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Statistiques religieuses roumaines 1992-2011

Publié : lun. 17 août 2015 16:00
par Claude le Liseur
Sur Internet, une très intéressante brochure de l'institut statistique de Roumanie sur l'évolution de l'appartenance religieuse à travers les trois recensements menés à bien depuis la chute du communisme: 1992, 2002 et 2011, et un bref rappel du recensement de 1930, le dernier avant l'instauration du régime communiste :

http://www.insse.ro/cms/files/publicati ... igie_n.pdf

D'emblée, il faut rappeler que ces recensements laissent apparaître un déclin démographique important, dû à la dénatalité et surtout à une émigration très forte: on se doute bien que s'il y a un million de Roumains en Italie, c'est qu'ils ne sont plus en Roumanie...

La population dans son ensemble est ainsi passée de 22 à 20 millions en une vingtaine d'années.

Ce qui est plus intéressant que la valeur absolue (nombre de fidèles par religion), c'est le pourcentage de chaque religion dans la composition de la population.
Lorsque ces religions sont en fait l'expression de minorités ethniques déjà affaiblies par un processus d'émigration qui remonte à la fin de la deuxième Guerre mondiale, les pourcentages ne sont guère significatifs: que l'Eglise apostolique arménienne soit passée de 10'005 fidèles en 1930 à 393 en 2011, que l'Eglise de la Confession d'Augsbourg soit passée de 398'759 fidèles en 1930 à 20'168 en 2011 ou le judaïsme (cult mozaic) de 756'930 fidèles en 1930 à 3'519 en 2011 ne fait que nous rappeler ce que nous savons déjà, à savoir que les Arméniens, les Allemands et les Juifs de Roumanie sont presque tous partis. Communautés ayant des points de chute dans le monde capitaliste (RFA pour les Allemands; Israël pour les Juifs; USA, France, Canada et Grèce pour les Arméniens), elles sont parties dès qu'elles l'ont pu, et même souvent avant la chute du communisme; même en URSS, les Arméniens, les Grecs et les Juifs avaient commencé à partir avant la chute du communisme et les Allemands l'ont fait en masse après la fin de l'Union soviétique.
En revanche, les pourcentages sont très significatifs lorsqu'ils s'agit d'autres ethnies, celles qui n'ont pas de terre d'asile dans des pays pour le moment plus prospères, celles qui paraissent destinées à rester: Magyars, Tziganes, Tatars, Turcs, Serbes, Ukrainiens et bien entendu Roumains. Dans ce contexte - qui reste celui d'un déclin démographique, mais pas d'une débandade comme pour les Allemands, les Arméniens et les Juifs -, l'évolution des pourcentages entre 1992 et 2011 est intéressante, car elle répond à une question importante. Dans quelle mesure des religions enracinées dans le pays et qui ne peuvent pas compter sur un soutien matériel extérieur (réformés et unitariens magyars et surtout et bien entendu orthodoxes roumains, serbes et ukrainiens) parviennent-elles à résister au prosélytisme uniate et néo-protestant aux moyens financiers et matériels quasi-illimités (soutien financier du Vatican et de la RFA pour les uniates, des USA pour les néo-protestants)?
Les résultats sur la période 1992-2011 sont assez surprenants en ce sens que l'on constate que certaines offensives prosélytes réussissent mieux que d'autres.
En effet, si on additionne les différentes rubriques qui correspondent aux orthodoxes ("orthodoxe", "vieux-croyant" et "orthodoxe serbe"), on ne constate qu'un léger déclin, de 86,93% en 1992 à 86,7% en 2011, soit une recul de 0,26% en proportion. Dans l'ensemble, malgré le peu de moyens financiers et une certaine timidité face au prosélytisme uniate et néo-protestant, les orthodoxes restent donc attachés à leur religion.
D'une manière inattendue, les catholiques romains reculent plus, de 5,09% à 4,62%, soit une baisse de 9,23% en proportion. La baisse est comparable chez les réformés, qui passent de 3,52% à 3,19% (baisse de 9,37% en proportion), mais ce n'est pas une surprise, car on peut penser que les protestants historiques étaient, plus que d'autres, susceptibles de rejoindre les néo-protestants.
Comme attendu, les néo-protestants progressent: les pentecôtistes passent de 0,97% à 1,92% (hausse de 97,94%, soit un quasi-doublement en proportion), les baptistes de 0,48% à 0,6% (hausse de 25%), les adventistes du septième Jour de 0,34% à 0,43% (hausse de 10,26%), les Témoins de Jéhovah (non recensés en 1992) à 0,26%. La progression est impressionnante, mais si la Roumanie apparaît comme une terre d'élection des groupes néo-protestants en Europe, l'ensemble ne dépasse pas 3,21% de la population, mettons 3,5% au maximum. On est donc (encore?) loin de la situation de la plupart des pays d'Amérique latine avec leurs 20, 30 ou 35% de pentecôtistes. Et certains groupes, comme les baptistes, semblent avoir fait le plein.
La plus grande surprise vient de l'échec du prosélytisme uniate: les uniates, qui représentaient 0,98% de la population en 1992, ne sont plus que 0,80% en 2011, soit une baisse de 18,37%, pratiquement le double de celle de leurs frères de rit romain. Malgré l'argent et la désinformation (qui ne se souvient des grosses campagnes menées en faveur des uniates dans les pays francophones au début des années 1990 et qui ressuscitaient le "cirque oriental" du début du XXe siècle?), l'offensive uniate semble s'être heurtée aux réalités du terrain. On notera d'ailleurs que la "nouvelle évangélisation" à la Jean-Paul II aura surtout fait passer le catholicisme de 6,07% de la population roumaine en 1992 à 5,42% en 2011- ce qui n'est finalement pas si mal: en République tchèque, ladite "nouvelle évangélisation" s'est traduite par une baisse de la population catholique romaine de 39% en 1991 à 10,3% en 2011. Conclusion: il y a quand même une morale; dans des pays traumatisés par le communisme et qui apparaissaient comme des proies faciles (pauvreté, crise économique, problèmes sociaux), le Vatican aurait mieux fait de consacrer ses moyens financiers à s'occuper de ses ouailles plutôt qu'à tenter de porter un coup mortel à l'Eglise orthodoxe.

Re: Statistiques religieuses roumaines 1992-2011

Publié : sam. 03 oct. 2015 17:41
par FABRE
a propos de statistiques, le patriarchat de Roumanie a demandé à toute Ses paroisses en France de lui donner des statistiques il y a quelques trois mois de cela; je pyuis d'ores et déjà dire qu'elles seront entièrement fausses quand par exemple là où je suis ou étais...en une paroisse roumaine donc, par exemple pour Pâque ils notent plusieurs centaines de personnes ! or si au début des Vigiles Pascales il y aurait eu environ 80 à 110 personnes, à pein arrivé au tiers des Vigiles quand le prêtre eut béni des " nourritures festives privées ", il n'en restait plus qu'une quarantaine et à la fin des vigiles une trentaine ce qui n'empêche" pas la paroisse de déclarer plusieurs centaines au moins 200 personnes ! bof ! pareil partout !

Re: Statistiques religieuses roumaines 1992-2011

Publié : mar. 20 oct. 2015 16:45
par Claude le Liseur
FABRE a écrit :a propos de statistiques, le patriarchat de Roumanie a demandé à toute Ses paroisses en France de lui donner des statistiques il y a quelques trois mois de cela; je pyuis d'ores et déjà dire qu'elles seront entièrement fausses quand par exemple là où je suis ou étais...en une paroisse roumaine donc, par exemple pour Pâque ils notent plusieurs centaines de personnes ! or si au début des Vigiles Pascales il y aurait eu environ 80 à 110 personnes, à pein arrivé au tiers des Vigiles quand le prêtre eut béni des " nourritures festives privées ", il n'en restait plus qu'une quarantaine et à la fin des vigiles une trentaine ce qui n'empêche" pas la paroisse de déclarer plusieurs centaines au moins 200 personnes ! bof ! pareil partout !
Ceci étant, il me semble bien que c'est la Métropole orthodoxe roumaine d'Europe occidentale qui a donné les chiffres les plus réalistes sur le nombre de ses fidèles en France. Il faudrait que je retrouve le document, mais, dans mon souvenir, le métropolite Joseph avait indiqué un effectif de moins de 3'000 pratiquants en se basant sur les statistiques des paroisses.

En revanche, on sait très bien que d'autres diocèses ont fait l'objet de surestimations statistiques surprenantes. Ainsi, l'Orthodox Church in America s'est longtemps vu attribuer un million de fidèles aux Etats-Unis, avant que le travail sérieux du statisticien Alexey Krindatch n'aboutisse à une estimation plus réaliste de 100'000 fidèles. Le RP Roberti, dans Être orthodoxe en France aujourd'hui, attribuait 140'000 fidèles en France à l'archevêché de la rue Daru, qui n'en a que 10'000 dans toute l'Europe occidentale, la France devant représenter quelque 70% de ce total. (Si l'archevêché de la rue Daru est bien présent en Scandinavie ou au Bénélux - c'est par exemple aux paroisses dépendant de la rue Daru que l'on doit les premières célébrations orthodoxes en norvégien -, il est absent en Suisse et sa présence en Allemagne et en Italie se limite à quelques paroisses.) Il me semble que, dans les deux cas mentionnés, ce sont les communautés d'expression grecque qui sont les plus nombreuses. (Aux USA, selon Krindatch, l'archevêché d'origine grecque -dont, bien sûr, tous les fidèles ne sont pas hellènes ou d'origine hellène - représente tout de même 60% des orthodoxes http://hirr.hartsem.edu/research/TenFac ... tterns.pdf .) Je suppose que cette réalité ne plaisait pas à tout le monde en raison de la sociologie moins "intellectuelle" de ces diocèses.

Ceci étant, la question qui se pose dans des pays comme la France ou les Etats-Unis, qui ne posent pas la question de l'appartenance confessionnelle lors des recensements, est celle de la distinction entre baptisé et pratiquant. Les statistiques religieuses roumaines que j'ai données plus haut donnent une appartenance, pas une pratique. Des statistiques comme celles de Krindatch donnent une pratique, pas une appartenance. Il y a donc sans doute plus d'orthodoxes aux Etats-Unis que les 800'000 recensés par Krindatch. Si on appliquait les critères de Krindatch à d'autres confessions, il n'y aurait sans doute pas 70 millions de catholiques romains aux Etats-Unis, mais moins de 20 millions. Si les recensements confessionnels pratiqués dans certains pays (Canada, Roumanie, Suisse jusqu'en 2000) surestiment les effectifs de chaque groupe religieux parce que des personnes qui n'ont plus aucune pratique vont continuer à répondre qu'elles appartiennent à la religion dans laquelle elles ont été baptisées, la méthode de Krindatch sous-estime ces mêmes effectifs parce qu'en se basant sur les statistiques des paroisses, on perd de vue des personnes qui sont parfois loin d'avoir rompu avec l'Eglise (pratiquants irréguliers, personnes isolées, fidèles disséminés, familles où l'on va à la liturgie à tour de rôle, etc.).

Re: Statistiques religieuses roumaines 1992-2011

Publié : mer. 21 oct. 2015 13:50
par FABRE
Ceci dit, je ne puis renier ce que je constatais moi-même et, de même qu'il est évident que Monseigneur Joseph n'est pas venu compter lui-même et que ces chiffres sont transmis par les paroisses ce qui ne garantit rien .