le rôle politique des chrétiens dans l'Orient arabe
Publié : ven. 09 avr. 2004 15:28
Voici exactement deux semaines, je suis tombé par hasard sur une bla-blaterie à la télévision française, consacrée au thème du choc des civilisations, où S. E. Boutros Boutros-Ghali, ancien secrétaire général des Nations-Unies, venait faire son numéro. Boutros-Ghali, qui, comme chacun sait, est de l'Eglise copte d'Egypte du pape Chenouda III, se faisait - sans surprise pour moi - l'avocat de la cause musulmane. Mais, à un moment, mon sang n'a fait qu'un tour et je me suis dit qu'il avait franchi toutes les bornes de l'impudence. En effet, dissimulant à peine sa conviction que les Occidentaux sont des imbéciles à qui on peut faire gober n'importe quoi en raison de leur ignorance du monde arabe, le sieur Boutros-Ghali s'est mis à invectiver la France en lui reprochant le fait que les musulmans soient sous-représentés au Parlement français. Je ne m'arrêterai pas sur la bassesse de la comparaison (les Coptes étant, que je sache, la population autochtone de l'Egypte), pour en venir à une constatation de fait. Quand on connaît la situation des chrétiens au parlement égyptien, on ne peut qu'admirer l'extraordinaire cynisme et l'insolence sans bornes de Boutros-Ghali, semblable, mutatis mutanda, à un Marc Dutroux qui se ferait l'avocat de la peine de mort pour les tueurs d'enfants.
Car observons un instant la situation politique en Egypte. L'Eglise copte y revendique 20% de la population, et 30% dans les moments de grand enthousiasme. Chiffre hautement fantaisiste, car les recensements égyptiens donnent une proportion de chrétiens en baisse constante et légère depuis un siècle, en gros de 8% vers 1900 (mais il y avait à l'époque des communautés grecques, italiennes et françaises qui ont émigré) à environ 5% aujourd'hui. Les Coptes soutiennent que tous les recensements depuis un siècle sont truqués, mais sans apporter d'élément en faveur de cette thèse. Les spécialistes occidentaux ne vont pas au-delà d'une sous-estimation de 30% de la population chrétienne en Egypte (rappelons que le chiffre de 20% de chrétiens avancés par les Coptes voudrait dire que le recensement sous-estime la population chrétienne de 75%). On peut donc aller jusqu'à une estimation de 7,5% de chrétiens en Egypte, soit quelque 5 millions de personnes; l'Eglise copte en regrouperait environ 4'500'000 (on sait en revanche que les orthodoxes ne sont plus que 18'000 environ à cause du départ de la communauté grecque).
Mais même si nous nous en tenons aux chiffres officiels qui tournent autour de 5%, cela voudrait dire qu'il devrait y avoir une vingtaine de députés coptes sur les 454 députés du Parlement égyptien pour que leur représentation parlementaire corresponde à leur poids dans la population.
On en comptait en fait 7 aux élections de 1990, 8 aux élections de 2000. Et précisons que, parmi les membres du Parlement, 10 sont nommés par le président de la République, qui nomme toujours une moitié de Coptes pour rétablir un peu l'équilibre. Parmi les 444 députés élus, on comptait 2 Coptes en 1990, 3 en 2000. Outre le fait que ces résultats infirment sans doute la prétention des Coptes à représenter 20% de la population (s'ils étaient 20%, il devrait bien y avoir des circonscriptions où ils sont majoritaires), ils veulent surtout dire que M. Boutros-Ghali, pour donner des leçons de démocratie à la France, ferait mieux d'attendre que 20 députés coptes soient élus dans les circonscriptions égyptiennes...
Le rôle des chrétiens au gouvernement égyptien n'est guère plus brillant. S'il y a dans tous les gouvernements égyptiens deux ministres coptes, ils sont en général en charge de l'Emigration, de l'Irrigation ou du Ravitaillement. La grande nouveauté de ces dernières années a été la nomination du frère de Boutros Boutros-Ghali à l'Economie. Précisons d'ailleurs, que, contrairement à la légende complaisamment entretenue par les media occidentaux, Boutros Boutros-Ghali n'a jamais été ministre des Affaires étrangères: sa qualité de chrétien lui interdisait à l'époque de prétendre à un portefeuille aussi prestigieux; il n'était que le secrétaire d'Etat du ministre en titre Esmat Abdel Meguid, qui était lui musulman.
Non seulement M. Boutros-Ghali, le fameux secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie qui avait écrit ses mémoires en anglais, n'a guère de leçons à donner à la France, mais il devrait encore plus se taire quand on compare la situation de l'Egypte à celle d'autres pays arabes.
Prenons le cas de la Jordanie, qui compte une proportion de chrétiens bien plus faible qu'en Egypte (3%, ce qui représente quelque 150'000 personnes, dont 35'000 orthodoxes): ce pays assure depuis sa création une représentation garantie au Parlement à la communauté chrétienne; ce quota a toujours été largement supérieur à la proportion de chrétiens dans la population totale (par exemple 9 sièges sur 80 au début des années 1990), et le gouvernement compte toujours un ou deux ministres chrétiens, sans restriction quant aux portefeuilles qui peuvent leur être accordés, quoique la présidence du Conseil revienne toujours à un musulman. C'est ainsi qu'on a vu des chrétiens détenir le portefeuille des Finances ou celui des Affaires étrangères.
Au Liban, le Pacte national de 1943, révisé en 1990, va beaucoup plus loin, puisqu'il répartit les sièges du Parlement entre chacune des communautés chrétiennes ou musulmanes reconnues. Quatre communautés musulmanes (sunnites, chiites, druses et alaouites) et six communautés chrétiennes (maronites, grecs orthodoxes, grecs catholiques, arméniens apostoliques, arméniens catholiques et protestants) sont reconnues, tandis que le dernier siège du Parlement est attribué aux minorités chrétiennes et à la petite communauté israélite (il est en général occupé par un catholique romain de rite latin). Chaque groupe se voit assuré d'être représenté au Parlement (par exemple, les orthodoxes ont 14 sièges sur 128). En même temps, le système électoral assez complexe ne fait pas voter les électeurs dans des collèges séparés selon leur confession, mais est conçu pour que les députés soient forcés d'obtenir des voix en-dehors de leur groupe. A titre d'exemple, dans la circonscription d'Aley, qui désigne cinq députés, chaque électeur, quelque soit sa confession, doit obligatoirement voter pour deux maronites, deux druses et un orthodoxe. Ce système assure au Liban l'accès à une existence politique à des minorités particulièrement malmenées dans le reste du monde (Arméniens ou Alaouites, par exemple). On notera aussi que les chrétiens, qui ne représentent plus que 40% de la population (quelque 1'400'000 personnes, dont environ 250'000 orthodoxes), se voient assurés de 50% des sièges, ce qui paraît une mesure des plus sages. La participation au pouvoir exécutif n'est pas non plus monopolisée par un groupe comme c'est le cas en Egypte: le président de la République est maronite, le président du Conseil est sunnite et le gouvernement compte des ministres de toutes confessions.
Reste maintenant le cas des deux Etats arabes qui ont connu le gouvernement du parti Baas, la Syrie et l'Irak.
En Syrie (environ 8% de chrétiens, soit 1'200'000 personnes, dont environ 500'000 orthodoxes), le laïcisme affiché par le parti Baas fait qu'il n'y ni recensement confessionnel, ni quota de sièges au Parlement garantis aux minorités. Mais on se doute que les élections n'ont pas grand sens sous un régime aussi autoritaire, et le clan Assaad s'est toujours arrangé pour leur donner une petite représentation (4 chrétiens sur 250 députés au début des années 1990; toujours deux ou trois chrétiens au gouvernement). La situation politique des chrétiens est très en retrait sur celle des débuts de la Syrie indépendante, où Farès Khoury fut deux fois président du Conseil (1945 et 1954), chose qui aurait été impensable en Egypte. En fait, cette évolution vient aussi du fait que les chrétiens ne veulent pas trop s'engager aux côtés du régime, car ils redoutent les représailles de la majorité sunnite (70% de la population) en cas de disparition du pouvoir baassiste. Au début du régime d'Hafez El-Assaad, les chrétiens avaient pourtant obtenu en Syrie deux postes inimaginables dans la quasi-totalité des pays musulmans: notre coreligionnaire Youssouf Chakkour avait été chef d'état-major de l'armée pendant la guerre du Kippour en 1973, et un chrétien fut ministre de l'Education nationale (et défendu par le président El-Assaad contre les affronts du colonel Khadafi lors d'un sommet arabe à Tripoli). Et ce n'est que devant le risque de guerre civile que Hafez El-Assaad renonça à supprimer l'article de la Constitution qui réservait la présidence de la République aux musulmans.
En Irak, la communauté chrétienne, qui ne représentait pas plus de 5% de la population (le laïcisme affiché avait aussi conduit Saddam Hussein à supprimer la mention de la religion dans les recensements), était sous-représentée au point de vue politique ( 4 chrétiens sur 250 députés en 1984), malgré les très hautes fonctions confiées à l'uniate Tarek Aziz, mais fermement protégée contre toutes les agressions islamistes. En particulier, la construction d'églises, pratiquement impossible en Egypte, ne posait aucun problème en Irak, et recevait fréquemment des subsides de la part du chef de l'Etat. Ajoutons aussi que, malgré l'arabisme de l'idéologie du régime, l'Irak baasssiste était le seul pays à soutenir la langue et la culture syriaques depuis le décret de 1972. On peut donc dire, que, dans ce régime très totalitaire, les chrétiens obtenaient sur le plan culturel et religieux ce qu'ils n'avaient pas au point de vue politique.
Aujourd'hui, après l'émigration massive des années 1990 causée par l'embargo anglo-saxon, la communauté chrétienne d'Irak ne doit plus guère dépasser les 3% de la population, soit quelque 600'000 personnes. On sait que l'Eglise chaldéenne catholique, unie à la Papauté depuis le XVIème siècle, est très majoritaire parmi cette communauté chrétienne et que les orthodoxes, en revanche, sont pratiquement absents (moins de 500 personnes, bien que Bagdad ait eu son évêque, qui avait aussi juridicton sur le Koweït).
Au terme de ce tour d'horizon, on voit que le pays du donneur de leçons Boutros-Ghali est un des moins bien placés en matière de droits des minorités dans l'Orient arabe (même s'il reste infiniment plus facile d'être chrétien en Egypte que dans la Turquie "laïque").
On notera aussi que l'espoir des chrétiens de participer à la vie politique n'est assuré que dans les deux pays, Liban et Jordanie, qui garantissent un quota de sièges aux minorités.
Enfin, il est intéressant de constater que des pays très décriés par l'Occident, la Syrie et l'Irak, ont au cours des trente dernières années donné à des chrétiens des postes politiques (ministère de l'Education nationale, ministère des Affaires étrangères, commandement de l'état-major de l'armée) qui seraient inimaginable dans bien des pays musulmans chouchoutés par le soi-disant Born-Again Christian qui préside (provisoirement) aux destinées du monde.
Car observons un instant la situation politique en Egypte. L'Eglise copte y revendique 20% de la population, et 30% dans les moments de grand enthousiasme. Chiffre hautement fantaisiste, car les recensements égyptiens donnent une proportion de chrétiens en baisse constante et légère depuis un siècle, en gros de 8% vers 1900 (mais il y avait à l'époque des communautés grecques, italiennes et françaises qui ont émigré) à environ 5% aujourd'hui. Les Coptes soutiennent que tous les recensements depuis un siècle sont truqués, mais sans apporter d'élément en faveur de cette thèse. Les spécialistes occidentaux ne vont pas au-delà d'une sous-estimation de 30% de la population chrétienne en Egypte (rappelons que le chiffre de 20% de chrétiens avancés par les Coptes voudrait dire que le recensement sous-estime la population chrétienne de 75%). On peut donc aller jusqu'à une estimation de 7,5% de chrétiens en Egypte, soit quelque 5 millions de personnes; l'Eglise copte en regrouperait environ 4'500'000 (on sait en revanche que les orthodoxes ne sont plus que 18'000 environ à cause du départ de la communauté grecque).
Mais même si nous nous en tenons aux chiffres officiels qui tournent autour de 5%, cela voudrait dire qu'il devrait y avoir une vingtaine de députés coptes sur les 454 députés du Parlement égyptien pour que leur représentation parlementaire corresponde à leur poids dans la population.
On en comptait en fait 7 aux élections de 1990, 8 aux élections de 2000. Et précisons que, parmi les membres du Parlement, 10 sont nommés par le président de la République, qui nomme toujours une moitié de Coptes pour rétablir un peu l'équilibre. Parmi les 444 députés élus, on comptait 2 Coptes en 1990, 3 en 2000. Outre le fait que ces résultats infirment sans doute la prétention des Coptes à représenter 20% de la population (s'ils étaient 20%, il devrait bien y avoir des circonscriptions où ils sont majoritaires), ils veulent surtout dire que M. Boutros-Ghali, pour donner des leçons de démocratie à la France, ferait mieux d'attendre que 20 députés coptes soient élus dans les circonscriptions égyptiennes...
Le rôle des chrétiens au gouvernement égyptien n'est guère plus brillant. S'il y a dans tous les gouvernements égyptiens deux ministres coptes, ils sont en général en charge de l'Emigration, de l'Irrigation ou du Ravitaillement. La grande nouveauté de ces dernières années a été la nomination du frère de Boutros Boutros-Ghali à l'Economie. Précisons d'ailleurs, que, contrairement à la légende complaisamment entretenue par les media occidentaux, Boutros Boutros-Ghali n'a jamais été ministre des Affaires étrangères: sa qualité de chrétien lui interdisait à l'époque de prétendre à un portefeuille aussi prestigieux; il n'était que le secrétaire d'Etat du ministre en titre Esmat Abdel Meguid, qui était lui musulman.
Non seulement M. Boutros-Ghali, le fameux secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie qui avait écrit ses mémoires en anglais, n'a guère de leçons à donner à la France, mais il devrait encore plus se taire quand on compare la situation de l'Egypte à celle d'autres pays arabes.
Prenons le cas de la Jordanie, qui compte une proportion de chrétiens bien plus faible qu'en Egypte (3%, ce qui représente quelque 150'000 personnes, dont 35'000 orthodoxes): ce pays assure depuis sa création une représentation garantie au Parlement à la communauté chrétienne; ce quota a toujours été largement supérieur à la proportion de chrétiens dans la population totale (par exemple 9 sièges sur 80 au début des années 1990), et le gouvernement compte toujours un ou deux ministres chrétiens, sans restriction quant aux portefeuilles qui peuvent leur être accordés, quoique la présidence du Conseil revienne toujours à un musulman. C'est ainsi qu'on a vu des chrétiens détenir le portefeuille des Finances ou celui des Affaires étrangères.
Au Liban, le Pacte national de 1943, révisé en 1990, va beaucoup plus loin, puisqu'il répartit les sièges du Parlement entre chacune des communautés chrétiennes ou musulmanes reconnues. Quatre communautés musulmanes (sunnites, chiites, druses et alaouites) et six communautés chrétiennes (maronites, grecs orthodoxes, grecs catholiques, arméniens apostoliques, arméniens catholiques et protestants) sont reconnues, tandis que le dernier siège du Parlement est attribué aux minorités chrétiennes et à la petite communauté israélite (il est en général occupé par un catholique romain de rite latin). Chaque groupe se voit assuré d'être représenté au Parlement (par exemple, les orthodoxes ont 14 sièges sur 128). En même temps, le système électoral assez complexe ne fait pas voter les électeurs dans des collèges séparés selon leur confession, mais est conçu pour que les députés soient forcés d'obtenir des voix en-dehors de leur groupe. A titre d'exemple, dans la circonscription d'Aley, qui désigne cinq députés, chaque électeur, quelque soit sa confession, doit obligatoirement voter pour deux maronites, deux druses et un orthodoxe. Ce système assure au Liban l'accès à une existence politique à des minorités particulièrement malmenées dans le reste du monde (Arméniens ou Alaouites, par exemple). On notera aussi que les chrétiens, qui ne représentent plus que 40% de la population (quelque 1'400'000 personnes, dont environ 250'000 orthodoxes), se voient assurés de 50% des sièges, ce qui paraît une mesure des plus sages. La participation au pouvoir exécutif n'est pas non plus monopolisée par un groupe comme c'est le cas en Egypte: le président de la République est maronite, le président du Conseil est sunnite et le gouvernement compte des ministres de toutes confessions.
Reste maintenant le cas des deux Etats arabes qui ont connu le gouvernement du parti Baas, la Syrie et l'Irak.
En Syrie (environ 8% de chrétiens, soit 1'200'000 personnes, dont environ 500'000 orthodoxes), le laïcisme affiché par le parti Baas fait qu'il n'y ni recensement confessionnel, ni quota de sièges au Parlement garantis aux minorités. Mais on se doute que les élections n'ont pas grand sens sous un régime aussi autoritaire, et le clan Assaad s'est toujours arrangé pour leur donner une petite représentation (4 chrétiens sur 250 députés au début des années 1990; toujours deux ou trois chrétiens au gouvernement). La situation politique des chrétiens est très en retrait sur celle des débuts de la Syrie indépendante, où Farès Khoury fut deux fois président du Conseil (1945 et 1954), chose qui aurait été impensable en Egypte. En fait, cette évolution vient aussi du fait que les chrétiens ne veulent pas trop s'engager aux côtés du régime, car ils redoutent les représailles de la majorité sunnite (70% de la population) en cas de disparition du pouvoir baassiste. Au début du régime d'Hafez El-Assaad, les chrétiens avaient pourtant obtenu en Syrie deux postes inimaginables dans la quasi-totalité des pays musulmans: notre coreligionnaire Youssouf Chakkour avait été chef d'état-major de l'armée pendant la guerre du Kippour en 1973, et un chrétien fut ministre de l'Education nationale (et défendu par le président El-Assaad contre les affronts du colonel Khadafi lors d'un sommet arabe à Tripoli). Et ce n'est que devant le risque de guerre civile que Hafez El-Assaad renonça à supprimer l'article de la Constitution qui réservait la présidence de la République aux musulmans.
En Irak, la communauté chrétienne, qui ne représentait pas plus de 5% de la population (le laïcisme affiché avait aussi conduit Saddam Hussein à supprimer la mention de la religion dans les recensements), était sous-représentée au point de vue politique ( 4 chrétiens sur 250 députés en 1984), malgré les très hautes fonctions confiées à l'uniate Tarek Aziz, mais fermement protégée contre toutes les agressions islamistes. En particulier, la construction d'églises, pratiquement impossible en Egypte, ne posait aucun problème en Irak, et recevait fréquemment des subsides de la part du chef de l'Etat. Ajoutons aussi que, malgré l'arabisme de l'idéologie du régime, l'Irak baasssiste était le seul pays à soutenir la langue et la culture syriaques depuis le décret de 1972. On peut donc dire, que, dans ce régime très totalitaire, les chrétiens obtenaient sur le plan culturel et religieux ce qu'ils n'avaient pas au point de vue politique.
Aujourd'hui, après l'émigration massive des années 1990 causée par l'embargo anglo-saxon, la communauté chrétienne d'Irak ne doit plus guère dépasser les 3% de la population, soit quelque 600'000 personnes. On sait que l'Eglise chaldéenne catholique, unie à la Papauté depuis le XVIème siècle, est très majoritaire parmi cette communauté chrétienne et que les orthodoxes, en revanche, sont pratiquement absents (moins de 500 personnes, bien que Bagdad ait eu son évêque, qui avait aussi juridicton sur le Koweït).
Au terme de ce tour d'horizon, on voit que le pays du donneur de leçons Boutros-Ghali est un des moins bien placés en matière de droits des minorités dans l'Orient arabe (même s'il reste infiniment plus facile d'être chrétien en Egypte que dans la Turquie "laïque").
On notera aussi que l'espoir des chrétiens de participer à la vie politique n'est assuré que dans les deux pays, Liban et Jordanie, qui garantissent un quota de sièges aux minorités.
Enfin, il est intéressant de constater que des pays très décriés par l'Occident, la Syrie et l'Irak, ont au cours des trente dernières années donné à des chrétiens des postes politiques (ministère de l'Education nationale, ministère des Affaires étrangères, commandement de l'état-major de l'armée) qui seraient inimaginable dans bien des pays musulmans chouchoutés par le soi-disant Born-Again Christian qui préside (provisoirement) aux destinées du monde.