Raphael a écrit : ↑ven. 11 mars 2011 7:18
Savez-vous ce que dit l'église orthodoxe de l'IMG (interruption médicale de grossesse) ?
J'ai en mémoire un couple d'amis à moi, attendant un enfant et le désirant plus que tout. Puis, à la première échographie, on diagnostique une anencéphalie. La grossesse a peu de chances d'arriver à terme, et si elle y parvient, le bébé mourra à sa naissance. Les médecins les ont orientés vers une IMG, disant que l'accouchement pourrait être dangereux pour la maman. Le traumatisme a été important pour eux.
Je sais que le pape ne fait aucune différence entre ce genre de cas et un avortement. Personnellement, il me semble pourtant qu'il y en a une.
Y-a-t-il des textes concernant la position de l'église orthodoxe là-dessus?
Peut-être dans certains des ouvrages cités plus haut par Claude?
Vous savez, c'est toujours difficile de répondre de but en blanc à ce genre de questions, car si l'Eglise orthodoxe a des dogmes et une tradition, elle n'a pas de magistère infailliblement erroné dont les décisions successives et contradictoires aggravent des situations déjà insupportables.
Je pense que ce que la plupart des orthodoxes diront, par rapport au cas que vous avez cité, c'est qu'il n'y a pas de faute lorsque la vie de la mère est en danger. Non pas parce que la vie de la mère est intrinsèquement supérieure à la vie du fœtus, mais parce que la famille ne peut pas exister sans la mère.
Ensuite, même si la vie de la mère n'était pas en danger, je crois que, s'agissant d'une anencéphalie, il y a un autre critère de choix qui intervient que le critère moral. Je ne suis pas médecin, mais, à ma connaissance, la grande majorité des enfants anencéphales mourront à la naissance, et une petite minorité parviendra à vivre quelques jours. Je ne pense pas que, si 5% des parents qui apprennent ce diagnostic choisissent de poursuivre jusqu'à son terme une grossesse qui s'achèvera par la naissance d'un enfant condamné à mourir en quelques jours, ce soit forcément pour des raisons morales ou religieuses (dans ce cas, joue certes la possibilité de faire baptiser - ou chez nous, en cas de danger de mort, de baptiser soi-même - le bébé pendant les quelques minutes ou quelques heures qu'il passera dans ce monde). Il y a aussi, par rapport à la souffrance extrême que représente pour des parents l'avortement de leur enfant, la possibilité de prendre dans leurs bras et de parler à leur bébé, même s'ils le savent condamné. Il semblerait que, dans la plupart des pays d'Europe occidentale, le corps médical soit organisé en conséquence et qu'il y ait des soins palliatifs pour nourrissons, en sachant que c'est aussi très dur pour une sage-femme ou un médecin d'aider à mettre au monde un enfant qui ne peut vivre.
Je pense que la religion ou la morale ne jouent pas un grand rôle dans une telle décision. Je pense que le critère déterminant, c'est que ce n'est pas la même chose pour la plupart des parents d'avoir embrassé un bébé vivant, même s'il n'a vécu que quelques minutes ou quelques heures, que d'avoir assisté à la naissance d'un fœtus déjà mort.
Vous voyez comme c'est difficile de répondre. D'un côté, je dirais que le critère déterminant, dans un cas comme celui que vous avez évoqué, doit être la santé de la mère. D'un autre côté, il est possible que vos amis aient été plus traumatisés par l'AMG qu'ils l'auraient été par la naissance d'un bébé mort au bout de quelques minutes.
Il s'ajoute aussi la complication juridique que si certains pays - comme la France depuis un arrêt de la Cour de cassation de 2008 - autorisent l'inscription sur le livret de famille du fœtus né mort (ce qui me semble être le cas du fœtus dans le cas de l'AMG), d'autres pays, comme la Suisse, maintiennent la distinction entre le fœtus né mort et l'enfant viable mort-né (critère des 22 semaines et des 500 grammes adopté par l'OMS en 1977) et n'autorisent l'enregistrement à l'état-civil que pour l'enfant viable mort-né. Toutefois, à ma connaissance, les cantons francophones (à tout le moins Genève, Vaud et le Jura) délivrent des permis d'inhumer pour des petits êtres qui n'ont pas existé aux yeux de la législation fédérale, et le Conseil fédéral a annoncé un changement de législation (à cet égard, cf. l'interpellation parlementaire de la conseillère nationale Rosmari Quadranti du 11 décembre 2012
https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb ... d=20124090 , la réponse du Conseil fédéral du 22 mars 2013, annonçant qu'il ne ferait rien, et le rapport du Conseil fédéral du 3 mars 2017
https://www.parlament.ch/centers/eparl/ ... BR%20F.pdf annonçant un virage à 180 degrés et proposant que les enfants nés sans vie soient enregistrés à l'état civil comme les enfants morts nés.