d'identité, de repères identitaires reviennent en force après qu'on ait voulu les nier à tout prix.