Peut-on être Orthodoxe et vivre en France ?

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eliazar
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Peut-on être Orthodoxe et vivre en France ?

Message par eliazar »

« … Ils allaient çà et là, vêtus de peaux de mouton ou de toisons de chèvre, privés de tout, maltraités, affligés, eux dont le monde n’était pas digne, errant dans les déserts, les montagnes, les cavernes et les antres de la terre… »

Ce passage de l’épître aux Hébreux me bouleverse toujours ; c’est au chapitre 11, la séquence qui commence au verset 32 … et j’allais écrire : qui se termine au verset 40. Mais en réalité, il es impossible de s’arrêter là, et on est comme aspiré par un grand tourbillon de vent ascensionnel, qui nous engouffre dans le chapitre 12 qui lui fait suite, en suivant ce texte splendide : « Ainsi donc, nous aussi, environnés que nous sommes d’une telle nuée de témoins… » et puis : « Vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang dans la lutte contre le péché, et vous avez oublié l’exhortation qui vous est adressée comme à des fils… » et encore : « Quel est donc le fils que ne corrige pas son père ? Si vous êtes exempts de cette correction à laquelle tous ont part, c’est que vous êtes des bâtards et non des fils … » et surtout, bien sûr : « Recherchez la paix avec tous, et la sanctification – sans laquelle personne ne verra le Seigneur. Veillez à ce que personne ne soit privé de la grâce du Seigneur… »

Nous qui sommes orthodoxes, en France - et en même temps qui essayons chaque jour de le devenir vraiment ! – nous avons parfois (mais c’est de manière bien récurrente) le sentiment d’être nous-mêmes ces étrangers dans notre propre pays. Sans doute pas au point d’être maltraités, ni privés de tout - puisque nous avons tout de même une paroisse orthodoxe disponible ; même si elle est à 150 km de chez nous (quand ce n’est pas plus loin encore) et même si nous n’avons pas les moyens, ou la santé, pour nous y rendre tous les mois…

Non ; pas vraiment maltraités - mais méprisés, oui ; souvent.

Pas méprisés à cause de nos péchés, ce qui serait encore une sorte de bénédiction, mais à cause de notre foi. Même les musulmans ont droit à plus de considération : nous vivons pourtant sur une terre qui a été défrichée de sa sauvagerie initiale par les apôtres venus de la Méditerranée orientale, et imprégnée par le sang des martyrs orthodoxes, un pays qui a été une terre chrétienne orthodoxe ( et combien !) pendant plus de 800 ans : bien avant de commencer à faire figure de nation, reconnaissable pour telle. Et nos martyrs l’ont été souvent de la main des musulmans, même sur cette terre au bout de l’Occident. Pourtant, la religion des bourreaux de l’orthodoxie est mieux connue, et plus « admirée » ( !) par nos édiles que la Foi de nos Pères.

Tout récemment, j’en ai encore fait la constatation.
Un de mes amis les plus proches, en butte à une crise familiale (il est orthodoxe et cette famille ne l’est pas), s’est entendu dire : « Nous sommes allés voir l’avocat de la famille, et il nous a confirmé que nous pouvons te mettre dehors quand nous le voudrons si tu tardais trop à t'en aller de toi-même ; il nous a dit aussi que de toute évidence, ta fameuse orthodoxie n'a rien à voir avec l'Église; c'est une secte, et très dangereuse"…
Il est vrai que cela se passe en milieu rural, dans ce qu’on appelait encore hier « la France profonde ». Mais cet ami m’a confirmé que le bruit courait dans le bourg qu’il était un gourou, et qu’il faisait partie d’une secte ; ceux des siens qui cherchent à l’expulser ne sont sans doute pas étrangers à cette rumeur ; n’empêche qu’elle court, sans éveiller le moindre esprit critique chez les braves gens qui l’écoutent bouche bée, avant de la colporter à leur tour.

Qu'a donc fait de bien différent, au siècle dernier, l'empire occupant de l'époque, mais alors vis à vis des juifs ? Et qu'ont fait alors nos concitoyens, si ce n'est courir vers les boîtes aux lettres de leurs kommandantur pour les dénoncer ?

Est-ce donc ainsi, sur cette antique terre d’orthodoxie qu’est le midi de la France (même si tout a été fait à Rome pour le lui faire oublier) que le commun des Français nous perçoit ? Une secte pire que les autres, plus dangereuse même que la Scientologie ou le New Age - parce qu'il y a des peuples entiers « qui sont tombés dedans depuis l'an mille » ?

Car c’est bien ce que pense la plupart de nos concitoyens (quand ils pensent aussi loin, ce qui n’est pas si répandu !) : les orthodoxes sont des fanatiques qui se sont séparés du Pape au Moyen-Age.
Bien sûr, ils ne savent rien de 1054, mais quelque chose comme çà doit tout de même traîner dans le fonds de leurs têtes, surtout depuis les guerres du Kosovo - et de Bosnie. Beaucoup se disent (surtout depuis que les chefs du tentaculaire empire étasunien insistent sur leur nouvelle stratégie de « guerre mondiale contre le terrorisme ») qu’il faudra bien éliminer un jour ou l’autre ces peuples dangereux, racistes, terroristes, partisans de l'épuration ethnique, bref ces peuples qui sont encore "orthodoxes comme les Russes".
Sans être vraiment capables d’analyser cela bien clairement, les peuples orthodoxes font pour eux partie du « bloc des ennemis » : entre le grand diable Staline et le patriarche de Moscou qui refuse de recevoir le pape, et les méchants Serbes qui faisaient du mal aux gentils musulmans du Kosovo, font-ils encore grande différence ? Tout çà, c’est le bloc de l'Est. La grande menace qui vient du froid.

Eh ! bien, quand je lis sur le Forum certaines interventions (pourtant écrites par des catholiques romains de la tendance la plus ouverte, celle qui s’intéresse peu ou prou à l’Orthodoxie ; ce qui est statistiquement rarissime), et que je lis ensuite les réactions qu'elles entraînent chez nous, je commence à me demander si nous ne sommes pas dangereusement inconscients du monde réel qui nous entoure. Nous blablatons de confiance, comme si nous étions entre esprits supérieurs, devisant entre eux de choses élevées, de la perfection de la doctrine des Apôtres et de la nécessité de vérifier la nôtre à son aune, de la définition la plus exacte possible du mystère de la sainte Trinité, etc. etc. - alors que nous ne sommes pas du tout dans la situation de nos premiers illuminateurs, et que nous ne vivons pas au coeur d’une contrée peuplée de "bons païens" à convertir, mais que nous sommes le plus souvent en posture de chemineaux de passage sur la route, face à des chiens à l'attache qui reniflent une odeur de bêtes sauvages dès que nous ouvrons la bouche, et qui se mettent à aboyer au loup - comme pour alerter leur maître... Attention, rôdeur ! Attention, secte ! Attention, gourou !

Et pourquoi pas, demain : « Attention, terroriste ! » pendant qu’on y est ?

C’est une question plus grave qu’il y paraît. Pouvons-nous encore les considérer comme nos frères (... en Adam) ou bien faudra-t-il un jour plus ou moins proche nous chercher quelque caverne dans la montagne - pour nous y réfugier comme des hommes préhistoriques à l'arrivée de la prochaine ère de glaciation ?
Parfois, je dois reconnaître que j’en ai eu l’envie. Mais chaque fois que j'ai essayé, j'ai dû bientôt redescendre dans la plaine : parce que la glaciation n'était pas encore arrivée, parce que la société de consumation continuait plus ou moins à tourner, vaille que vaille - parce qu'il fallait bien vivre : les enfants, leurs études, les impôts, la Sécu … et ce fameux hameçon de la retraite au bout de la dernière ligne droite, le dernier verrou qui protège encore un peu les vieillards sans compte en banque – et que cette société de dirigeants avides de fric (et d’élus escrocs) essaie de plus en plus de leur voler pendant qu’ils dorment.

Bien sûr, c’est un problème de société, et on me dira que notre Forum n’est pas là pour en traiter. Mais je crains que tout soit dans tout, et qu’un train en cache un autre : doit-on vraiment préférer être écrasé par celui-ci, et se bander les yeux pour ne pas voir venir l’autre ?!

Comme disait un écrivain qui eut son heure : « C’est Mozart qu’on assassine ! ». Nous ne sommes pas Mozart, mais en étant tout simplement orthodoxes dans un pays qui n’est même plus vraiment chrétien (ni chrétien hérétique ou schismatique, peu importe en l’occurrence), ne sommes-nous pas déjà entrés jusqu’au cou dans le bain glacé de cette problématique ?

Et, dernière question : serais-je vraiment le seul à ressentir ce malaise ?
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Antoine
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Message par Antoine »

Kissinger déclarait lui-même ;" il faut extirper l'Orthodoxie de la Grèce".
Irène
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Message par Irène »

Ce que vous dites, Eliazar, est extrêmement douloureux et il est vrai que les évènements politiques des dix dernières années ont pu permettre aux esprits mal intentionnés de faire un "amalgame" entre orthodoxie et "méchants".

Mais je me permettrai seulement de dire que je remarque combien l'on se moque également des catholiques, du pape, dans les médias ; J'ai entendu plusieurs fois le Vatican être appelé le "vaticon" et cela me révulse car on ne s'attaque qu' aux chrétiens.

Voyez comme les profanations dans les cimetières catholiques, dans une paroisse protestante ont laissé les autorités de marbre. Que les orthodoxes n'aient éventuellement pas les moyens de se faire entendre, peut-être, mais les catholiques sont restés cois, en ces circonstances, de même que les protestants.

J'ai écrit une fois, sur le forum, que nous aurions bien besoin d'un (e) bon (ne) attaché (e) de presse ; C'est un problème d'information. Il faudrait de la lucidité et du courage. En nous concertant tous peut-être aurons-nous une idée ?
Antoine
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Message par Antoine »

peut-être aurons-nous une idée ?
Et si on faisait un forum? On pourrait peut-être l'appeler:http://www.forum-orthodoxe.com
Qui sait, ce serait peut-être un début...
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Que les Etats-Unis se soient donnés comme mission d'extirper l'Orthodoxie de la surface de la terre et que leurs valets européens soient particulièrement nombreux ne doit quand même pas non plus nous amener à généraliser les réactions qui proviennent de milieux arriérés dans des régions sorties de l'Histoire - ce qui est probablement le cas du village où habite ton ami, Eliazar.

En Suisse romande, je connais aussi des régions où le taux de pratique religieuse inférieur à 10% et en baisse constante n'empêche pas les manifestations de la papolâtrie la plus outrée, où toute discussion religieuse se termine par un rituel: "Vous avez raison... Mais reconnaissez-vous le Saint-Père?" et où l'intolérance à l'égard de qui passe à l'Orthodoxie ou au protestantisme ne connaît pas de bornes.

Il y a peut-être un lien de cause à effet avec le fait que ces régions sont restées à l'écart des deux révolutions industrielles et servent depuis 150 ans de réservoir de main d'oeuvre à des régions comme celle où je vis, où je peux t'assurer que tout le monde se fiche complètement que l'on soit orthodoxe, bouddhiste ou adorateur de l'oignon...

Ce dont je suis sûr en revanche, c'est que même les régions que j'évoquais plus haut, dans trente ou quarante ans, seront comme la mienne. C'est un mouvement irrésistible. La preuve, c'est que les adolescents de ces cantons commencent petit à petit à se rapprocher des mentalités des cantons développés: à partir du moment où l'on commence à penser par soi-même, il est très difficile de revenir en arrière!

Eliazar, avant de t'inquiéter des conséquences des guerres de Bosnie et du Kosovo sur la perception de l'Orthodoxie, fais un petit test: quel pourcentage de la population sait que le peuple serbe était naguère orthodoxe?

Il me vient un souvenir de mon école de recrues en 1996. J'avais fait savoir à mon commandant que j'étais orthodoxe, histoire de lui expliquer que je ferais des demandes de congé à l'occasion de certaines fêtes religieuses. La nouvelle parvient à mes camarades. Ils me demandent: "Il paraît que tu es orthodoxe. C'est quoi?" Moi: "La religion des Grecs et des Russes." Eux: "Ah bon!" Et fin de l'histoire. Le sujet n'est plus jamais revenu sur le tapis. Personne n'en avait rien à faire. Et quand un officier de retour d'une mission d'observation en Bosnie nous a fait une conférence (d'ailleurs impartiale) sur la situation là-bas, je me suis rendu compte qu'aucun de mes camarades n'interprétait cette guerre en termes religieux. Pour eux, c'était juste une guerre entre trois "ethnies" dans les Balkans, point final!

Il faut aussi prendre consience que les appels à la croisade que les milieux catholiques-romains ont lancé contre la Serbie vers 1991-1992 (Bernard Antony dit Romain Marie était insurpassable dans ce rôle) ne touchent qu'une frange régressive (en termes démographiques) de la population.
Régressive, tout simplement parce que les générations nées après 1960 sont devenues totalement hermétiques à ce type de discours. Et ce n'est pas parce qu'un jeune militant du Front national d'Auvergne avait été assez imbécile pour se faire tuer sous l'uniforme croate en 1992 au nom des appels à la croisade pour la Papauté lancés par Bernard Antony & Cie que cette exception change la règle générale...
Irène
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Message par Irène »

Antoine, vous venez d'avoir une excellente idée !
pascal
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Message par pascal »

il m'avait semblé toutefois, au moment du conflit du kosovo que des voix s'étaient élevées pour rappeler que cette province était le coeur orthodoxe de la Serbie... bon c'est vrai qu'à côté de la puissance médiatique déployée pour justifier l'intervention des américains (et des français malheureusement...) ça n'a peut être pas pesé trop lourd, mais enfin cela a été dit à plusieurs reprises.

mais bon, malheureusement, le cas est presque le même pour Chypre... il faut regarder des émissions à 3h du matin pour être éclairé sur la situation de ce pays... qu'est ce que les chypriotes pèseront face à la volonté à peine masquer de l'ONU et de l'Europe de faire entrer la Turquie par la fenêtre après qu'elle se soit fait virée par la porte de notre "vieux continent".

que dire de la situation des coptes en Egypte, qui même s'ils sont monophysites je vous l'accorde sont régulièrement "pogromisés" par des autorités parait il modérées...et j'en passe...

oui d'une certaine manière, être orthodoxe et vivre en France c'est dur... dans d'autres, les églises et les paroisses ne sont pas à 150km mais vous vivez plus fréquemment le martyr.

encore que dans certains coins de France, si vous portez la soutane, vous risquez votre vie...
Jean-Serge
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Malaise...

Message par Jean-Serge »

Que tout ne soit pas parfait, c'est bien le cas; en revanche, je n'éprouverais pas un si grand malaise...

Le point où je me retrouve, c'est en ce qui concerne le nombre très réduit de lieu de cultes orthodoxes en France.Cela dit, pour 200000 orthodoxes au plus, est-il si réduit que ça? Sans oublier qu'il y a aussi l'Eglise domestique...

Cela dit, est-ce là la question majeure?
Priidite, poklonimsja i pripadem ko Hristu.
Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

Bien sûr, les chrétiens ne sont jamais nulle part vraiment chez eux, même dans leur patrie selon la chair. Mais je crois que le problème très intéressant posé par Éliazar est de savoir s’il y a un préjugé anti-orthodoxe dans l’opinion publique française.

Il y a eu un tel préjugé. Je n’ai pas été aux premières loges pour m’en rendre compte, mais je me rappelle mon enfance à Nantes, encore dans l’immédiat après-guerre, où on faisait la gueule aux Serbes et aux Russes. Les uniates (il y en avait quelques uns dans une ville industrielle) étaient à peine mieux traités. Des amis serbes et grecs m’ont raconté ce que représente pour eux le rapprochement œcuménique : « Enfin on est reconnus !» Ce n’est pas mon point de vue, mais on doit comprendre que derrière ces mots il y a route le souffrance que devait représenter pour eux le mépris qui s’attachait à l’Orthodoxie.

Et que dire d’un passé à peine plus ancien ? Les Russes et les Grecs obligés de construire keurs cathédrales dans de petites rues larérales (comme les Juifs). Et jadis le père Wladimir Guettée contraint à aller finir sa vie au Luxembourg !

Il y a certainement encore en France des gens qui ont des opinions de ce type. Je ne doute pas que dans le grand Ouest, si on cherchait bien on en trouverait, et même ailleurs. Néanmoins le panorama confessionnel, le PSF (Paysage spirituel français), est en train d’évoluer très rapidement.

D’abord parce que les gens n’ont plus de religion, ou croient ne plus en avoir,(mais il vont encore en foule à la Toussaint dans les cimetières). L’Église catholique est en chute libre. Il doit bien y avoir quelques provinciaux qui y croient, plus des Antillais et des Ivoiriens et en cherchant bien dans les campagnes profondes... Mais qui prend encore Lustiger au sérieux ? Mathématiquement en France il ne pourra plus y avoir que trente ou cinquante églises en fonctionnement, à moins qu’ils ne fassent massivement appel au clergé africain (c’est déjà commencé).

Cette disparition laisse un grand vide. Y a-t-il persistance des stéréotypes anti-orthodoxes ? Certainement oui, mais dans quelques cantons retardataires. Mais malgré l’obstination acharnée de nos évêques (orthodoxes) à ne pas faire leur boulot, et en dépit de l’obstination de la Frat à présenter l’Orthodoxie sous des couleurs qui n’eussent pu impressionner que les cathos des années 1950, je crois que l’image de l’Orthodoxie dans les stéréotypes collectifs est en train de devenir de plus en plus positive.

Il y a à cela des raisons diverses, superficielles et événementielles, mais aussi le fait d’une évolution profonde des chrétiens d’Occident qui les amène à reconsidérer ce qui était la vice profond de leur religiosité mourante.

Ce n’est pas par hasard que le Pape a jugé inévitable de réciter le Symbole sans le Filioque. Ce n’est pas par hasard que des théologiens catholiques dénoncent l’absence de l’épiclèse dans la Messe catholique. Ce n’est pas par hasard qu’ils rendent à la Russie, sans contrepartie, une icône, etc. Et je suis persuadé qu’on verra encore bien d’autres choses semblables. Le prestige intellectuel de l’Orthodoxie s’est considérablement accru. Il n’y a que le clergé orthodoxe pour ne pas s’en rendre compte.

Nos valeureux évêques n’y sont bien entendu pour rien, et le Vatican de son côté s’efforce de tirer profit de chacun des gestes qu’il doit consentir. Mais je suis convaincu que le véritable moteur de ce changement d’attitude est en dernière analyse le travail de l’Esprit, qui renverse les montagnes. La montagne de l’inertie épiscopale orthodoxe sera peut-être la plus difficile à renverser, mais elle le sera.

Évidemment mon expérience est limitée à la région parisienne, où on est moins marqué par le poids du passé. Mais je n’y vois plus depuis très longtemps le moindre signe d’une réaction anti-orthodoxe , et je vis dans un quartier très populaire. Il m’arrive de temps à autre de marcher dans la rue ou d’aller au café avec des popes convenablement ensoutanés, je suis connu pour cela dans mon quartier, je n’ai rencontré du côté français que de la curiosité amusée (ceux qui sont véritablement intéressés se signalent de manière plus personnelle).

Par contre j’ai vu des orthos de souche que j’ignorais complètement venir en pleine rue baiser la main du prêtre (boulevard Barbès !). Il sont de plus en plus nombreux dans le prolétariat immigré de Paris. Au cours de mes séjours hospitaliers j’ai pu voir deux infirmiers, un roumain et un copte (!!!) se serrer les coudes en tant qu’orthodoxes. Quand ils ont vu une petite icône sur ma table de chevet ils ont été profondément étonnés : il ne savaient pas qu’il y a des orthos en France !

Quant à la dimension européenne du problème orthodoxe, elle n’est pas encore passée dans la tête des gens, mais dans les couloirs des pouvoirs elle donne plutôt de la crédibilité à l’Orthodoxie, car ceux qui sont un peu au courant comprennent que si l’Orthodoxie tourne le dos à l’Europe, l’Europe y perdra beaucoup.
Jean-Louis Palierne
paliernejl@wanadoo.fr
eliazar
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Message par eliazar »

Chère Irène,

Vous avez écrit : "J'ai écrit une fois, sur le forum, que nous aurions bien besoin d'un (e) bon (ne) attaché (e) de presse ; C'est un problème d'information. Il faudrait de la lucidité et du courage. En nous concertant tous peut-être aurons-nous une idée ?"

Et moi j'ai envie de vous compléter : "Et si nous avions des Évêques, en France, qui se décident à faire leur métier : n'aurions-nous pas déjà "d'un (e) bon (ne) attaché (e) de presse" ?

Pour le courage et la lucidité, nos Évêques ont reçu tous les charismes nécessaires à leur mission.

Sûrement, la réalisation de votre (notre) vœu est pour demain !
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Geoffroy le Bouillonnant

Attachés de presse et cie

Message par Geoffroy le Bouillonnant »

Le rôle des évêques est important : mais il convient de ne pas oublier que des laïcs peuvent créer des associations trans-juridictionnelles telles les fraternités. Celles-ci peuvent réaliser un excellent travail...
eliazar
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Message par eliazar »

Cher Jean-Serge,

Vous avez écrit : "Le point où je me retrouve, c'est en ce qui concerne le nombre très réduit de lieu de cultes orthodoxes en France.Cela dit, pour 200000 orthodoxes au plus, est-il si réduit que ça? Sans oublier qu'il y a aussi l'Eglise domestique... Cela dit, est-ce là la question majeure?"

Je ne le crois pas non plus.
La question majeure est celle du recrutement et de la formation d'un clergé capable de célébrer, et donc de l'organisation de diocèses organisés territorialement.

Quand il y aura un Évêque orthodoxe par région (au lieu de deux ou six dans la même ville, mais de deux ou de six Églises qui restent chacune derrière son propre paravent), leur synode pourra enfin organiser UN clergé orthodoxe, et créer des lieux de culte non luxueux, mais à la portée géographique des noyaux de fidèles existants - même s'ils sont restreints.

Je vois en pleine Gascogne rurale ouvrir des mosquées dans des patelins où il n'y a que deux familles musulmanes. Elles ne cherchent pas à ressembler à la Grande Mosquée de Paris - mais elles existent. Je sais, il y a un but politico-diplomatique derrière ces créations. Et après ?

Nos Évêques ne pourraient-ils se décider à avoir un but apologétique qui leur donnerait le même dynamisme - pour l'Église - que les imams pour l'Islam ?

Nous, laïques, serions trop heureux de les bâtir de nos propres mains, si le feu vert nous était enfin donné - et aussi un prêtre, bien sûr.

Il y a vingt ans de cela, à trois, nous avions trouvé le lieu nécessaire - et l'autorisation de l'utiliser avait été accordée par son propriétaire, l'évêque catholique romain d'un diocèse méridional. J'avais personnellement déjà réuni la plupart des Livres nécessaires, Évangéliaire, Parémies, Ménées, livres de chant, etc. Plus les principales icônes. Nous avions nous-mêmes trouvé le prêtre.

L'ami (prêtre kto) qui m'avait obtenu l'autorisation AMICALE et PERSONNELLE de son évêque m'a téléphoné deux mois plus tard, au moment où nous étions en train d'organiser la collecte pour commencer à repeindre cette ancienne église conventuelle désaffectée depuis un demi-siècle : notre évêque orthodoxe venait d'intervenir auprès de son collègue kto pour lui demander de nous retirer l'autorisation.

Je ne suis pas certain qu'il sache, là où il a été muté maintenant, que j'ai été mis au courant de sa démarche. Mais nous sommes au moins trois qui ne l'oublierons pas de si tôt. Et je trimballe toujours les Livres - et les icônes... de déménagement en déménagement.

C'est cela, qui est la question majeure. La frilosité de l'Égise de Laodicée.
Elle a d'ailleurs été traitée clairement dans l'Apocalypse, au chapitre 3ème.
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Geoffroy le Bouillonnant

Pourquoi si peu d'Eglises orthodoxes

Message par Geoffroy le Bouillonnant »

Bonjour Eliazar,

Ce manque d'églises serait donc dû à la frilosité. Je me demande bien s'il n'existe pas des problèmes pratiques.

- du point de vue financier, une église doit coûter bien cher. Je sais qu'elle peut être modeste mais... il y a un certain coût...

- autre problème pratique, où les localiser? Elles devraient être facilement accessible aux fidèles dispersés un peu partout. Seul hic, il faudrait qu'on sache localiser ces fidèles

- autres points, sous quels juridctions placer ces églises. La juridiction de quel Patriarcat exactement? Il faudrait une corrdination de ce point de vue. Mais est-elle possible car elle supposerait qu'il n'yait guère de compétition entre les différentes juridictions présentes en France, ce dont je ne suis guère sûr

- pour ce qui est des prêtres, je crois que les laïcs doivent arrêter d'attendre qu'on leur envoie des prêtres d'autant que un homme marié peut devenir prêtre. Bien souvent, le prêtre peut être trouvé sur place et bien sûr formé. Du point de vue de la formation, n'oublions pas que l'Esprit a fait des pêcheurs du lac des théologiens. Sans vouloir me vanter, je crois pouvoir dire qu'avec tout ce que j'ai lu, je pourrais faire des homélies bien plus qu'acceptables...
danilo
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hep

Message par danilo »

Sur vos 4 points Geoffroy, je ne vois pas où sont les problèmes.
Par contre il y a un point qui me fait énormement sourire, c'est le fait que l'on pourrait prendre des gens comme ça sur place et vite les former pour qu'ils deviennent des prêtres ( vu le rythme imposé par votre phrase qui va à 300 km/heure, ça décoiffe...).
Votre point de vue me rappelle surtout certaines églises évangéliques que j'ai vu et où chacun à un moment donné, après courte une étude biblique, peut devenir prêtre, curé ou pasteur, vous faire la morale et vous donner une explication infallible sur le sens de la Bible. C'est assez marrant d'un coté quand on y assiste mais triste quelque part.
Je pense que les prêtres se forment de toute façon de plus en plus sur place et qu'on les cherchent quand ils en manquent urgemment comme partout. Regardez le nombre de prêtres catholiques étrangers en France appelés ces dernières années.
Antoine
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Message par Antoine »

Geoffroy le bouillonnant a écrit :Sans vouloir me vanter, je crois pouvoir dire qu'avec tout ce que j'ai lu, je pourrais faire des homélies bien plus qu'acceptables...
Dommage qu'on n'ait pas pu s'en faire une idée sur le forum et tout le monde sait bien que la prêtrise se réduit à l'art de l'homélitique.
Merci de votre participation à laquelle nous mettons un terme.
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