Ukraine: de la vérité des chiffres
Publié : mar. 13 nov. 2018 20:45
A l'heure où le patriarcat de Moscou a pris la très grave décision de ne plus entretenir de relations liturgiques avec le patriarcat de Constantinople suite à l'intervention de celui-ci pour résoudre la crise ecclésiastique qui perdure en Ukraine - non depuis 1990, mais depuis 1918, voire depuis 1686, date de la soustraction d'obédience contraire aux promesses que la Russie avait faites aux Cosaques zaporogues, je voudrais rappeler certains chiffres que j'ai donnés sur le présent forum il y a de très nombreuses années de cela.
Ainsi,je crois avoir été un des premiers, en terre francophone,et ce dès 2004, à avoir expliqué que les deux juridictions "schismatiques" ukrainiennes avaient en fait plus de fidèles que l'Eglise autonome d'Ukraine du patriarcat de Moscou, la seule avec laquelle les autres Eglises locales ont entretenu des relations jusqu'en 2018. Ce message date du 18 avril 2004, sur le présent forum (
viewtopic.php?f=1&t=502&p=2664 ).
Quelques mois plus tard, le 25 janvier 2005, j'écrivais ici viewtopic.php?f=1&t=1139 :
J'ai écrit dès 2004 qu'il y avait en Ukraine pratiquement deux fois plus de fidèles dans les deux partis autocéphalistes (11,5 millions) que dans l'Eglise considérée comme canonique (6 millions). Il est donc faux, comme l'ont écrit beaucoup de media francophones, que les fidèles aient basculé vers le patriarcat de Kiev et l'Eglise autocéphale en 2014 suite à la crise du Donbass et de la Crimée, et à la dégradation inimaginable des relations entre l'Ukraine et la Russie. Un ami russe établi en Suisse m'a un jour de 2016 fait une comparaison éloquente: "aussi absurde que si les cantons de Vaud et du Valais se déclaraient la guerre" , et c'est vrai qu'il est tragique que deux pays qui avaient tant de liens en arrivent à une telle rupture.
Il est probable que la situation de l'Eglise orthodoxe d'Ukraine sous la juridiction du patriarcat de Moscou se soit certes dégradée depuis 2014, mais elle était déjà nettement minoritaire dix ans plus tôt.
Le métropolite Stéphane de Tallinn et de toute l'Estonie a sans doute en grande partie raison lorsqu'il affirme (réflexion publiée le 4 octobre 2018 sur orthodoxie.com, ici : https://orthodoxie.com/mgr-stephane-de- ... -lukraine/ ) que:
Selon Antoine Arjakovsky (in Colloque de la KEK – Chypre, 8-10 novembre 2017), les trois-quarts des 25 millions de chrétiens orthodoxes ukrainiens se trouvent actuellement sous la juridiction du Patriarcat de Kiev, dirigé par le patriarche Philarète. De plus, on estime que, sur le quart des fidèles restants (Patriarcat de Moscou sous la conduite du métropolite Onuphre et Église dite autocéphale sous la direction du métropolite Macaire), plus de 75% d’entre eux rejoindraient cette nouvelle structure ecclésiale de ce qui serait demain « l’Église orthodoxe autocéphale d’Ukraine ».
En effet, j'estimais en 2004 que les deux tiers des orthodoxes ukrainiens avaient déjà rompu avec le patriarcat de Moscou. La situation de l'Ukraine ayant évolué de la déplorable manière que nous connaissons, il n'y aurait rien d'étonnant à ce que cette proportion soit passée des deux tiers aux trois quarts, encore que je pense qu'il s'agisse du chiffre des fidèles des deux juridictions autocéphalistes ukrainiennes, et non du seul patriarcat de Kiev.
Par ailleurs, contrairement au professeur Arjakovsky et au métropolite Stéphane, je doute qu'il y ait 25 millions d'orthodoxes en Ukraine. Je pense plutôt que les chiffres ont baissé par rapport à mon estimation de 17 millions en 2004. Pas tant au profit des uniates, qui ne progressent plus guère, que des néo-protestants, dont l'Ukraine est le bastion en Europe, encore plus que le nord de la Roumanie. Je parle bien des néo-protestants. En Europe orientale comme en Amérique du Sud, les Eglises protestantes historiques sont en difficulté, car liées à un héritage culturel en perdition (luthériens = minorités allemandes, calvinistes = minorités magyares). En revanche, en Ukraine, pentecôtistes et baptistes enregistrent un très grand nombre de conversions.
On voit d'ailleurs mal comment l'Orthodoxie ukrainienne qui affiche ses divisions depuis 1990 pourrait résister de manière efficace au prosélytisme uniate, baptiste et pentecôtiste, et Monseigneur Stéphane n'a pas non plus tort de parler de l'absence de propositions et de perspective "susceptibles de mettre un terme aux divisions entre les juridictions orthodoxes locales et de résorber définitivement les schismes existants" (loc. cit.)
J'avais aussi expliqué, en 2005, que la situation ukrainienne était encore aggravée par la division des autocéphalistes entre le patriarcat de Kiev et l'Eglise autocéphale. Il n'est dès lors pas étonnant que le patriarcat de Constantinople soit d'abord intervenu pour pousser les deux factions à la réconciliation et qu'on parle désormais d'une union imminente entre le patriarcat de Kiev et l'Eglise autocéphale.
Qu'on le veuille ou non, l'intervention du patriarcat de Constantinople en Ukraine en 2018 était inscrite dans les statistiques que j'ai publiés en 2004 sur le présent forum. Dès le 18 avril 2004, j'avais indiqué, ici même, que les autocéphalistes ukrainiens avaient d'ores et déjà plus de fidèles que l'Eglise de Grèce, et j'écrivais " il faudra bien un jour que l'Eglise trouve une solution aux problèmes posés par le "patriarcat" de Kiev et l'Eglise de Macédoine, que l'on ne pourra pas toujours balayer d'un revers de main".
J'ai critiqué tant d'interventions malencontreuses du patriarcat de Constantinople au cours des trente dernières années que je ne peux que dire que celle-ci me paraissait inévitable. Ou il y aura en Ukraine une Eglise orthodoxe autocéphale, ou il y aura une Ukraine néo-protestante. Tertium non datur.
Evidemment, on ne pouvait laisser éternellement dans les limbes dix millions de baptisés orthodoxes, qui plus est représentant la communauté religieuse la plus importante d'un pays de la taille de l'Ukraine. Mais c'était l'évidence à condition d'être honnête et de regarder la vérité en face, ce qui n'est pas forcément le cas des débris tchékistes et guébistes mal convertis en défenseurs de la Troisième Rome qui m'ont couvert de boue pendant toutes ces années.
L'avenir est parfois prévisible pour peu que l'on regarde les vrais chiffres. C'est faute d'avoir su lire les résultats de ses propres recensements en 1846 et en 1856 que la France s'est lancée, en Algérie, dans une colonisation de peuplement vouée à l'échec; c'est faute d'avoir su lire les résultats des recensements effectués dans ses départements algériens que la même France n'a pas su préparer son désengagement (cf. notamment Guy Pervillé, "Le rôle de la colonisation de peuplement dans la politique de la France en Algérie et dans l’organisation de la colonie", communication au communication au colloque Colonies, territoires, sociétés, l’enjeu français, organisé à Montpellier les 4, 5 et 6 novembre 1991, accessible ici: http://guy.perville.free.fr/spip/articl ... rticle=105 ).
Mutatis mutandis, la comparaison n'est pas gratuite. Les empires morts ne ressusciteront pas, même pas sous la forme d'une domination ecclésiastique rejetée par la majorité des populations concernées, et il est préférable d'en prendre acte.
Presque partout dans leur immense empire, les Britanniques ont très vite compris que, parfois, pour rester, il vaut mieux partir. Les Français l'ont compris en Tunisie, au Maroc, à Madagascar et en Afrique noire; ils ne l'ont pas compris en Syrie, en Indochine et en Algérie. Il suffit de comparer les résultats six décennies plus tard.
"Que celui qui a des oreilles pour entendre entende!" (Mt XI, 15)
Ainsi,je crois avoir été un des premiers, en terre francophone,et ce dès 2004, à avoir expliqué que les deux juridictions "schismatiques" ukrainiennes avaient en fait plus de fidèles que l'Eglise autonome d'Ukraine du patriarcat de Moscou, la seule avec laquelle les autres Eglises locales ont entretenu des relations jusqu'en 2018. Ce message date du 18 avril 2004, sur le présent forum (
viewtopic.php?f=1&t=502&p=2664 ).
D'abord, sur le site des uniates ukrainiens www.risu.org.ua , une estimation des différentes confessions plus fine que la mienne et basée sur des sondages:
- 11,5 millions d'orthodoxes "autocéphalistes" (je pensais 7 millions)
- 6 millions d'orthodoxes dans la juridiction du patriarcat de Moscou (je pensais 13 millions: la différence énorme entre les deux estimations vient du fait que je me basais sur le nombre de paroisses qui est très à l'avantage de la juridiction du patriarcat de Moscou; en fait, il semblerait que les paroisses du patriarcat de Moscou en Ukraine soient plus petites que les paroisses des autocéphalistes ukrainiens)
- 4 millions d'uniates (chiffre équivalent à mon estimation; les uniates ne surévaluent pas leurs effectifs, ce qui semble plaider en faveur de l'honnêteté de leurs estimations)
- 500'000 catholiques-romains de rite latin (50% de moins que mon estimation)
- 2'500'000 fidèles d'autres religions (comme on sait qu'il y a quelque 500'000 juifs et 500'000 musulmans en Ukraine, cela veut dire qu'il doit s'agir essentiellement de protestants, et que le protestantisme ukrainien doit dépasser le million de fidèles - soit une taille déjà supérieure à celle du protestantisme français).
Enfin, je suis très sceptique quant aux 26% de la population qui répondent qu'ils sont orthodoxes, mais sans pouvoir dire s'ils appartiennent au patriarcat de Moscou ou à l'un des deux partis autocéphalistes. Ces 26% me semblent correspondre à une catégorie que nous connaissons en Suisse à travers les réponses des immigrants venus de pays ex-communistes à la question sur la confession lors du recensement fédéral: il s'agit des gens non-baptisés qui indiquent la dernière religion à laquelle a appartenu un membre de leur famille, par attachement culturel ou par peur de passer pour communiste. Je les compte donc avec les sans religion.
On aboutit ainsi à une population de l'Ukraine divisée entre 35% d'orthodoxes (et non 40% comme je le croyais), 9% de catholiques-romains (à 89% uniates de rite byzantin), 5% d'autres religions et 51% de sans religion.
Au total, cette enquête appelle trois remarques:
- le grand nombre des orthodoxes qui se trouvent dans la juridiction considérée comme non-canonique du "patriarcat" de Kiev (10 millions de baptisés - plus que l'Eglise de Grèce!): il faudra bien un jour que l'Eglise trouve une solution aux problèmes posés par le "patriarcat" de Kiev et l'Eglise de Macédoine, que l'on ne pourra pas toujours balayer d'un revers de main;
- les media occidentaux présentent l'Ukraine comme un pays catholique-romain, alors que les orthodoxes y sont près de quatre fois plus nombreux que les catholiques-romains;
- le taux de sans religion (51%) paraît très élevé en comparaison d'un pays comme la Suisse (19%), et c'est sans doute l'héritage du communisme, mais c'est aussi un leurre: si l'on prend la suite de l'estimation des uniates, les données sur la pratique religieuse indiquent que 17% des croyants ukrainiens, toutes confessions confondues, vont à l'église au moins une fois par mois, ce qui est une proportion très supérieure à celle des pays d'Europe occidentale, exception faite peut-être de l'Espagne, de l'Italie, du Portugal et de l'Irlande. Rapporté au pourcentage de chrétiens qui tourne autour de 46% de la population, cela veut dire qu'en fait près de 8% de la population totale vont à l'église au moins une fois par mois: des décennies de communisme n'ont donc pas réussi à ébranler la pratique religieuse en Ukraine. 8% de la population totale qui vont à l'église au moins une fois par an représentent à coup sûr une proportion bien supérieure à celle de la Suède, de la Norvège, du Danemark, de l'Allemagne, des Pays-Bas, de la Belgique, du Royaume-Uni, de la France, de la Suisse ou de l'Autriche, pays qui n'ont pas connu le communisme...
Quelques mois plus tard, le 25 janvier 2005, j'écrivais ici viewtopic.php?f=1&t=1139 :
J'avais fait mon devoir de dire la vérité, honnêtement, au service du Christ et de son Eglise, comme je l'ai sans cesse fait depuis 2003 sur le présent forum, ce qui m'a valu tant et tant d'insultes des adogmatiques, des marchands du Temple, des apologistes du tribalisme et des nostalgiques d'impérialismes à jamais condamnés.
Ce qui, pour le moment, bloque toute perspective de solution en Ukraine, c'est que les autocéphalistes sont loins d'être unis autour du patriarcat de Kiev de Mgr Philarète (Denissenko). Celui-ci est surtout présent dans le centre de l'Ukraine.
Il y a un autre parti autocéphaliste, l'Eglise orthodoxe autocéphale ukrainienne en Ukraine, dont le primat est le métropolite Méthode (Koudriakov) de Ternopil (ex-Tarnopol), qui compte sept évêques, et qui semble surtout avoir des réserves à l'égard de Mgr Philarète dont ils se demandent s'il ne s'est pas rallié à la cause ukrainienne uniquement parce que ses ambitions ont été déçues au sein du patriarcat de Moscou. Ce groupe autocéphaliste est surtout présent dans l'ouest de l'Ukraine, et je crois qu'il a surtout pour lui d'avoir de bonnes relations avec la diaspora ukrainienne. Je ne crois pas que ce groupe soit quantité négligeable: peut-être 3-3,5 millions de fidèles contre 7,5-8 millions au patriarcat de Kiev, si l'on en juge par leur nombre de paroisses respectives (environ 1'500 contre environ 3'500).
J'ai écrit dès 2004 qu'il y avait en Ukraine pratiquement deux fois plus de fidèles dans les deux partis autocéphalistes (11,5 millions) que dans l'Eglise considérée comme canonique (6 millions). Il est donc faux, comme l'ont écrit beaucoup de media francophones, que les fidèles aient basculé vers le patriarcat de Kiev et l'Eglise autocéphale en 2014 suite à la crise du Donbass et de la Crimée, et à la dégradation inimaginable des relations entre l'Ukraine et la Russie. Un ami russe établi en Suisse m'a un jour de 2016 fait une comparaison éloquente: "aussi absurde que si les cantons de Vaud et du Valais se déclaraient la guerre" , et c'est vrai qu'il est tragique que deux pays qui avaient tant de liens en arrivent à une telle rupture.
Il est probable que la situation de l'Eglise orthodoxe d'Ukraine sous la juridiction du patriarcat de Moscou se soit certes dégradée depuis 2014, mais elle était déjà nettement minoritaire dix ans plus tôt.
Le métropolite Stéphane de Tallinn et de toute l'Estonie a sans doute en grande partie raison lorsqu'il affirme (réflexion publiée le 4 octobre 2018 sur orthodoxie.com, ici : https://orthodoxie.com/mgr-stephane-de- ... -lukraine/ ) que:
Selon Antoine Arjakovsky (in Colloque de la KEK – Chypre, 8-10 novembre 2017), les trois-quarts des 25 millions de chrétiens orthodoxes ukrainiens se trouvent actuellement sous la juridiction du Patriarcat de Kiev, dirigé par le patriarche Philarète. De plus, on estime que, sur le quart des fidèles restants (Patriarcat de Moscou sous la conduite du métropolite Onuphre et Église dite autocéphale sous la direction du métropolite Macaire), plus de 75% d’entre eux rejoindraient cette nouvelle structure ecclésiale de ce qui serait demain « l’Église orthodoxe autocéphale d’Ukraine ».
En effet, j'estimais en 2004 que les deux tiers des orthodoxes ukrainiens avaient déjà rompu avec le patriarcat de Moscou. La situation de l'Ukraine ayant évolué de la déplorable manière que nous connaissons, il n'y aurait rien d'étonnant à ce que cette proportion soit passée des deux tiers aux trois quarts, encore que je pense qu'il s'agisse du chiffre des fidèles des deux juridictions autocéphalistes ukrainiennes, et non du seul patriarcat de Kiev.
Par ailleurs, contrairement au professeur Arjakovsky et au métropolite Stéphane, je doute qu'il y ait 25 millions d'orthodoxes en Ukraine. Je pense plutôt que les chiffres ont baissé par rapport à mon estimation de 17 millions en 2004. Pas tant au profit des uniates, qui ne progressent plus guère, que des néo-protestants, dont l'Ukraine est le bastion en Europe, encore plus que le nord de la Roumanie. Je parle bien des néo-protestants. En Europe orientale comme en Amérique du Sud, les Eglises protestantes historiques sont en difficulté, car liées à un héritage culturel en perdition (luthériens = minorités allemandes, calvinistes = minorités magyares). En revanche, en Ukraine, pentecôtistes et baptistes enregistrent un très grand nombre de conversions.
On voit d'ailleurs mal comment l'Orthodoxie ukrainienne qui affiche ses divisions depuis 1990 pourrait résister de manière efficace au prosélytisme uniate, baptiste et pentecôtiste, et Monseigneur Stéphane n'a pas non plus tort de parler de l'absence de propositions et de perspective "susceptibles de mettre un terme aux divisions entre les juridictions orthodoxes locales et de résorber définitivement les schismes existants" (loc. cit.)
J'avais aussi expliqué, en 2005, que la situation ukrainienne était encore aggravée par la division des autocéphalistes entre le patriarcat de Kiev et l'Eglise autocéphale. Il n'est dès lors pas étonnant que le patriarcat de Constantinople soit d'abord intervenu pour pousser les deux factions à la réconciliation et qu'on parle désormais d'une union imminente entre le patriarcat de Kiev et l'Eglise autocéphale.
Qu'on le veuille ou non, l'intervention du patriarcat de Constantinople en Ukraine en 2018 était inscrite dans les statistiques que j'ai publiés en 2004 sur le présent forum. Dès le 18 avril 2004, j'avais indiqué, ici même, que les autocéphalistes ukrainiens avaient d'ores et déjà plus de fidèles que l'Eglise de Grèce, et j'écrivais " il faudra bien un jour que l'Eglise trouve une solution aux problèmes posés par le "patriarcat" de Kiev et l'Eglise de Macédoine, que l'on ne pourra pas toujours balayer d'un revers de main".
J'ai critiqué tant d'interventions malencontreuses du patriarcat de Constantinople au cours des trente dernières années que je ne peux que dire que celle-ci me paraissait inévitable. Ou il y aura en Ukraine une Eglise orthodoxe autocéphale, ou il y aura une Ukraine néo-protestante. Tertium non datur.
Evidemment, on ne pouvait laisser éternellement dans les limbes dix millions de baptisés orthodoxes, qui plus est représentant la communauté religieuse la plus importante d'un pays de la taille de l'Ukraine. Mais c'était l'évidence à condition d'être honnête et de regarder la vérité en face, ce qui n'est pas forcément le cas des débris tchékistes et guébistes mal convertis en défenseurs de la Troisième Rome qui m'ont couvert de boue pendant toutes ces années.
L'avenir est parfois prévisible pour peu que l'on regarde les vrais chiffres. C'est faute d'avoir su lire les résultats de ses propres recensements en 1846 et en 1856 que la France s'est lancée, en Algérie, dans une colonisation de peuplement vouée à l'échec; c'est faute d'avoir su lire les résultats des recensements effectués dans ses départements algériens que la même France n'a pas su préparer son désengagement (cf. notamment Guy Pervillé, "Le rôle de la colonisation de peuplement dans la politique de la France en Algérie et dans l’organisation de la colonie", communication au communication au colloque Colonies, territoires, sociétés, l’enjeu français, organisé à Montpellier les 4, 5 et 6 novembre 1991, accessible ici: http://guy.perville.free.fr/spip/articl ... rticle=105 ).
Mutatis mutandis, la comparaison n'est pas gratuite. Les empires morts ne ressusciteront pas, même pas sous la forme d'une domination ecclésiastique rejetée par la majorité des populations concernées, et il est préférable d'en prendre acte.
Presque partout dans leur immense empire, les Britanniques ont très vite compris que, parfois, pour rester, il vaut mieux partir. Les Français l'ont compris en Tunisie, au Maroc, à Madagascar et en Afrique noire; ils ne l'ont pas compris en Syrie, en Indochine et en Algérie. Il suffit de comparer les résultats six décennies plus tard.
"Que celui qui a des oreilles pour entendre entende!" (Mt XI, 15)