différence catholiques/orthodoxes

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Frantsysk
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différence catholiques/orthodoxes

Message par Frantsysk »

bonjour, je suis nouveau alors s'il vous plaît, ne m'en veuillez pas si je pose une question à laquelle vous avez répondu mille fois, mais je n'ai pas trouvé la réponse dans les nombreux posts de ce forum. je me présente. je suis un jeune catholique et marié à une russe orthodoxe que j'aime profondément. je suis franchement russophile, mais ma femme ne sait pas vraiment m'expliquer ce qu'est l'orthodoxie par rapport au catholiscisme. en effet comme la plupart des russes, elle n'est orthodoxe que par la tradition, comme en France, la plupart ne sommes que catholiques par héritage.
j'ai lu de nombreux posts se rapprochant de près ou de loin à cette question, mais à part la hiérarchie religieuse, le reste des réponses me paraissaient trop savantes pour moi (je vous avoue ne pas avoir un niveau d'études en matière théologique très grand, mon cathéchisme s'étant arrêté très tôt)). les catholiques et les orthodoxes croient-ils tous en un dieu d'amour? croient-ils en la résurrection et le pardon des péchés?
merci d'avance à ceux qui voudront bien m'expliquer.
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Cher Frantsysk,

Vous pouvez trouver un début de réponse à votre question dans deux livres: Dieu est vivant, catéchisme orthodoxe pour les familles publié aux Editions du Cerf, qui est un livre illustré, facile à lire et qui représente une première introduction; ainsi que Le nouveau catéchisme contre la foi des Pères, publié aux Editions L'Âge d'Homme, qui concerne la question particulière des différences avec le catholicisme romain. Ce dernier livre est ardu à lire, je ne vous le cache pas. Cependant, il n'est pas cher, pas très long, et vous pouvez le lire petites bribes par petites bribes, et, si certaines choses vous surprennent, vous pouvez toujours poser des questions sur ce forum. Le livre de Mgr Kallistos (Ware) cité par Jeanne Saint-Gilles constitue aussi une bonne présentation de l'Eglise orthodoxe.

Mais l'Orthodoxie se vit, et la meilleure suggestion que je peux vous faire, c'est d'un jour vous offrir deux semaines de vacances dans une région orthodoxe particulièrement fervente, comme le nord de la Transylvanie ou le sud du Péloponnèse. Je pense que c'est plus facile avec le sud du Péloponnèse où il y a plus de tourisme et plus de possibilités d'hébergement. Si vous allez en Laconie, du côté de Sparte ou de Monemvasia, et que vous êtes un touriste curieux qui en profite pour visiter les monastères ou pour aller à la liturgie dans une église de village, vous pourrez observer ce que les livres ne peuvent pas décrire et vous pourrez mieux comprendre les différences.

Il y a à mon avis un seul endroit en France qui peut vous apporter cette expérience: le monastère Saint-Antoine-le-Grand à Saint-Laurent-en-Royans dans le sud du Vercors. Allez y assister à une liturgie, parlez avec les moines, observez, et vous aurez la réponse à beaucoup de questions.
Dernière modification par Claude le Liseur le sam. 18 sept. 2004 20:58, modifié 1 fois.
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Je complète la réponse précédente.

Frantsysk, vous nous avez expliqué, que, au stade actuel, vous n'êtes pas très intéressé par les différences théologiques (qui sont très nombreuses et ont souvent été évoquées sur ce forum). Je conçois sans peine que l'on ne remarque pas du premier coup que l'anthropologie, l'eschatologie, l'ecclésiologie, etc., sont différentes. J'essaie donc ici de résumer en vrac des différences visibles entre catholicisme romain et orthodoxie, des différences qui sont immédiatement perceptibles, telles qu'elles me viennent à l'esprit.

* Il y a moins de séparation entre clergé et laïques chez les orthodoxes. Chez les orthodoxes, c'est le peuple dans son ensemble qui est considéré comme le gardien de la foi et il n'y a pas d'idée de l'Eglise enseignante et de l'Eglise enseignée. Malheureusement, le cléricalisme existe aussi parfois chez nous.

*La grande majorité des paroisses sont desservies par des prêtres mariés.

* Le culte des saints et la vénération des icônes et des reliques jouent un rôle important dans la vie spirituelle orthodoxe.

* Le côté "église domestique" est plus développé côté orthodoxe, en ce sens qu'il existe des offices particuliers (acathistes) que les fidèles ont l'habitude de lire à la maison.

* Les monastères ont une place plus importante dans la vie de l'Eglise orthodoxe qu'au sein du catholicisme romain, ce qui rend d'autant plus dramatique le déclin numérique du monachisme orthodoxe au cours du XXème siècle.

* L'Eglise orthodoxe rejette les indulgences, la croyance au Purgatoire et le culte du Sacré-Coeur. Le rosaire et le chemin de croix ne sont pas en usage. (Il existe une forme de chapelet, mais il est utilisé pour la prière de Jésus.) Les statues ne sont normalement pas tolérées dans les églises.
milano
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Message par milano »

L'analyse de lecteur Claude est absolument pertinente et claire, comme tous ses propos, d'ailleurs.
J'approuve ce qu'il dit dans sa dernière livraison, avec un bémol cependant : je ne suis pas certain que l'usage des offices domestiques soit si répandu que cela dans les familles ... loin s'en faut
Pour tout dire, je n'ai jamais rencontré un orthodoxe qui ait une seule fois récité l'office chez lui, quelle qu'en soit la tradition au cours de mes pérégrinations, de la Roumanie à la Russie, de la Grèce au Proche Orient. C'est un voeu pieu ... A contrario, j'ai rencontré des catholiques qui lisaient les vêpres chez eux !
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Cher Milano, je me réjouis de trouver en vous un lecteur attentif et indulgent à mes erreurs, mais je ne comprends pas vraiment ce que vous voulez dire quand vous écrivez que vous n'avez jamais rencontré "un orthodoxe qui ait une seule fois récité l'office chez lui". De quel office parlez-vous? De mon côté, je ne voulais parler que des offices qui sont spécialement conçus pour pouvoir être lus à la maison (quoiqu'ils puissent aussi l'être à l'église), donc des acathistes, qui, à ma connaissance, n'ont pas d'équivalent dans l'usage romano-catholique, et pas des offices de vêpres et matines.

Je vous rassure, cher Milano, il y a pas mal d'orthodoxes qui lisent des acathistes à la maison (surtout chez les Roumains). Je ne dis pas que tous les orthodoxes le font, mais je dis juste que c'est une forme de dévotion qui me semble propre à l'Eglise orthodoxe. De même que les slavas des Serbes représentent une forme de rite familial et domestique qui n'a pas d'équivalent ailleurs.

D'ailleurs, avez-vous remarqué le nombre d'acathistaires que l'on vend dans les librairies et les lieux de pélerinage en Roumanie? Dans les lieux de pélerinage (reliques de saint Jean le Nouveau à Suceava, reliques de saint Joseph le Nouveau à Timisoara), on vend aussi beaucoup de brochures qui contiennent la vie et l'acathiste à un seul saint. Il y a une maison d'édition à Brasov qui ne publie que ce type de brochures.
pascal
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Message par pascal »

il existe aussi des livres de prière, du matin et du soir, qui ne sont pas à proprement parler des offices, mais qui permettent d'avoir une "vie de prière domestique".

j'en ai acheté un à la librairie Saint Serge, du Monastère Saint Antoine le Grand (pas cher, 2,50€!), j'en possède un autre du Monastère de Lavardac...

sinon effectivement certains utilisent un livre d'heures...

pour les acathistes, je pense qu'on peut dire comme le Lecteur Claude que c'est une forme de dévotion propre à l'église orthodoxe... je ne vois pas trop d'équivalent chez les catholiques romains. Ce qui s'en rapproche le plus, les litanies peut être...mais la comparaison a ses limites.
Antoine
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Message par Antoine »

Milano a écrit :Pour tout dire, je n'ai jamais rencontré un orthodoxe qui ait une seule fois récité l'office chez lui, quelle qu'en soit la tradition au cours de mes pérégrinations, de la Roumanie à la Russie, de la Grèce au Proche Orient. C'est un voeu pieu ... A contrario, j'ai rencontré des catholiques qui lisaient les vêpres chez eux !
La prière se faisant souvent dans la discrétion et le secret du coeur, ceci explique peut-être cela.

Il y a des catholiques qui effectivement lisent les offices chez eux. Il y en a qui font partie de communautés de prière et prononcent des sortes de "voeux" et s'engagent à lire les offices chez eux, tous les jours.

Il y a aussi beaucoup d'orthodoxes qui n'ayant pas la possibilité d'assister tous les jours aux offices de vêpres et matines les lisent chez eux et ont ivesti dans la collection complète des ménées, livre d'heures, octoèque , apôtre etc... Cette façon de faire est particulièrelent répandue pendant le grand carême où beaucoup d'orthodoxes lisent le triode tous les jours. Il y a aussi les livres de prières déjà cités. D'autres liront les complies, d'autres se servent des psaumes etc...

Pour votre information, Milano, voici la table des matières du "livre de prières orthodoxes" publié par "Paix"dans une réédition de 1996. Non seulement vous y trouvez vêpres et matines mais également l'office des heures et les complies. On est en droit de supposer que si ces rubriques sont dans un livre de prières, c'est qu'elles sont utilisées...

LIVRE DE PRIÈRES

Table des matières
Introduction 1
Prières d'usage universel 5
Prières du matin 11
Office des matines 21
Office des heures
Prime 44
Tierce 51
Sexte 59
None
67
Prières diverses 75
Office des vêpres 83
Petites complies
97
Prières du soir 109
Hymne Acathiste à la Mère de Dieu 119
Petit canon paraclitique 133
Office de la communion
La veille de la communion au soir 141
Le matin de la communion 147
Action de Grâces après la divine communion166
Prières du Grand Carême 171
Prières pascales ( heure pascale ) 182
Appendice
Tropaires, theotokia et kondakia du dimanche 185
Tropaires et kondakia des fêtes fixes 194
Tropaires et Kondakia des fêtes mobiles 200
Tropaires des jours de semaine 204
Exapostilaires des jours de semaine 207
Calendrier liturgique 210
Dernière modification par Antoine le dim. 19 sept. 2004 23:34, modifié 4 fois.
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Merci Jeanne, et honte à moi!

Il s'agissait bien sûr de Dieu est vivant.

Mille excuses pour ma distraction.

Bien sûr qu'il y a des chapitres de ce catéchisme qui sont faibles, mais il a l'avantage d'être très bien conçu pour ce qui est de la pédagogie. Et ils donnent les prières essentielles en annexe.

En ce qui concerne les acathistes et les offices, le père Denis Guillaume en a traduit un grand nombre (la liste pour la période du 1er janvier au 22 septembre se trouve à chaque jour sur le forum calendrier des saints). Et je connais aussi des gens qui lisent les offices à la maison (au moins le canon des matines). Dans son Spoutnik, il a rassemblé un certain nombre d'offices et d'acathistes en un seul fort volume qui tient dans la poche.
pascal
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Message par pascal »

sur le site http://perso.wanadoo.fr/stranitchka/Lav ... odoxe.html, 'Eglise russe hors frontières, vous avez les sommaires des différents bulletins "la voie orthodoxe", vous pouvez disposer ainsi d'un nombre considérable d'acathistes.

et dans le premier bulletin vous trouvez un texte du Prêtre Quentin de castelbajac:

A propos des hymnes acathistes
L'hymne acathiste pour la Sainte Communion, dont nous donnons ci-dessous une traduction du slavon (*1), présente certaines particularités qu'il convient de préciser. Comme tout hymne acathiste, les fidèles peuvent en faire la récitation chez eux, tout particulièrement pour se préparer à la sainte communion. Dans certaines paroisses ou communautés monastiques russes, il est d'usage de le lire durant les complies à la veille du Jeudi Saint, quand normalement l' assemblée toute entière se dispose à communier au même calice ce jour même où nous commémorons l'institution de la Sainte Cène. C'est qu'en effet le texte même de l'acathiste récapitule l'enseignement de l'Eglise sur la participation au sacrement eucharistique, mettant en lumière ses préfigurations dans l'Ancien Testament, reprenant les paroles et les actes symboliques de Notre Seigneur et des Apôtres , soulignant la portée comme le mode de son accomplissement liturgique et la façon dont nous devons en approcher.
D'une façon générale, les différents hymnes acathistes, qui se sont multipliés dans l'usage russe orthodoxe, sont tous construits sur le modèle de leur archétype, l'acathiste à la Mère de Dieu (*2), composé en 626 pour célébrer la délivrance miraculeuse de Constantinople assiégée par les Perses et les Avares: c'est un ensemble de treize kondakions et douze ikos lus en alternance: la fin du premier kondakion sert de refrain à tous les ikos, et tous les autres kondakions se terminent par alléluia! . Chaque ikos est lui-même formé d'une introduction puis d'une série d'exclamations qui commencent par le même mot (anaphoriques). Dans son usage liturgique, l'acathiste est souvent célébré après la sixième ode du canon, aux matines ou aux complies (puisqu'il sert de développement au premier kondakion, dont c'est la place naturelle), quoiqu'il puisse tout aussi bien constituer un office indépendant. Le kondakion initial, les alléluia et souvent aussi la partie anaphorique des ikos sont chantés, tandis que le reste est lu par le célébrant, le dernier kondakion trois fois. En conclusion, le premier ikos et le premier kondakion sont répétés.
On trouve dans les recueils russes d'acathistes (frfabcnybr), des textes consacrés à la Trinité, ou à une des trois Personnes, à la Mère de Dieu ou à une de ses icones, à nombre des Saints, à la Croix,aux défunts. Particulièrement populaires en Russie, les acathistes offrent sous une forme simple et instructive des prières appropriées aux évènements particuliers qui peuvent marquer la vie spirituelle d'un fidèle ou d'une communauté: la vénération d'une icône miraculeuse (*3) ,un pélerinage, la fête d'un saint spécialement honoré etc... L'acathiste (prototype) à la Mère de Dieu fait partie intégrante de l'office des matines, le samedi de la cinquième semaine du Grand Carème, office nommé Louange de la Mère de Dieu. Quant à l'acathiste à Notre Seigneur Jésus Christ Très Doux (*4), il est lu comme préparation à la communion le samedi soir ou le dimanche matin, soit par les fidèles individuellement soit, dans certains monastères, durant l'office des petites vêpres associées aux complies.

http://perso.wanadoo.fr/stranitchka/VO0 ... nesac.html
Frantsysk
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Message par Frantsysk »

tout d'abord, je tiens à remercier tout ceux qu ont bien voulu prendre de leur temps pour me répondre et me conseiller dans ma recherche. soyez sûr que je ne manquerai pas de lire les ouvrages que vous m'avez conseillé, c'est un thème qui m'intéresse fortement.
pour répondre à la question sur mon pseudo, frantsysk, cela veut dire tout simplement "français" en russe... ce n'est pas un prénom et il n'y a aucune symbolique ou message particulier derrière cela.
par contre, j'ai remarqué dans d'autres posts, qu'il y avait sur ce forum certains intervenants anciens catholiques qui s'étaient convertis à l'orthodoxie. et je voudrais leur demander: cette conversion, ou cette démarche vers la conversion s'est-elle traduite par un changement de spiritualité, de croyance en dieu? dieu est-il pour vous différent depuis?
merci encore pour ceux qui m'ont répondu (pascal, lecteur claude, antoine, Jeanne saint Gille, Milano, Jean Serge, ), et mille merci pour ceux qui me répondront.
Antoine
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Message par Antoine »

Frantsysk a écrit :cette conversion, ou cette démarche vers la conversion s'est-elle traduite par un changement de spiritualité, de croyance en dieu? dieu est-il pour vous différent depuis?
Dieu est devenu Trinitaire avec ma découverte de l'Orthodoxie.
L'Esprit sort enfin de cette réduction à une relation Père-Fils, pour retrouver sa place de personne à part entière et l'âme vacille de Trois à un et de un à Trois.
"Je n'ai pas commencé de penser à l'Unité que la Trinité me baigne dans sa splendeur. Je n'ai pas commencé de penser à la Trinité, que la l'Unité me ressaisit. Lorsqu'un des trois se présente à moi, je pense que c'est le tout, tant mon eil est rempli, tant le surplus m'échappe; car dans mon esprit trop borné pour comprendre un seul, il ne reste plus de place à donner au surplus. Lorsque j'unis les Trois dans une même pensée, je vois un seul flambeau, sans pouvoir diviser ou analyser la lumière unifiée."(Grégoire de Naziance)

Et alors tout devient différent. La foi devient cohérente et dépasse toutes les antinomies. La liturgie avec son épiclèse prend tout son sens, la prière devient autre qu'une demande d'épicier, l'incarnation se poursuit dans les icônes, la théologie apophatique s'impose avec puissance, les sacrements deviennent mystères, toute la vie de l'Eglise devient Mystérique dans le souffle de l'Esprit. Les grands thèmes de la Kénose, la déification de l'homme, la métanoïa, la miséricorde, le péché, l'acquisition de l'Esprit Saint, tout devient différent. On quitte une vie de culpabilité pour entrer dans celle du royaume, la vierge devient Mère de Dieu, l'Eglise devient le corps du Christ et la prière devient hypostatique. "Paix aux hommes de bonne volonté" devient "paix et bienveillance aux hommes"(1), le Dieu de l'enfer devient un Dieu "bon et ami des hommes", le baptème n'est plus une gomme à "péché originel", mais la Vie dans la mort et la résurrection du Christ. Les énergies divines sont incréées et l'homme y participe. St Silouane, saint Jean de Cronstadt, St grégoire, St jean Climaque, Damascène, St Basile, St Dorothée, St Macaire, St Antoine, St Isaac et tous les saints: tous parlent orthodoxe. Les anges parlent orthodoxe. Le Christ parle orthodoxe. C'est le règne du Verbe incarné, du Logos qui par l'Esprit Saint nous ramène au Père.
Dans l'Orthodoxie c'est Pâques chaque dimanche.


(1) Cf Jean-Louis Palierne
danilo
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Inscription : lun. 14 juin 2004 20:38
Localisation : Briançon

hep

Message par danilo »

J'ai une question,
est ce que le Christ dans la tradition Orthodoxe est en nous ou auprès de nous ?
Jean-Louis Palierne
Messages : 1044
Inscription : ven. 20 juin 2003 11:02

Message par Jean-Louis Palierne »

Tout d’abord nous sommes en Christ. C’est une formule audacieuse qui a été inventée par les chrétiens pour exprimer la conscience qu’ils ont de faire partie (comme des membres, dit saint Paul) de ce corps multipersonnel qu’est l’Église, la plénitude du Christ. Le fait que ce corps soit multipersonnel est l’image dans la nature humaine de la Trinité des personnes divines, et là je ne peux que renvoyer à l’excellent exposé que vient de faire ci-dessus Antoine.

Dès l’origine le Verbe, créateur du monde, a pris la matière de toute ce cosmos qu’il venait de créer, y a imprimé son image et l’a appelée à sa ressemblance, et la nature humaine fut créée en la personne de nos Ancêtres, Adam et Ève. Depuis lors, à chaque procréation humaine, le Verbe dépose son image sur chaque homme, et l’appelle à sa ressemblance.

Il est donc beaucoup trop peu et beaucoup trop étroit que de se demander si le Christ est “en nous” ou bien “auprès de nous”. Mais il nous a promis d’être avec son Église jusqu’à la fin des temps. Dans les pays de tradition orthodoxe, souvent, lorsque des fidèles orthodoxes se rencontrent, ils disent : “Christ est parmi nous” ou “au milieu de nous”. N’oublions jamais qu’il nous a dit : “Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux.”

C’est donc simultanément en plusieurs sens et à plusieurs niveaux qu’il faut comprendre la présence du Christ au monde des hommes.
Jean-Louis Palierne
paliernejl@wanadoo.fr
Antoine
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Inscription : mer. 18 juin 2003 22:05

Message par Antoine »

Danilo a écrit :est ce que le Christ dans la tradition Orthodoxe est en nous ou auprès de nous ?
J'avoue que je ne saisis pas le sens de la question que nous pose Danilo. La "spatialité" dans laquelle cette question nous enferme est posée a priori et ne nous donne qu'une illusion de choix entre deux solutions pré-établies:"en nous" ou "auprès de nous".
Distinguer "en" de "auprès" ne me semble pas spirituellement pertinent. Lorsque nous aurons choisi le "en nous", il faudra ensuite affiner la localisation pour déterminer dans quelle partie du corps exactement. Et si nous choisisons le "auprès de nous" Danilo nous demandera à quelle distance exactement.
Jean-Louis Palierne nous dit que <<C’est simultanément en plusieurs sens et à plusieurs niveaux qu’il faut comprendre la présence du Christ au monde des hommes.>>
L'évangile de Jean illustre bien ces différents niveaux.

Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang demeure en moi, et je demeure en lui. (6.56 ) L'eucharistie.

Et moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre consolateur, afin qu'il demeure éternellement avec vous (14.16 ) La pentecôte

l'Esprit de vérité, que le monde ne peut recevoir, parce qu'il ne le voit point et ne le connaît point; mais vous, vous le connaissez, car il demeure avec vous, et il sera en vous. (14.17 ) La confession de la foi

Jésus lui répondit: Si quelqu'un m'aime, il gardera ma parole, et mon Père l'aimera; nous viendrons à lui, et nous ferons notre demeure chez lui. (14.23 ) La charité

Demeurez en moi, et je demeurerai en vous.(15.4) Le combat

Je suis le cep, vous êtes les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure porte beaucoup de fruit, car sans moi vous ne pouvez rien faire. (15.5) Les charismes


Jean-Louis dans sa réponse nous rappelle également l'omni présence du Verbe dans la création, notre création à l'image et à la ressemblance du Christ, et notre appartenance au corps du Christ, notre consubstantialité par participation réalisée dans la double nature du Christ.

C'est dans cette omniprésence (ou supra-spatialité) de Dieu qu'il faut rechercher nos catégories d'espace et c'est dans notre création à l'image et à la ressemblance du verbe qu'il faut poser nos catégories de temps.

Le Père Dumitru Staniloae dans son livre "Dieu est amour" propose ce type d'approche ancrée dans la théologie des Pères. L'altérité des personnes trinitaires est à la fois ce qui permet l'amour trinitaire et le résultat de cet amour. Il n'ya pas pas d'antériorité de l'un sur l'autre . C'est par amour que le Père engendre le Fils et spire l'Esprit mais cet engendrement et cette spiration sont de toute éternité. Il n'y a pas un temps où le Père fut seul.
L’amour est l’offre de soi à l’autre. Il est aussi l’attente de l’offre réciproque comme réponse au don premier. Lorsque réponse et offre coïncident dans un même élan, alors seulement toute attente disparaît , tout espace temporel se dissout dans une unité immédiate. Cette immédiateté est la vie même de la Trinité. L'offre d'amour de chacune des personnes aux deux autres et la réponse à cette offre sont simultanées. Pour l'homme qui est créé, la finalité du temps est donc de lui permettre de tendre vers une réponse complète à l’offre de son Dieu. C'est la théologie de la ressemblance. Et le temps déchu que nous connaissons est le résultat du différé de notre réponse. Plus notre réponse est différée plus le temps est déchu. Plus notre volonté se conforme à celle de Dieu plus nous nous rapprochons de l'éternité. Le temps et l'espace pour le saint n'ont pas la même "consistance" que pour celui qui s'enferme dans le refus de Dieu. Et l'immédiateté de notre réponse ne sera pleinement réalisée que lorsque nous serons divinisés par la grâce.

De même que le temps tire son fondement de l’éternité de la Trinité, ainsi l’espace le trouve-t-il dans la vie supraspatiale des Personnes divines. Dans la Trinité l'altérité des personnes est à la fois le résultat de leur communion unitaire parfaite et ce qui permet leur communion. Elles patagent la même nature divine. Le Père est la source: Il tire sa paternité de l'engendrement et de la spiration et partage la divinité dans l'altérité. Et lui même tient son altérité de cette propriété hypostatique d'être la source. Dieu est Dieu en "s'altérisant". Les Pères, pour appréhender ce mystère parlent apophatiquement de la "Tri-unité" Le Père Dimitru écrit:«C’est là justement que se trouve, en Dieu, la possibilité de l’espace, en ceci que la différence existant entre les Personnes divines rend possible l’altérité de personnes finies. (...) Comme ces personnes finies ne sont pas, dès l’origine, dans une communion accomplie entre elles et avec Dieu, la distance qui les sépare de cette perfection prend la forme de l’espace, comme l’intervalle prend celle de la durée temporelle. Ainsi l’espace est la forme que prend la relation entre le Dieu supraspatial et infini et les personnes limitées, forme qui rend possible le mouvement de ces créatures entre elles et vers Dieu, dans la mesure où Dieu ne peut être trouvé en dehors de la relation à l’autre »
Je résumerai en disant que la passion et la résurrection récapitulent toute l'économie divine: La croix rassemble l'espace dans son condensé trinitaire originel et la résurrection rassemble le temps dans l'éternité de sa simultanéité.

Dans le texte ci-dessous le Père Dumitru redonne au temps et à l'espace leur fondement théologique.
Ce texte est extrait du livre "Dieu est amour", ed Labor et Fides 1980 p 50-52.

L'éternité, dans ce sens véritable, rend possible la compréhension du temps et de son rapport à l'éternité. Il n'est plus nécessaire de les considérer comme irréconciliables. Le temps n'est plus quelque chose de contraire à l'éternité, sa déchéance. L'éternité divine, vie dans la plénitude, dialogue de l'amour parfait avec des « je » qui lui sont parfaitement intérieurs, porte en elle-même la possibilité du temps. Inversement le temps porte en lui la possibilité de l'éternité, qui peut être actualisée dans la communion avec Dieu ou par la grâce. (Avec cette expression « par grâce » nous mettons en évidence que Dieu nous a créés capables de répondre à son offre d'amour). Il nous a donc mis en relation avec l'éternité, et c'est en communion avec lui que nous l'obtenons. C'est pour cela que l'éternité des croyants n'est pas semblable à celle de Dieu.
L'amour est l'offre de soi à un autre « je » et l'attente de la réponse: l'offre totale de l'autre. C'est uniquement dans une réponse immédiate et complète que l'aimé s'unit à l'aimant et que l'amour est intégral. Le temps est la durée de cette attente. Il exprime en effet la distance spirituelle entre les personnes, alors que l'éternité est au-dessus de cette distance. Saint Maxime le Confesseur déclare: « Le mystère de la Pentecôte est donc l'union immédiate de la Providence avec les créatures qu'elle protège, l'union de la nature créée avec le Verbe, par l'opération de la Providence, union dans laquelle toute manifestation du temps et du devenir est exclue » (34)
En Dieu l'attente est réduite à zéro, car l'amour entre les « je » est parfait. Le don de soi d'un sujet divin à un autre et la réponse du deuxième au premier sont simultanés et de la même perfection.
Ne pouvant faire croître ni détruire cette simultanéité ou cette perfection, l'amour divin demeure — en tant qu'offre et réponse — un acte bilatéral, ou trilatéral — intemporel et éternel.
Dieu créa les partenaires de l'amour, mais ces partenaires ne furent plus capables d'être par nature porteurs de sa subjectivité, infinie sous tous les rapports (donc aussi sous celui de l'amour), il fallut donc qu'ils en devinsent volontairement participants. Cela implique effort et croissance. Ainsi leur réponse ne pouvait plus être, à la base, un don, un amour équivalant à l'offre divine, simultané et parfait. C'est pourquoi Dieu a nuancé son offre en fonction de leur capacité de réponse.
Dans sa relation avec les hommes, participants de sa subjectivité, Dieu concrétise bénévolement ses énergies, il n'est plus en communication avec son être entier. Car les hommes tardent à répondre, ou à répondre parfaitement et immédiatement à Dieu et à leurs semblables. Cette croissance dans la capacité d'offrir et de répondre, ce retard et cette attente sont équivalents au temps. Mais les partenaires ont la possibilité de recevoir de Dieu une aide dans leur chemine-ment vers son éternité, vers la simultanéité et la perfection de l'offre et de la réponse. Puisque Dieu est éternel nous pouvons, nous aussi, croître vers l'éternité.
Dieu chemine avec nous vers l'éternité et vit lui-même l'attente et donc le temps, la restriction imposée par l'évolution de l'offre de son amour. Il vit simultanément son éternité dans ses relations inter-trinitaires et le rapport temporel avec les créatures spirituelles.
C'est une kénose acceptée bénévolement par Dieu, dans l'ordre de la création, une descente dans le rapport avec le monde, que Dieu vit simultanément avec l'éternité de sa vie trinitaire. Il vit ces deux actes dans le fait-même qu'il offre son amour éternel dans notre instant temporel; ainsi nous sommes nécessairement invités à ré-pondre car nous ressentons dans cet instant non seulement notre temporalité, mais également notre éternité, même si notre réponse est partielle ou négative.
Dieu attend « avec une immense patience » notre retour, notre éveil à l'amour qu'il offre, et en même temps il se réjouit de l'intemporalité, de l'immédiateté, de la réciprocité existant dans les manifestations aimantes des sujets trinitaires. Le paradoxe est encore plus grand: la joie de l'immense amour trinitaire demeure dans l'attente de la réponse amoureuse des hommes et dans la tristesse due à son retard. « Voici je me tiens à la porte et je frappe ! Si quelqu'un entend ma voix et ouvre la porte, j'entrerai chez lui ». (Apoc. 3, 20). Le temps signifie pour Dieu la durée de son attente à la porte, jusqu'à ce qu'elle s'ouvre tout entière. Dieu n'entre pas de force dans le coeur de l'homme. L'union avec lui ne peut se réaliser sans la réponse libre des croyants à l'offre de son amour. Pour cela il leur donne le temps. Mais ce temps est également vécu par Dieu. On pourrait même dire qu'il est plus vécu par Dieu que par nous, car Dieu est conscient qu'il se trouve en attente, à la porte, alors qu'occupés par les affaires domestiques, nous ne l'attendons pas, ne savons même pas qu'il attend à la porte. Si Dieu entrait de force, s'il ne donnait aux hommes un délai pour répondre, il forcerait leur réponse, or une réponse forcée n'est plus celle de l'amour. C'est justement parce que Dieu désire leur amour qu'il laisse le temps aux hommes. Le temps est l'expression du désir qu'a Dieu de l'amour des croyants, l'expression du prix qu'il donne à cet amour. Sans doute nous attendons, nous aussi, toutes sortes de choses, mais l'attente la plus intense est celle de l'amour; or ayant perdu l'espoir de voir notre attente comblée, nous n'attendons presque plus rien de tel. Cependant nous nous trouvons dans le temps et sommes face à un manque, c'est pourquoi le temps passe difficilement, plus difficilement encore que lorsque nous attendons avec espoir l'amour total d'une personne. Alors nous vivons l'éternité, ne serait-ce qu'en espérance, par anticipation, et cela nous procure un certain bonheur. Dieu est dans cette espérance attentive, dans cette attente de l'amour d'un homme, plus importante que tout.

Notes:

34 Saint MAXIME le Confesseur, Réponse à Talase, P. G. XC 760 B.
pascal
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Inscription : mar. 22 juin 2004 15:59

Message par pascal »

au moment du baptême il est chanté: vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu le Christ.

un élément de plus pour dire que des considérants de "spatialité" semblent difficiles à utiliser.

c'est tout aussi difficile à appréhender intellectuellement que le fait même que le Christ se soit incarné. Au sens où: comment limiter (et donc délimiter) ce qui ne l'est pas par nature, comment considérer fini ce qui est infini...
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