Le pape: le successeur de Pierre?

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Stephanopoulos
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Message par Stephanopoulos »

Je suis absolument certain que c'était à Pully (La Rosiaz);
j'y était!
Par contre, j'ignorais qu'il y avait une communauté orthodoxe à Prilly!
Stephanopoulos
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

C'est moi qui me suis trompé. La liturgie a donc été célébrée à Pully par l'évêque de Brno en Moravie . La personne qui m'avait informé a dû dire Pully et j'ai entendu Prilly.

Non, à ma connaissance, il n'y a pas de communauté orthodoxe à Prilly. Sicpa doit suffire au bonheur de cette localité.
christian
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Message par christian »

Il existe sur Pully une paroisse qui est celle de l'ERHF, paroisse de Lausanne Vevey de la Nativité de Notre Seigneur Jésus-Christ.

Pour ce qui concerne l'autre paroisse, est-ce qu'il ne s'agirait pas de la paroisse dont le recteur en est le Père Dimitri ( Menassa ) et qui habite en effet sur les Hauts de Pully dans la commune de Lausanne?
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Oui, c'est bien le père Dimitri Manassa qui s'est placé sous la juridiction tchèque. Ce qui me semble bien extraordinaire: c'est la première fois que j'entends parler d'une paroisse de cette Eglise en dehors de l'ex-Tchécoslovaquie.

Ce qui me paraît aussi étonnant, c'est qu'une Eglise qui a à peine 100'000 fidèles sur son territoire canonique fonde une paroisse en Suisse romande, alors qu'elle n'y a pas de diaspora sur laquelle elle pourrait s'appuyer et que je vois mal qui, dans toute l'Eglise de Tchéquie et Slovaquie, parle un tant soit peu le français, à l'exception du père Cristian Popescu.
Stephanopoulos
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Message par Stephanopoulos »

A propos du "pape en tant que successeur de Pierre", je possède un texte intitulé : "Discours de l'évêque Strossmayer au concile Vatican I en 1870" d'aprés une version italienne parue à Florence.

J'ai fait une recherche sur le forum au cas où il se trouverait déjà, et je n'ai rien trouvé.

Est-ce-que je peux le publier sur le forum?
Stephanopoulos
Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

À titre purement informatif, je crois que cette publication serait très intéressante car on laisse toujours entendre que le "mouvement des Vieux-Catholiques" n'est pas à la hauteur des espoirs qu'avaient suscités ses fondateurs. Mais quels espoirs avaient-ils pu susciter ? J'avoue que je n'en sais rien.

En tout cas je pense qu'il ne faut pas poser ce genre de problèmes en termes de "la médiocrité humaine n'a pas permis que cette idée se développe. Ceci est tout aussi valable dans quelques autres circonstances analogues. On ne construit pas ou on ne re-construit pas l'Église à partir d'un "petit reste. C'est le Seigneur Lui-même qui est le Maître de l'Histoire et qui donne la Vie à son Église. Si une branche meurt, ce n'est pas à cause d'un ratage stupide.

L'Église reste une, traverse toutes sortes d'épreuves où elle semble sombrer, et elle en ressurgit toujours une.

Les espoirs de tous ceux qui se sont voulus des "refondateurs" à partir d'un "petit reste" ne sont que des espoirs fous. On peut souffrir de l'Église, on peut dénoncer les errements de ses hiérarques, on ne peut pas la recommencer.
Jean-Louis Palierne
paliernejl@wanadoo.fr
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Bien sûr, mon cher Stephanopoulos, le texte de Mgr Strossmayer est intéressant, car il contient beaucoup d'arguments contre l'infaillibilité pontificale, et il vaut la peine d'être publié sur le forum... avec indication de la source, comme d'habitude!

Il faut toutefois préciser que Mgr Strossmayer n'a pas eu le courage de rejoindre les Vieux-Catholiques et qu''il s'est incliné après la proclamation du nouveau dogme. Son opposition à la proclamation de l'infaillibilité pontificale: cet évêque, croate malgé son nom allemand (Strossmayer transcrit Strosmajer en Croatie), s'était donné comme but de rallier à la Papauté tous les Slaves du Sud; il avait peu d'espoir en ce qui concernait les Serbes, mais misait sur les Bulgares et les Slavo-Macédoniens. Il ne s'est opposé à l'infaillibilité pontificale que parce qu'il savait que celle-ci rendrait plus difficiles ses projets de prosélytisme.

Le mouvement vieux-catholique avait suscité beaucoup d'espoirs parmi les orthodoxes, tout aussi naïfs à l'égard de l'Union d'Utrecht qu'à l'égard de la communion anglicane. Je ne crois pas, en revanche, que beaucoup de gens y aient cru en Occident. Les effectifs du vieux-catholicisme en Europe ont toujours été limités à quelques centaines de milliers de personnes, recrutés surtout parmi les intellectuels qui avaient été en contact avec le protestantisme, et trop massivement soutenus par les gouvernements anticléricaux d'Allemagne ou des cantons de Berne et de Genève.

Depuis qu'ils sont entrés en intercommunion avec les Anglicans en 1931, les Vieux-Catholiques sont devenus irrémédiablement protestants, mais, en plus, protestants libéraux. Le milieu vieux-catholique est beaucoup plus éloigné de la Tradition que peuvent l'être, par exemple, les luthériens scandinaves ou les "réformés confessants" (type Union des Eglises réformées évangéliques indépendantes en France).

En Suisse, le vieux-catholicisme, après avoir connu un déclin démographique continu pendant tout le XXème siècle (et ce malgré une aide de l'Etat qui ne s'est jamais tarie), a poussé un cri de triomphe parce que leurs effectifs sont soudain remontés de 11'748 au recensement de 1990 à 13'312 au recensement de 2000, soit une hausse de 13,3% en dix ans. Mais ce qu'il faut savoir, c'est que cette hausse est essentiellement due au tapage médiatique qui a entouré l'ordination de la première prêtresse vieille-catholique en Suisse. Cela a naturellement attiré des catholiques romains très libéraux et partisans de l'ordination des femmes (d'autant plus que les prêtres vieux-catholiques ont les mêmes vêtements liturgiques que les prêtres catholiques-romains actuels: l'exigence de l'ordination des femmes est satisfaite, mais le dépaysement est moins grand que chez les protestants). Comme l'effet de ce coup médiatique va s'estomper à un moment ou à un autre, il semble bien qu'un autre soit en préparation, puisque l'on parle maintenant, dans les milieux vieux-catholiques suisses, de l'ordination d'homosexuels pratiquants et déclarés.

En revanche, l'Eglise nationale polonaise (qui a plus de fidèles aux Etats-Unis qu'en Pologne), avec laquelle l'Union d'Utrecht est en pleine communion, ressemble plus à un catholicisme romain sans Pape qu'au protestantisme.
pascal
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Message par pascal »

extraits de:
Quand les papes étaient orthodoxes:
deux lettres papales que Jean-Paul II semble avoir oubliées
Higoumène André (Wade)

il semble utile de rappeler aux Orthodoxes que les papes n’étaient pas toujours les hérétiques impérialistes qu’ils sont malheureusement devenus de nos jours. Il fut un temps quand les papes étaient orthodoxes, défendant, avec une franchise et une force de langage que peu de théologiens orthodoxes s’autorisent de nos jours, les dogmes qu’aujourd’hui ils nient. Parmi la vaste littérature qui démontre cette orthodoxie romaine hélas perdue, nous proposons d’examiner deux lettres par d’admirables paladins de l’Orthodoxie – les papes Grégoire le Grand et Jean VIII.


Quand l’empereur byzantin attribua le titre de Patriarche Œcuménique à Jean le Jeûneur, Grégoire le Grand (c. 540 – 602) a commencé une véritable campagne épistolaire pour montrer l’hérésie ecclésiologique contenue dans ce titre, au moins dans sa version latine de Patriarca Universalis. Les lettres que nous possédons sont adressées au Patriarche Jean le Jeûneur, à l’Empereur, au Patriarche Cyriaque, le successeur de Jean, et aux Patriarches d’Antioche et d’Alexandrie. Nous avons choisi sa lettre à Euloge d’Alexandrie et à Anastase d’Antioche. Du moment où des auteurs ultramontains ont cité quelques phrases isolées de cette lettre pour soutenir leurs doctrines, tout en omettant le noyau qui les détruit, nous donnerons le texte in extenso avant d’ajouter quelques commentaires.


lettre 43 du livre V des Lettres de saint Grégoire dans l’édition bénédictine. Nous avons numéroté les paragraphes pour faciliter les repères.

Lettre de Saint Grégoire le Grand


1. « Grégoire à Euloge, évêque d’Alexandrie, et à Anastase, évêque d’Antioche.


2. « Lorsque le Prédicateur par excellence disait : « Tout le temps que je serai l’Apôtre des nations, j’honorerai mon ministère [Rom 11 : 13] » ; lorsqu’il disait ailleurs : « nous sommes devenus comme des enfants au milieu de vous [I Thess 2 : 7] » ; il nous donnait, à nous qui sommes venus après lui, l’exemple d’être en même temps humbles en esprit et fidèles à conserver en honneur la dignité de notre Ordre, de manière que notre humilité ne soit pas de la timidité, que notre élévation ne soit pas de l’orgueil.

3. « Il y a huit ans, lorsque vivait encore notre prédécesseur Pélage, de sainte mémoire, notre confrère et coévêque Jean, prenant occasion d’une autre affaire, assembla un synode dans la ville de Constantinople, et s’efforça de prendre le titre d’universel ; dès que mon prédécesseur en eut connaissance, il envoya des lettres par lesquelles, en vertu de l’autorité de l’apôtre saint Pierre, il cassa les actes de ce synode.

4. « J’ai eu soin d’adresser à Votre Sainteté des copies de ces lettres. Quant au diacre qui, selon l’usage, est attaché à la suite des très pieux Empereurs pour les affaires ecclésiastiques, Pélage lui défendit de communiquer, à la messe, avec notre susdit coévêque. Suivant les traces de mon prédécesseur, j’ai écrit à notre coévêque des lettres dont j’ai cru devoir envoyer des copies à Votre Béatitude. Notre principale intention était, dans une affaire qui, à cause de son orgueil, trouble l’Eglise jusqu’en ses entrailles, de rappeler l’esprit de notre frère à la modestie, afin que, s’il ne voulait rien céder à la rigueur de son orgueil, nous pussions plus facilement, avec le secours de Dieu tout-puissant, traiter des moyens de le réprimer.

5. « Comme Votre Sainteté, que je vénère d’une manière particulière, le sait, ce titre d’Universel a été offert par le saint concile de Chalcédoine à l’évêque du siège apostolique dont je suis le serviteur, par la grâce de Dieu. Mais aucun de mes prédécesseurs n’a voulu se servir de ce mot profane ; parce que, en effet, si un patriarche est appelé Universel, on ôte aux autres le titre de patriarche. Loin, bien loin de toute âme chrétienne la volonté d’usurper quoi que se soit qui puisse, tant soit peu, diminuer l’honneur des ses frères ! Lorsque nous, nous refusons un honneur qui nous a été offert, réfléchissez combien il est ignominieux de le voir usurper violemment par un autre.

6. « C’est pourquoi, que Votre Sainteté ne donne à personne, dans ses lettres, le titre d’Universel, afin de ne pas se priver de ce qui lui est dû, en offrant à un autre un honneur qu’elle ne lui doit pas. En cela ne concevez aucune crainte des Sérénissimes Seigneurs ; car l’empereur craint le Dieu Tout-Puissant, et il ne consent point à ce qu’on viole les commandements évangéliques et les très saints canons. Pour moi, quoique je sois séparé de vous par de longs espaces de terre et de mer, je vous suis cependant étroitement lié de cœur. J’ai confiance que tels sont aussi les sentiments de Votre Béatitude à mon égard ; dès que vous m’aimez comme je vous aime, l’espace ne nous sépare plus. Grâces donc à ce grain de sénevé, à cette graine qui en apparence était petite et méprisable et qui, en étendant de toutes parts ses rameaux sortant de la même racine, a formé un asile à tous les oiseaux du ciel ! Grâces aussi à ce levain qui, composé avec trois mesures de farine, a formé en unité la masse du genre humain tout entier ; grâces encore à cette petite pierre qui, détachée sans efforts de la montagne, a occupé toute la surface de la terre ; qui s’est étendue au point de faire, du genre humain amené à l’unité, le corps de l’Eglise universelle ; qui a fait même que la distinction des différentes parties servît à resserrer les liens de l’unité !

7. « Il suit de là que nous ne sommes pas éloignés de vous, puisque nous sommes un en Celui qui est partout. Rendons-lui donc grâces d’avoir détruit les inimitiés au point que, dans son humanité, il n’y eût plus dans tout l’univers qu’un seul troupeau et une seule bergerie sous un seul pasteur qui est lui-même. Souvenons-nous toujours de ces avertissements du Prédicateur de la vérité : Soyez vigilants à conserver l’unité de l’esprit dans le lien de la paix [Eph 4 : 3] ; Cherchez à avoir avec tout le monde la paix et la bonne harmonie, sans laquelle personne ne verra Dieu [Héb 12 : 14]. Le même disait à ses disciples : Si cela est possible, autant qu’il est en vous, ayez la paix avec tout le monde [Rom 12 : 18]. Il savait que les bons ne pouvaient avoir la paix avec les méchants ; c’est pourquoi il dit d’abord, comme vous le savez : Si cela est possible.

8. « Mais parce que la paix ne peut exister entre deux partis opposés, dès que les mauvais la fuient, les bons doivent y tenir du fond de leurs entrailles. Aussi saint Paul dit-il admirablement : Autant qu’il est en vous ; pour nous faire comprendre qu’elle doit se maintenir en nous, même lorsque les hommes pervers la repoussent de leur cœur. Nous conservons véritablement la paix lorsque nous poursuivons les fautes des orgueilleux sous l’impulsion de la charité et de la justice ; lorsque nous aimons leurs personnes et que nous haïssons leurs vices, car l’homme est l’œuvre de Dieu, mais le vice est l’œuvre de l’homme. Distinguons, par conséquent, ce que Dieu a fait et ce que fait l’homme ; ne haïssons pas l’homme à cause de son erreur, et n’aimons pas l’erreur à cause de l’homme.

9. « Poursuivons donc, dans l’homme, le mal de son orgueil, en lui restant uni en esprit, afin que cet homme soit délivré de son ennemi, c’est-à-dire de son erreur. Notre Rédempteur Tout-Puissant donnera des forces à notre charité et à notre justice ; il nous donnera l’unité de son esprit, à nous qui sommes séparés de vous par une grande étendue de terre, car c’est Lui qui a construit son Eglise comme une arche, en lui donnant pour ses quatre côtés les quatre parties du monde ; il l’a faite d’un bois incorruptible ; il l’a enduite du bitume de la charité, de manière qu’elle n’ait rien à craindre ni du côté des vents, ni du côté des flots. Nous devons le prier de tout notre cœur, très chers frères, afin que, sous le gouvernement de la grâce, l’eau du dehors ne la trouble pas, et que la droite de la Providence tienne en bon état le fond du vaisseau ; car le Diable, notre ennemi, en sévissant contre les humbles et en tournant autour d’eux, comme un lion rugissant qui cherche à les dévorer, ne se contente pas, comme nous le voyons, de tourner autour, mais il a planté si profondément ses dents dans certains membres nécessaires de l’Eglise que, sans aucun doute (ce qu’à Dieu ne plaise !) le troupeau sera bientôt ravagé si les autres pasteurs ne s’entendent entre eux pour le secourir, sous les auspices du Seigneur. Songez, très chers frères, à ce que fera bientôt celui qui, de prime abord, a soulevé de si détestables projets contre le sacerdoce. Il est près de nous celui dont il a été écrit : Celui-là est roi sur tous les enfants d’orgueil. Je ne puis le dire sans être accablé de douleur, notre frère et coévêque Jean cherche à s’élever jusqu’à ce titre, en méprisant les commandements du Seigneur, les préceptes apostoliques et les règlements des Pères.

10. « Que le Dieu tout-puissant fasse connaître à Votre Béatitude combien je gémis profondément en pensant que celui qui me semblait autrefois le plus modeste des hommes, celui que j’aimais le mieux, qui ne semblait occupé que d’aumônes, de prières, de jeûnes, a tiré sa jactance de cette cendre sur laquelle il était assis, de cette humilité dont il se faisait gloire, au point de chercher à tout s’attribuer, et par l’orgueil d’un titre pompeux, à subjuguer tous ceux qui sont attachés au chef unique qui est le Christ, c’est-à-dire les membres de ce même Christ. Il n’est pas étonnant que le Tentateur, qui sait que l’orgueil est le commencement de tout péché, qui s’en est servi tout d’abord contre le premier homme, cherche, par ce vice, à détruire les vertus de certaines personnes, qu’il tende un piège et qu’il mette un obstacle à toute bonne œuvre, dans les vertus mêmes de ceux qui sembleraient avoir échappé à ses mains cruelles.

11. « C’est pourquoi il faut prier beaucoup ; nous devons adresser au Dieu tout-puissant de continuelles prières pour qu’il détourne l’erreur de l’esprit de notre frère, qu’il écarte de l’unité et de l’humilité de son Eglise ce mal d’orgueil et de trouble. Avec la grâce de Dieu, il faut recourir à toutes ses forces pour empêcher que, par le poison contenu dans un seul titre, les membres qui vivent dans le corps du Christ ne soient frappés de mort ; car permettre ce titre, c’est détruire la dignité de tous les patriarches ; et s’il arrive que celui qui se dit universel tombe dans l’erreur, il n'y a plus aucun évêque qui soit resté ferme dans la vérité.

12. « Il faut donc que vous conserviez dans leur intégrité les Eglises, telles que vous les avez reçues, et que cette tentation d’usurpation diabolique ne trouve chez vous aucun appui. Tenez bon, et soyez tranquilles ; ne donnez et ne recevez jamais d’écrits qui porteraient ce faux titre d’universel ; empêchez tous les évêques qui vous sont soumis de se souiller en adhérant à cet orgueil, et que toute l’Eglise sache que vous êtes patriarches non seulement par vos bonnes œuvres, mais encore par une autorité véritable. S’il nous en arrive quelque malheur, nous le supporterons ensemble ; et notre devoir sera de montrer, même par notre mort, que nous n’avons rien qui nous soit cher dès qu’il en résulte du dommage pour l’universalité. Disons avec Paul : « Le Christ est ma vie, et mourir m’est un gain » [Phil 1 : 21]. Ecoutons ce que le premier de tous les pasteurs a dit : « Si vous souffrez quelque chose pour la justice, vous serez heureux » [Mt 5 : 10].

13. « Croyez bien que la dignité que j’ai reçue pour prêcher la vérité, nous l’abandonnerons tranquillement pour cette même vérité, si cela est nécessaire. Priez pour moi, comme il convient à Votre Très Chère Béatitude, afin que mes œuvres soient en rapport avec les paroles que j’ai osé vous adresser. »


Si le pape Grégoire le Grand a des messages ecclésiologiques de si grande importance à l’adresse de Jean-Paul II, un enseignement parfaitement orthodoxe sur la procession du Saint Esprit se trouve dans l’admirable lettre du pape orthodoxe de Rome Jean VIII (pape de 872 à 882) à Saint Photius le Grand de Constantinople (c. 820 – 886). Dans cette lettre, le pape condamne l’ajout du Filioque et la doctrine qu’il implique, sans ambages. On se souviendra que cet ajout signifie que le Saint Esprit procède du Père (Jn 15 : 26) et du Fils (Filioque).


Lettre du Pape Jean VIII à Saint Photius


« Pour vous rassurer touchant cet article qui a causé des scandales dans les Eglises : non seulement nous n’admettons pas le mot en question, mais ceux qui ont eu l’audace de l’admettre les premiers, nous les regardons comme les transgresseurs de la parole de Dieu, des corrupteurs de la doctrine de Jésus-Christ, des apôtres et des Pères qui nous ont donné le symbole. Nous les mettons à côté de Judas, puisqu’ils ont déchiré les membres du Christ. Mais vous avez une trop haute sagesse pour ne pas comprendre qu’il est très difficile d’amener tous nos évêques à penser ainsi, et de changer en peu de temps un usage qui s’est introduit depuis tant d’années. Nous croyons donc qu’il ne faut obliger personne à renoncer à l’addition faite au symbole, mais les engager peu à peu et avec douceur à renoncer à ce blasphème. Ceux qui nous accusent de l’accepter se trompent ; mais ceux qui affirment qu’il y a parmi nous beaucoup de gens qui l’acceptent, disent la vérité. C’est à vous de travailler avec nous pour ramener par la douceur ceux qui se sont écartés de la sainte doctrine. »
pascal
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Message par pascal »

les deux lettres plus leurs commentaires sur le lien:
http://www.nistea.com/papifr.htm

pour les ultramontains, je ne pense pas qu'il y en ait des masses ici... il y a de quoi s'étrangler...on peut y lire notamment:

Cette longue lettre est riche en enseignements ecclésiologiques. Naturellement, les défenseurs de la papauté se limitent à citer le n° 3. Ils y appliquent une fausse interprétation, sans donner le contexte historique et en faisant dire à Saint Grégoire non seulement ce qu’il ne dit pas, mais ce qu’il nie de façon si péremptoire en maints autres lieux. « L’autorité de l’apôtre saint Pierre » n’entraîne pas une juridiction universelle, selon l’enseignement – orthodoxe – de Saint Grégoire. Preuve en est cet extrait de sa lettre (livre I, lettre 25 dans l’édition bénédictine) à Jean le Jeûneur :


« Pierre, le premier des apôtres, et membre de l’Eglise sainte et universelle ; Paul, André, Jean, ne sont-ils pas les chefs de certains peuples ? et cependant tous sont membres sous un seul chef. Pour tout dire en un mot, les saints avant la loi, les saints sous la loi, les saints sous la grâce, ne forment-ils pas tous le corps du Seigneur ? Ne sont-ils pas membres de l’Eglise ? Et il n’en est aucun parmi eux qui ait voulu être appelé universel. Que Votre Sainteté reconnaisse donc combien elle s’enfle en elle-même lorsqu’elle revendique un titre qu’aucun n’a eu la présomption de s’attribuer. »

Ce synode de Constantinople avait été convoqué pour juger un prêtre pour une question de discipline. Le prêtre inculpé avait eu recours à Rome, se basant sur le Canon 3 du concile de Sardique (343 ou 344) :

« L’évêque Hosius [de Cordoue] dit : (…) Mais si par hasard une sentence est rendue contre un évêque dans une autre affaire et il suppose que son cas n’est pas mauvais mais bon, pour que cette question puisse être rouverte, s’il semble bon à votre charité, honorons la mémoire de Pierre l’Apôtre, et que ceux qui rendent le jugement écrivent à Jules, l’évêque de Rome, pour que, si nécessaire, le cas puisse être entendu de nouveau par des évêques des provinces voisinantes et qu’il nomme des arbitres. (…) »

La version latine ajoute à la fin de ce canon :

« Est-ce que ceci plaît à tous ? Le synode répondit, Il nous plaît »

Au sujet de ce canon, Tillemont observe que la formulation est très forte, pour montrer que ceci était un droit que le Pape ne possédait pas auparavant. Pierre de Marca, en De Concordantia Sacerdotii et Imperii, Lib. VII, Cap. iij., § 8, dit qu’ici Hosius proposait aux Pères d’honorer la mémoire de Saint Pierre pour les mener plus facilement à consentir à ce nouveau privilège car, comme de Marca l’a prouvé, le droit accordé ici à l’évêque de Rome était clairement inconnu auparavant. Edmond Richer, de la Sorbonne, indique que la fait que la pape est nommé démontre clairement que la provision d’un appel à Rome dans ces canons n’était qu’une mesure temporaire.
Quoiqu’il en soit, l’évêque de Rome, Pélage, était considéré comme juge en dernier ressort dans cette affaire, car le Concile de Chalcédoine (451) lui avait accordé la primauté par son canon n° 28 :

« … Car le Pères justement accordèrent des privilèges au trône de l’ancienne Rome, parce qu’elle était la cité impériale. Et les Cent Cinquante Evêques très pieux, motivés par les mêmes considérations, donnèrent des pareils privilèges (isa presbeia) au très saint trône de la Nouvelle Rome, jugeant justement que la cité qui est honorée avec l’Empire et le Sénat, et qui jouit de privilèges pareils à ceux de l’ancienne Rome impériale, devait être magnifiée comme elle l’est, et occuper le rang après elle ; …. »

Il est fort intéressant de noter que le Concile Œcuménique de Constantinople I (381) a donc accordé des privilèges à l’ancienne Rome qui, par conséquent, n’en jouissait pas auparavant. En outre, la raison pour ces privilèges accordés par droit ecclésiastique au IVème siècle, et par cela même manifestement non pas de droit divin, ni d’origine apostolique, est citée : cela n’avait aucun lien avec l’apôtre Saint Pierre, c’était tout simplement parce que Rome était la cité impériale. En d’autres mots, les Pères ont voulu que l’ordre ecclésiastique reflète l’ordre civil : ni plus, ni moins.
L’interprétation papiste d’une juridiction universelle ‘en vertu de l’autorité de l’apôtre saint Pierre’ est donc parfaitement fausse.

(...)

N° 10 réitère la doctrine orthodoxe selon laquelle aucun évêque ne doit ‘chercher à tout s’attribuer, et par l’orgueil d’un titre pompeux, à subjuguer tous ceux qui sont attachés au chef unique qui est le Christ, c’est-à-dire les membres de ce même Christ.’ N° 11 souligne la gravité d’une telle erreur, car ‘par le poison contenu dans un seul titre les membres qui vivent dans le corps du Christ’ peuvent être ‘frappés de mort ; car permettre ce titre, c’est détruire la dignité de tous les patriarches ; et s’il arrive que celui qui se dit universel tombe dans l’erreur, il n’y a plus aucun évêque qui soit resté ferme dans la vérité.’

La véracité de ce que dit ici Saint Grégoire a malheureusement été démontré peu de temps après, quand le pape de Rome et le patriarche de Constantinople tombèrent dans l’hérésie monothélite, ce qui leur valut l’anathème d’un concile œcuménique (Constantinople III : 680-681) :

« Le saint concile dit : Ayant considéré, selon la promesse que nous fîmes à Votre Altesse, les lettres doctrinales de Serge, autrefois patriarche de cette cité royale et protégée par Dieu, à Cyr, alors évêque de Phasis et à Honorius, naguère Pape de l’Ancienne Rome, et aussi celles de ce dernier au même Serge, nous trouvons que ces documents sont tout à fait étrangers aux dogmes apostoliques, aux déclarations des saints Conciles, et à tous les Pères généralement acceptés, et qu’ils suivent les faux enseignements des hérétiques ; par conséquent, nous les rejetons entièrement, et les exécrons comme nuisibles à l’âme. Mais les noms des hommes dont nous exécrons les doctrines doivent aussi être éjectés de la sainte Eglise de Dieu, à savoir, celui de Serge, autrefois évêque de cette cité royale et protégée par Dieu (…). Et avec eux nous définissons que doit être expulsé de la sainte Eglise de Dieu et anathématisé Honorius, qui fut naguère Pape de l’Ancienne Rome, à cause de ce que nous avons trouvé écrit par lui à Serge, car il a entièrement suivi son point de vue et confirmé ses doctrines impies. »

«A Théodore de Pharan, l’hérétique, anathème ! A Serge, l’hérétique, anathème ! A Cyr, l’hérétique, anathème ! A Honorius, l’hérétique, anathème ! A Pyrrhus, l’hérétique, anathème!»

Ajoutons donc : A Grégoire, Pape de l’Ancienne Rome, l’Orthodoxe : mémoire éternelle ! A Jean-Paul, l’hérétique, anathème !

Si quelqu’un pense qu’il est exagéré de lancer l’anathème à Jean-Paul II à cause de ses prétentions universalistes suivant l’enseignement des conciles de Florence et de Vatican I, qu’il accepte comme œcuméniques, qu’il lise N° 12 de la lettre de Saint Grégoire : ‘Notre devoir sera de montrer, même par notre mort, que nous n’avons rien qui nous soit cher dès qu’il en résulte du dommage pour l’universalité.’

Le N° 13 montre que Grégoire considérait qu’il était tout à fait possible de renoncer à la position de Pape si cela était nécessaire pour le bien de l’Eglise. Ne serait-ce pas à propos pour Jean-Paul II, dont les souffrances de la vieillesse et les séquelles de sa malheureuse maladie de Parkinson le rendent plus pitoyable qu’autre chose lors de ses apparitions publiques ? Grégoire ne voyait pas la position de Pape comme étant une charge divine à conserver jusqu’à la mort, coûte que coûte. Cette sacralisation indue n’est qu’une espèce de métastase de l’hérésie ecclésiologique de la papauté romaine. Ainsi la lecture des lettres de Saint Grégoire pourrait non seulement convertir l’âme de Jean-Paul II : elle pourrait également alléger ses souffrances corporelles.
Stephanopoulos
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Message par Stephanopoulos »

Il me semble qu'il n'est pas possible de faire un copier/coller à partir d'un texte sur format pdf. J'ai trouvé ce document sur un site protestant dont voici le lien http://bible.free.fr/histoire/histoire.html , vous pouvez le télécharger là. Comme ce site est protestant, il y a aussi un texte qui critique le culte des images : "critiqué et attaqué par les partisans de ce nouveau culte -au IXème s.???-que l'Église primitive n'avait pas connu", disent-ils alors qu'on a retrouvé des images dans les catacombes à Rome et que la plus vieille icône fut retrouvé également à Rome et date du IIIème siècle.

Merci Pascal pour ce texte de l'Higoumène Wade.
Merci aussi à vous Claude et jean-Louis.

A propos du Père Wade, je lui ai demandé des informations sur les conciles orthodoxes suivant :

1. celui de Constantinople (879)

2. celui de Constantinople (1351) et les suivants défendant et
définissant la doctrine des Énergies incréées du Saint-Esprit et de la
grâce ;

3. du grand Concile de Moscou (1667)

4. de Bethléem-Jérusalem (1672),

5. de Jassy

mais, il ne possède que des extraits ou
des comptes-rendus, chez le P. Wladimir Guettée ou chez Mgr. Kallistos Ware (ce dernier en anglais).

J'ai également parlé au Père Wade du pape Jean XVI (parce que j'avais demandé par e-mail interposé à un papiste pourquoi Jean XVI est un anti-pape-je n'ai d'ailleurs jamais eu de réponse claire) et de la succession appostolique et il m'a donné une réponse intéressante :

De toute façon, la succession des papes "légitimes" est très floue. Ce n'est
que quand Jean XXIII s'est déclaré Jean XXIII qu'on était "sûr" combien de Jeans il y avait eu.... Le chapitre dans l'Histoire de l'Eglise de Guettée
sur le Xème siècle est instructif et fort amusant.
Et aussi :

Jusqu'à maintenant, personne n'a réussi à trancher sur le status de plusieurs papes ou bien anti-papes, ce qui rend toute la prétendue succession très chancelante. L'idée de succession ne se
trouve nulle part dans le Nouveau Testament ni dans les Pères
sub-apostoliques. C'est étrange, n'est-ce-pas, si toute la vie de l'Eglise
en dépend....
Stephanopoulos
Antoine
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Message par Antoine »

Ci-dessous le texte cité par Stéphanopoulos. Les chiffres(...) renvoient aux notes en fin de texte.

Le pape est-il successeur de St Pierre?
Le pape est-il infaillible?


DISCOURS DE L’ÉVÊQUE STROSSMAYER
AU CONCILE DU VATICAN I
en 1870 (1)

D ‘après une version italienne parue à Florence(2)


Vénérables pères et frères,

Ce n’est pas sans un tremblement, et cependant avec une conscience libre et tranquille devant Dieu qui vit et qui me voit, que j’ouvre la bouche au milieu de vous dans cette auguste assemblée!

Depuis que je siège ici avec vous, j ‘ai suivi avec attention les discours prononcés dans cette salle, espérant avec un grand désir qu’un rayon d’En-Haut pût illuminer les yeux de mon entendement et me permettre de voter les canons de ce Saint Concile Œcuménique en parfaite connaissance de cause.

L’étude de l’Ancien et du Nouveau Testament.
Pénétré du sentiment de ma responsabilité, dont Dieu me demandera un jour compte, je me suis mis à étudier avec la plus sérieuse attention les écrits de l’Ancien et du Nouveau Testament, et j ‘ai demandé à ces vénérables documents de la Vérité de me faire connaître si le Saint Pontife, qui préside

ici, est véritablement le Successeur de Saint Pierre et vicaire de Jésus Christ et le Docteur infaillible de l’Église.

Pour résoudre cette grave question, j ‘ai été obligé d’ignorer l’état présent des choses et de me transporter en esprit, avec la torche évangélique en main, aux jours où il n’y avait ni ultramontanisme(3), ni gallicanisme(4) et dans lesquels l’Eglise avait pour Docteurs: Saint Paul, Saint Pierre, Saint Jean, Saint Jacques, Docteurs auxquels personne ne conteste l’autorité divine, sans mettre en doute ce que la Sainte Bible, qui est devant moi, nous enseigne, et ce que le concile de Trente a proclamé comme règle de foi. J’ai donc ouvert ces pages sacrées. Eh bien, oserai-je vous le dire? Je n’ai trouvé, ni de près, ni de loin, ce qui confirme l’opinion des ultramontains.

Et plus encore, à ma grande surprise, je trouve que dans les jours apostoliques, il n’est pas plus question d’un pape successeur de Saint Pierre et vicaire de Jésus Christ que de Mahomet qui n’existait pas encore. Vous, Monseigneur Manning (5) , direz-vous que je blasphème? Vous? Monseigneur Pie (6) , que je suis fou? Non, je ne blasphème pas et je ne suis pas fou. Seulement, ayant lu le Nouveau Testament en entier... je déclare devant Dieu, avec ma main levée vers ce grand crucifix, que je n’ai trouvé aucune trace de la papauté telle qu’elle existe en ce moment. Ne me refusez pas votre attention, mes vénérables frères, et ne justifiez pas par vos murmures et vos interruptions ceux qui disent, comme le Père Hyacinthe(7), que nos votes ont été depuis le début dictés par l’autorité! Si tel était le cas, cette auguste assemblée, vers laquelle sont tournés les yeux du monde entier, tomberait dans le plus honteux discrédit.

Si nous la voulons grande, nous devons être libres! Je remercie Son Excellence Dupanloup(8) pour son signe d’approbation, cela me donne du courage, et je continue...

Jésus Christ n’a donné aucune autorité à Pierre sur les autres apôtres.

En lisant ainsi les livres sacrés, avec cette attention dont le Seigneur m’a rendu capable, je me trouve pas un seul chapitre, ni un seul verset, dans lesquels Jésus Christ donne à Saint Pierre l’autorité sur les apôtres, ses compagnons d’œuvre.

Si Simon, fils de Jonas, avait été ce que nous croyons qu’est Sa Sainteté Pie IX aujourd’hui, c’est extraordinaire que Jésus ne leur ait pas dit: «Quand je serai monté vers mon Père, vous obéirez tous à Saint Pierre, comme vous m’obéissez. Je l’établis comme vicaire de ma Personne sur la terre».

Non seulement le Seigneur est silencieux sur ce point, mais Il pense si peu à donner un chef à l’Eglise, que lorsqu’Il promet à Ses apôtres qu’ils jugeront les douze tribus d’Israël (Matthieu 19:28), Il fait la promesse aux douze, un pour chaque tribu, sans leur dire: parmi ces trônes, l’un sera plus élevé que les autres: celui qui appartiendra à Saint Pierre! Certainement s’Il avait désiré qu’il en soit ainsi, Il l’aurait dit. Que concluons-nous de cette déclaration?

La logique nous dit: Christ ne désirait pas faire de Saint Pierre le Chef du Collège apostolique.

Quand Christ envoya Ses apôtres à la conquête du monde, Il donna à tous la promesse du Saint Esprit. Permettez-moi de le répéter: s’Il avait désiré constituer Pierre comme vicaire, Il lui aurait donné le plus haut commandement sur Son armée spirituelle. Christ, ainsi dit la Sainte Ecriture, défendit à Pierre et à ses collègues de régner ou d’exercer une souveraineté, d’avoir de l’autorité sur les fidèles comme le font les rois des gentils (Saint Luc 22:25).

Si Saint Pierre avait été élu Pape, Jésus n’aurait pas parlé ainsi, parce que, d’après nos traditions la papauté tient dans ses mains deux épées, symboles du pouvoir temporel et du pouvoir spirituel.

Une chose m’a beaucoup surpris; en la retournant dans mon esprit, je me dis en moi-même: si Saint Pierre avait été élu pape, est-ce que ses collègues auraient osé l’envoyer à Samarie avec Saint Jean pour annoncer l’Evangile du Fils de Dieu?

Que penseriez-vous, mes vénérables frères, si en ce moment, nous nous permettions d’envoyer Sa Sainteté Pie IX et son Excellence Monseigneur Plantier pour aller vers le patriarche à Constantinople, plaider avec lui, afin de mettre fin au schisme oriental?

Mais il y a encore un fait important: un Concile Œcuménique est réuni à Jérusalem pour décider de questions qui divisent les fidèles. Qui aurait réuni ce Concile, si Saint Pierre avait été pape? Saint Pierre. Qui l’aurait présidé? Saint Pierre ou ses légats. Qui en aurait formé ou promulgué les canons? Saint Pierre. Eh bien, rien de ceci ne s’est passé. L’apôtre assiste au Concile comme tous les apôtres; cependant ce n’est pas lui qui fait le résumé, mais Saint Jacques. Et quand les décrets furent promulgués, ils le furent au nom des apôtres, des anciens et des frères (Aptes 15:28). Plus j‘examine toutes ces choses, ô vénérables frères, plus je suis convaincu que dans les Ecritures le fils de Jonas n’apparaît pas comme le premier.

Saint Paul et les apôtres ne parlent pas de papauté.

De plus, alors que nous enseignons que l’Église est bâtie sur Saint Pierre, Saint Paul (dont l’autorité ne peut être mise en doute) dit, dans son Epître aux Ephésiens (2:20), qu’elle est bâtie sur le fondement des apôtres et prophètes, Jésus Christ étant la principale pierre de l’angle.

Et le même apôtre croit si peu à la supériorité de Saint Pierre, qu’il blâme ceux qui disent: Nous sommes de Paul, nous sommes d’Apollos, comme ceux qui disent: Nous sommes de Pierre (1 Corinthiens 1:12).

Ainsi, si ce dernier apôtre avait été le vicaire de Jésus Christ, Saint Paul aurait pris grand soin de ne pas censurer si violemment ceux qui se réclament de ses collègues.

Le même apôtre, résumant les ministères dans l’Église mentionne: les apôtres, les prophètes, les évangélistes, les docteurs et les pasteurs (1 Corinthiens 12:18).

Pourriez-vous croire, mes vénérables frères, que Saint Paul, le grand apôtre des nations, aurait oublié le premier ce ces ministères, si la papauté avait été une institution divine? Cet oubli me paraît aussi impossible que si un historien de ce Concile devait ne pas mentionner le nom de Sa Sainteté PieIX

(Différentes voix: «Silence hérétique! Silence!»)

Calmez-vous, mes frères, je n’ai pas encore fini; si vous me défendiez de poursuivre, vous agiriez mal à la vue du monde entier, en fermant la bouche au membre le plus humble de cette assemblée.

Je continue. L’apôtre Paul ne fait pas mention de la suprématie de Saint Pierre dans ses lettres aux différentes églises. Si cette primauté avait existé, si en un mot l’Eglise avait dans son corps un chef suprême, infaillible, dans son enseignement, est-ce que le grand apôtre aurait oublié de le mentionner? Que dis-je, il aurait écrit une longue lettre sur ce sujet de première importance. Alors pourquoi le fondement, la clef de voûte a-t-elle été oubliée, quand l’édifice de la doctrine chrétienne était en train de s’ériger?

A moins que vous acceptiez que l’Église des apôtres était hérétique, ce qu’aucun de vous ne voudrait faire ou n’oserait dire. Nous sommes obligés de confesser que l’Eglise n’a jamais été plus belle, plus pure et plus sainte que dans les jours où ii n’y avait pas de pape.

(Cris: «Ce n’est pas vrai! Ce n’est pas vrai!»)

Ne dites pas non, Monseigneur de Lavai, car si l’un de vous, mes vénérables frères, osait dire que l’Eglise qui a aujourd’hui un pape à sa tête a plus de foi, est plus pure dans sa morale que l’Eglise apostolique, qu’il le dise ouvertement, puisque de cette enceinte nos paroles volent d’un pôle à l’autre.

Je continue. Ni dans les écrits de Saint Paul, ni dans ceux de Saint Jacques ou de Saint Jean je n’ai trouvé la moindre trace ou le moindre germe d’autorité papale. Saint Luc, l’historien missionnaire des travaux des apôtres, est silencieux sur ce point si important. Le silence de ces saints hommes dont les écrits font partie du canon des Ecritures divinement inspirées, m’est toujours apparu comme un obstacle insurmontable, comme une impossibilité aussi injustifiable, si Saint Pierre avait été pape, que si Thiers, écrivant l’histoire de Napoléon Bonaparte avait omis le titre d’Empereur.

Je vois ici devant moi un membre de l’assemblée qui dit, en me montrant du doigt: «C’est un évêque schismatique qui a pénétré parmi nous sous de fausses couleurs». — Non, mes vénérables frères, je ne suis pas entré dans cette auguste assemblée comme un voleur, par la fenêtre, mais par la porte; mon titre d’évêque m’en a donné le droit, comme ma conscience de chrétien me force de dire ce que je crois être vrai.

Le silence de Saint Pierre

Ce qui m’a le plus surpris et ce qui a le plus grand poids dans cette démonstration, c’est le silence de Saint Pierre.

Si l’apôtre avait été ce que nous proclamons qu’il fut, c’est-à-dire le vicaire de Jésus Christ sur la terre, il l’aurait sûrement su, et s’il l’avait su, comment peut-il se faire qu’il n’ait jamais agi une seule fois comme un pape? Il aurait pu le faire le jour de la Pentecôte, quand il prononça son premier sermon, et il ne le fit pas, ni dans les deux lettres adressées à l’Eglise. Pouvez-vous imaginer un tel pape, mes frères, si Saint Pierre avait été pape?

Alors si vous voulez maintenir qu’il était le pape, vous devez maintenir aussi comme conséquence naturelle qu’il était ignorant du fait qu’il l’était. Maintenant je demande à quiconque a une tête pour penser et un esprit pour réfléchir: ces deux suppositions sont-elles possibles?

En retournant, comme je l’ai dit, au temps où l’apôtre vivait, l’Église ne pense jamais qu’il pouvait y avoir un pape; pour maintenir le contraire, il faudrait que les Ecrits sacrés aient été rejetés ou soient entièrement ignorés.

Saint Pierre à Rome.

Mais on dit de tous côtés: Est-ce que Saint Pierre n’est pas allé à Rome? Ne fut-il pas crucifié la tête en bas? N’y a-t-il pas dans cette ville éternelle la chaire où il a enseigné? les autels devant lesquels il a dit la messe?

Le fait que Saint Pierre a été à Rome, mes vénérables frères, ne repose que sur la tradition. Mais même s’il avait été évêque de Rome comment pouvez-vous par cet épiscopat prouver sa suprématie? Scaliger(9) , un des hommes les plus érudits, n’a pas hésité à dire que l’épiscopat de Saint Pierre et sa résidence à Rome devaient être classés parmi les légendes ridicules.
(Cris répétés: «Fermez-lui la bouche, fermez-lui la bouche, faites-le descendre de la tribune!»)

Mes vénérables frères, je suis prêt à me taire, mais n’est-ce pas mieux dans une assemblée comme la nôtre, d’éprouver toutes choses et de retenir ce qui est bon! Mes vénérables frères et amis, nous avons un dictateur devant lequel nous devons nous incliner et être silencieux, fût-ce même Sa Sainteté Pie IX: c’est l’histoire. Elle n’est pas semblable à une légende qu’on peut fabriquer, comme le potier pétrit l’argile, mais elle est comme un diamant, qui laisse sur la vitre une trace qui ne peut être effacée.

Jusqu’à présent, je me suis appuyé sur elle, et si je n’ai pas trouvé trace de la papauté aux jours apostoliques, c’est sa faute et non la mienne.

Voulez-vous me placer dans la position de quelqu’un accusé de fausseté? Vous êtes en droit de le faire, si vous le pouvez.

J’entends à ma droite ces paroles: «Tu es Pierre et sur ce roc je bâtirai mon Église» (Matthieu 16:15). Je répondrai à cette objection, mes vénérables frères, mais avant de le faire, je désire présenter le résultat de mes recherches historiques.

Dans les quatre premiers siècles

Ne trouvant pas trace de la papauté aux jours des apôtres, je me dis que je trouverais ce que je cherche dans les annales de l’Eglise. Eh bien je le dis franchement: j’ai cherché un pape dans les quatre premiers siècles et je ne l’ai pas trouvé.

Aucun de vous, je l’espère, ne mettra en doute la grande autorité du saint Évêque d’Hippone: le grand Saint Augustin.(10)


Ce pieux docteur, l’honneur et la gloire de l’Église catholique, était secrétaire au Concile de Milève(11). Dans le début de cette assemblée on trouve des mots significatifs: «Quiconque veut en appeler à ceux qui habitent au-delà de la mer ne sera reçu en communion dans aucune Eglise en Afrique.» Les évêques d’Afrique reconnaissaient si peu l’évêque de Rome, qu’ils frappaient d’excommunication ceux qui voulaient avoir recours à lui.(12)

Ces mêmes évêques au XXe Concile de Carthage, tenu sous Aurelius, évêque de cette cité, écrivaient à Célestin, évêque de Rome(13), pour l’avertir de ne pas recevoir d’appels des évêques, prêtres ou clercs d’Afrique; de ne pas envoyer de légats ou de commissionnaires, et de ne pas introduire la vanité humaine dans l’Eglise.

Le fait que le patriarche de Rome avait essayé, dès les temps anciens d’attirer à lui toute l’autorité, est un fait évident, mais un fait non moins évident, c’est qu’il n’avait pas la suprématie que les Ultramontains lui attribuaient. S’ils l’avaient possédée, est-ce que les évêques d’Afrique, Saint Augustin parmi eux le premier, auraient osé prohiber les appels de leurs décrets à son tribunal suprême?

Je confesse sans difficulté que le patriarche de la Rome ancienne tenait la première place. Une des lois de Justinien disait: «Nous ordonnons, d’après la définition des quatre Conciles, que le saint pape de Rome soit le premier des évêques et le très saint archevêque de Constantinople, qui est la nouvelle Rome soit le second».

Inclinez-vous alors devant la suprématie du pape, me direz-vous. Ne courez pas si vite à cette conclusion, mes vénérables frères, attendez ce que la loi de Justinien a écrit sur ce fait: «Dans l’ordre des sièges des patriarches, la prééminence donnée au primat est une chose, le pouvoir et la juridiction en est une autre».

Par exemple, supposons qu’à Florence il y ait une assemblée de tous les évêques du Royaume, la prééminence serait donnée au primat de Florence, comme parmi les Orientaux, elle serait accordée au patriarche de Constantinople, de même qu’en Angleterre, à l’archevêque de Canterbury. Mais ni le premier, ni le deuxième, ni le troisième n’aurait déduit de la position qui lui est assignée, un droit de juridiction sur ses collègues.

L’importance des évêques de Rome ne procédait pas d’un pouvoir divin mais de l’importance de la ville dans laquelle ils avaient leurs sièges. Monseigneur Darboy(14) n’est pas supérieur en dignité à l’archevêque d’Avignon; mais en dépit de cela, Paris lui donne une considération qu’il n’aurait pas s’il avait son palais au bord du Rhône au lieu de l’avoir au bord de la Seine. Ce qui est vrai dans l’ordre religieux, l’est aussi dans les sujets civils et politiques; le préfet de Rome ne l’est pas davantage que celui qui est à Pise; mais civilement et politiquement il a une plus grande importance;

J’ai dit que dès les premiers siècles, le patriarche de Rome aspirait au gouvernement universel de l ‘Eglise.

Malheureusement il ne fut pas loin d’y arriver, mais il ne réussit pas dans ses prétentions, car l’empereur ThéodoseII fit une loi par laquelle il établit que le patriarche de Constantinople devait avoir la même autorité que celui de Rome (Leg. cod. de sacra., etc.).

Les Pères du Concile de Calcédoine placèrent les évêques de la nouvelle et ancienne Rome sur un pied d’égalité, pour toutes choses, même au point de vue ecclésiastique (Canon 28).

Le VIe Concile de Carthage défendit à tous les évêques de prendre le titre «Évêque UNIVERSEL» ou de «Prince des évêques» ou de «Prince souverain».

Quant au titre d’Évêque UNIVERSEL que les papes prirent ensuite, Saint Grégoire, croyant que ses successeurs ne penseraient jamais à se l’attribuer, écrivit des paroles remarquables: «Aucun de mes prédécesseurs n’ a consenti à prendre ce nom profane, car lorsqu’un patriarche se donne à lui-même le nom d’universel, il en reçoit du discrédit, que les chrétiens s’abstiennent du désir de se donner un titre, eux-mêmes, qui apporte du discrédit sur les frères».

Les paroles de Saint Grégoire sont destinées à ses collègues de Constantinople qui prétendaient être les primats de l’Église.

Le pape Pélage II appelle Jean, évêque de Constantinople, impie et profane parce qu’il aspirait à la plus haute prêtrise. Ne vous souciez pas, disait-il, du titre d’universel que Jean a usurpé illégalement. Qu’aucun des patriarches ne prenne ce nom profane car quel malheur ne devrons-nous pas attendre, si de tels sentiments s’élèvent parmi les prêtres? Ils obtiendraient ce qui leur a été prédit: «Il est le roi des fils de l’orgueil» (Pélagius II, Lettre 13).

Ces autorités (et je pourrais en ajouter une centaine de même valeur), ne prouvent-elles pas avec une clarté égale à la splendeur du soleil à midi, que les premiers évêques de Rome ne furent reconnus que beaucoup plus tard comme évêques universels et chefs de l’Eglise?

D’un autre côté, qui ne sait que depuis l’année 325 dans laquelle fut tenu le premier Concile de Nicée, jusqu’en 580, l’année du deuxième Concile œcuménique de Constantinople, parmi plus de 1109 évêques qui assistèrent aux six premiers Conciles généraux, il n’y eut pas plus de 19 évêques occidentaux? Qui ne sait pas que les Conciles étaient convoqués par les empereurs, sans en informer l’évêque de Rome et souvent contre son désir? Que Hosius, évêque de Cordoue, présida le premier Concile de Nicée et en édita les canons. Le même Hosius présida ensuite le Concile de Serdica(15) en excluant les légats de Jules Ter, évêque de Rome.

Tu es Pierre

Je n’en dis pas plus mes vénérables frères et j’en viens maintenant au grand argument qui a été mentionné auparavant: établir la supériorité de l’évêque de Rome par le roc (pétra (16). Si cela était vrai, la dispute prendrait fin, mais les Pères de l’Eglise ne pensaient pas à ce sujet comme nous le faisons,
— et ils en savaient certainement quelque chose. Saint Cyril dans son quatrième livre sur la Trinité dit: «Je crois que par le roc vous devez comprendre la foi inébranlable des apôtres.»

Saint Hilaire, évêque de Poitiers, dans son deuxième livre sur la Trinité, dit «le roc (pétra) est le seul roc béni de la foi (confessionnelle) confessé par la bouche de Saint Pierre». Et dans le sixième livre sur la Trinité, il dit: «C’est sur ce roc de la confession de foi que l’Eglise est bâtie».

«Dieu, dit Saint Jérôme dans le sixième livre sur Matthieu, a fondé son Église sur le roc et c’est de ce roc que l’apôtre a été nommé».

Après lui, Saint Jean Chrysostôme, dans sa cinquante-troisième homélie sur Saint Matthieu: «Sur ce roc je bâtirai mon Eglise, c’est-à-dire sur la foi de la confession». Alors qu’était la confession de l’apôtre? La voici: «TU ES LE CHRIST, LE FILS DU DIEU VIVANT».

Saint Ambroise, le saint archevêque de Milan (sur le deuxième chapitre des Éphésiens), Saint Basile de Séleucie et les Pères du Concile de Calcédoine enseignent exactement la même chose.

Parmi tous les docteurs de l’antiquité chrétienne, Saint Augustin occupe une des premières places par ses connaissances et sa sainteté. Ecoutez alors ce qu’il écrit dans son deuxième traité sur la première Épître de Saint Jean: «Que signifient ces mot: Je bâtirai mon Église sur ce roc? Sur cette foi, sur celle qui dit: Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant». Dans son cent vingt-quatrième traité sur Saint Jean, nous trouvons cette phrase significative: «Sur ce roc, que tu as confessé, je bâtirai Mon Eglise puisque Christ était le roc».

Le grand évêque croyait si peu que l’Église était bâtie sur Saint Pierre qu’il dit à ses auditeurs dans son treizième sermon: «Tu es Pierre, et sur ce roc (pétra) que tu as confessé, sur ce roc que tu as reconnu en disant: Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant, sur ce roc Je bâtirai mon Eglise, Je la bâtirai sur Moi-même qui suis le Fils du Dieu vivant, Je la construirai sur Moi et non sur toi».

Ce que pensait Saint Augustin sur ce passage célèbre était l’opinion de la chrétienté de son temps. Par conséquent, j ‘affirme en résumé que:
1 — Jésus a donné à Ses apôtres les mêmes pouvoirs qu’Il a donnés à Saint Pierre.

2— Les apôtres n’ont jamais reconnu en Saint Pierre le vicaire de Jésus Christ et le docteur infaillible de l’Église.

3 — Saint Pierre n’a jamais eu le sentiment d’être pape et il n’a jamais agi comme s’il l’était.

4— Les Conciles des quatre premiers siècles, malgré qu’ils reconnurent la haute position qu’occupait dans l’Église l’évêque de Rome à cause de l’importance de cette ville, ne lui confèrent seulement qu’une prééminence honorifique, mais jamais d’autorité et de juridiction.

5 — Les saints Pères n’interprétèrent jamais le fameux passage (Tu es Pierre et sur ce roc je bâtirai mon Église) comme signifiant que l’Église était édifiée sur Saint Pierre (super Petrum), mais sur le roc (super petram), c’est-à-dire sur la confession de foi de l’apôtre.

J’en conclus victorieusement, avec l’aide de l’histoire, de la logique, de la raison, du bon sens, et avec une conscience chrétienne, que Jésus n’a accordé aucune suprématie à Saint Pierre, et que les évêques de Rome ne sont devenus les souverains de l’Eglise qu’en confisquant un à un les droits de l’épiscopat.

(Voix: «Silence, protestant éhonté!»)
— Non, je ne suis pas un protestant éhonté. L’histoire n’est ni catholique, ni anglicane, ni calviniste, ni luthérienne, ni schismatique grecque, ni ultramontaine. Elle est ce qu’elle est, c’est-à-dire quelque chose de plus fort que toutes les confessions de foi, que tous les Canons des Conciles Œcuméniques.

Vous pouvez écrire contre elle, si vous l’osez, mais vous ne pouvez pas plus la détruire que vous ne pourriez faire tomber le Colisée en en retirant une brique.

Si j’ai dit quelque chose qui soit contraire à l’histoire, prouvez-le moi par l’histoire, etje n’hésiterai pas un instant à faire amende honorable; mais soyez patients, et vous verrez que je n’ai pas dit tout ce que j’aurais voulu ou pu dire, car je suis obligé de continuer etje ne garderai pas le silence, même si le bûcher m’attendait sur la place de Saint Pierre.

Mgr Dupanloup dans ses célèbres Observations sur le concile du Vatican a dit, et avec raison, que si nous proclamions l’infaillibilité de Pie IX, la logique nous obligerait à considérer comme infaillibles tous ses prédécesseurs.

Erreurs et contradictions des Papes.

Eh bien! vénérables frères, ici l’histoire fait entendre sa voix avec autorité pour nous convaincre qu’il y a des papes qui ont commis des fautes.

Vous pouvez, à votre gré, protester contre ce fait. On ne peut le nier, mais je prouverai:

— Le pape Victor (189-198) approuva d’abord le montanisme et ensuite le condamna.

— Marcellin (296-3 04) fut un idolâtre. Il entra dans le temple de Vesta et offrit de l’encens à cette déesse. Vous direz que ce fut un acte de faiblesse, mais je déclare qu’<<un vicaire de Jésus Christ PREFERE MOURIR QUE D’APOSTASIER».

— Libère (352-356) approuva la condamnation d’Athanase et fit une profession d’arianisme, afin d’être rappelé de son exil (358) et de recouvrer un siège.

— Honorius (625-63 8) adhère au monothélisme; le Père Gratry l’a prouvé jusqu’à l’évidence.

— Grégoire 1(590-604) déclare que: quiconque aurait pris le titre d’évêque universel était un anti-christ et, par contre

— Boniface III(607) s’est fait accorder ce titre par l’empereur parricide Phocas.

— Pascal II(1099-1118) et Eugène 111(1145-1153) autorisèrent le duel.

—Jules II(1503-15 13) et Pie IV(1559-15665) le défendirent.

— Eugène IV (1431-1447) approuva le Concile de Bâle et la restitution du calice à l’Église de Bohême.

— Pie II(1458-1464) révoque la concession.

— Adrien II (867-872) déclare valides les mariages civils.

—Pie VII(1800-1823) les condamna.

— Sixte V (1585-1590) fit publier une édition de la Bible en en recommandant la lecture par une bulle.

Pie VII condamna cette lecture.

— Clément XIV (1769-1774) abolit l’ordre des Jésuites qui avait été permis par Paul III et Pie VII le rétablit.

Mais pourquoi aller chercher des preuves si loin?

Est-ce que notre Saint Père ici présent n’a pas dans sa bulle par laquelle il a donné les directions pour ce Concile dans le cas où il viendrait à mourir, avant qu’il ait pris fin, révoqué tout ce qui du passé pourrait lui être contraire, y compris ce qui procède des décisions de ses prédécesseurs? Et il est certain que si Pie IX a parlé ex cathedra il ne le fait pas lorsque des profondeurs de son sépulcre il impose sa volonté aux souverains de l’Eglise.

Je n’en finirais plus, mes vénérables frères, si je devais placer devant vos yeux les contradictions des papes dans leurs enseignements.

Si donc vous proclamez l’infaillibilité du présent pape, vous devez soit prouver, ce qui est impossible, que les papes ne se sont jamais contredits les uns les autres, ou bien vous devez déclarer que le Saint Esprit vous a révélé, à vous personnellement, que l’infaillibilité du pape date seulement de 1870. Etes-vous assez téméraire pour le faire?

Il se peut que le peuple soit indifférent, et passe par dessus des questions théologiques qu’il ne comprend pas et dont il ne voit pas l’importance; mais s’il est indifférent quant aux principes, il ne l’est pas quant aux faits. Par conséquent, ne vous trompez pas; si vous décrétez le dogme de l’infaillibilité papale, les protestants qui sont nos adversaires, entreront d’autant plus courageusement par la brèche, qu’ils ont l’histoire de leur côté, pendant que nous, nous n’avons que la négation à leur opposer. Que pourrons-nous leur dire quand ils nous exposeront ce qu’ont été tous les évêques de Rome depuis les jours de Luc jusqu’à sa sainteté Pie IX? Ah! s’ils avaient été tous comme Pie IX, nous serions vainqueurs sur toute la ligne, mais hélas il n’en est rien.

(Cris: «Silence, silence, assez, assez»).

Ne criez pas Messeigneurs! Craindre l’histoire, c’est se reconnaître vaincus. D’ailleurs, même si vous pouviez faire passer sur elle toute l’eau du Tibre, vous ne pourriez pas en effacer une seule page. Laissez-moi parler, et je serai aussi bref que possible, sur ce sujet si important.

— Le pape Virgile (537-555) acheta le siège pontifical de Bélisaire, lieutenant de l’empereur Justinien. C’est vrai qu’il rompit la promesse et qu’il ne donna jamais la somme promise. Est-ce là une façon canonique de mettre la tiare? Le second Concile de Calcédoine l’a formellement condamné. Dans un de ses canons, on peut lire: «L’évêque qui obtient l’épiscopat au moyen d’argent le perdra et sera dégradé».

— Le pape Eugène III (17) (1145-53) imita Virgile. Saint Bernard qui a brillé comme une étoile dans le firmament de cette époque, a désapprouvé le pape et lui a dit: «Peux-u montrer quelqu’un dans cette ville de Rome qui te reconnaisse comme pape s’il n’ avait pas reçu pour cela de l’argent, de l’or?» Mes vénérables frères, un pape qui établit une banque à la porte du temple est-il inspiré par le Saint Esprit? A-t-il le moindre droit à enseigner l’Eglise infailliblement?

Vous connaissez très bien l’histoire de Formose (891-896) pour qu’il ne soit pas nécessaire que je m’ étende.

Étienne VI (896-897) fit déterrer le Corps du pape Formose vêtu de ses habits pontificaux pour lui faire son procès, et lui fit ensuite couper les doigts dont il s’était servi pour donner la bénédiction et il le fit ensuite jeter dans le Tibre, en déclarant qu’il avait été un pape parjure et illégitime. Etienne VI fut ensuite jeté en prison par le peuple qui l’empoisonna et l’étrangla.

Rappelez-vous comment cette histoire se termina.

— Romain, successeur d’Ètienne, et après lui Jean IX réhabilita la mémoire de Formose.

Mais vous me direz que ce sont là des fables et non de l’histoire! Des fables! Allez, Messeigneurs dans la bibliothèque du Vatican et lisez Platina(18), l’historien de la papauté et les annales de Baronius (19) (A.D. 897). Ce sont là des faits, que pour l’honneur du Saint Siège nous voudrions ignorer mais quand il s’agit de définir un dogme qui peut provoquer un grand schisme parmi nous, l’amour que nous portons à notre vénérable Mère, l’Eglise Catholique, apostolique et romaine, doit-il nous imposer le silence?

Les péchés des papes et leurs excès.

Je continue. L’érudit cardinal Baronius, en parlant de la cour papale dit (prêtez attention, mes vénérables frères à ces paroles):«Comment se présentait l’Eglise romaine dans ce temps-là? Sous des traits inrames! A Rome, ne gouvernaient que de toutes puissantes courtisanes. Ce sont ces dernières qui donnaient, échangeaient, et s’appropriaient des évêchés, et, horrible à dire, elles firent installer sur le trône de Saint Pierre leurs amants, les faux papes». (Baronius A.D. 912)

Vous répondrez que c’étaient là des faux papes et non des vrais. Admettons cela, mais dans ce cas, si pendant 50 ans le siège de Rome fut occupé par des antipapes, comment ferez-vous renouer le fil de la succession apostolique? L’Eglise a-t-elle pu aller de l’avant, au moins pendant un siècle et demi, sans chef, donc acéphale?

Maintenant, considérez que le plus grand nombre de ces antipapes sont placés dans l’arbre généalogique de la papauté; et c’est cette absurdité que Baronius a décrite car Genebrardo, le grand adulateur des papes, n’a pas craint de dire dans ses chroniques (A.D. 901): «Ce siècle est infortuné, car depuis près de 150 ans, les papes sont déchus de toutes les vertus de leurs prédécesseurs, et sont devenus apostats plutôt qu’apôtres». Je comprends sans peine comment l’illustre Baronius doit avoir rougi en racontant les actes de ces évêques romains.(20)

En parlant de Jean XI (931-936) fils naturel du pape Serge III et de Marozia(21), il écrivit ces paroles:
«La sainte Eglise, c’est-à-dire, l’Eglise romaine, a été lâchement piétinée par un tel monstre».

Jean XII (955-963) élu pape à l’âge de 18 ans, sous l’influence de courtisans, ne fut pas du tout meilleur que son prédécesseur(22).

Cela m’afflige, mes vénérables frères de remuer tant de pourriture. Je me tais sur Alexandre VI, père et amant de Lucrèce, je passe à côté de Jean XXII(23) qui nia l’immortalité de l’âme, de Jean XXIII(24) qui fut déposé par le Concile Œcuménique de Constance. Certains diront que ce Concile n’était qu’un concile à caractère privé; soit, mais si vous refusez toute autorité à ce Concile, logiquement vous devez tenir la nomination de Martin V (1417-143 1) comme illégale. Dans ce cas, qu’adviendra-t-il de la succession apostolique? Pouvez-vous en retrouver le fil?

Je ne parle pas des schismes qui ont déshonoré l’Église. Dans ces tristes jours, le siège de Rome était occupé par deux rivaux et parfois par trois. Lequel de ceux-ci était le vrai pape?


Je me résume de nouveau, et je dis encore une fois, que si vous décrétez l’infaillibilité de l’évêque de Rome, vous devez établir l’infaillibilité de tous ses prédécesseurs, sans en oublier et exempter un seul, mais pouvez-vous faire cela quand l’histoire est là pour affirmer, avec un éclat qui n’a d’égal que celui du soleil, que les papes se sont trompés dans leurs enseignements?

Pourriez-vous faire cela et maintenir que les papes avares, incestueux, menteurs, meurtriers, simoniaques, ont été des vicaires de Jésus Christ? Oh! mes vénérables frères, on ne peut maintenir une pareille énormité sans trahir Jésus Christ, pire que ne l’a fait Judas, sans Lui jeter de la boue à la face.

(Cris: «Descendez de la chaire! fermez la bouche à l’hérétique!»)

Retournons aux Saintes Écritures

Mes vénérables frères, vous criez, mais ne serait-ce pas plus digne de peser mes raisons et mes preuves à la balance du sanctuaire? Croyez-moi, l’histoire ne peut être refaite, elle est là, elle restera là et elle restera là toute l’éternité, pour protester avec force contre le dogme de l’infaillibilité. Vous pouvez le proclamer à l’unanimité, mais il vous manquera une voix, et c’est la mienne!

Les vrais fidèles, Messeigneurs, ont les yeux fixés sur nous, attendant de nous un remède aux maux innombrables qui déshonorent l’ Eglise. Allez-vous décevoir leurs espérances?

Quelle ne sera pas notre responsabilité devant Dieu, si nous laissons passer cette occasion solennelle que Dieu nous a donnée pour guérir la vraie foi? Saisissons-la mes frères, armons-nous d’un saint courage, faisons un violent et courageux effort, retournons à l’enseignement des apôtres, étant donné qu’en dehors de cet enseignement, nous n’avons qu’erreurs et fausses traditions.

Servons-nous de notre raison et de notre intelligence pour prendre les apôtres et les prophètes comme nos seuls maîtres infaillibles concernant la question des questions: «Que dois-je faire pour être sauvé?»

Quand nous aurons réglé cette question, nous aurons posé le fondement de notre système dogmatique sur le rocher ferme, inébranlable, durable et incorruptible des Ecritures divinement inspirées. Alors nous irons pleins de confiance devant le monde et, à l’exemple de l’apôtre Paul, en présence des libre-penseurs, nous ne voudrons savoir autre chose que «Jésus Christ et Jésus Christ crucifié». Nous irons à la conquête par la prédication de la «folie de la croix» comme Paul a conquis les savants de Grèce et de Rome, et l’Eglise romaine aura son glorieux 89.

(Clameurs et cris: «Descendez, chassez ce protestant, ce calviniste, ce traître de l’Église!»)

Vos cris, Messeigneurs, ne m’épouvantent pas. Si mes paroles sont brûlantes, ma tête est froide.

Je ne suis ni de Luther, ni de Calvin, ni de Paul, ni d’Appolos, mais de Christ.

(Cris renouvelés: «Anathème, anathème à l’apostat»).

Anathème? Messeigneurs, anathème? Vous savez bien que vous ne protestez pas contre moi, mais contre les saints apôtres, sous la protection desquels j ‘aimerais que ce Concile place l’Eglise. Ah! s’ils sortaient de leurs tombes, couverts de leurs linceuls, parleraient-ils un langage différent du mien? Que leur répondriez-vous, quand par leurs écrits ils vous diraient que la papauté s’est éloignée de l’Evangile du Fils de Dieu, qu’ils ont prêché et confirmé d’une façon si généreuse par leur sang? Auriez-vous le courage de leur dire: «Nous préférons l’enseignement de nos papes, de Bellarmin(25), d’Ignace de Loyola(26) au votre»? Non, non, mille fois non, a moins que vous ayez fermé vos oreilles pour ne plus entendre, vos yeux pour ne plus voir et que vous n’ayez atrophié votre intelligence pour ne plus comprendre.

Ah! si Celui qui règne en haut désire nous punir en faisant descendre Sa main lourdement sur nous, comme Il le fit pour le Pharaon, Il n’a pas besoin des soldats de Garibaldi pour nous chasser de la ville éternelle, Il n’a qu’à nous permettre de faire un dieu de Pie IX, comme nous avons fait une déesse de la Sainte Vierge.

Arrêtez-vous, arrêtez-vous! sur la pente odieuse et ridicule sur laquelle vous êtes placés. Sauvez l’Église du naufrage qui la menace, cherchant dans les seules Écritures la règle de foi que nous devrions croire et pratiquer.

J’ai parlé. Que Dieu me soit en aide!

Notes

1 Josip Juraj STROSSMAYER né à Osijek en 1815, ordonné prêtre en 1838, nommé professeur de Droit Canon à Vienne en 1847, devient évêque de Djakovo en 1850, décédé à Djakovo en 1905.

2. Le texte de ce discours, apparemment pris en sténographie, comportait quelques erreurs de références et quelques fautes d’orthographe dans les noms propres. Au cas où il en resterait qui nous auraient échappé, nous vous serions reconnaissant de nous les signaler.

3 Ultramontanisme: mouvement qui prônait la centralisation des pouvoir spirituels et temporels dans les mains du pape.
Ce courant triompha avec le Concile de Vatican I en 1870.

4 Gallicanisme: affirmation que le pouvoir temporel est indépendant de la juridiction du pape.

5 Henry Edward Manning (1808-1892) archevêque de Westminster à partir de 1865.

6 Louis Pie, 1815-1880, évêque de Poitiers ultramontain devint cardinal en 1879.

7 Charles Loyson dit le Père Hyacinthe (1827-19 12).

8 Félix Dupanloup, 1802-1878, évêque d’Orléans

9 . Joseph Juste Scaliger, humaniste, 1540-1609.

10. Saint Augustin (354-430), évêque d’Hippone (l’actuelle Bône en Algérie) de 396 à sa mort, le plus célèbre des Pères de l’église latine.

11. 402.

12. Voir aussi les canons 11 du XIe Concile de Carthage, 17 et 28 du XVIe Concile de Carthage. Un certain Apiarius excommunié en Afrique en avait appelé au pape qui par son légat Faustin exigeait qu’il soit réadmis. Les pères d’Afrique avaient refusé en déniant tout autorité à Rome pour s’ingérer dans cette affaire.

13. Célestin 1er 422-432.

14. Georges Darboy (1813-1871), archevêque de Paris, opposé à l’infaillibilité pontificale au Concile de Vatican I, otage
de la Commune, il en fut l’une des plus illustres victimes.

15. en 343. Serdica, en latin Sardica, l’actuelle Sofia.

16. le passage de Matthieu 16:18 emploie deux mots grecs différents souvent traduits, à tort, par le seul mot «pierre». Il est écrit: «Je te dis que tu es Pierre (petros); et sur ce roc (petra) je bâtirai mon église». Le mot «petros» désigne une pierre que l’on peut soulever ou lancer à la main (cf. 2 Macc. 1:16 et 4:4 1), le mot «petra» désigne un roc, un rocher (cf. Matt. 7:24 & 25, Malt. 27:51 &60, etc.). Le père jésuite F.Zorell le reconnaît dans son «Lexicon Grœcum Novi Testamenti», où nous trouvons: «Petra: rupes, petra, saxum et quidem, in oppositione ad «petros» quod significat saxum a monte vel solo solutum, lapidem magnum, sed tantum ut adhuc levari manuque proj ici possit)», c’est à dire: «Petra: rocher, roc, roche et ceci en opposition à «petros» qui signifie rocher arraché à une montagne ou au sol, grosse pierre mais qui peut être néanmoinS soulevée et lancée à la main».

17. (IV originairement)

18. Bartolomeo Sacchi dit il Platina (142l-148l)~ humaniste devint bibliothécaire du Vatican en 1478, il publia une histoire des papes en 1479.

19. Cesare Baronius ou BarofliO (1538-16O7) Cardinal et historien. Disciple de Saint Philippe Néri, confesseur du pape Clément VIII, protoflotaire apostolique cardinal (1596) et bibliothécaire de la Vaticane (1597).

20. Baronius a appelé la période qui va des règnes de Serge III à celle de Jean XI: la «pornocratie».

21. Marozia (892-93 7) fille de Théophylacte et de Théodora (qui mit sur le trône pontifical Serge III) épouse en 905 Albéric 1er marquis de Spolète, devint la maîtresse de Serge III dont elle eut un fils qu’elle fit plus tard élire pape sous le nom de Jean XI. Elle épousa par la suite Gui de Toscane puis Hugues de Provence; Elle fit et défit les papes pendant des années faisant emprisonner et assassiner Jean X, et probablement aussi Léon VI et Etienne VII.

22. Jean XII (955-964) petit-fils de Marozia et fils d’Albéric II de Spolète. Connu pour ses débauches il mourut des suites de la correction que lui infligea un mari qui l’avait trouvé dans le lit de sa femme.

23. Jean XXII régna de 1316 à 1334. Célèbre pour avoir fait faire par l’Inquisition un procès contre Maître Eckart. Il mourut alors qu’un procès pour hérésie lui était intenté.

24. Jean XXIII régna de 1410 à 1415 date à laquelle il fut déposé par le Concile de Constance et remplacé par Martin V qui le nomma cardinal-évêque de Tusculum. Sa tombe, dans le baptistère de Florence, porte l’insigne papal. Aujourd’hui, dans l’église romaine, il n’est plus compté dans la liste officielle des papes.

25. Bellarmin, en italien Roberto Bellarmino (1542-1621) Théologien célèbre entre autre pour ses écrits et aussi pour sa condamnation de Galilée, il fut canonisé en 1930 et mis au rang des docteurs de l’église romaine.

26. Ignace de Loyola (1491-1556) fondateur de l’ordre des Jésuites, canonisé en 1622.
pascal
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Message par pascal »

dans l'ouvrage "le nouveau cathéchisme contre la foi des pères" référencé dans la liste des ouvrages conseillés sur ce site, une excellente analyse du sujet est livrée, des pages 36 à 50.

quand j'aurais le courage, je vous en livrerai une synthèse... sinon pour les parisiens il est encore disponible au moins dans un lieu: directement chez l'éditeur aux éditions l'age d'homme...

c'est un peu long de tout retranscrire, donc, un peu de patience et un peu de clémence si je suis obligé de synthétiser...

enfin ça vaut la peine quand même je pense
pascal
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Message par pascal »

extraits et synthèse des pp 36 à 50 de "le nouveau cathéchisme contre la foi des pères"

II. une écclésiologie étrangère à la tradition de l'Eglise

sur la primauté:
"Jésus n'ayant pas établi de vicaire ou de remplaçant sur terre, pour la simple raison qui est resté sur terre, présent dans Son Corps qui est l'Eglise, comment les historiens du pape ont-ils réussis à trouver des témoignages en faveur de leur système dans l'antiquité chrétienne? En modifiant matériellement certains textes, et en chageant l'interprétation de certains autres, contre la tradition, les Pères, les conciles. Leur principale erreur consiste à faire passer tous les textes en faveur d'une primauté d'honneur de l'évêque de Rome, pour des témoignages en faveur de la primauté de pouvoir que le pape revendique.

sur ces différences d'interprétation des évangiles, on peut citer:

si matt 16, 19 montre la primauté, elle ne montre pas le vicariat exclusif puisque la même bénédiction est donnée et la même promesse est entendue par les apôtres dans matt 18, 18

16, 18 de matt: tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai Mon Eglise: la pierre en question n'est pas Pierre l'apôtre mais la pieere qui est la confession de la divinité du Christ. dans ce sens: saint Hilaire, saint Grégoire de Nysse, saint Ambroise, saint Jérôme, saint Jean Chrysostome, Augustin, Acace, saint Cyrille d'Alexandrie, saint Léon 1er, saint Grégoire le Grand, saint Jean Damascène.

21, 15 & s: où le Seigneur dit par trois fois à Pierre: "Pais mes agneaux", "pais mes brebis." Selon les Pères, la triple attestation d'amour correspond au triple reniement et réintroduit simplement l'apôtre dans la communauté apostolique.

Concernant la primauté présupposée, on pourra retenir aussi le patriarche de Constantinople Grégoire VI aux envoyés de Pie IX en 1868: "affirmer l'inégalité des Apôtres, c'est faire injure au Saint Esprit qui les a tous également éclairés."

conséquences de la doctrine:
la conséquence spirituelle de cette doctrine est la destruction de l'Eglise comme communauté divino-humaine., l'unité du choeur apostolique disparaissant au profit d'une église monarchique où le pape peut décider seul (motu proprio) ou comme tête du corps épiscopal, restant l'instance suprême au dessus de la communauté des fidèles.
"si l'on accepte ce genre de théorie [plein et suprême pouvoir du pape]
le sens de l'unanimité qui se manifeste dans l'Eglise primitive est perdu de vue, et avec lui c'est la vie divino-humaine dans le corps du Christ, vrai Dieu et vrai Homme qui devient impossible. Le Christ n'a pas établi de vicaire sur terre, il est resté présent dans l'Esprit Saint. Cette présence agit dans la vie synodale, conciliaire, de l'orthodoxie.(...) L'équilibre entre le principe hiérarchique et le principe communautaire existe pour que la concorde règne, de même que la volonté divine et la volonté humaine de Notre Seigneur Jésus Christ concourent et ne s'opposent pas.(...) C'est pourquoi il y a dans l'orthodoxie une réelle synergie, une colloaboration, entre la hiérarchie et le peuple." est rappelé ensuite la nécessaire approbation des fidèles pour les consécrations des évêques ou des prêtres par l' Axios! (il est digne!).

l'infaillibilité du magistère (doctrine découlant directement de la doctrine du centre divin)
elle est contraire à l'Ecriture et aux Pères; elle est contredite par le témoignage de l'histoire; elle risque d'anéantir la conscience morale.
on peut mentionner, sans développer: matt 7-15, Gal. 1, 8, le canon 31 des Apôtres, le canon 15 du Concile Premier-Second, Gal 2,11, le VIè concile oecuménique relatif à Honorius (Pape Anathémisé, donc faillible s'il fallait le rajouter!)
on peut retenir: "La séparation d'avec l'év^que qui ne pr^che pas la VERITE a toujours été une règle un droit pour tout clerc, pour tout moine ou laïc."

la véritabel infaillibilité
L'Eglise seule est infaillible - l'Eglise, en tant que Corps divino-humain du Seingeur Jésus - Christ qui est sa tête. " Tel est le sens du dogme des deux natures défini au IVè concile Oecuménique de Chalcédoine en 451. En disant que le Christ était une Personne unique en deux natures, à la fois vrai Dieu et vrai Homme, "le même parfait dans la divinité, le même parfait dans l'humanité", semblable à nous tous sans le péché, les Pères ont défini l'Eglise et notre rapport à elle. Aucun homme n'a reçu mission ni pouvoir pour légiférer au-dessus et en-dehors du Corps de l'Eglise. Le non ex concensu Ecclesiae (c'est à dire sans avoir besoin du consentement de l'Eglise) qui définit l'infaillibilité du pape, place ce dernier dans une position que nul n'occupe. Il n'y a rien au-dessus du consentement de l'Eglise, Corps du Christ: les deux natures sont unies sans confusion ni séparation.
(...)
C'est bien à l'Eglise toute entière que le Christ a promis son assistance: "je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde" matt 28,20, même s'il arrive que le nombre de ceux qui la composent sur terre soit réduit.
(...)
L'Eglise latine place le croyant dans un faux dilemme: ou bien le pape est infaillible, ou l'Eglise est faillible. Accepter la seconde hypothèse, c'est réduite l'Eglise à une société humaine ou à un parti politique. Décréter le pape infaillible, c'est mettre l'homme à la place du Dieu-Homme. l'Eglise orthodoxe ne connait pas d'intermédiaire entre Dieu et l'homme: "le Pasteur est au ciel, le troupeau sur la terre".
Stephanopoulos
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Message par Stephanopoulos »

Je trouve curieux que ni l’évêque Strossmayer, ni le Père Wladimir Guettée, ni même les partisans de la papauté au XIXème siècle n'ont mentionné le fait que la pape léon Ier n'a pas signé le 28ème canon du concile de Chalcédoine!

J'ai relu la lettre du pape Saint Grégoire le grand à Jean le Jeûneur, et ce dernier évoque ce canon comme s'il avait été accepté!

D'où sort donc cette histoire du refus du pape Léon de signer le 28ème canon du concile de Chalcédoine?
Stephanopoulos
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Axel a écrit :Claude,

Je vous répondrai en citant les papes orthodoxes Damase et Léon le Grand quand j'aurai trouvé le temps et le courage de traduire les textes en anglais que je vous ai déjà fait parvenir à titre privé. Il est fait mention d'Antioche et d'Alexandrie comme partageant in petrinitas l'autorité du Patriarcat de Rome.
Et l'on verra alors si c'est effectivement le pape Nicolas Ier l'inventeur de la "doctrine hérétique" de la papauté ou si cette même doctrine n'est pas déjà professée par des saints orthodoxes occupant la chaire romaine.
Oui, ce que l'on verra surtout, c'est qu'il est facile d'affirmer en 2004 que la doctrine de Nicolas Ier sur la papauté n'était pas une nouveauté en son temps, mais que, malheureusement pour la papolâtrie, il existe des preuves irréfutables du contraire, dont celle-ci qui me plaît particulièrement et qui vient d'Allemagne.

"Les légats (de Nicolas Ier, NdL) étant arrivés en Bulgarie, tous les prêtres grecs furent chassés de ce pays, et l'on reconnut comme invalide le sacrement de Confirmation qu'ils y avaient administré. C'était lancer à l'Eglise orientale l'insulte la plus grossière, en foulant aux pieds les premiers principes de la théologie chrétienne. Photius ne put tolérer ni cette erreur mêlée d'injure ni les entreprises de Nicolas. Il convoqua à Constantinople (867), un concile auquel il invita non seulement les patriarches et les évêques orientaux, mais trois évêques d'Occident qui s'étaient adressés à lui pour obtenir son appui contre le despotisme de Nicolas. C'étaient l'évêque-exarche de Ravenne et les archevêques de Trèves et de Cologne (mis en gras par moi, NdL) ."

Archiprêtre Wladimir Guettée, La Papauté schismatique, Fischbacher, Paris 1863, p. 311, reproduction anastatique éditions du monastère orthodoxe de l'Archange Michel à Lavardac, s.d. (1992?)

C'est donc un peu gros d'affirmer en 2004 que la doctrine de Nicolas Ier sur la Papauté correspondait à un enseignement traditionnel quand on voit les réactions jusque dans l'évêché de Ravenne (pourtant pas très loin de Rome sur le plan géographique) en 867.

Si la doctrine papale avait correspondu à quoi que ce soit de reçu en Occident, les archevêques de Trèves et de Cologne auraient-ils écrit à Nicolas Ier cette lettre citée par le docteur Guettée en note de bas de page:

"Sans concile, sans examen canonique, sans accusateur, sans témoins, sans nous convaincre par des raisons ou des autorités, sans avoir notre aveu, en l'absence des métropolitains et des évêques nos suffragants, vous avez prétendu nous condamner selon votre fantaisie, et avec une fureur tyrannique; mais nous ne recevrons point votre maudite sentence, éloignée de la charité d'un père et d'un frère; nous la méprisons comme un discours injurieux; nous vous rejetons vous-même de notre communion, puisque vous communiquez avec des excommuniés; nous nous contentons de la communion de toute l'Eglise et de la société de nos frères que vous méprisez et dont vous vous rendez indigne par votre hauteur et votre arrogance. Vous vous condamnez vous-même en condamnant celui qui n'observera pas les préceptes apostoliques que vous violez le premier, anéantissant autant qu'il est en vous les lois divines et les sacrés canons, et ne suivant pas les traces des papes vos prédécesseurs."

Si vraiment la doctrine de la juridiction universelle de la Papauté avait été si traditionnelle et les patriarcats orientaux de simples subdivisions territoriales soumies à Rome ainsi que le Vatican en use aujourd'hui avec les "patriarches" uniates, les évêques de deux des sièges principaux d'Allemagne auraient-ils éprouvé le besoin de se tourner vers le siège de la Nouvelle Rome pour protester contre les abus du pape de l'Ancienne Rome? Le texte de Gerbert d'Aurillac que j'ai reproduit dans le fil "la Papauté moderne jugée par Sylvestre II" ne montre-t-il pas que cette doctrine n'était toujours pas reçue en Occident à la fin du Xème siècle?

Enfin, le prétendu complot des "Barbares" germaniques contre l'Orthodoxie, si souvent évoqué sur ce forum, est à nuancer. Complot de Charlemagne et de son entourage, certes. Mais cela n'est pas valable pour Otton III, par exemple. Et la lettre que je viens de citer montre bien que jusqu'au coeur de l'Allemagne, encore en l'an 867, les évêques se tournaient vers l'empire des Romains et le patriarche de Constantinople pour protester contre les abus de Nicolas Ier. Ce qui montre bien qu'il y avait encore des évêques orthodoxes en Rhénanie en 867, et que la chute de l'Occident hors de l'Orthodoxie est bien le résultat d'une guerre civile à l'intérieur des Eglises occidentales - et ce jusqu'en Germanie, où pourtant l'Orthodoxie était moins assurée que dans les Gaules ou en Italie.

Voilà les faits historiques. Que certains préfèrent la fidélité à une institution humaine à la vérité est leur libre choix d'homme. Mais qu'ils ne prétendent pourtant pas changer l'Histoire, car les faits sont têtus et les pierres crient.
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