Question à propos d'une traduction en turc

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Claude le Liseur
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit :
Claude le Liseur a écrit :
Claude le Liseur a écrit :La librairie russe de ma ville m'a garanti l'arrivée du livre de Kontzevitch Оптина Пустынь и её время, où il y a des information sur Nicolas-le-Turc, pour la semaine prochaine. Je verrai d'abord ce qu'il y a à glaner dans ce livre.
Encore merci pour tout le souci que vous vous donnez.

Ce n'est que lundi que le livre de Kontzevitch est arrivé dans la librairie en question, et ce n'est qu'aujourd'hui (8 mai) que j'ai pu aller le chercher. Il s'agit d'une édition publiée à Optina (Fédération de Russie) en 2008 sur le texte de l'édition publiée à Jordanville (Etats-Unis d'Amérique) en 1970. Je vais enfin en savoir plus.

Kontzevitch parle bien de Nicolas le Turc - page 355 de l'édition de 2008 de son livre Оптина Пустынь и её время. Résumé suivra.

Suite du texte sur Nicolas le Turc ici: viewtopic.php?f=1&t=2484 .
Claude le Liseur
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit :
Aujourd'hui lycée + université. La seule université de langue française d'un pays riverain de la mer Noire, et la seule université de langue française au Moyen-Orient en dehors des six universités francophones du Liban (Université Saint-Joseph de Beyrouth; Université des technologies et des sciences appliquées franco-libanaise de Tripoli; Université libanaise de Beyrouth; Université La Sagesse de Beyrouth; Université libano-canadienne de Kesrouan; Université du Saint-Esprit de Kaslik).

J'oubliais l'Université française en Arménie, à Erevan, l'Université antonine de Baabda, au Liban, l'Université française en Egypte, au Caire, et l'Université Senghor à Alexandrie. Cela fait tout de même encore onze universités de langue française au Moyen-Orient (sept au Liban, deux en Egypte, une en Turquie, une en Arménie).

Feu le chah Mohammed Reza d'Iran avait caressé le projet de doter son pays d'une université francophone et d'une université germanophone, projet curieusement (!) abandonné après que les Anglo-Saxons l'ont remplacé par la république dite islamique.
Claude le Liseur
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Claude le Liseur »

adam a écrit :
Et j'ajouterai à titre personnel, que j'ai découvert également, qu'à deux heures de voiture de la région d'origine de mes parents, qui par ailleurs se trouve être la province d'origine de mes arrières arrières grands parents du côté maternel, existe un monastère aujourd'hui laissé quasiment à l'abandon...

http://fr.wikipedia.org/wiki/Monast%C3%A8re_de_Sumela

Le site orthodoxie.com nous apprend que les autorités turques viennnent de donner leur accord formel à la célébration d'une liturgie à l'ancien monastère de Sümela pour la première fois depuis 1923; cette liturgie sera vraisemblablement célébrée le 15 août 2010:

http://www.orthodoxie.com/2010/06/une-l ... C3%A0.html

C'est une attitude logique de la part des autorités turques, puisque les personnes qui viendront assister à la liturgie sont des descendants des autochtones chrétiens liquidés entre 1914 et 1923 dans le Pont, donc des gens qui viendront en touristes depuis la Grèce et l'Amérique du Nord, qui apporteront des devises à la Turquie, etc.
Mais ce que le site orthodoxie.com ne signale pas, c'est qu'on peut trouver sur youtube les images d'une tentative de lire un acathiste à la Toute-Sainte devant l'ancien monastère lors d'un pélerinage de Pontiques le 15 août 2009:

http://www.youtube.com/watch?v=RY_p1PNX ... re=related

(document posté à d'autres adresses sur youtube avec commentaires en turc ou en grec)

Ce que je trouve délicieux sur ces images, c'est l'espèce de mégère aux cheveux teints en blond qui éteint un cierge et empêche la lecture de l'office au nom de la laïcité kémaliste.

Où l'on constatera une fois de plus que le gouvernement "islamiste" a permis un acte du culte chrétien que les "laïcs" interdisaient depuis 87 ans.
J-Gabriel
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par J-Gabriel »

Dans le message de Maksim au 24 février, à propos d’un de nos saints, j’ai particulièrement apprécié la formule de cette "salutation" : Qu'il ne nous prive pas de ses prières! elle est… si Orthodoxe !

Aussi voilà encore un autre blog en langue turc http://ortodokslugunsesi.blogspot.com/ qui semble plus actif que le premier cité au tout début de cette rubrique (attention, le chant part automatiquement).

Lié à ce site http://www.ortodoksluk.org/ en turc aussi.
Maksim
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Maksim »

Merci pour les adresses de blogs, J-Gabriel.
La formule de salutation est très belle, en effet, mais elle est de Anastasia, ma correspondante sur l'autre forum. J'avais traduit textuellement son post (le tout en italique).
Quoique... je termine aussi mes prières par une formule semblable, après avoir sollicité la compassion et l'intercession de la Toute Sainte : Peder Paissios, Kilisenin Mübarekleri, Dualarınızda bizleri de anın.* Et j'ajoute parfois : de temps en temps, même si nous n'en sommes pas dignes.

* Père Païssios, Bienheureux de l'Eglise, Citez nous aussi dans vos prières.
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit : Quand je disais qu'en termes français, je traduisais par jugement et arrêt, il faut garder à l'esprit que le français est à ma connaissance la langue judiciaire dans vingt-cinq États de la planète - ce qui rend encore plus risible la prétention du clergé de certaines juridictions orthodoxes de traiter notre langue comme si elle avait aussi peu d'importance dans le monde que le taki-taki ou le vougoul - avec encore plus de systèmes juridiques si l'on tient compte des États fédéraux parmi cette liste. (Par exemple, la Suisse a encore, jusqu'au 31 décembre de cette année, sept codes de procédure civile différents rédigés en français, et ce sans tenir compte des lois fédérales en la matière - à partir du 1er janvier 2011, il n'y aura plus qu'un seul code de procédure civile pour tout le pays. Ou encore, dans le cas du Canada, on a les tribunaux du Nouveau-Brunswick qui fonctionnent partiellement en français, mais en appliquant la Common Law - d'où l'existence du CICLEF - Centre international de Common Law en français - à l'université de Moncton - , et les tribunaux du Québec qui fonctionnent en français, mais en appliquant le Code civil du Québec.) Il est donc bien sûr très difficile de ramener le vocabulaire appliqué dans tant de pays différents à une définition unique et je ne suis pas sûr que ma définition vaille partout, mais je suppose qu'elle doit valoir dans la plupart des pays francophones. J'entendais donc par jugement une décision de justice qui peut faire l'objet d'un appel, et par arrêt une décision de justice qui ne peut faire l'objet que d'un pourvoi en cassation. Je découvre donc avec le plus grand intérêt que la Turquie connaît un système que je n'avais jamais vu ailleurs, où, si je comprends bien, la fonction de cour d'appel est exercée par chaque chambre de la cour de cassation, et la fonction de cour de cassation par les chambres réunies.

Au passage, le mot mahkemesi que vous m'indiquez doit sans doute être d'origine arabe: محكمة maḥkama(t) = tribunal.

Merci en tout cas pour toutes ces précisions.

Bien sûr, étant donné le bilinguisme déséquilibré qui caractérise le Canada, les tribunaux du Québec fonctionnent aussi en anglais. Dans un contexte de domination d'une ethnie sur une autre comme celui-ci, le fait que le français soit théoriquement la seule langue officielle du Québec depuis 1974 veut dire que le Québec est en réalité bilingue et le fait que le Nouveau-Brunswick soit théoriquement bilingue depuis 1969 veut dire qu'en réalité cette province tolère une minorité de langue française (ce qui n'est pas le cas des autres provinces anglaises du Canada). On est loin de la territorialité des langues de la Belgique ou de la Suisse.


Néanmoins, sur le plan judiciaire, le maintien du droit romano-germanique au Québec (coutume de Paris jusqu'en 1866, Code civil du Québec depuis 1866) est à peu près la seule promesse que les Anglo-Saxons aient toujours respectée depuis l'acte de Québec de 1774. Ce qui ne fut, bien sûr, pas le cas du bilinguisme au Manitoba, de l'absence de conscription obligatoire, du droit à l'autodétermination du Québec, etc., etc.
Maksim
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Maksim »

Je ne suis pas sûr d'être au bon chapitre... mais pourrais-je demander ici, si je peux traduire en turc "canon de prière" par "dua kural(lar)i"* ("règle(s) de prière")?

* avec un "i" sans point.
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Claude le Liseur
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Claude le Liseur »

Maksim a écrit :Je ne suis pas sûr d'être au bon chapitre... mais pourrais-je demander ici, si je peux traduire en turc "canon de prière" par "dua kural(lar)i"* ("règle(s) de prière")?

* avec un "i" sans point.

Oui, un canon, dans ce sens-là, c'est une règle.

En grec moderne, κανόνας = règle, κανόνικος = régulier, κανονικότιτα = régularité; certes, cela veut aussi dire canon, canonique et canonicité, selon les cas; mais, dans l'exemple que vous citez, c'est bien une règle.

θα σε κανονίσω = je vais te régler ton compte!
Maksim
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Maksim »

Merci infiniment, Claude.
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit :
Maksim a écrit :D'après wikipedia, il ya une idée d'absolutisme dans "hükümdar"... quoique... :

"Hükümdar
Vikipedi, özgür ansiklopedi :

"Hükümdar, bir ülkede mutlak otorite sahibi yönetici. Hükümdarlar, imparator, padişah, kral, han, hakan, şah gibi unvanlara sahip olurlar. Yunanca kökenli monark sözcüğü de genellikle hükümdar ile eş anlamlı olarak kullanılır."

C'est une liste assez passionnante de mots turcs plus ou moins synonymes et d'origine fort diverses: hükümdarlar d'origine arabe d'après les étymologies qu'Adam et vous-même nous avez données, imparator d'origine latine, padişah et şah d'origine persane, han d'origine turco-mongole, et kral d'origine germanique via le serbe.

En effet, en serbe kralj / краљ (le serbe est la seule langue d'Europe à s'écrire indifféremment avec deux alphabets) veut dire «roi »- c'était par exemple le titre porté par les rois de Yougoslavie. Marko Kraljević, le héros de nombreuses épopées serbes - et aussi d'une des Nouvelles orientales de Marguerite Yourcenar - est donc «Marc, fils de roi».
- Au Mont Athos, interrompit l'ingénieur. Les os gigantesques de Marko Kraliévitch reposent quelque part dans cette Sainte Montagne où rien ne change depuis le Moyen Âge, sauf peut-être la qualité des âmes, et où six mille moines ornés de chignons et de barbes flottantes prient encore aujourd'hui pour le salut de leurs pieux protecteurs, les princes de Trébizonde, dont la race est sans doute éteinte depuis des siècles. Qu'il est reposant de penser que l'oubli est moins prompt, moins total qu'on ne suppose, et qu'il y a encore un endroit au monde où une dynastie du temps des Croisades se survit dans les prières de quelques vieux prêtres! (...) (Marguerite Yourcenar, «Le Sourire de Marko», in Œuvres romanesques, La Pléiade, Gallimard, Paris 1990 [1re édition dans la collection Paris 1982; 1re édition du texte Paris 1963], p. 1155.)
Il est plus que probable que c'est par la voie du serbe que le mot est arrivé en turc où il a donné kral.

Mais le mot n'est pas slave. C'est le russe qui va nous mettre sur la voie: dans cette langue apparentée au serbe, roi se dit король - prononcé karolj avec accent tonique sur la deuxième syllabe et mouillure de la consonne finale.

Il s'agit bien sûr d'une déformation du nom latin de Charlemagne: Karolus Magnus - Karl der Große en allemand. (J'ignore complètement comment cela pouvait se dire en francique.) Autrement dit, Charles le Grand. (Bien, que du point de vue de la foi, il eût plutôt été Charles le Petit.) Le prénom Karl (français Charles, italien Carlo) correspondant à l'idée de virilité; cf. en allemand Kerl = gars.

Fait peu connu, on trouve le mot turc kral , transcrit phonétiquement crall , sous la plume d'un des plus grands écrivains de langue française:

Dès que le sultan approcha, on voulut faire retirer Villelongue; il se jeta à genoux, et se débattit entre les mains des janissaires : son bonnet tomba; de grands cheveux qu'il portait le firent reconnaître pour un Franc; il reçut plusieurs coups et fut très maltraité. Le Grand-Seigneur, qui était déjà proche, entendit ce tumulte, et en demanda la cause. Villelongue lui cria de toutes ses forces: amman! amman! miséricorde! en tirant la lettre de son sein. Le sultan commanda qu'on le laissât approcher; Villelongue court à lui dans le moment, embrasse son étrier, et lui présente l'écrit en lui disant: Sued crall dan, «c'est le roi de Suède qui te le donne». Le sultan mit la lettre dans son sein, et continua son chemin vers la mosquée. Cependant on s'assure de Villelongue et on le conduit en prison dans les bâtiments extérieurs du sérail.

(Voltaire [1694-1778], Histoire de Charles XII, in Œuvres historiques, La Pléiade, Gallimard, Paris 1987, p. 228 [1re édition 1731])
Les faits décrits se déroulèrent l'an 1713.
Maksim
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Maksim »

"[...]hükümdarlar d'origine arabe d'après les étymologies qu'Adam et vous-même nous avez données, [...]"

Pour être plus exact, je tends à penser que "hükümdar" est un mot composé d'un radical (hük-ü-m) arabe est d'un suffixe (dar) persan.
Dès que j'en aurai confirmation, je signalerai.
Avec espérance et humilité...
Claude le Liseur
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Claude le Liseur »

Un livre très intéressant qui vient de paraître sur un peuple turc de tradition chrétienne orthodoxe:

Güllü Karanfil

Parlons gagaouze

L'Harmattan, Paris 2010, 122 pages

Contrairement à une opinion répandue, il ne s'agit pas du seul peuple turcophone où l'Orthodoxie soit la religion dominante ou du moins officiellement la mieux implantée: c'est aussi le cas des Yakoutes (Iakoutes) ou Sakha (où la religion officieuse est le chamanisme, bien que la première liturgie en langue iakoute eût été célébrée dès 1859 ...), des Khakasses et surtout des Tchouvaches (qui, dans l'ensemble, passent pour avoir manifesté un attachement plus grand à l'Orthodoxie que la majorité des peuples de l'ancienne Union soviétique - il y eut même un évêque tchouvache vieux-calendériste consacré à Boston, Massachusetts, par les paléohimérologites grecs !).

Néanmoins, les Gagaouzes sont les seuls Oghuz (même groupe que les locuteurs du turc de Turquie) à être de tradition orthodoxe depuis la quasi-disparition du groupe des Karamanlis, expulsé vers la Grèce en 1924 et depuis assimilé linguistiquement. (J'ai évoqué à plusieurs reprises les Karamanlis sur le présent forum.) Selon Madame Karanfil, ils seraient près de 200'000, dont plus de 134'000 en république de Moldavie (où ils jouissent de l'autonomie depuis 1995), 40'000 en Ukraine, 12'000 en Bulgarie, près de 14'000 répartis entre la Roumanie, la Turquie, le Kazakhstan et l'Azerbaïdjan. Selon Madame Karanfil, à l'heure actuelle, la liturgie orthodoxe, dans les paroisses situées dans le territoire autonome gagaouze de la république de Moldavie, ne serait plus célébrée en slavon, mais en turc gagaouze. L'information demande à être vérifiée. Si elle est confirmée, elle viendrait corroborer d'autres échos qui me sont parvenus selon lesquels le patriarcat de Moscou tournerait maintenant le dos à la politique de russification menée auparavant et renouerait avec la pratique de l'Eglise orthodoxe russe antérieure à la soviétisation, à savoir la célébration dans les langues autochtones; j'ai ainsi lu par ailleurs que, depuis 2010, la liturgie serait célébrée en ossète, et non plus en slavon, dans les paroisses de la république d'Ossétie du Nord-Alanie de la fédération de Russie. Si cette autre information était corroborée, il s'agirait à la fois de l'utilisation d'une langue iranienne dans la liturgie orthodoxe (honneur dont n'a jamais, à ma connaissance, bénéficié le persan...) et d'un hommage mérité rendu aux authentiques descendants des Alains et, par là même, des anciens peuples nomades iranophones de la steppe.

En ce qui concerne les chiffres donnés par Madame Karanfil: si les Gagaouzes ont émigré dans la même proportion que les autres Moldaves et vers les mêmes pays, il doit alors y en avoir bien plus en Italie qu'en Bulgarie...
Claude le Liseur
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit :Un livre très intéressant qui vient de paraître sur un peuple turc de tradition chrétienne orthodoxe:

Güllü Karanfil

Parlons gagaouze

L'Harmattan, Paris 2010, 122 pages

Contrairement à une opinion répandue, il ne s'agit pas du seul peuple turcophone où l'Orthodoxie soit la religion dominante ou du moins officiellement la mieux implantée: c'est aussi le cas des Yakoutes (Iakoutes) ou Sakha (où la religion officieuse est le chamanisme, bien que la première liturgie en langue iakoute eût été célébrée dès 1859 ...), des Khakasses et surtout des Tchouvaches (qui, dans l'ensemble, passent pour avoir manifesté un attachement plus grand à l'Orthodoxie que la majorité des peuples de l'ancienne Union soviétique - il y eut même un évêque tchouvache vieux-calendériste consacré à Boston, Massachusetts, par les paléohimérologites grecs !).

Néanmoins, les Gagaouzes sont les seuls Oghuz (même groupe que les locuteurs du turc de Turquie) à être de tradition orthodoxe depuis la quasi-disparition du groupe des Karamanlis, expulsé vers la Grèce en 1924 et depuis assimilé linguistiquement. (J'ai évoqué à plusieurs reprises les Karamanlis sur le présent forum.) Selon Madame Karanfil, ils seraient près de 200'000, dont plus de 134'000 en république de Moldavie (où ils jouissent de l'autonomie depuis 1995), 40'000 en Ukraine, 12'000 en Bulgarie, près de 14'000 répartis entre la Roumanie, la Turquie, le Kazakhstan et l'Azerbaïdjan. Selon Madame Karanfil, à l'heure actuelle, la liturgie orthodoxe, dans les paroisses situées dans le territoire autonome gagaouze de la république de Moldavie, ne serait plus célébrée en slavon, mais en turc gagaouze. L'information demande à être vérifiée. Si elle est confirmée, elle viendrait corroborer d'autres échos qui me sont parvenus selon lesquels le patriarcat de Moscou tournerait maintenant le dos à la politique de russification menée auparavant et renouerait avec la pratique de l'Eglise orthodoxe russe antérieure à la soviétisation, à savoir la célébration dans les langues autochtones; j'ai ainsi lu par ailleurs que, depuis 2010, la liturgie serait célébrée en ossète, et non plus en slavon, dans les paroisses de la république d'Ossétie du Nord-Alanie de la fédération de Russie. Si cette autre information était corroborée, il s'agirait à la fois de l'utilisation d'une langue iranienne dans la liturgie orthodoxe (honneur dont n'a jamais, à ma connaissance, bénéficié le persan...) et d'un hommage mérité rendu aux authentiques descendants des Alains et, par là même, des anciens peuples nomades iranophones de la steppe.

En ce qui concerne les chiffres donnés par Madame Karanfil: si les Gagaouzes ont émigré dans la même proportion que les autres Moldaves et vers les mêmes pays, il doit alors y en avoir bien plus en Italie qu'en Bulgarie...

Le célèbre site du professeur Jacques Leclerc de l'université Laval de Québec L'aménagement linguistique dans le monde http://www.tlfq.ulaval.ca/AXL/EtatsNsou ... aouzie.htm donne le chiffre de 198'000 Gagaouzes, dont 172'500 en Moldavie (dont 135'757 dans le territoire autonome gagaouze où Madame Karanfil les évalue à 133'477), 12'000 en Bulgarie et 13'500 répartis entre Roumanie, Ukraine, Russie, Kazakhstan et Turquie.
Ceci étant, il n'a pas coordonné toutes ses informations (ce qui est compréhensible pour un site aussi riche), puisqu'ailleurs, il écrit qu'il y a 31'900 Gagouzes en Ukraine (ici: http://www.tlfq.ulaval.ca/AXL/europe/ukraine-1demo.htm ).
Maksim
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Maksim »

Entre parenthèses, j'ai reçu la confirmation : dans "hükümdar", "hük(ü)m" est le radical arabe et "dar", le suffixe persan.
Et un mot admirable du vocabulaire des Karamanlis : Validetullah (Théotoque).
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Re: Question à propos d'une traduction en turc

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit :
Le blog antiochien francophone que j'ai cité renvoyait au communiqué publié en arabe sur le site Internet de la métropole orthodoxe d'Alep http://www.alepporthodox.org/modules/ne ... ews_id=655 .

On constate que, dans le texte arabe, le nom du prêtre-traducteur de Mersin a été transcrit اسبيرو تيمور Sbirou Teymour. La langue arabe (contrairement au persan) ne connaissant pas le p, les traducteurs français ont très justement rétabli un -p à la place du -b et écrit Spirou Teymour. La providentielle source turque que j'ai trouvée sur Internet nous permet de savoir que le nom de ce prêtre, en caractères latins, est toutefois Ispir Teymur. Souhaitons une longue vie à ce prêtre traducteur qui officie à l'église Saint-Michel-Archange de Mersin, fondée en 1852.
Puisque nous parlons de prêtres orthodoxes qui se sont consacrés à traduire les textes liturgiques orthodoxes (ou au moins les prières) dans une langue turque, Madame Güllu Karanfil, dans son Parlons gagouze (L'Harmattan, Paris 2010), p. 49, indique que le Ispir Teymur des Gagaouzes fut le prêtre Mikhaïl Tchakir (1861-1938), qui traduisit et édita des textes religieux en gagaouze. Elle nous apprend aussi que le premier texte traduit en gagaouze par le RP Tchakir fut l'évangile (publié en 1907 en caractères slavons), suivi d'un livre de prières (en 1908), puis du psautier (publié en 1936 en caractères latins, la Bessarabie ayant été rattachée à la Roumanie en 1918). L'évangile traduit en gagaouze par le RP Tchakir fut le premier ouvrage jamais publié en gagaouze (op. cit., p. 57).

Soit dit en passant, ce nom de Tchakir me semble être une translittération à la française d'un nom orthographié Чакир en cyrillique (utilisé pour écrire le gagaouze jusqu'en 1996, date à laquelle il fut remplacé par l'alphabet latin). Or, en lisant ce nom à haute voix, je me suis rendu compte que la translittération à la roumaine serait Ciachir. Il y a en Roumanie, à l'heure actuelle, un essayiste nommé Dan Ciachir qui écrit des choses intéressantes sur l'Orthodoxie. Je me demande maintenant si son nom de famille n'est pas d'origine gagaouze (comme le nom de famille Comăneci dénote une lointaine origine kiptchak, autre peuple turcophone marqué par l'Orthodoxie).
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