Sur la célébration du millénaire de la mort de St. Méthode en 1885

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katya1965
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Sur la célébration du millénaire de la mort de St. Méthode en 1885

Message par katya1965 »

La célébration du 1000e anniversaire de la mort de saint Méthode en 1885 a été une manifestation d'hommage de grande échelle aux Saints frères Soluniens Cyrille et Méthode, qui est entrée dans les annales de l'histoire des cultures slaves et de l'Eglise Orthodoxe. C'était un évènement panslave et voire paneuropéen, tant du côte des orthodoxes que du côté des catholiques. Cette fête grandiose avait deux centres concurrents, à Saint-Pétersbourg et à Velehrad (à Moravie), ou plutôt il y a avait deux fêtes quasi disjointes, qui ont à nouveau mis en évidence des divergences entre les deux Eglises.

Tout d'abord, il convient de rappeler que l'anniversaire de 1885 n'était pas la première d'une série de célébrations de Cyrille et Méthode du XIXe siècle. Elle a été précédée par le millénaire de la mission morave des frères Soluniens en 1863 et le millénaire de la mort de saint Cyrille en 1869. De plus, ces deux millénaires précédents ont été célébrés également dans les deux parties du monde slave, catholique et orthodoxe. Cependant, il y avait un trait nouveau dans la célébration de 1885.

Il y a eu des changements importants en Europe entre 1869 et 1185. La chute de Napoléon III et la perte d'un solide soutien politique au Saint-Siège ont incité le pape Léon XIII à proposer de nouvelles initiatives visant à trouver des alliés, et la guerre russo-turque a aidé à libérer une partie des Slaves des Balkans, mais a laissé l'Europe du Sud-Est dans un état de déséquilibre. Le Kulturkampf, lutte des états européens contre l'église et la culture religieuse, a atteint les Slaves, auxquels ils ont répondu par le réveil de plusieurs mouvements religieux, de la modernité catholique et du « socialisme chrétien » (Tchéquie, Slovénie), au mouvement de retour à l'Orthodoxie (Galicie, Tchéquie).

Dans ce contexte la généralisation à toute l'Eglise de la vénération des Sts. Cyrille et Méthode et l'introduction de leur fête dans le calendrier catholique, proclammées
dans son encyclique du Pape « Grande munus », avaient pour but de gagner le soutien des couches politiquement actives des peuples slaves occidentaux et, en même temps, de confronter le Kulturkampf. L'idée de cette encyclique et, semble-t-il, le texte même appartenaient à l'évêque de Dyakovo (Diakovár) Josip Juraj Strossmayer, qui a été également organisateur principal des célébrations du millénaire de la mort de St. Méthode à Velehrad et qui voulait représenter ces célébrations comme panslaves et paneuropéennes.

Du point de vue des russes, la seule glorification digne de la mémoire de nos saints premiers maîtres était celle menée à l'initiative de la Société slave de Saint-Pétersbourg; une telle glorification ne pouvait pas être conçue en dehors de l'Orthodoxie. La profonde différence de sens des deux célébrations suit du fait que pour les russe la contribution la plus importante des saints frères Soluniens était la création de la langue liturgique slave ; la point de vue du camp de Velehrad (et donc de Vatican) se basait sur le principe administratif et hiérarchique, mettant en premier lieu la subordination formelle de saint Méthode à Rome. Voici un extrait de l'encyclique qui met en évidence cette observation :

« Nous sommes profondément émus par la magnifique association de la nation slave et de l'église romaine, association aux débuts les plus nobles. Bien que ces deux apôtres de la foi chrétienne soient allés de Constantinople prêcher aux peuples de l'étranger, c'est de ce Siège Apostolique, centre de l'unité catholique, qu'ils ont reçu l'investiture de leur mission ou, comme cela s'est produit plus d'une fois, sa solennelle approbation. C'est bien ici, dans cette ville de Rome, qu'ils rendirent compte de leur mission et répondirent à leurs accusateurs. C'est ici, sur les tombes de Pierre et de Paul, qu'ils ont juré de garder la foi catholique. C'est ici qu'ils reçurent la consécration épiscopale et le pouvoir d'établir la hiérarchie sacrée, tout en y observant la distinction de chaque ordre. Finalement, c'est ici qu'ils ont demandé et obtenu la permission d'utiliser la langue slave dans les rites sacrés.

[...]

Nous remercions Dieu de Nous avoir donné cette occasion appropriée de remercier le peuple slave et de réaliser un bien commun pour lui. En effet, Nous le faisons avec autant d'empressement que Notre prédécesseurs. Certes, Nous prévoyons et désirons que la nation slave apprenne de la grande abondance d'évêques et de prêtres. Puissent-ils être fortifiés dans la profession de la vraie foi, dans la vraie obéissance à l'Église de Jésus-Christ. Puissent-ils comprendre chaque jour davantage combien une grande force de bien vient des coutumes de l'Église catholique dans la vie familiale et dans tous les ordres de gouvernement. Ces églises justifient certainement les nombreux grands soucis que Nous leur avons témoignés. Il n'y a rien que Nous désirons plus que de prendre les mesures appropriées pour leur confort et leur prospérité et que toutes leurs relations avec Nous soient en perpétuelle harmonie. C'est le plus grand et le meilleur lien de sécurité. Il reste que Dieu, riche en miséricorde, pourrait considérer nos plans et favoriser ce que nous avons commencé. Pendant ce temps, Nous avons Cyril et Méthode, les enseignants de Slovénie, comme intercesseurs auprès de Lui. De même que Nous souhaitons promouvoir leur vénération, Nous faisons confiance à leur futur patronage céleste. »

* * *

Après cet exposé très bref des divergences dans la perception des célébrations de 1885 dans les deux camps, voici une traduction d'un discours de M. Ivan Palmov, prononcé dans la réunion de la Société Caritative Slave le 14 février 1885, donnant davantage de détails sur ce sujet.

Sur l'importance historique du Velehrad d'aujourd'hui *)
(Concernant le prochain pèlerinage des Slaves latins à Velehrad)

Très Révérends Archipasteurs, Mesdames et Messieurs ! Depuis longtemps dans le monde slave, les préparatifs se sont poursuivis de la célébration du millénaire depuis la mort de Saint Méthode. Ces préparatifs, à l'initiative de la Société caritative slave de Saint-Pétersbourg, se font également en Russie : les Izvestia de notre Société ont déjà publié un programme de la commémoration qui aura lieu le 6 avril, bien qu'il n'épuise pas encore tous les préparatifs prévus. Sans aucun doute, ce programme sera fondamentalement adopté par d'autres Slaves orthodoxes qui, comme nous, ont l'intention de célébrer le 6 avril chez eux, sans participer au pèlerinage à Velehrad organisé par les latinistes. Pendant ce temps, pour ce pèlerinage à Velehrad avec une tension fébrile incompréhensible, nos frères latinistes se préparent selon les instructions de Rome : ils écrivent des appels et envoient des invitations non seulement à leurs coreligionnaires, mais aussi aux orthodoxes, construisent des baraques à Velehrad pour des pèlerins, et cela se fait en très grande quantité, comme les journaux avaient depuis longtemps déterminé leur nombre à 300 000. Maintenant, peut-être, ce chiffre a augmenté et tout le Velehrad actuel, composé uniquement des bâtiments de l'ancien monastère ciscercien, avec un petit village adjacent de colons ultérieurs, s'est peut-être transformé en une grande ville bâtie. En général, le nombre de casernes est très impressionnant et témoigne, d'une part, de la bonne gestion par le comité d'organisation de la fête de Cyrille et Méthode du 6 avril à Velehrad, et, d'autre part, des prévisions d'un nombre très important de pèlerins sympathisant avec la célébration organisée.

On suppose donc que le rassemblement à Velehrad sera très peuplé, avec la participation de l'aristocratie spirituelle et laïque des latino-slaves et qu'il y aura une célébration d'envergure inédite. Nous ne savons pas exactement quels seront les détails de la célébration, et en général ils sont soigneusement cachés. Mais des rumeurs plus ou moins fiables à ce sujet en provenance des sphères compétentes pénètrent toujours dans la presse et donnent des raisons de juger de la nature générale de la célébration à Velehrad, prétendument de Cyril et Méthode. Bien entendu, les insolences démonstratives des latinistes contre les orthodoxes n'y prendront pas la dernière place : même les journaux étrangers en informent déjà, et ils pointent, par exemple, les faits d'adresses reconnaissantes des Slaves latins au Pape pour l'ouverture de la célébration de l'anniversaire du 6 avril avec des prières appelant à l'unification des Slaves Orthodoxes avec Rome, les projets de l'évêque croato-latin Strossmayer et d'autres personnes partageant les mêmes idées pour commémorer le millénaire depuis la mort de St. Méthode par la formation d'un nouvel évêché latin en Bucovine, avec sa subordination à l'archevêque polono-latin de Varsovie (probablement dans le but de répandre de nouveaux réseaux de propagande entre les orthodoxes de Bucovine), et bien plus encore †). Et nous entendons des rumeurs privées selon lesquelles la propagande des latinistes parmi les Slaves orthodoxes autrichiens accouplée avec l'invitation à Velehrad va inlassablement : les orthodoxes sont appelés à Velehrad afin qu'ils puissent eux-mêmes participer aux manifestations préparées contre eux sur la tombe inconnue de St. Méthode.

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*) Discours prononcé à l'assemblée solennelle de la Société Caritative Slave le 14 février 1885.
†) Voir Izvestiya No. 1 (mois de janvier), pp. 4–7.

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Ces invitations sont étranges ! Elles auraient un sens pour nous s'il s'agissait de l'autre, de l'ancien Velehrad *), où se trouvait en réalité la tombe de St. Méthode, et où ce saint, avec son frère St. Cyril a vécu et travaillé au profit de l'illumination des Slaves**). Mais le fait est que ce sont des invitations au nouveau Velehrad ; bien qu'il ne soit qu'à une heure de route de l'ancien, il ne représente - en général pour les Slaves et surtout pour les orthodoxes - aucun sanctuaire mémorable ; au contraire, son histoire évoque en nous tant de souvenirs tristes et à la fois instructifs que si nous n'y connaissions pas les derniers exemples d'insolences qui s'y préparent contre nous, nous pourrions les assumer sur la base du passé, de l'esprit latin et de la tendance latine qui ont toujours existé là-bas historiquement. Pour clarifier cette idée, je me permettrai d'entrer dans quelques détails historiques qui ne sont pas dénués d'intérêt aujourd'hui, notamment en vue du prochain pèlerinage latino-slave au nouveau Velehrad.

L'invasion des Magyars sur la plaine du Danube moyen était un signe funeste de la chute de l'ancien État de Grande Moravie, autrefois fort mais déchiré par les troubles internes et les intrigues externes de ses voisins-ennemis : au début du Xe siècle, La Grande Moravie est finalement tombée et sa capitale, Velehrad, a été complètement détruite ; en même temps le sanctuaire de Velehrad a été détruit, le sanctuaire qui nous rappelait la glorieuse activité apostolique de nos éclaireurs Saints Cyrille et Méthode ; le temple où les saints frères enseignaient et où est l'un d'eux, St. Méthode a même été enterré ***).

Néanmoins, les souvenirs de Velehrad et de son sanctuaire de Cyrille et Méthode ont sans aucun doute vécu dans la mémoire du peuple et ont été conservés comme un héritage précieux tout au long de la période ultérieure de la lutte des Slaves occidentaux avec leurs adversaires latino-allemands. Dans la chronique rimée tchèque de Dalimila, donc à la fin du XIIIe et au début du XIVe siècle, le vieux Velehrad est encore dans les mémoires comme un lieu de service et de prédication de St. Méthode dans l'esprit de l'enseignement et des rituels de l'Église orthodoxe orientale:
Prosi Křista Bořivoj ot Svatopluka, krale moravského,
A ot Metuděje, arcibiscupa velehradského.
Ten arcibiscup Rusin bieše,
Mšiu svu slivensky služieše
Ten Velehradě křstil Cecha prvého,
Bořivoje kněze českého****).

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*) Selon les savants (Šafárik, Palacký, G. Wolny, Jireček, Brandl, Gorsky, Lavrovsky, Budilovich, etc.) le vieux Velehrad était probablement situé près de la ville actuelle Ugorskoe Gorodishche (Ungarisch Hradisch), à la gare du chemin de fer allant de Cracovie à Vienne, à un quart d'heure de la Ugorskoe Gorodishche et à une heure du nouveau Velehrad. Il y a des savants qui définissent la position du vieux Velehrad différemment, en l'identifiant à la Mosbourg pannonienne, c'est ce que pensaient Dulik et al. Comparez avec les recherches récentes de A.S. Petrushevich, publiées depuis la fin de l'année dernière dans le Slovo (Le verbe) galicien-russe.

**) Le prof. A.S. Budilovich s'est exprimé en faveur du pèlerinage slave du 6 avril au vieux Velehrad, et son projet, qui n'a pas encore été suffisamment apprécié dans notre pays, a rencontré - selon des rapports privés des sphères slaves compétentes - une grande sympathie de la part des Slaves latins autrichiens, principalement ceux d'entre eux qui apprécient l'antiquité cyrillo-méthodienne, conservée uniquement chez les Slaves orthodoxes, et qui s'abstiennent donc prudemment de préparer des manifestations dans le nouveau Velehrad contre les orthodoxes (le projet lui-même fut imprimé dans Izvestiya en 1884, n°12).

***) La vie pannonienne de St. Méthode dit qu'il est mort à Velehrad et a été enterré dans l'église cathédrale (ch. 17) ; et dans la vie serbe des saints frères Soluniens, le lieu de sépulture de St. Méthode est indiqué de façon encore plus précise, à savoir : St. Méthode a été déposé dans la grande église morave, sur le côté gauche, dans le mur derrière l'autel de la Sainte Mère de Dieu.

****) Rýmovana kronika česka dle výdani Jos. Jirečka, 1877, p. 40. Traduction : « Borivoj a demandé le baptême à Sviatopolk, roi des Moraves, et à Méthode, archevêque de Velehrad. Cet archevêque était Rusin, il fit sa liturgie en slavon, à Velehrad il baptisa le premier tchèque, le prince de Bohême Borivoj. »

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Méthode s'appelle Rusyn, bien sûr, non pas de par son origine slave-russe, mais de par sa confession, à Velegrad comme dans toute la Moravie de l'époque, de la foi que les Slaves russes avaient gardée et confessée. Ainsi, la tradition populaire, dès le XIVe siècle, s'est souvenu de l'ancien Velehrad et y a associé les souvenirs de l'ancienne foi de Cyrille et Méthode, apportée ici d'Orient où elle demeurait intacte.
Mais la force hostile a commencé à prendre le dessus bien plus tôt encore et peu à peu obscurci les légendes orthodoxes cyrillo-méthodiennes sur Velegrad dans la mémoire narrative, soit en les exterminant comme hérésie, soit en les remplaçant par de nouvelles confessions latino-allemandes et en introduisant de traits latino-allemands dans le rituel. La fraude a touché, tout d'abord, le nom même de « Velehrad » : au lieu de l'ancien Velehrad, à une heure de distance de celui-ci, à la fin du XIIe siècle, un nouveau Velehrad est apparu et a usurpé le nom du premier. En 1198, deux frères, les héritiers du trône tchèque, qui se disputaient la couronne, ont conclu un accord entre eux, selon lequel l'un d'eux, l'aîné, Przemysl Ottokar, est monté sur le trône tchèque, et le cadet, Vladislav Heinrich, renonçant volontairement au trône tchèque, a pris le margrave de Moravie comme fief de la couronne tchèque. C'est ce Vladislav Heinrich qui, en 1198, fut le premier à poser en Moravie, dans un creux étroit entre de basses montagnes, à une heure vers l'ouest de l'Ugorsk Gorodishche, la fondation d'un nouveau Velehrad, en y construisant un monastère qui s'est ensuite transformé, avec les efforts de la propagande latine, en un faux « ancien Velehrad ». Après avoir doté le monastère nouvellement fondé de domaines, qui ont ensuite été confirmés à plusieurs reprises par les rois tchèques, le margrave Vladislav, pour y vivre, a convoqué des moines ciscerciens latins et a confié les environs du nouveau Velehrad et d'autres parties de la terre tchéco-morave à leurs activités éducatives, et le Pape les a acceptés, de bonne grâce, sous son patronage particulier.*)


Remarquez, Mesdames et Messieurs, les Ciscerciens - bien que cette fois ils soient venus, avec leur abbé Titelin, de Bohême, où ils sont apparus depuis 1146, ils avaient leur patrie d'origine en France - les Ciscerciens ont été appelés des monastères ciscerciens de la lignée dite de Morimondo, avec une coloration spécialement latine **). Quelle étrange ironie ! L'ancien Velehrad de Cyrille et Méthode est restauré dans un endroit complètement différent et transmis aux ennemis de l'Orthodoxie, donc aux ennemis de la cause et de l'enseignement de nos saints premiers maîtres, est transmis aux premiers latinisateurs les plus conséquents des églises orthodoxes slaves - aux ciscerciens, qui semblaient avoir été introduits en Moravie non pour soutenir les traditions orthodoxes cyrillo-méthodiennes, mais pour les tuer complètement et pour renforcer sur leurs ruines et diffuser parmi les masses populaires les enseignements et les rituels de l'Église latine. Et maintenant, en effet, ayant pris possession du nouveau Velehrad, les Ciscerciens ont aussitôt rejeté l'épithète « nouveau » en insistant sur le nom de Velehrad tout court, car c'est avec celui-ci que le peuple associait les traditions cyrillo-méthodiennes qui lui étaient chères. C'est la technique de la propagande latine : là où il est impossible de détruire complètement les traditions orthodoxes cyrillo-méthodiennes dans la mémoire du peuple, les latinistes recourent aux faux, remplaçant les sanctuaires orthodoxes par des sanctuaires latins analogues - et l'histoire des églises slaves occidentales, en particulier, abonde en de telles contrefaçons.

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*) Les Ciscerciens de Velehrad bénéficiaient du patronage spécial des papes, comme en témoigne un moine de Velehrad, Engel German (†1744) dans son ouvrage manuscrit : « Archivum Welehradense » (maintenant conservé dans l'archive Brněnský Zemský). Déjà en 1208, le pape Innocent III a commencé à accorder aux Ciscerciens de Velehrad un patronage spécial, qui leur a ensuite été constamment montré par d'autres papes ultérieurs : Monasteruim Welehradense fuit assumptum in specialem protectionem s.sedis... in tota Moravia alia nulla recensentur monasteria hac gaudere praerogativa, praeterquam... (Le manuscrit Archivum Welehradense, p. 29 ; aussi dans Sbornik Velehradsky, 1883, III, p. 20)

**) Par conséquent, dans les armoiries des ciscerciens de Velehrad, entre autres, il y avait un signe « MORS » qui appartenait à Morimondo. Manuscrit de l'archive Brněnský Zemský « Nova et Vetera Loci Welehrad monimenta », p. 121. Comp. Památky archeol. V, p. 300 ; aussi Sborník Velehradský, 1881, II, p. 41.

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Dans le cas présent, en ce qui concerne Velehrad, l'affaire frauduleuse ne s'est pas arrêtée au seul nom « Velehrad » : les nouveaux venus Ciscerciens ont continué leur travail et, attirant progressivement dans leur confrérie des slaves locaux et extérieurs, puis ont agi conjointement avec eux dans le sens de la romanisation du Velehrad et de ses mémoires orthodoxes cyrillo-méthodiennes vivant encore parmi le peuple. Certes, les plus récents écrivains latino-slaves qui veulent rapprocher l'œuvre orthodoxe-slave des Sts. Cyrille et Méthode et Rome tentent de montrer que les nouveaux venus ciscerciens auraient eu en tête de soutenir la cause de Cyrille et Méthode sur Velehrad et qu'ils l'ont réellement soutenu presque jusqu'à la toute fin du XVIIIe siècle, quand, sous l'empereur autrichien Joseph II, le monastère a été fermé et seule la fara (église paroissiale) a été laissée à sa place. Mais, bien sûr, il n'y a pas de motifs sérieux pour de tels jugements, et certains de ceux cités frappent simplement par leur naïveté, ou, peut-être, par une impertinence désinvolte et par des rapprochements étonnamment artificiels. Ainsi, par exemple, ils disent: "Méthode et son frère Cyril étaient d'ardents vénérateurs de la Vierge Marie, lui ayant dédié leur église principale à Velehrad ; voilà les Ciscerciens, les fils de Saint-Bernard, d'excellents vénérateurs de Sainte-Marie se sont établis à Velehrad, le 28 novembre 1228, lorsqu'ils ont consacré, selon les règles de leur ordre, un temple et un monastère au nom de la Mère de Dieu, et encore aujourd'hui le temple de Velehrad est consacré au nom de l'Assomption de Sainte-Marie "*). N'est-il pas ridicule d'exposer l'adaptation intentionnelle des Ciscerciens à la légende locale sur l'église de la Theotokos dans le vieux Velehrad pour la base de leur disposition envers la prédication de Cyrille et Méthode et leurs activités parmi les Slaves moraves ?

Le fait que les "Ciscerciens, vénérateurs de Sainte-Marie" aient dédié leur église Velehrad nouvellement construite à la Très Sainte Théotokos, au nom de laquelle le temple avait aussi été consacré à l'ancien Velehrad, le temple qui avait été le lieu de service et d'enterrement de St. Méthode, cette circonstance, dis-je, ne témoigne que de la nature des procédés latinisants des ciscerciens, de leur tendance de manipulation et d'applications rusées (selon les circonstances), au nom de l'idée de promouvoir le latinisme, mais moins de tout cela peut parler de leur sympathie pour la cause des Sts. Cyrille et Méthode.

A ce dernier égard, des cas de vénération de la mémoire de saints Cyrille et Méthode par certains ciscerciens de Velehgrad mériteraient plus d’attention. Tel était d'ailleurs Christian Hirschmentzel (1638 - 1703), allemand de naissance de Silésie : selon les écrivains latins, il parlait beaucoup en public, écrivait et contribuait généralement à l'introduction et à la diffusion de la commémoration des Sts. Cyril et Méthode le 9 mars **). Oui, il est remarquable qu'un ciscercien-allemand se souvienne autant des saints premiers maîtres slaves et qu'il laisse dans ses écrits, conservés dans des manuscrits à l'archive Zemsky de Brno, beaucoup d'instructions concernant la célébration des Sts. Cyrille et Méthode en Moravie. Dans une de ses œuvres, Cineres Welehradenses (pp. 58-59), il a même écrit : « Litaniae ad sanctos Patronos Ecclesiae Welehradensis, quorum primario post dei Latriam honori et Duliae sacella et Altaria sunt erecta. » Dans ces litanies, après les noms de Très Sainte Theotokos, de Saint-Pierre, « prince des apôtres », de Saint-Paul, « apôtre des nations », les noms des Sts. Cyril et Méthode sont mentionnés, à côté des Sts. Benoît, Bernard, Nicolas, Augustin, Viatcheslav, Florian, Clément, Marie-Madeleine, Jadwiga et « tous les saints de l'ordre ciscercien ».
Tous ces témoignages du Velehrad Ciscercien-allemand, bien sûr, ont leur propre signification pour l'histoire des attitudes envers la mémoire des Sts. Cyrille et Méthode en Bohême et en Moravie, mais ils peuvent difficilement confirmer l'idée que les Ciscerciens de Velehrad étaient les véritables gardiens des traditions de Cyrille et Méthode, comme essaient de le présenter les écrivains latins.
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*) Cf. Sborník Velehradský, 1881, II, стр. 41.
**) Stredowsky, Sacra Moraviae Historia, p. 453.

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En comparant cette preuve avec d'autres données historiques, qui sont en partie représentées par le même ciscercien Hirschmentzel, on arrive involontairement à la même conclusion sur les « manipulations » que les ciscerciens pratiquaient généralement pour éradiquer les traditions orthodoxes cyrillo-méthodiennes à Velehrad : pour cela, pour des raisons inconnues, le 9 mars a été établi comme le jour de fête des Sts. Cyrille et Méthode ; apparemment, cette célébration n'était pas « généralisée » à Velehrad avant le moment de l'activité de Hirschmentzel, elle n'a été introduite ici que comme une concession aux traditions populaires locales, qui ont conservé les souvenirs des activités saintes des frères Soluniens à Velehrad et en Moravie en général. Il n'est donc pas surprenant que dans les litanies le nom des Sts. Cyril et Méthode sont rappelés à côté des noms de saints spécialement latins, comme, par exemple, avec le nom du patron ciscercien St. Bernard : il est clair qu'une concession a été faite aux traditions populaires, mais de nouveaux traits latins leur ont été ajoutés, obscurcissant et même déformant l'essence des souvenirs de Cyrille et Méthode parmi le peuple.
Mais telles sont, comme nous l'avons indiqué plus haut, les méthodes de latinisation des ciscerciens, qui dans leur effort pour la latinisation de Velehrad sont allés encore plus loin : ils ont même réussi à révérer Jean Népomucène comme un saint, avant même sa canonisation formelle en 1729. Au lieu du combattant aimé du peuple contre la latinisation de l'Église en Bohême et Moravie, Jan Hus, les Ciscerciens, avec les Jésuites, se sont empressés de pousser Jean Népomucène hors des ténèbres de l'obscurité, l'ont entouré d'une aura de martyre pour le secret de la confession latine (à la fin du XIVe siècle, il fut jeté dans la rivière Vltava à Prague, prétendument pour ne pas avoir révélé au roi tchèque Viatcheslav IV les confessions de la reine Sofia), le glorifier comme un fervent confesseur du latinisme, comme un gardien strict de ce contre quoi le peuple tchèque s'est toujours battu, défendant ses vieilles traditions cyrillo-méthodiennes et défendant son père spirituel vénéré et exécuté Jan Hus. Par conséquent, dans le nouveau Velehrad, même plus tôt que dans tout autre endroit de Bohême et de Moravie, des statues du saint postiche tchéco-latin Jean Népomucène, au lieu de Jan Hus, sont apparues et sa vénération était imposée avec succès parmi le peuple. Ainsi, par exemple, à Velehrad même sur les statues et les chapelles, vous pouvez voir l'inscription suivante : « Venerationi sancti Joannis De Nepomuco 1715 ». Les écrivains tchéco-latins attachent une importance particulière à ce fait ; et en général le fait de l'extrême attachement des Ciscerciens de Velehrad à Jean Népomucène, ses statues placées à différents endroits des anciennes possessions monastiques, chapelles et oratoires qui lui sont dédiées sont considérées comme « une preuve éclatante de la vitalité de l'idée de Cyrille et Méthode dans le monastère ciscercien de Velehrad" *).
Quelle ironie maléfique encore sur le sanctuaire de Cyrille et Méthode, quelle effronterie désinvolte d'associer à ce sanctuaire le saint latin postiche artificiellement avancé Jean Népomuc, dont le nom n'a servi que d'instrument pour la suppression définitive des protestations légitimes de Tchéco-Moravans contre la latinisation, pour l'étouffement des traditions cyrillo-méthodiennes dans le peuple à qui elles sont chères, et par conséquent, pour l'obscurcissement, et non pour l'exaltation de la gloire des Sts. Cyril et Méthode ! Il est étrange que les plus récents écrivains tchéco-slaves n'y prêtent pas plus d'attention, bien que leurs ancêtres, les Hussites, aient parfaitement compris toute la fausseté de la romanisation de leurs anciennes traditions et coutumes ecclésiastiques et, défendant « l'honneur de leurs pères et la vérité de Dieu", ont résolument exprimé leur protestation contre la violence des latinisateurs. Ainsi, à l'époque hussite, les repaires des latinisateurs et, entre autres, le monastère ciscercien de Velehrad étaient dévastés, ses frères fuyaient précipitamment la redoutable vengeance des hussites, de sorte que le monastère de Velehrad restait vide et abandonné lors de ces pogroms.

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*) Sborník Velehradský, II, p. 49.

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Ce n'est qu'après la fin des guerres hussites, avec le début de la réaction germano-latine en Bohême sous les Habsbourg, que le latinisme a recommencé à se renforcer dans le pays et Velehrad est de nouveau tombé entre les mains des ciscerciens de retour, qui maintenant plus résolument qu'auparavant s'opposaient aux traditions cyrillo-méthodiennes et aux idées hussites qu'ils détestaient. L'agitation intensifiée des ciscerciens de Velehrad en faveur de la vénération de Jean Népomucène, dont les images et les statues sont dispersées sur toute la terre tchéco-morave, et en particulier dans les propriétés monastiques de Velehrad, appartient à cette même époque. Ces monuments de Jean Népomucène sont-ils considérés comme « une preuve éclatante de la vitalité des idées de Cyrille et Méthode » au Velehrad Ciscercien ?
Ainsi, la latinisation de Velehrad s'est progressivement déroulée à partir du début du XIIIe siècle jusqu'à la fermeture du monastère ciscercien local à la fin du XVIIIe siècle ! Ni les guerres hussites ni les incendies qui s'abattent sur le monastère à deux reprises (1681 et 1719) n'affaiblissaient les énergies des latinisateurs ciscerciens : après les guerres hussites, un nouveau saint latin, Jean Népomucène, est nommé à Velehrad comme patron (?!) du sanctuaire des Saints Cyrille et Méthode, et sur le site des églises incendiées a été érigé en 1735 un nouveau temple assez spacieux dans le style roman de Renaissance, qui existe toujours avec des changements mineurs dans la décoration intérieure et extérieure. Bien entendu, à chaque restauration, des rénovations étaient effectuées dans un esprit strictement latin et afin de détourner les esprits et les cœurs des traditions anciennes avec un faste extérieur et par des décorations surtout latines : des statues de Jean Népomucène servaient de décoration, entre autres, mais les images des Sts. Cyrille et Méthode ne sont même pas mentionnés dans les monuments écrits et matériels de Velehrad. Cela était fait comme pour que rien ne rappelle au peuple l'antiquité cyrillo-méthodiennee, la majestueuse simplicité byzantine, et tout ne respirait qu'un accablant esprit du latinisme. Certes, lors de la sécularisation des monastères en Autriche, sous le règne de Joseph II, le monastère ciscercien de Velehrad fut également dévasté : comme déjà noté plus haut, en 1784, par ordre de l'empereur Joseph II, ce monastère était fermé et transformé en une simple fara (église paroissiale) avec un seul prêtre, pour la première fois issu des ciscerciens dispersés. Dans le même temps, de nombreux domaines monastiques sont confisqués puis vendus. Entre eux, le bâtiment de l'ancien monastère ciscercien a été vendu et est maintenant passé aux mains du baron de Castries, un parent du célèbre français Mac Mahon ; les richesses et les joyaux des ornements de l'église étaient alors pillés ; seul le temple restait invendu, qui était pourtant de nouveau destiné au culte. Les écrivains tchéco-latins décrivent en larmes ce pogrom et révèlent, avec des lamentations amères, des temps difficiles qui ont suivi à Velehrad : la liturgie était réglée dans les moindres détails, les processions solennelles de la croix, les processions latines étaient limitées à l'extrême, et en même temps, disent-ils, il n'y avait aucun moyen de maintenir l'ancien culte des Sts. Cyril et Méthode, donc, l'esprit cyrillo-méthodien aurait dû s'éteindre à Velehrad.
Apparemment, toutes ces dévastations et restrictions étaient censées simplifier le culte liturgique latin sur Velehrad et semblaient promettre de diminuer les succès latinisateurs des ciscerciens exilés. En effet, il y a maintenant moins de cérémonies latines, artificiellement introduites et répandues parmi le peuple, afin de détourner leurs souvenirs de l'antiquité cyrillo-méthodienne au profit du culte latin ultérieur. Mais la latinisation, à ce moment là, et après la fermeture du monastère et la formation d'une fara à sa place, ne s'est pas arrêtée, elle s'est poursuivie de manière constante, grâce à l'influence allemande désormais croissante partout en Autriche. Depuis ce temps, c'est-à-dire depuis l'époque de Joseph II, l'influence allemande, qui s'était accrue dans toute l'Autriche, a eu un effet plus fort à Velehrad, de sorte que, selon les écrivains tchèques, même dans le travail de bureau, l'ancienne langue latine a été remplacée par l'allemand - et cette pratique a continué jusqu'au temps très récent.

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Cette domination des Allemands, selon même les historiens tchèques eux-mêmes, représentait des conditions défavorables pour l'existence et le développement de l'idée de Cyrille et Méthode, dont la renaissance n'a commencé qu'au siècle présent. Pour notre part, on notera que ce renouveau n'a commencé qu'au milieu de ce siècle, artificiellement, sur la base du rapprochement de la cause cyrillo-méthodienne avec Rome, n'a commencé qu'en 1863, le jour du millénaire de l'arrivée des Sts. Cyrille et Méthode en terre morave, et à partir de ce moment, un propagande intense a eu lieu pour la glorification de leur mémoire. A cette époque, des préparatifs démonstratifs et artificiels ont été faits : la rénovation de l'ancienne église ciscercienne a été entreprise, s'approchant de la fin seulement maintenant, pour le millénaire de la mort de St. Méthode, puis la réalisation des statues des Sts. Cyrille et Méthode, placées à droite et à gauche sur les côtés du maître-autel. Tout cela est la création des mains des temps récents, commencée avec la bénédiction de Rome avec un but dissimulé impur de fournir aux traditions cyrillo-méthodiennes repandues parmi le peuple les signes d'origine latine ultérieure, en empreignant dans les esprits des Slaves l'idée que Sts. Cyrille et Méthode servaient à la cause de Rome. Avec un tel décor latin, cette église rénovée dans un style mixte, roman et renaissance, l'église de Velehrad, bien qu'elle soit magnifiquement décorée et spacieuse, ne représente absolument aucun sanctuaire qui rappellerait l'antiquité orthodoxe cyrillo-méthodienne, chère à tout orthodoxe - sans distinction de nationalités - et surtout aux orthodoxes slaves. Ils exposent dans l'église actuelle de Velehrad, sur l'autel en l'honneur du saint latin Benoît, une petite parcelle des reliques de St. Cyril, offerte par le pape Léon XIII et apportée à Velehrad en 1881 (30 septembre), l'année du pèlerinage des Slaves-latinistes à Rome pour rendre hommage au pape. Mais rappelons l'histoire de ce morceau des reliques de St. Cyril : ce morceau, dit-on, a été obtenu par les moines de Raigrad à Brno en Moravie (où une quantité plus grande des reliques était conservée jusqu'à 1811), et a été présenté au Pape Léon XIII, et ce dernier l'a partagé, l'année du pèlerinage des Slaves à Rome (en 1881), en envoyant la plus petite particule à Velehrad, où elle est exposée aujourd'hui comme le seul rappel de St. Cyrille, bien que non confirmé par des recherches historiques assez conséquentes.
Dans le nouveau Velehrad, en plus de l'église, les auteurs tchéco-latins sont particulièrement heureux de désigner un autre sanctuaire apparemment ancien de Velehrad, connu sous le nom de « Kirilka ». C'est une petite église (en grec paraklis), située dans la direction nord-ouest par rapport à l'église principale de Velehrad, près de la clôture de l'ancien monastère ciscercien, et pendant l'existence du monastère lui-même - dans sa clôture. Même les auteurs tchéco-latins eux-mêmes n'osent pas attribuer son origine à une époque très ancienne : le style gothique de « Kirilka » fait que certains connaisseurs d'architecture l'attribuent au XIVe siècle ; mais les défenseurs de son antiquité imaginaire, par souci de preuve de la vitalité de « l'idée de Cyrille et Méthode » sur Velegrad, habitués à remonter de douteux monuments jusqu'à la vieille antiquité, sans aucune raison, bien sûr, affirment l'antiquité de cette « Kirilka » et disent que même l'endroit où elle se trouve actuellement est le même sur lequel se tenait l'ancienne « Kirilka » construite à l'époque des Sts. Cyrille et Méthode *). Nous ne discuterons pas de ce qui a pu être à cet endroit et de ce qui a pu existé pendant la vie et le travail de nos saints premiers maîtres en Moravie ; cela pouvait être une église ou une chapelle, dont les gens se souviennent encore comme un vestige de l'activité de prédication de Cyrille et Méthode en Moravie sous le nom de « Kirilka ». Cependant, nous pensons, non sans raison, que les ciscerciens adventices ont fait avec la legende de l'ancienne « Kirilka » la même chose qu'ils ont fait avec les traditions de Velegrad en général, c'est-à-dire qu'ils ont encore essayé de la latiniser à un tel degré que même le nom « Kirilka » a été expulsé, au moins de l'usage officiel, et a été remplacé par un nouveau nom : dans les documents ciscerciens, « Kirilka » est appelée « Kostelik du Corps de Dieu » ou « de la Cène du Seigneur »**), et non par son vrai nom qui vivait dans la bouche des gens.

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*) Cf. Sborník Velehradský, 1883, III, pp. 3—9.

**) Nova et vetera loci Velehrad monimenta, manuscrit, pp. 60-61. Comp. Sborník Velehradský, 1883, III, p. 4.

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Ainsi « Kirilka », un monument à l'activité de prédication des Sts. frères Soluniens en Moravie, a été baptisée d'après de la fête apparue dans l'Église latine dans le milieu du XIIIe siècle, la fête définitivement installée en 1311 par le Pape Clément V, et qui
serait très probablement rejetée par nos saints premiers maîtres (s'ils étaient descendus du ciel sur la terre), comme par toute l'Église orthodoxe en général, en tant qu'une innovation ultérieure infondée du latinisme, survenue à la suite d'une vision d'une nonne Juliana à Lüttich. Peut-on considérer un rapprochement aussi artificiel entre la fête spécialement latine du Corpus Christi et les légendes de « Kirilka » comme une « preuve de la vitalité des idées de Cyril et Méthode » chez les Ciscerciens de Velehrad ? — il est clair qu'ils ont essayé de toutes les manières possibles de tuer cet esprit dans la « Kirilka », si populaire, au moins de nom, parmi le peuple. Ainsi, « Kirilka », à l'époque du séjour des Ciscerciens à Velehrad, a connu le même sort, comme l'ensemble de Velehrad en général, subissant une latinisation systématique.

Avec l'expulsion des Ciscerciens de Velehrad en 1784, leurs traditions perdurent néanmoins : la latinisation de Velehrad, on l'a vu, n'a pas cessé depuis l'installation de la « fara » là-bas, et « Kirilka », restant l'église près du cimetière, peu à peu a également perdu sa signification que les ciscerciens ont réussi à lui donner. Dans les années 30 du siècle actuel, il en est venu au point qu'un prêtre de Velehrad, Jan Rudolf, a proposé de détruire complètement la « Kirilka » abandonnée encore plus tôt. Si elle n'était pas détruite, alors elle était complètement abandonnée : le cimetière a été transféré à un autre endroit et le bâtiment même a commencé à servir à des fins économiques des propriétaires et des locataires des domaines de Velehrad. Selon les descriptions de témoins oculaires, dans la période 1855-57, du foin et de la paille ont été conservés à « Kirilka », et cette désolation du lieu saint a conduit un voyageur en 1859 aux tristes réflexions suivantes : « Ne soyez pas horrifiés, Slaves, à ce que vous entendrez maintenant ! Par l'écurie, par un sentier étroit tracé par les dévots moraves, puis devant la verdure du jardin, nous sommes arrivés à une chapelle discrète. Nous avons franchi le seuil - oh mon Dieu, nos jambes n'ont pas bougé, nos yeux se sont remplis de larmes, nos lèvres tremblantes disaient involontairement : Moravie, Moravie ingrate ! Où est passée ta gloire ! Tournons nos yeux vers un nouveau chagrin ! Quelle dérision malveillante dans cette désolation ! Quel redoutable doigt de la Providence pour un peuple ingrat ! La plume tombe de mes mains, mes jambes reculent, je ne veux pas offenser le lieu saint avec une colère provoquée par mon sang. »*)

Pendant ce temps, des plaintes similaires concernant la désolation de « Kirilka » se faisaient entendre, l'année 1863 approchant, que les Slaves occidentaux avaient l'intention de célébrer comme l'anniversaire de la mission des Sts. Cyrille et Méthode en Moravie. A cette époque, le travail sur le renouvellement de « Kirilka » s'est intensifié. Mais remarquablement, presque tout le fardeau de ces soucis et coûts a été supporté par l'archevêque d'Olomut Friedrich Firstenberg, allemand d'origine, qui a également reçu le patronage de « Kirilka » du propriétaire des domaines de Velehrad, le baron de Castries. Par conséquent, il n'est pas étonnant que « Kirilka » ait été restaurée par l'archevêque allemand à nouveau dans le même esprit latin et avec les mêmes tendances que l'étaient le temple et le monastère de Velehrad par les ciscerciens venus de l'extérieur. L'apparence et la forme de « Kirilka » sont restées les mêmes **), dans le style gothique; ses entrailles conservaient aussi un caractère strictement latin.

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*) Hvězda Olomoucká 1859, p. 151, Sborník Velehradský I, p. 48.

**) Elle mesure environ 3 brasses de long, 3 brasses de large et 3 brasses de hauteur.

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Tout d'abord, elle a été consacrée au nom de la fête exclusivement latine « Trois Rois » (le 6 janvier, lorsque les orthodoxes célèbrent l'Epiphanie ou le Baptême du Seigneur), et a été également décorée d'images latines : sur l'autel il y a une image des « Trois Rois », mais aussi des images de Cyrille et Méthode sur un mode latin ; il y a des inscriptions latines sur les murs sous les images *). Les rénovateurs n'ont pas oublié d'indiquer à la postérité qui était le nouveau patron de la « Kirilka », l'archevêque d'Olomouc Friedrich Firstenberg, dont les signes peuvent être vus sur l'autel (ex voto a o. 1862), sur les murs et les piliers soutenant de petites voûtes **) ; même au-dessus de l'entrée en haut, autour de la fenêtre ronde, il y a l'inscription suivante : « Fridericus Archiepiscopus Olomucensis a. d. 1863 » (c'est-à-dire que cet archevêque a contribué à la rénovation de « Kirilka » en 1863). En un mot, tout dans la « Kirilka » fait savoir qu'elle a été rénovée par un archevêque latin, un cardinal allemand, et ce pour indiquer sa signification passée au temps des Ciscerciens et non pour rappeler l'antiquité cyrillo-méthodienne en Moravie.
Cependant, il existe un autre type de particularités dans « Kirilka » qui exposent en partie son caractère latin général. Je veux dire, l'image picturale du Sauveur (sur l'arc principal du pré-autel de l'église), qui de sa main droite bénit selon le modèle de la bénédiction utilisé dans l'Église orthodoxe, et dans sa gauche il tient un livre sur lequel il est écrit en grec : α ω, c'est-à-dire alpha et oméga, début et fin, une image tirée de l'Apoc. 1, 8. Une autre particularité de « Kirilka », qui rappelle encore plus l'époque de Cyrille et Méthode en Moravie, c'est l'icône orthodoxe des Sts. Cyrille et Méthode. Cette icône, avec une lampe pour elle (en or et en argent), a été envoyée à Velehrad par la section de Saint-Pétersbourg de la Société slave, le jour du millénaire de la mort de St. Cyrille en 1869, et avec la permission de l'archevêque d'Olomouc, ellea été pendue à « Kirilka » sur le côté droit sur le mur entre deux fenêtres, légèrement en dessous d'elles ***). Avec cette icône et avec sa lampe de la part de la Société slave, un message petit mais significatif a été envoyé à Velehrad au contenu suivant : « Bien-aimés frères Tchèques et Moraves, réjouissez-vous en Christ ! Vous, frères bien-aimés, avez toujours hautement respecté nos premiers maîtres slaves, Saints Cyrille et Méthode. Nous les Russes, qui utilisons principalement leur héritage sacré, valorisons cette mémoire comme un signe d'unité panslave, qui se manifeste distinctement dans l'esprit de notre communion spirituelle. Cette année marque le millénaire depuis la mort de St. Cyrille. Nous vous offrons pour l'église de Velehrad une icône de lui et de son frère Méthode, qui qui a œuvré chez vous. Nous joignons une lampe et vous demandons de l'allumer devant eux. Que ce petit cadeau soit la preuve de notre chaleureuse affection pour vous et de notre invocation ardente de meilleurs temps glorieux pour l'ensemble du monde slave. 10 janvier 1869 Ville de Saint-Pierre ».
Malheureusement, ce chaleureux message fraternel des Russes a été reçu dans le milieu ultramontain tchéco-morave comme un signe de réconciliation des slaves orthodoxes avec le latinisme sous la conduite du Pape, et a suscité, à l'époque, et continue à susciter encore aujourd'hui, une joie prématurée de l'unité de tous les Slaves à Velehrad, au sein de l'Église latine. Ainsi, par exemple, un prêtre de Velehrad a écrit à ce sujet à ce moment là : « Les généreux donateurs avec cette offrande dédiée à l'église de Velehrad (icônes de saint Cyrille et Méthode avec une lampe) veulent montrer leur révérence religieuse pour Sts. Cyrille et Méthode qu'ils considèrent à juste titre comme les fondateurs de leur éducation chrétienne.

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*) Par exemple : In nomine Jesu omne genu flectatur. Philip. p. 2; Laudemus viros gloriosos, Sap. 44. ver. 1; Initium sapientiae timor Domini. prov. 9; Laudate Dominum omnes gentes. Psal. 116.

**) « FF » avec une couronne, « Aigle rouge sur fond or », « Aigle noire avec une étoile blanche sur fond or », « Dents blanches sur fond rouge », etc.

***) Une petite icône en bois représente, sur fond or, des images orthodoxes des Sts. Cyrille et Méthode, dont le premier, St. Cyril sur le côté droit du spectateur, tient dans ses mains une lettre avec l'alphabet slave cyrillique, et St. Méthode (sur le côté gauche du spectateur) bénit avec sa main droite et tient, dans la main gauche, un livre ouvert avec les premiers mots de l'Évangile de Jean. Entre deux Sts. frères, il y a une croix à huit branches quelque peu surélevée. Ci-dessous, sous les images, se trouve l'an 1869, et au-dessus d'elles, la date du 14 février, puis Les « Éclaireurs des Slaves ».

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Nous, catholiques, ne pouvons que nous réjouir qu'en ce qui concerne la vénération et la célébration des saints, les « schismatiques » (?) soient d'accord avec nous. Il semble que le temps d'une union réelle et sincère des églises occidentales et orientales approche, tant attendu par sa Sainteté (c'est-à-dire le Pape), comme par tous les vrais catholiques. »*) La même idée a été répétée si récemment, à l'occasion du transfert d'une particule des reliques de St. Cyrille sur l'autel de St. Benoît dans l'église de Velehrad et de l'allumage, devant cette particule des reliques, de la lampe russe envoyée en 1869**): « Les membres de la branche de Saint-Pétersbourg de la Société caritative slave de Moscou, en envoyant l'icône, ont clairement compris que Sts. Cyrille et Méthode servent pour tous les Slaves un lien commun, ainsi que Velehrad, où Cyrille et Méthode avaient le siège épiscopal. Aller le plus vite possible vers l'unité, vers l'unité dans la foi prêchée par Sts. Cyrille et Méthode — ce désir de Sa Sainteté le Pape Léon XIII est évident pour tous les Slaves ; par conséquent était-il inapproprié d'accrocher une lampe russe devant les restes de St. Cyrille ? Était-il inapproprié de le faire à Velehrad la semaine même où les mots étaient lus dans le lectionnaire de semaine : Un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême (Eph. 4, 5) ? Après avoir déposé les reliques de saint Cyrille avec révérence et solennité sur l'autel de St. Benoît, accrochant une lampe russe devant eux, nous nous sommes tournés vers la chaire de prédication. »***) Probablement, un sermon a été alors prononcé de cette chaire, en lequel il s'agissait de l'unité des Russes et d'autres « schismatiques » avec Rome sur Velehrad, comme certains tchéco-moraves ultramontains osent encore dire sur Velehrad, lorsqu'ils s'exclament : « Dans quel merveilleux et excellent accord Rome et Petrograd sont sur Velehrad ! Mais qu'ils donnent une interprétation si fausse et tendancieuse à notre offre russe ! Nous savons qu'il y a des gens en Bohême et en Moravie, et peut-être à Velehrad même, qui croient en la sincérité de l'offrande russe et comprennent sa véritable signification, ainsi que le fait de la tendance anti-cyrillo-méthodienne qui existe encore à Velehrad.#) Peut-être que l'image orthodoxe des Sts. Cyrille et Méthode, reçue du peuple consanguin russe, rappellera la vraie nature des activités et de la prédication de nos saints premiers maîtres à Velehrad, en Moravie et en général chez les Slaves occidentaux ; peut-être que cette image fera revivre parmi eux l'esprit de Cyril et Méthode, dont les gens se souviennent encore dans le monde slave occidental, préservant l'histoire, bien que vague, de Cyril et Méthode, dans divers types de légendes, contes, etc., conservant certaines coutumes orthodoxes (comme par exemple la croix orthodoxe, l'attachement aux coutumes et aux rituels de l'Église orthodoxe, la bénédiction de l'eau, etc.),##) épargnant comme une antiquité cyrillo-méthodienne sacrée d'anciennes croix byzantines, dont une multitude se trouve aujourd'hui en Bohême et Moravie et en général dans d'autres terres slaves latinisées.

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*) Comp. Sborník Velehradský, III, p. 37.

**) La lampe envoyée par les russes, avec l'icône des Sts. Cyril et Méthode, transportée dans l'église principale de Velehrad à l'autel de St. Benoît depuis 1881, où des reliques (supposées) de St. Cyrille sont exposées.

***) Comp. Hlas. 1881, N. 84.

#) Nous avons des raisons de croire qu'il existe de nombreuses telles personnes parmi les Slaves occidentaux ; peu d'entre eux se permettent de s'exprimer et encore moins osent s'exprimer plus résolument pour défendre « l'honneur des pères et la vérité de Dieu » contre les mensonges malveillants des ennemis du slavisme et de l'orthodoxie. D'autant plus, donc, méritent attention ces quelques combattants contre ce mensonge malveillant, que l'on voit en Autriche aussi bien chez les Slaves uniates, que chez les Latins et les Protestants, qui se souviennent de l'antiquité cyrillo-méthodienne et la défendent dans l'église et dans la vie.

##) En Bohême et Moravie, la coutume a survécu de sanctifier l'eau trois fois par an (la veille de l'Épiphanie, le Samedi Saint et avant le jour de la Trinité) — une coutume qui a depuis longtemps disparu dans l'Église latine. Comp. mon article dans la « Collection d'articles sur les études slaves, publiée par les étudiants de V. I. Lamansky », SPb. 1883, p. 41-56.

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Je ne veux pas fatiguer votre attention, Mesdames et Messieurs, par d'autres communications, plus spécifiques, qui rendent compte du sort passé et de la situation actuelle du nouveau Velehrad. Il semble que les indications données suffisent à juger quels souvenirs suscite le Velehrad moderne. Fondé dans un endroit complètement différent (de celui où se trouvait l'ancien Velehrad) par des étrangers, Ciscerciens, le plus terrible de tous les ordres latins monastiques de l'époque, persécuteurs de tout ce qui était orthodoxe, le nouveau Velehrad a progressivement subi une latinisation, a servi, en effet, un centre, d'où ce la latinisation s'est répandue à d'autres parties de la Bohême et de la Moravie, supprimant dans la mémoire du peuple les chères traditions de l'époque de Cyrille et Méthode par toutes sortes de falsifications, remplaçant les tranditions anciennes par des innovations, telles que, par exemple, des processions solennelles en l'honneur du patron ciscercien St. Benoît, des légendes du martyre d'un saint latin rapporté Jean Nepomucène, etc. En un mot, sur le Velehrad actuel, il y avait une persécution systématique contre l'esprit cyrillo-méthodiienne, parfois sous les prétextes plausibles de le protéger par des rapprochements artificiels avec des innovations spécialement latines ; ce qui se passait donc, c'était le processus commencé après la mort de St. Méthode par les ennemis latino-allemands des Slaves dans le vieux Velehrad et arrêté par le pogrom magyar. En attendant, pour ce nouveau Velehrad, un pèlerinage populeux des Slaves latins se prépare maintenant, afin de célébrer, le 25 mars (6 avril), le millénaire depuis la mort de St. Méthode. La question est : que retiendront-ils de ce Velehrad, qui a été pendant tant de siècles et reste encore un témoin impitoyable du déracinement du véritable esprit cyrillo-méthodienne en Bohême et Moravie ? Le plus naturel serait pour eux de fixer au préalable un jour de repentir pour les actes contre la mémoire des Sts. Cyrille et Méthode commis par leurs ancêtres et leurs chefs spirituels latinisateurs, et de faire alors la promesse solennelle de suivre indéfectiblement lе testament de nos premiers maîtres. Ce n'est pas ici le lieu d'expliquer l'essence de ce testament, d'autant plus que beaucoup de nos frères latinistes, qui l'ont transgressé, en comprennent suffisamment le sens, mais je rappellerai seulement, combien il s'exprime dans les derniers mots de nos saints premiers maîtres. Il y a 1016 ans, en ce jour même, le 14 février, St. Cyrille dans sa prière sur le lit de mort s'est écrié : Seigneur mon Dieu !.. Ecoute mes prières et garde ton troupeau fidèle, auquel tu avais envoyé moi, serviteur incohérent et indigne de toi. Délivre tous le gens de toute méchanceté impie, abominable et de tout langage hérétique païen, verbeux et blasphématoire, de tout blasphème contre toi, détruis l'hérésie trilingue, et fortifie ton église plus encore, et remets tous le gens ensemble en une seule congrégation, qu'ils confessent la foi vraie, insuffle dans leurs cœurs la parole de ton enseignement, qui est ton don. Comme tu as adopté nous indignes pour la prédication de l'Evangile de ton Christ à eux, pour les inciter à de bonnes œuvres, qui te sont agréables, et que tu les as donnés comme des tiens, je te rends ce qui es à toi, arrange-les avec ta main puissante, couvre les de tes ailes, et qu'ils tous louent et glorifient ton nom. Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit dans les siècles des siècles, Amen. *)
Comme vous pouvez le voir, St. Cyril a prié, entre autres, pour la destruction de l'hérésie trilingue, cette hérésie dont les adeptes (dont le Pape et le clergé latin) considéraient digne de glorifier Dieu seulement en 3 langues : latin, grec et hébreu, mais en aucun cas en slave. Maintenant, nous demandons : cette hérésie trilingue a-t-elle été condamnée dans le Velehrad moderne et n'y est-elle pas encore soutenue dans la pratique liturgique (reconnaissant le droit d'une langue liturgique, généralement, seulement pour le latin), dans l'esprit général du latinisme, qui centralise le tout autour du Pape et ne donne aucune signification aux origines du peuple dans l'église ?

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*) Vie pannonienne de St. Cyrille, chap. XVIII.

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Aussi le dernier sermon de St. Méthode, l'autre premier maître des slaves, non moins instructif, qu'il a laissé à son troupeau orthodoxe, devrait être imprimé de manière indélébile dans le cœur des sucesseurs des Sts. Cyrille et Méthode :
« Mes enfants bien-aimés ! Vous connaissez le pouvoir des hérétiques dans la méchanceté et comment ils, déformant la parole de Dieu, essaient de toutes les manières possibles d'enivrer leurs prochains d'un savoir impur, acceptant et utilisant pour cela deux moyens, la conviction et la cruauté, le premier pour les simples, et le second pour les craintifs ; j'espère que vous garderez votre âme non coupable ni de l'un ni de l'autre, et je prie que vous ne vous laissiez emporter ni par la persuasion des mots, ni par de vaines flatteries, car vous vous tenez sur la pierre de la confession de foi et de l'enseignement des Apôtres, sur laquelle se fonde l'église, et les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle...
Exhortez les autres à garder le testament que nous avons reçu des saints Apôtres et des Saints Pères et qu'ils nous demanderont le jour du jugement dernier. Regardez, marchez prudemment, non pas comme des insensés, mais comme des sages et essayez de garder vos cœurs et ceux de vos frères avec toute la vigilance ; car vous marcherez parmi les filets et grimperez aux sommets ; car après ma mort, des loups sinistres viendront à vous, n'épargnant pas le troupeau, pour emporter le peuple : résistez-leur, vous qui êtes fermes dans la foi, suivant l'enseignement de St. App. Paul que je vous transmets. Dieu tout-puissant et le Père et le Fils né pour l'éternité et le Saint-Esprit, qui procède du Père, vous enseignera toute la vérité et, à ma grande joie, vous présentera irréprochables le jour de la seconde venue du Christ "*).

N'est-il pas clair qu'il condamne ici l'hérésie filiopaternelle (іопатерская, iopatrique) contemporaine de nos premiers maîtres, selon laquelle le Saint-Esprit procède du Fils, ce qui permet par conséquent Filioque. Pendant ce temps, cette hérésie est toujours soutenue sur Velehrad et a toujours d'ardents défenseurs, qui la répandent parmi leurs coreligionnaires et même parmi les Slaves orthodoxes.
Accomplir la volonté de notre premier maître St. Méthode, qui nous a instruit « d'exhorter les autres à garder le testament que nous avons reçu des Saints Apôtres et des Saints Pères » — nous nous tournons maintenant vers nos frères latins et protestants avec une sincère exhortation : qu'ils se souviennent maintenant, que ce soit à la veille de leur célébration de Velehrad, du testament laissé par nos premiers maîtres : peut-être alors auraient-ils découvert leurs autres illusions postérieures, inconnues de nos saints premiers maîtres ; et alors il serait facile pour tous les Slaves de converger vers Velehrad, et de célébrer ensemble la mémoire millénaire de St. Méthode selon l'ancien calendrier et selon les anciens livres liturgiques, qui ont été traduits par nos saints premiers maîtres du grec au slave et qui sont toujours utilisés dans les églises slaves orthodoxes. Malheureusement, nos frères latins ne montrent pas une telle disposition pour la prochaine célébration de Velehrad ; c'est pourquoi la célébration prend un caractère principalement démonstratif, principalement contre les Slaves orthodoxes, ne contenant aucune idée plus ou moins digne de la mémoire de nos grands maîtres slaves. Nous, les Slaves orthodoxes, malgré les manifestations préparées par les latinistes contre nous, nous nous préparerons, comme toujours, honnêtement à célébrer dignement le jour prochain du 6 avril, et que le Seigneur nous épargne des mauvaises intrigues de nos ennemis, comme a prié St. Cyril, il y a 1016 ans, en ce jour même, le 14 février, avant sa mort, en adressant au Seigneur la prière pour son troupeau slave : Béni soit notre Dieu, qui ne nous a pas livrés en proie aux dents de nos ennemis invisibles, mais qui a fait se rompre leurs filets et nous a protégés contre leur impureté ! **)

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*) Légende bulgare ou vie grecque de St. Clément d'Ohrid, chap. 6.

**) Vie pannonienne de St. Cyrille, chap. XVIII.


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Claude le Liseur
Messages : 4352
Inscription : mer. 18 juin 2003 15:13

Re: Sur la célébration du millénaire de la mort de St. Méthode en 1885

Message par Claude le Liseur »

Merci beaucoup. C'est extrêmement intéressant. Et quel travail!

Dans la célébration organisée par Mgr Strossmajer en 1885, on a en germe le génocide des orthodoxes de l'Etat indépendant de Croatie en 1941-1945.

La carte du yougoslavisme et du panslavisme ayant échoué, le Vatican a ensuite joué à fond la carte du pangermanisme, représenté par l'Autriche-Hongrie en 1914-1918 et par le IIIe Reich et ses alliés en 1939-1945.
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