A propos du slavon et du français

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Antoine
Messages : 1782
Inscription : mer. 18 juin 2003 22:05

A propos du slavon et du français

Message par Antoine »

Date : 05.04 16h37
auteur : Éliazar


Chère Olia,
J'aime bien vos messages et je les apprécie à leur
juste valeur. Aussi vous
prié-je de ne voir dans ma position au sujet de cette
Passion célébrée par un
archevêque orthodoxe russe dans une cathédrale
parisienne hétérodoxe (et à mon
humble avis complètement hérétique) aucun
dédain de la « couronne d'épines qui a
été portée par [votre] Église », non plus que « du
couronnement de ses martyrs »
– mais enfin, Olia, ce n'est tout de même pas de
ma faute si le hiérarque qui a
commis cette incongruité représente (bien mal à
mon avis) le patriarcat de
Moscou !
Ni si celui qui lui sert en l'occurrence d'attaché de
presse est un diacre, lui
aussi Russe !

Je n'ai rien contre les Russes, bien au contraire. Et
mes premiers contacts
émerveillés avec l'Orthodoxie ont été, au temps de
mon enfance niçoise, les
Saintes Liturgies dominicales auxquelles je me
faufilais derrière un pilier de
la cathédrale russe St-Nicolas. On n'oublie jamais
ses premières amours.
Mais je crois qu'on a le devoir d'appeler un chat un
chat – même si on est
orthodoxe, et qu'on vit son orthodoxie en France !
L'Église Orthodoxe, dans ce pays, respire avec de
plus en plus de difficulté
(au sens doctrinal) dans un milieu hélas très
décadent. De plus en plus,
l'Église Orthodoxe, ici, me semble pour ainsi dire
rongée par une véritable
colonie de termites. Ce n'est pas parce que j'ai
renoncé à toute activité autre
que la prière que je n'en souffre pas. Et si j'ai
demandé mon admission dans
l'Église Orthodoxe de Serbie (et seulement depuis
la guerre du Kosovo, c'est à
dire autant pour des raisons de protestation
patriotique que par affection pour
le peuple serbe martyr) c'est essentiellement parce
que sa doctrine est resté
inébranlablement fidèle à l'enseignement des
Pères. J'aurais aimé pouvoir dire
que la somme de doctrine orthodoxe moderne que
représente l'œuvre du Père Justin
avait été écrite par un Russe – mais ce n'est pas
vrai.
Ceci dit, ma chère Olia, je vous avoue que je m'en
contrefiche ; l'Église est
le Corps du Seigneur Jésus, et ne saurait avoir à
mes yeux ni couleur, ni
nationalité : s'Il avait été nègre, ce serait la même
chose pour moi. Notre cher
saint Paul nous en a prévenus à cor et à cri, il n'y a
plus en elle ni Juifs, ni
Grecs, ni hommes, ni femmes (ou plutôt il serait
grand temps qu' il n'y ait plus
en elle … etc.) – et j'en ai plus qu'assez d'entendre
crachoter que « les Russes
font du théâtre », ou qu'ils « chantent la liturgie
comme si c'était un chœur
d'opéra » (ce qui n'est historiquement pas faux,
mais n'empêche pas cette
liturgie d'être très belle et très profondément
spirituelle), ou encore, comme
vous le glissez au détour d'un paragraphe un peu
trop nationaliste à mon goût :
« Nous espérons la création d'autres paroisses
francophones, bien sûr... sur une
base bien française, notamment… »

Mais qu'est ce que cela veut dire, Olia ?! Nous ne
demandons pas mieux, vous
savez ? Savez-vous que presque chaque fois que
des orthodoxes francophones ont
été sur le point d'ouvrir une paroisse « bien
française » (comme il vous a
échappé de l'écrire, par un malheureux lapsus ), ils
ont été contrés en sous-
main par des hiérarques plus ou moins proches de
la coterie parisienne à
laquelle je fais allusion ? Et souvent même par les
laïques de leur propre
paroisse qui à la fois refusaient de les y admettre,
mais s'opposaient à ce
qu'ils s'en aillent « ailleurs » - comme si aller là où
l'on arrive enfin à
comprendre l'enseignement de la Liturgie, c'était «aller ailleurs»?
C'est bien aussi un prêtre de l'Église Orthodoxe
russe qui me disait, en pleine
réunion paroissiale il y a cinq ou six ans, que certes
! il n'était pas opposé à
des célébrations en langue vernaculaire (comme
les canons le prescrivent, chère
Olia, ne vous en déplaise !), c'est à dire en
français, pour les fidèles qui
vivent en France (et qui le comprennent visiblement
tous) mais que pour cela,
comme « ils » n'étaient pas vraiment prêts, il
faudrait au moins attendre
cinquante ans ! Ce qui, vu mon âge, revenait à me
conseillait de me faire
enterrer en slavon !

Mais où est l'Orthodoxie, dans tout cela, chère Olia ?
Pourquoi tant de gens
veulent-ils en faire une chasse gardée, rien que
pour « leur Église-mère » à eux,
où ils veulent bien accueillir les francophones (ou
les non-russes, non-grecs,
non-arabes, etc…) à la manière de saint Alexis : à
condition qu'ils se cachent
silencieusement sous l'escalier – par charité
chrétienne comme disent les gens «bien» ?
Est-ce de crainte que d'autres qu'eux ne
comprennent la Liturgie,
l'Évangile, l'Apôtre, voire le prône ?
Aurait-on peur que l'Orthodoxie soit enfin comprise,
et que les Français
déboussolés n'évitent les sectes pour se convertir
vraiment ? Ou qu'ils
deviennent trop nombreux à étudier l'Orthodoxie, et
que leur foi toute neuve
n'empêche les cercles parisiens de diriger leurs
ouailles trop confiantes, comme
les petits enfants pipés par le sinistre joueur de
flûte de Hamelin, vers les
cavernes romaines ?

Fraternellement et bon Carême

Éliazar
Antoine
Messages : 1782
Inscription : mer. 18 juin 2003 22:05

A propos du slavon et du français

Message par Antoine »

Date : 05.04 17h35
auteur : Olia


J'y étais, à la vénération de la Couronne d'épines,
il y avait une difficulté
évidente mais l'office et la vénération n'était pas
une incongruité. La prière
et la présence de nombreux orthodoxes y compris
ceux qui sont bien avertis (plus
que vous et moi à bien d'égards, notamment en
termes spirituels) en sont les
témoins.

Quant à la remarque concernant le slavon
d'Eglise auquel je tiens tant, elle
n'était pas tellement adressée à vous mais à un
autre intervenant.

Que Dieu vous bénisse,

Olga.
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