Adieu, Bonjour : ce n'est qu'un Au Revoir
Publié : jeu. 21 août 2003 6:26
Non, notre petit Forum n’est pas « L’Orthodoxie ». N'y mettez pas d'emphase.
Ce n’est jamais qu’un petit salon, où se retrouvent 5 ou 6 personnes. Elles se connaissent, savent reconnaître, même à l’aveugle, les caractéristiques, les défauts, les qualités de chacune des autres, et haussent les épaules (imperceptiblement) ou sourient (dans leur barbe) ou vitupèrent (en clignant de l’œil aux autres) aux saillies de la dernière qui a parlé ; parfois même elles vont fumer une cigarette sur le balcon pour glisser un mot en aparté à l’une ou l’autre, puis après avoir ainsi actionné leur soupape personnelle, jettent leur mégot dans la rue et reviennent dans le petit salon parce que, somme toute, la conversation est en train d’aborder un sujet vraiment intéressant – et que du coup les traits de caractères ou les défauts d’élocution de tel ou telle perdent cette soi-disant importance qu’ils n’ont du reste jamais vraiment eue.
Et quand il manque depuis quelques jours, celui (ou celle) avec qui on se crêpait le chignon régulièrement pour des questions de bottes devient très vite un sujet d’inquiétude – et on se rend compte (en l’appelant chez lui ou elle pour savoir s’il ou elle n’est pas malade) qu’il ou elle nous était bien plus cher qu’on croyait.
Bien sûr, dès son retour dans le salon, on recommence à le trouver insupportable – mais cette fois, on sait que ce sont nos propres impatiences qui n’arrêtent pas d’aller buter contre le mur de ses petits défauts – à la manière de l’ASDIC, qui en nous renvoyant le son que nous émettions de nous-mêmes nous permet de situer l’autre, de l’évaluer à notre aune. Et on recommence à hausser les épaules ou à sourire dans sa barbe – mais cette fois, avec une grande tendresse qu’on essaie bien sûr de dissimuler, pour n’embarrasser personne. Et parfois même, cette tendresse que nous n’avions pas perçue auparavant nous incite à nous taire au lieu de répliquer.
Et ce silence, c’est une des facettes de l’amour.
Pour saisir ces mouvements imperceptibles de nos propres humeurs, et ce que les aspérités de l’autre nous cachaient de sa richesse, il a fallu du temps, et du silence, et ce miracle permanent de pouvoir rester immobile en regardant monter les volutes de fumée vers le plafond, dans le relatif brouhaha du petit salon, en écoutant les autres penser pour vous qui suçotez béatement votre propre silence.
Vous êtes entré depuis trop peu de temps, et vous ressentez encore comme brûlure de cigarette ce regard à la dérobée par lequel on vous pèse; et l’attention portée à la coupe de vos cheveux ou au style de votre habillement vous irrite ; cela vous empêche de voir que peu à peu, vous êtes entré dans la compagnie et que vous y avez déjà fait modelé l'espace qui vous est propre, et pris votre place. Peut-être pas à votre taille entière, mais tout de même : que vous n’avez plus vraiment besoin de rester assis les genoux serrés, cramponné de la fesse au rebord du fauteuil. Que vous pouvez vous détendre au lieu de vous défendre - et que celui qui vient de vous envoyer une vanne cherchait simplement votre fer - pour un assaut, c'est vréai, mais d'entraînement; mais avec un fleuret moucheté, pas avec un poignard.
Si vous partiez déjà, nous aurions tous manqué quelque chose, ou plutôt quelqu’un; qui au fond était déjà « de chez nous » - à sa manière à lui.
Et vous, aussi.
Ce n’est jamais qu’un petit salon, où se retrouvent 5 ou 6 personnes. Elles se connaissent, savent reconnaître, même à l’aveugle, les caractéristiques, les défauts, les qualités de chacune des autres, et haussent les épaules (imperceptiblement) ou sourient (dans leur barbe) ou vitupèrent (en clignant de l’œil aux autres) aux saillies de la dernière qui a parlé ; parfois même elles vont fumer une cigarette sur le balcon pour glisser un mot en aparté à l’une ou l’autre, puis après avoir ainsi actionné leur soupape personnelle, jettent leur mégot dans la rue et reviennent dans le petit salon parce que, somme toute, la conversation est en train d’aborder un sujet vraiment intéressant – et que du coup les traits de caractères ou les défauts d’élocution de tel ou telle perdent cette soi-disant importance qu’ils n’ont du reste jamais vraiment eue.
Et quand il manque depuis quelques jours, celui (ou celle) avec qui on se crêpait le chignon régulièrement pour des questions de bottes devient très vite un sujet d’inquiétude – et on se rend compte (en l’appelant chez lui ou elle pour savoir s’il ou elle n’est pas malade) qu’il ou elle nous était bien plus cher qu’on croyait.
Bien sûr, dès son retour dans le salon, on recommence à le trouver insupportable – mais cette fois, on sait que ce sont nos propres impatiences qui n’arrêtent pas d’aller buter contre le mur de ses petits défauts – à la manière de l’ASDIC, qui en nous renvoyant le son que nous émettions de nous-mêmes nous permet de situer l’autre, de l’évaluer à notre aune. Et on recommence à hausser les épaules ou à sourire dans sa barbe – mais cette fois, avec une grande tendresse qu’on essaie bien sûr de dissimuler, pour n’embarrasser personne. Et parfois même, cette tendresse que nous n’avions pas perçue auparavant nous incite à nous taire au lieu de répliquer.
Et ce silence, c’est une des facettes de l’amour.
Pour saisir ces mouvements imperceptibles de nos propres humeurs, et ce que les aspérités de l’autre nous cachaient de sa richesse, il a fallu du temps, et du silence, et ce miracle permanent de pouvoir rester immobile en regardant monter les volutes de fumée vers le plafond, dans le relatif brouhaha du petit salon, en écoutant les autres penser pour vous qui suçotez béatement votre propre silence.
Vous êtes entré depuis trop peu de temps, et vous ressentez encore comme brûlure de cigarette ce regard à la dérobée par lequel on vous pèse; et l’attention portée à la coupe de vos cheveux ou au style de votre habillement vous irrite ; cela vous empêche de voir que peu à peu, vous êtes entré dans la compagnie et que vous y avez déjà fait modelé l'espace qui vous est propre, et pris votre place. Peut-être pas à votre taille entière, mais tout de même : que vous n’avez plus vraiment besoin de rester assis les genoux serrés, cramponné de la fesse au rebord du fauteuil. Que vous pouvez vous détendre au lieu de vous défendre - et que celui qui vient de vous envoyer une vanne cherchait simplement votre fer - pour un assaut, c'est vréai, mais d'entraînement; mais avec un fleuret moucheté, pas avec un poignard.
Si vous partiez déjà, nous aurions tous manqué quelque chose, ou plutôt quelqu’un; qui au fond était déjà « de chez nous » - à sa manière à lui.
Et vous, aussi.