le rôle politique des chrétiens dans l'Orient arabe

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Claude le Liseur
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le rôle politique des chrétiens dans l'Orient arabe

Message par Claude le Liseur »

Voici exactement deux semaines, je suis tombé par hasard sur une bla-blaterie à la télévision française, consacrée au thème du choc des civilisations, où S. E. Boutros Boutros-Ghali, ancien secrétaire général des Nations-Unies, venait faire son numéro. Boutros-Ghali, qui, comme chacun sait, est de l'Eglise copte d'Egypte du pape Chenouda III, se faisait - sans surprise pour moi - l'avocat de la cause musulmane. Mais, à un moment, mon sang n'a fait qu'un tour et je me suis dit qu'il avait franchi toutes les bornes de l'impudence. En effet, dissimulant à peine sa conviction que les Occidentaux sont des imbéciles à qui on peut faire gober n'importe quoi en raison de leur ignorance du monde arabe, le sieur Boutros-Ghali s'est mis à invectiver la France en lui reprochant le fait que les musulmans soient sous-représentés au Parlement français. Je ne m'arrêterai pas sur la bassesse de la comparaison (les Coptes étant, que je sache, la population autochtone de l'Egypte), pour en venir à une constatation de fait. Quand on connaît la situation des chrétiens au parlement égyptien, on ne peut qu'admirer l'extraordinaire cynisme et l'insolence sans bornes de Boutros-Ghali, semblable, mutatis mutanda, à un Marc Dutroux qui se ferait l'avocat de la peine de mort pour les tueurs d'enfants.

Car observons un instant la situation politique en Egypte. L'Eglise copte y revendique 20% de la population, et 30% dans les moments de grand enthousiasme. Chiffre hautement fantaisiste, car les recensements égyptiens donnent une proportion de chrétiens en baisse constante et légère depuis un siècle, en gros de 8% vers 1900 (mais il y avait à l'époque des communautés grecques, italiennes et françaises qui ont émigré) à environ 5% aujourd'hui. Les Coptes soutiennent que tous les recensements depuis un siècle sont truqués, mais sans apporter d'élément en faveur de cette thèse. Les spécialistes occidentaux ne vont pas au-delà d'une sous-estimation de 30% de la population chrétienne en Egypte (rappelons que le chiffre de 20% de chrétiens avancés par les Coptes voudrait dire que le recensement sous-estime la population chrétienne de 75%). On peut donc aller jusqu'à une estimation de 7,5% de chrétiens en Egypte, soit quelque 5 millions de personnes; l'Eglise copte en regrouperait environ 4'500'000 (on sait en revanche que les orthodoxes ne sont plus que 18'000 environ à cause du départ de la communauté grecque).
Mais même si nous nous en tenons aux chiffres officiels qui tournent autour de 5%, cela voudrait dire qu'il devrait y avoir une vingtaine de députés coptes sur les 454 députés du Parlement égyptien pour que leur représentation parlementaire corresponde à leur poids dans la population.
On en comptait en fait 7 aux élections de 1990, 8 aux élections de 2000. Et précisons que, parmi les membres du Parlement, 10 sont nommés par le président de la République, qui nomme toujours une moitié de Coptes pour rétablir un peu l'équilibre. Parmi les 444 députés élus, on comptait 2 Coptes en 1990, 3 en 2000. Outre le fait que ces résultats infirment sans doute la prétention des Coptes à représenter 20% de la population (s'ils étaient 20%, il devrait bien y avoir des circonscriptions où ils sont majoritaires), ils veulent surtout dire que M. Boutros-Ghali, pour donner des leçons de démocratie à la France, ferait mieux d'attendre que 20 députés coptes soient élus dans les circonscriptions égyptiennes...

Le rôle des chrétiens au gouvernement égyptien n'est guère plus brillant. S'il y a dans tous les gouvernements égyptiens deux ministres coptes, ils sont en général en charge de l'Emigration, de l'Irrigation ou du Ravitaillement. La grande nouveauté de ces dernières années a été la nomination du frère de Boutros Boutros-Ghali à l'Economie. Précisons d'ailleurs, que, contrairement à la légende complaisamment entretenue par les media occidentaux, Boutros Boutros-Ghali n'a jamais été ministre des Affaires étrangères: sa qualité de chrétien lui interdisait à l'époque de prétendre à un portefeuille aussi prestigieux; il n'était que le secrétaire d'Etat du ministre en titre Esmat Abdel Meguid, qui était lui musulman.

Non seulement M. Boutros-Ghali, le fameux secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie qui avait écrit ses mémoires en anglais, n'a guère de leçons à donner à la France, mais il devrait encore plus se taire quand on compare la situation de l'Egypte à celle d'autres pays arabes.

Prenons le cas de la Jordanie, qui compte une proportion de chrétiens bien plus faible qu'en Egypte (3%, ce qui représente quelque 150'000 personnes, dont 35'000 orthodoxes): ce pays assure depuis sa création une représentation garantie au Parlement à la communauté chrétienne; ce quota a toujours été largement supérieur à la proportion de chrétiens dans la population totale (par exemple 9 sièges sur 80 au début des années 1990), et le gouvernement compte toujours un ou deux ministres chrétiens, sans restriction quant aux portefeuilles qui peuvent leur être accordés, quoique la présidence du Conseil revienne toujours à un musulman. C'est ainsi qu'on a vu des chrétiens détenir le portefeuille des Finances ou celui des Affaires étrangères.

Au Liban, le Pacte national de 1943, révisé en 1990, va beaucoup plus loin, puisqu'il répartit les sièges du Parlement entre chacune des communautés chrétiennes ou musulmanes reconnues. Quatre communautés musulmanes (sunnites, chiites, druses et alaouites) et six communautés chrétiennes (maronites, grecs orthodoxes, grecs catholiques, arméniens apostoliques, arméniens catholiques et protestants) sont reconnues, tandis que le dernier siège du Parlement est attribué aux minorités chrétiennes et à la petite communauté israélite (il est en général occupé par un catholique romain de rite latin). Chaque groupe se voit assuré d'être représenté au Parlement (par exemple, les orthodoxes ont 14 sièges sur 128). En même temps, le système électoral assez complexe ne fait pas voter les électeurs dans des collèges séparés selon leur confession, mais est conçu pour que les députés soient forcés d'obtenir des voix en-dehors de leur groupe. A titre d'exemple, dans la circonscription d'Aley, qui désigne cinq députés, chaque électeur, quelque soit sa confession, doit obligatoirement voter pour deux maronites, deux druses et un orthodoxe. Ce système assure au Liban l'accès à une existence politique à des minorités particulièrement malmenées dans le reste du monde (Arméniens ou Alaouites, par exemple). On notera aussi que les chrétiens, qui ne représentent plus que 40% de la population (quelque 1'400'000 personnes, dont environ 250'000 orthodoxes), se voient assurés de 50% des sièges, ce qui paraît une mesure des plus sages. La participation au pouvoir exécutif n'est pas non plus monopolisée par un groupe comme c'est le cas en Egypte: le président de la République est maronite, le président du Conseil est sunnite et le gouvernement compte des ministres de toutes confessions.

Reste maintenant le cas des deux Etats arabes qui ont connu le gouvernement du parti Baas, la Syrie et l'Irak.
En Syrie (environ 8% de chrétiens, soit 1'200'000 personnes, dont environ 500'000 orthodoxes), le laïcisme affiché par le parti Baas fait qu'il n'y ni recensement confessionnel, ni quota de sièges au Parlement garantis aux minorités. Mais on se doute que les élections n'ont pas grand sens sous un régime aussi autoritaire, et le clan Assaad s'est toujours arrangé pour leur donner une petite représentation (4 chrétiens sur 250 députés au début des années 1990; toujours deux ou trois chrétiens au gouvernement). La situation politique des chrétiens est très en retrait sur celle des débuts de la Syrie indépendante, où Farès Khoury fut deux fois président du Conseil (1945 et 1954), chose qui aurait été impensable en Egypte. En fait, cette évolution vient aussi du fait que les chrétiens ne veulent pas trop s'engager aux côtés du régime, car ils redoutent les représailles de la majorité sunnite (70% de la population) en cas de disparition du pouvoir baassiste. Au début du régime d'Hafez El-Assaad, les chrétiens avaient pourtant obtenu en Syrie deux postes inimaginables dans la quasi-totalité des pays musulmans: notre coreligionnaire Youssouf Chakkour avait été chef d'état-major de l'armée pendant la guerre du Kippour en 1973, et un chrétien fut ministre de l'Education nationale (et défendu par le président El-Assaad contre les affronts du colonel Khadafi lors d'un sommet arabe à Tripoli). Et ce n'est que devant le risque de guerre civile que Hafez El-Assaad renonça à supprimer l'article de la Constitution qui réservait la présidence de la République aux musulmans.

En Irak, la communauté chrétienne, qui ne représentait pas plus de 5% de la population (le laïcisme affiché avait aussi conduit Saddam Hussein à supprimer la mention de la religion dans les recensements), était sous-représentée au point de vue politique ( 4 chrétiens sur 250 députés en 1984), malgré les très hautes fonctions confiées à l'uniate Tarek Aziz, mais fermement protégée contre toutes les agressions islamistes. En particulier, la construction d'églises, pratiquement impossible en Egypte, ne posait aucun problème en Irak, et recevait fréquemment des subsides de la part du chef de l'Etat. Ajoutons aussi que, malgré l'arabisme de l'idéologie du régime, l'Irak baasssiste était le seul pays à soutenir la langue et la culture syriaques depuis le décret de 1972. On peut donc dire, que, dans ce régime très totalitaire, les chrétiens obtenaient sur le plan culturel et religieux ce qu'ils n'avaient pas au point de vue politique.
Aujourd'hui, après l'émigration massive des années 1990 causée par l'embargo anglo-saxon, la communauté chrétienne d'Irak ne doit plus guère dépasser les 3% de la population, soit quelque 600'000 personnes. On sait que l'Eglise chaldéenne catholique, unie à la Papauté depuis le XVIème siècle, est très majoritaire parmi cette communauté chrétienne et que les orthodoxes, en revanche, sont pratiquement absents (moins de 500 personnes, bien que Bagdad ait eu son évêque, qui avait aussi juridicton sur le Koweït).

Au terme de ce tour d'horizon, on voit que le pays du donneur de leçons Boutros-Ghali est un des moins bien placés en matière de droits des minorités dans l'Orient arabe (même s'il reste infiniment plus facile d'être chrétien en Egypte que dans la Turquie "laïque").
On notera aussi que l'espoir des chrétiens de participer à la vie politique n'est assuré que dans les deux pays, Liban et Jordanie, qui garantissent un quota de sièges aux minorités.
Enfin, il est intéressant de constater que des pays très décriés par l'Occident, la Syrie et l'Irak, ont au cours des trente dernières années donné à des chrétiens des postes politiques (ministère de l'Education nationale, ministère des Affaires étrangères, commandement de l'état-major de l'armée) qui seraient inimaginable dans bien des pays musulmans chouchoutés par le soi-disant Born-Again Christian qui préside (provisoirement) aux destinées du monde.
eliazar
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Message par eliazar »

Merci, Claude.

Dieu! que cela fait du bien d'entendre enfin un orthodoxe ayant le courage de dire des choses vraies à propos de la situation de nos frères confrontés quotidiennement à des peuples - et surtout à des gouvernements - arabo-musulmans.

J'ai beaucoup souffert, depuis pas mal d'années, de l'hypocrisie du haut clergé orthodoxe en France à cet égard. Et du consensus de certains de ses représentants éminents, devant la lente montée de l'islamisation de la France - encore presqu'inaperçue, mais de plus en plus efficace.

Enfin, tu n'es pas évêque, bien sûr, et tu as donc ton franc-parler. Mais cela non plus ne court pas les rues en ce moment...
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Volontairement, je me suis abstenu dans ce fil de parler des sujets autre que la représentation politique, parce que mon but était de répondre avec des arguments circonstanciés à l'outrecuidance de Boutros Boutros-Ghali.

Sur le plan politique, on sait bien que, même dans des pays qui se paient le luxe d'avoir transformé le char de l'Etat en autobus, comme la France où le gouvernement Raffarin III compte 53 membres (tentant peut-être de se rapprocher du record de l'Union soviétique d'avant Gorbatchev où le gouvernement comptait cent ministres en titre...), il n'y a jamais que cinq ou six ministères qui incarnent vraiment le pouvoir: Finances, Affaires étrangères, Défense, Justice, le ministère en charge de la police (qu'il s'appelle Intérieur, Sécurité ou tout autre nom), et autrefois, la Marine ou les Colonies dans les pays qui avaient de vastes territoires outre-mer.
Il ne sert donc à rien de dire que tel ou tel pays de l'Orient arabe a toujours deux ou trois chrétiens dans son gouvernement. Encore faut-il voir s'ils sont barrés ou non de l'accès aux portefeuilles les plus importants. Et, de ce point de vue, il est intéressant de voir que des chrétiens ont pu accéder à l'un ou l'autre des postes les plus importants du gouvernement au Liban, dans la Jordanie du roi Hussein ou dans l'Irak de Saddam Hussein, mais jamais dans l'Egypte qui a engendré le grand démocrate Boutros-Ghali.

Si j'avais voulu faire des comparaisons en dehors du strict domaine politique, les appréciations n'auraient pas été différentes et auraient fait encore mieux ressortir l'impudence de l'ancien secrétaire général de l'ONU.

Il est pratiquement impossible de construire une église en Egypte: il faut pour cela un décret du gouverneur de la province, décret rarement accordé. Encore s'agit-il d'un progrès: en 1998 et 1999, le président Moubarak a délégué aux gouverneurs une prérogative qui était réservée au chef de l'Etat égyptien depuis 1856!
Il n'y avait en revanche aucune difficulté pour construire une église dans l'Irak de Saddam Hussein. Et il ne doit guère y avoir plus de difficultés en Jordanie et en Syrie (pour ne pas parler du Liban). De ce point de vue, l'Egypte est même en retard sur certains pays du Golfe (qui auraient, eux, l'excuse de ne plus avoir de population chrétienne autochtone), où si, la construction d'églises n'est pas libre, du moins les permis de construire sont-ils accordés avec bienveillance ( sultanat d'Oman, émirat de Sharjah, voire émirat du Koweït). Il y a des cas où le président Saddam Hussein, le sultan d'Oman ou l'émir de Sharjah ont offert de l'argent, des orgues ou des terrains pour la construction d'églises. Inimaginable en Egypte depuis la mort de Nasser (qui avait aidé la construction de la nouvelle cathédrale du patriarcat copte).

Seul de tous les pays arabes, le Liban autorise officiellement ses citoyens à quitter l'Islam pour se convertir à une autre religion. Un avocat libanais qui représente souvent le patriarcat d'Antioche dans des rencontres oecuméniques m'a expliqué que la procédure exige que celui qui veut changer de religion fasse enregistrer sa nouvelle appartenance confessionnelle devant l'officier de l'état-civil en se faisant accompagner d'un ministre du culte de son ancienne confession et d'un ministre du culte de sa nouvelle confession. Quand je lui ai demandé si la Syrie "laïcisante" autorisait les passages de l'Islam au christianisme, il m'a répondu que c'était toléré de fait, mais sans possibilité de faire enregistrer la nouvelle appartenance sur les papiers d'état-civil.
Au Maroc, le fait de quitter l'Islam pour une autre religion entraîne la mort civile.
En Arabie séoudite et en Iran, il entraîne la mort physique. Presque chaque année, en Arabie séoudite, l'enfant chéri de l'Amérique, il y a des gens qui sont décapités pour avoir voulu devenir chrétiens.
Au Koweït, j'ai connu un cas où un musulman koweïtien devenu chrétien a été condamné à mort, en 1996; mais les autorités l'ont finalement expulsé vers les Etats-Unis.
L'Algérie tolère les conversions au christianisme (environ un millier par an), peut-être parce qu'elles se produisent surtout en Kabylie où le pouvoir central n'a plus guère de possibilités d'intervention. En tout cas, je n'ai jamais eu connaissance d'un cas où un citoyen algérien passé de l'Islam au christianisme aurait été emprisonné, malmené par la police ou privé de ses droits civils ou civiques.
Mais l'Egypte de M. Boutros-Ghali, l'Egypte qui nous a donné ce grand diplomate "chrétien" venu asséner des leçons de démocratie aux pays d'Europe occidentale, l'Egypte en était en 1977 à discuter d'un projet de loi rétablissant la peine de mort pour le musulman qui passe (ou retourne) au christianisme. Et les cas d'emprisonnement accompagnés de sévices n'y sont pas rares vis-à-vis des musulmans qui se font baptiser. Quelle évolution depuis la Constitution de 1952 qui proclamait la liberté de changer de religion...


De même, il est très fréquent en Egypte que des Coptes soient assassinés par des islamistes dans le cadre d'une stratégie de la tension. Je n'ai pas entendu parler de ce type de violences depuis des décennies à propos de la Syrie, de l'Irak ou de la Jordanie, et je n'ai pas eu connaissance d'un cas semblable au Liban depuis la fin de la guerre civile en 1990.


Les Coptes sont de loin la communauté chrétienne la plus nombreuse dans l'Orient arabe. Ils sont pourtant celle qui semble le plus souffrir de discriminations et de violences de toutes sortes. Je ne dis pas que les chrétiens et les musulmans se regardent avec amour tous les jours en Syrie. Mais je n'ai jamais entendu parler à propos de la Syrie, de la Jordanie ou de l'Irak, de conversions forcées, d'enlèvements de jeunes filles, de pogroms contre des quartiers chrétiens au cours des dernières décennies: il en est en revanche souvent question à propos de l'Egypte. J'ai aussi montré que le baptême n'avait pas été un obstacle pour devenir chef d'état-major de l'armée en Syrie, ministre des Finances en Jordanie ou ministre des Affaires étrangères en Irak.

Il me semble donc qu'il y a un problème spécifiquement égyptien, dû probablement à la complicité de Sadate avec les Frères Musulmans, dont le pays ne s'est toujours pas remis après un quart de siècle.

Et le but de mon message n'était pas de dresser un état de toutes les discriminations religieuses qui peuvent exister dans les pays arabes, mais de montrer que Boutros Boutros-Ghali aurait eu moins d'indécence à donner des leçons à la France s'il avait été originaire de Jordanie, par exemple.
tanios
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Message par tanios »

AL MASSIH QAMM HAQQANNE QAMM
Soit ( en arabe ) : Le Christ est ressuscite , en vérité il est ressuscité.

En cette fête des fêtes je reprend pied dans le forme vous souhaitant à vous tous de joyeuses pâques même si l'expression n'est pas la meilleure qui soit . Il y a ceux qui ont font partie d'une paroisse et qui ont pu participé aux célébrations du Grand Carême et d'autres qui ont passé cette période isolés sur le plan de la participation ( comme c'est mon cas ) ; mais cette période qui commence avec le triode est très particulière dans notre année liturgique.
Je profite du fait que Claude a souléve le cas du problème des chrétiens arabes pour rapporter ce fait qui s'est déroulé printemps 1979 à l'université de Grenoble ( en fac de sciences éco je crois ) lors d'une conférence débat sur les accords de Camp David par un enseignant-chercheur spécialiste du moyen orient . Un étudiant a soulevé le fait que les chrétiens soient abaissés en général dans les pays musulmans et a apporté comme preuve que Boutros Ghali ne soit que secrétaire d'état et non ministre de plein droit ...Il a été hué et un groupe d'étudiants l'atendait à la sortie pour le tabasser...Pourtant à l'époque le fondamentalisme musulman n'était pas officiellement en vogue.
Cela pour dire qu'il est très difficile de débattre come on dit "sereinement " avec des musulmans sur tous les sujets qui fachent...
La plupart des musulmans , même parmi les modérés , refusent d'admettre qu'un chrétien en terre musulman est en situation d'infériorité. Ils comparent avantageusement leur situation à celle des immigrés en Europe ou alors ils invoquent l'inquisition , la reconquête de l'Espagne , ou la situation des chrétiens à l'âge d'or mythique de Baghdad.
Aujourd'hui les chrétiens arabes ne rêvent que de partir ailleurs et des régions entières se vident . C'est en Syrie ou semble -t-il ou leur situation est la meilleure et où leur nombre augmente ( d'après un interview avec le Patriarche Ignace d'Antioche en janvier 2001 ). Au Liban l'église maronite n'est pas timide et possède des médias télévisuels où la foi catholique est annoncée en permanence , elle essaie de dissuader l'émigration des jeunes car les chrétiens du Liban , même si le système politique ne leur est pas défavorable en principe , n'ont pas le moral et broient du noir depuis plus d'une décennie.
D'après les "spécialistes" la présence chrétienne au moyen orient sera réduite à son minimum d'ici peu ( 3 ou 4 décennies ) . Un diplomate français a même écrit un livre à ce sujet il ya qques années ( livre réfuté car trop pessimiste par le Patriarcat orthodoxe d'Antioche ).
Plus fondamentalement les églises essaient de retenir leurs fidèles mais l'attrait d'un vie moins difficile ( en général au Canada ) est terriblement fort. Le pape Schenouda avait déclaré dans une interview [je donne l'esprit de la déclaration qui remonte à 10 ans ] que la croix donnée à l'église copte pouvait paraître lourde mais qu'il fallait la porter avec patience dans le Seigneur.
Faisons confiance au Seigneur . C'est la moindre des choses en ce jour.
CHRISTOS ANESTI
T.
eliazar
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Message par eliazar »

ALITHOS ANESTI - HAQQANE QAMM ! Tanios...

Je te salue avec tout le souvenir ému que j'ai gardé de mes frères libanais et syriens de l'Église Grecque Catholique - car c'est par cette petite porte que je suis entré dans le chemin qui m'a enfin conduit à l'Orthodoxie.

Je n'oublierai jamais qu'à l'ombre de cette petite porte, j'ai trouvé des hommes et des femmes pleins de chaleur et d'affection, et pour moi qui ne suis jamais allé dans les pays de la Méditerranée Orientale, ils ont été comme une oasis dans le désert affectif des Franchimans ... où je me trouvais terriblement isolé, en ma qualité de Méditerranéen provençal.

Pendant quelques années, j'ai éprouvé une immense joie intérieure à chanter dans leur chœur la louange de Dieu en grec et en arabe - et c'est eux les premiers qui m'ont fait découvrir, comme à un frère aimé, la splendeur de la sainte Liturgie de Jean Chrysostome. Dont tu as été douloureusement privé cette nuit, hélas!

Que la solitude qui t'a fait passer cette nuit si sainte seul soit bénie par Al Massiah ! Et qu'elle devienne aussi lumineuse que la sainte semaine qui est devant nous!
< Demeurons dans la Joie. Prions sans cesse. Rendons grâce en tout... N'éteignons pas l'Esprit ! >
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Cher Tanios,

Heureux de vous revoir sur le forum et merci pour votre message riche en informations.

Le livre écrit par un diplomate français qui avait écrit sous le pseudonyme de Jean-Pierre Valognes était d'un pessimisme excessif parce qu'il était orienté: le but du livre était de faire croire que les chrétientés orientales étaient dans une déliquescence si grande que l'uniatisme était pour elle la seule planche de salut.

Or, on a vu pendant la guerre du Liban que le rattachement à Rome avait été pour les Maronites une source de déboires constants: l'interférence de diplomates vaticans ne connaissant pas la situation libanaise avait amené la Papauté à dicter aux Maronites la conciliation à tout prix quand la résistance était encore possible (1975-76) et l'intransigeance suicidaire quand la seule solution était de rechercher une entente avec les diverses factions sur la base de l'accord de Taëf (1989-90).


Le parti pris du livre de Valognes l'a par exemple amené à écrire des pages et des pages sur l'absence de perspectives de survie pour le patriarcat monophysite d'Antioche (Eglise dite jacobite ou syriaque - ce dernier terme étant un abus de langage, parce qu'il y a encore deux villages orthodoxes dans la région de Damas qui parlent un dialecte apparenté au syriaque, et que l'Eglise assyrienne ou nestorienne fait aussi partie de la famille syriaque). Or, aux dernières nouvelles, si cette Eglise a été totalement éradiquée de son terroir d'origine par les Turcs (le nombre des Jacobites du Tour Abdin seriat tombé de 15'000 en 1987 à 3'000 aujourd'hui!), elle a trouvé une nouvelle vie en Syrie où leur patriarcat s'était réfugiée à l'époque du mandat français. Il paraît que, bien loin d'agoniser, cette Eglise construit un immense centre mondial des Syriaques dans la banlieue de Damas.

J'ai eu l'impression que Valognes sous-estimait la capacité de résistance des vieilles chrétientés autochtones du Moyen-Orient, qu'elles soient orthodoxes, monophysites ou nestoriennes (même s'il est vrai que l'état présent de l'Eglise assyrienne ou nestorienne est très préoccupant).

Je vous signale qu'il y a en France un témoignage orthodoxe arabe qui nous est donné par le prêtre Nicodème, originaire de Beyrouth, qui dessert le monastère Saint-Antoine-le-Grand fondé à Saint-Laurent-en-Royans dans la Drôme par l'archimandrite Placide (Deseille).
Au moins, nous devons peut-être à la décision de l'empereur Napoléon III d'envoyer l'armée française au secours des chrétiens qui se faisaient massacrer dans le Mont-Liban et à Damas le fait que la langue française ait pu laisser quelques traces au Liban et que travaille désormais au retour de l'Orthodoxie dans le Vercors un prêtre capable de célébrer dans un français parfait, mais aussi d'entonner un tropaire de la Résurrection dans un arabe si majestueux qu'il vous donne l'impression, l'espace d'un instant, d'être dans une autre dimension.
eliazar
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Message par eliazar »

'HRISTOS ANESTI !

Décidément, le monde de l’Église Orthoxe est immense au regard de Dieu, … mais tout petit en France.
Le P. Nokodim est le moine qui m’a re-chrismé, lorsque je suis revenu à Nice un an après mon Baptême par l’Évêque VCO de Lyon, Photios ; l’Évêque russe de Nice (ou plus exactement de Trachia, résidant à Nice) avait exigé cette re-chrismation, considérant sans doute le Baptême VCO comme… hérétique ?

Ceci pose d’ailleurs une fois de plus le problème de l’œcuménisme et de sa feinte douceur : l’Évêque Photios avait demandé ce Baptême parce que j’avais seulement été chrismé pour entrer dans l’Église de Grèce, alors que mon Baptême catholique romain de naissance n’avait évidemment pas été accompli par la triple immersion. Cette exigence m’avait surpris, mais pas choqué : je trouvais même que c’était logique - même si une conception si « logique » du Baptême m’avait semblée dans un premier temps un peu trop « juridique ».
Par contre, qu’on m’impose une nouvelle chrismation après ce Baptême parfaitement conforme à la tradition de l’orthodoxie et aux canons de l’Église m’a fait une grande peine. J’ai ressenti cela comme l’accusation d’avoir été traître à l’Église – alors que l’Église VCO fondée par l’archimandrite Ambroise était et est toujours à mes yeux un modèle d’orthodoxie, avec une fidélité aux règles de l’Église comme à la Tradition des Pères que je n’avais pas toujours constatée… disons : ailleurs. Je n’ai accepté (dans mon cœur) cette nouvelle chrismation que pour la profonde et respectueuse amitié que je portais depuis des années au P. Nikodim (que j’avais connu bien avant qu’il devienne archimandrite) … qui a d’ailleurs abandonné sa charge de prêtre de la paroisse cathédrale de Nice pour pouvoir suivre et assister l’Évêque malade qui l’avait jadis converti à l’Orthodoxie – lorsqu’il a dû prendre sa retraite monacale à St Laurent en Royans.

Je te signale accessoirement que le P. Nikodim célèbre en slavon avec une égale perfection, et une égale ferveur.
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Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

eliazar a écrit : Ceci pose d’ailleurs une fois de plus le problème de l’œcuménisme et de sa feinte douceur : l’Évêque Photios avait demandé ce Baptême parce que j’avais seulement été chrismé pour entrer dans l’Église de Grèce, alors que mon Baptême catholique romain de naissance n’avait évidemment pas été accompli par la triple immersion. Cette exigence m’avait surpris, mais pas choqué : je trouvais même que c’était logique - même si une conception si « logique » du Baptême m’avait semblée dans un premier temps un peu trop « juridique ».
ALITHOS ANESTI!

Tu n'as pas été reçu dans l'Eglise de Grèce, mais dans le patriarcat de Constantinople.

Le patriarcat de Constantinople a pris l'habitude au XXème siècle de recevoir les catholiques-romains par le sacrement de la chrismation.

L'Eglise de Grèce, elle, reçoit les catholiques-romains par le sacrement du baptême, conformément à l'horos de la Grande Eglise du Christ de 1755-56.
eliazar
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Message par eliazar »

Cher Claude,

Ma tête se perd à te suivre : j’appartenais à l’époque de mon admission dans l’Église orthodoxe à la paroisse des Saints Constantin et Hélène, à Paris. Elle était pour moi une église grecque, avec prêtre grec, liturgie en grec, peuple grec et conseil paroissial tellement grec qu’il avait fait rapporter par le prêtre sa décision de me faire proclamer l’Apôtre en français après sa proclamation en grec : le conseil s’était ému de m’entendre lire l’Apôtre dans la langue du pays, considérant que dans cette église grecque, la langue vernaculaire était le seul grec.

Comment veux-tu qu’un nouveau venu s’y retrouve – dans une telle confusion ? L’Église de Grèce n’est-elle pas sous la juridiction du Patriarcat Œcuménique ? Ne sont-ils pas tous grecs ?

Je suis bien conscient que les deux prêtres et l’Évêque qui m’ont chrismé étaient de tendance nettement œcuméniste – et que l’un au moins appartenait à ce qu’on est convenu d’appeler « l’école de Paris ». Mais j’aurais bien été incapable de distinguer Église Grecque et Église Russe autrement que par leurs spécificités liturgiques.

J’ai été chrismé en effet rue Georges Bizet, mais je croyais que le lieu était choisi en vue de rassembler symboliquement sous l’autorité suprême du Patriarcat de Constantinople un prêtre russe et un prêtre et un Évêque grecs… dont l'un est un prêtre chypriote, par surcroît ! Chypre dépend-elle aussi de Constantinople ?

Certes je serais plus attentif aujourd’hui – mais alors, je me demande s’il existe à Paris une paroisse de l’Église de Grèce ?!
… Et non seulement à Paris, mais en France ?!

En tout cas, la doctrine de l'Évêque d'Athènes Christodoulos me semble beaucoup plus nettement Orthodoxe qu'Œcuméniste.

Et comment expliques-tu alors que des prêtres venus de villes grecques (et non de Turquie) soient en poste rue Georges Bizet ? Dépendent-ils canoniquement de Bartholomeos ou de Christodoulos ?
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Cher Eliazar,

Je ne comprends pas où tu vois un lien de dépendance entre l'Eglise de Grèce et le patriarcat de Constantinople. Te bases-tu sur le fait que l'Eglise de Grèce demande traditionnellement au patriarcat oecuménique de proclamer solennellement les canonisations, mais l'inverse existe aussi: en raison de la crainte que le patriarcat oecuménique avait devant les réactions turques, c'est l'Eglise de Grèce qui s'est chargée de la canonisation solennelle du patriarche-martyr saint Grégoire V.

L'Eglise de Grèce est autocéphale depuis 1850 et elle est aussi indépendante de Constantinople que l'est le patriarcat de Moscou ou celui de Roumanie. Ce n'est pas parce que son primat porte le titre d'archevêque (comme le primat de l'Eglise de Chypre, autocéphale depuis l'an 431...), et non de patriarche, que cela implique une dépendance canonique quelconque.

Le territoire canonique de l'Eglise de Grèce ne comprend pas la totalité du territoire de l'Etat grec dans ses limites actuelles: la Crète, le Dodécanèse et l'île de Patmos constituent trois entités autonomes sous la juridiction du patriarcat oecuménique.
Pour les diocèses de la Grèce du Nord (c'est-à-dire l'Epire, la Macédoine et la Thrace libérés en 1912 et en 1919), il existe depuis 1928 un accord par lequel le patriarcat de Constantinople a confié ces diocèses à l'administration de l'Eglise de Grèce. Les évêques de ces diocèses font partie du synode d'Athènes, mais le patriarche de Constantinople a un droit de regard sur leur désignation.

L'Eglise de Grèce a confié depuis 1922 toutes ses paroisses hors de Grèce au patriarcat oecuménique, à qui on voulait redonner des fidèles devant la disparition de la Grèce d'Asie. Cette décision était aussi motivée par le fait que la Grèce connaissait une instabilité politique grave et chronique et que l'on voulait mettre la diaspora à l'abri des conséquences de cette situation de guerre civile larvée.

Cette décision s'est heurtée à des résistances de la part des communautés grecques d'Amérique, où certaines paroisses sont restées pendant des décennies sous la juridiction du patriarcat d'Alexandrie.

Aujourd'hui, au moins 85% des fidèles du patriarcat de Constantinople sont représentés par la diaspora grecque qui lui a été confiée en 1922 par l'Eglise de Grèce. En Europe occidentale, ces paroisses sont essentiellement desservies par du clergé originaire de Grèce ou de Chypre et qui sert au sein du patriarcat oecuménique. Mais en Amérique du Nord, une grande partie, sinon la majorité, du clergé est née sur place et a toujours vécu dans la juridiction de Constantinople.

Quant à l'Archevêché de la rue Daru, il représente le cas particulier d'un groupe d'émigrés russes qui s'est placé sous la juridiction de Constantinople en 1931, pensant que cela le mettrait à l'abri des ingérences du pouvoir soviétique. Une partie beaucoup plus considérable de l'émigration russe avait formé, dès 1920, l'Eglise russe hors frontières, autre solution provisoire pour échapper aux pressions communistes. L'émigration russe devrait bientôt retrouver son unité administrative au sein du patriarcat de Moscou.
tanios
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Message par tanios »

Chers Amis
Claude a parlé de l'action de Napoléon III qui a sauvé les chrétiens du Liban ( essentiellement les maronites ) de l'anéantissement en 1860. Les maronites en ont gardé un si bon souvenir qu'ils ont appelé la France " leur mère pleine de tendresse "...En 1900 lors d'une visite officielle du Kaiser GuillaumeII au Liban , le gouverneur nommé par les ottomans avait demandé aux libanais de montrer leur joie d'accueillir l'empereur d'Allemagne en décorant leurs villages...Au lieu de cela les habitants de la montagne chrétienne ont éteint toutes les lumières toutes les nuits durant la durée de la visite officielle...
Plus tard , en 1913 , lors de première liaison aérienne Paris-Jérusalem , le commandant Védrine qui avait fait escale à Beyrouth , a lors de la poursuite de son voyage , survolé le siège du patriarche maronite et a lancé des pétales de rose...Cette francophilie , les libanais de la montagne l'ont payé très cher au cours de la première guerre mondiale : la population a été réduite volontairement à la famine et un bon quart des habitants est mort de faim . Les respondables turcs disaient " nous avons éliminé las arméniens par l'épée et nous éliminerons lesl libanais par la faim" ...et lorsqu'enfin en octobre 1918 les armées alliées ( britanniques d'abord puis français peu après ) des foules en guenilles les acclamaient avec une joie immense...
Par la suite cela a favorisé énormément les églises catholiques du pays notamment par le biais de l'enseignement scolaire ...Mais aussi cet enseignement assez occidentalisé a développé une forte sécularistion chez les chrétiens à laquelle la guerre civile de 1975 a marqué un premier coût d'arrêt.
Aujourd'hui les chrétiens du Liban sont ( en général ) plutôt fervents...
L'accueil fait au film de Mel Gibson montrerait la grande différence avec un pays comme la France.
Le film a un grand succès , et surtout , les prélats maronites , patriarche en tête ont tous été très favorables au film . De même les témoignages individuels . On ne le trouve surtout pas antisémite ...Mais cela est autre sujet.
Par contre , les chrétiens libanais sont plutôt oecuméniques au sens ou certains disent " catholiques , orthodoxes ou protestants", c'est pareil du moment qu'on confie sa vie au Christ et qu'on fait le bien...Quand je dis que je ne communie pas dans une église catholique , je risque d'être considéré comme un fanatique...D'ailleurs il me semble que l'église orthodoxe du Liban , lorsqu'elle envoie des futurs prêtres se former en France , elle les envoie à Saint-Serge... . Mais il me semble que l'on peut rencontrer ( surtout chez les moines ) des personnes qui ne se font guère trop d'illusion sur les rencontres oecuméniques .
Cela dit je suis avec intérêt les commentaires ( de JL Palierne en particulier ) sur l'oecuménisme.
Egalement un grand Merci pour Eliazar pour ce que tu as dit sur la nuit de Pâques!
T.
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Merci beaucoup, Tanios, pour votre témoignage.

J'ai souvenir de l'histoire d'un intellectuel maronite qui avait été pendu par les Turcs pendant la première guerre mondiale et avait écrit une déclaration d'amour à la France la veille de son exécution.

Cet attachement des chrétiens du Liban pour le pays qui les avait sauvés en 1860 était paraît-il si connu que le président irakien Saddam Hussein, lui-même musulman sunnite (du moins officiellement, parce qu'il ne semble pas avoir été un foudre de religiosité...) aurait fait au début de la guerre du Liban le reproche à Raymond Barre, alors chef du gouvernement français, de la "défaillance de Paris dans son amitié séculaire pour le Liban", parce qu'il semblait naturel au raïs irakien que tant de fidélité soit payée en retour... (Péroncel-Hugoz, Une croix sur le Liban, p. 21 de l'édition de poche, citant Le Monde du 31 juillet 1982).

En ce qui concerne l'oecuménisme des chrétiens du Liban, c'est aussi une conséquence du confessionnalisme où les différences dogmatiques s'estompent au profit des traditions culturelles. Mais il faut garder espoir. Et cela ne me paraît pas mal que les orthodoxes du Liban envoient certains des leurs se former à Saint-Serge.

Valognes parle tout de même en termes élogieux du renouveau du patriarcat d'Antioche. Avez-vous vraiment l'impression qu'il y a une renaissance spirituelle parmi les orthodoxes du Liban et de la Syrie?
Axel
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Message par Axel »

Je profite de cet excellent fil pour faire un hors-sujet. Mais cela en vaut la peine. Car, une fois n'étant pas coutume, la Civiltà Cattolica post-concilaire a publié il ya de cela quelques mois un très bon papier sur la situation des chrétiens en terre d'Islam.
Je me permets de vous en livrer la tradution française ci-dessous:
Source : http://www.leforumcatholique.org/message.php?num=33976
La 'Civiltà Cattolica' dénonce l’oppression des chrétiens en pays musulmans

Extraits sélectionnés et traduits de l’anglais par l'abbé Alain René Arbez (Genève)

Version anglaise sur le site de L’Espresso: http://213.92.16.98/ESW_articolo/0,2393,41931,00.html

La célèbre revue Civilta cattolica du 18 octobre dernier publie une analyse loyale de la condition des chrétiens en terres d'islam. Lorsque l'on sait que tous les articles de cette revue jésuite passent systématiquement par la censure du Vatican, on comprend que cette approche critique prend une signification particulière dans le contexte international actuel.
L'indispensable clé de lecture 'bat-yeorienne' des rapports entre musulmans et non-musulmans a-t-elle enfin trouvé preneurs au sein des commissions romaines, détrônant enfin le mol islamiquement correct, jusqu'ici habituel aux milieux ecclésiastiques?
Les lecteurs seront certainement intéressés par les quelques extraits objectifs et décapants de cette récente prise de position, traduits de la version anglaise de L'Espresso par mes soins.


Chrétiens en pays islamiques, par Giuseppe de Rosa


Comment vivent les chrétiens dans les pays majoritairement musulmans? Il faut d'abord mettre en évidence un fait étonnant: avant l'invasion islamique, il y avait, dans tous les pays d'Afrique du Nord (Egypte, Lybie, Tunisie, Algérie, Maroc), et en dépit des incursions des Vandales, des communautés chrétiennes rayonnantes, qui ont donné à l'Eglise universelle des personnalités hors du commun: Tertullien, Cyprien, évêque de Carthage, martyr en 258, Augustin, évêque d'Hippone, Fulgence, évêque de Ruspe. Mais après la conquête arabe, la chrétienté locale fut absorbée par l'islam, au point qu'aujourd'hui, elle n'a de présence significative qu'en Egypte, avec l'Eglise copte orthodoxe et autres minorités chrétiennes représentant 7 à 10% seulement de la population égyptienne.

La même situation prévaut au Proche-Orient (Liban, Syrie, Palestine, Jordanie, Mésopotamie), où vivaient de florissantes populations chrétiennes avant l'invasion de l'islam, et où, aujourd'hui, ne subsistent que de minuscules communautés chrétiennes, à l'exception du Liban, où les chrétiens constituent encore une part importante de la société.

Il en est de même, de nos jours, avec la Turquie, qui, dans les premiers siècles chrétiens, apporta une extraordinaire contribution dans le domaine de la liturgie, de la théologie et de la vie monastique. L'invasion des Turcs seldjoukides et la conquête de Cosntantinople par Mehmet II (1453) conduisirent à la fondation de l'empire ottoman et à la destruction de la chrétienté d'Anatolie. Aujourd'hui, le nombre total des chrétiens en Turquie avoisine les 100.000, parmi lesquels un petit nombre d'orthodoxes qui vivent autour du Phanar, siège du Patriarcat œcuménique de Constantinople, lequel a la primauté d'honneur dans tout le monde orthodoxe, et se trouve en communion avec huit patriarches et de nombreuses Eglises autocéphales, en Orient et en Occident, et qui compte environ 180 millions de fidèles.

En conclusion, nous devons constater, en termes historiques, que partout où l'islam s'est imposé par une force militaire, sans équivalent en rapidité et en efficacité, la chrétienté - pourtant extrêmement vivante et enracinée là depuis des siècles - a pratiquement disparu ou a été réduite à d'insignifiants îlots, perdus dans un océan islamique.

Comment cela a-t-il pu se produire? En fait, la réduction des chrétiens autochtones à une minuscule minorité n'a pas été nécessairement le fruit d'une violente persécution, mais a souvent été le résultat des conditions dans lesquelles on les a forcés à survivre, au sein d'états islamiques.


Le visage guerrier de l'islam: le djihad

Selon la loi islamique, le monde est divisé en trois parties: dar al harb (domaine de la guerre), dar al islam (domaine de l'islam), et dar al ahd (domaine de la trève).

Avec les nations appartenant au domaine de la guerre, la loi islamique ne reconnaît pas d'autres relations que celles de la "guerre sainte" (djihad), terme qui signifie "effort sur le chemin d'Allah" et a deux significations, l'une et l'autre assez essentielles pour ne pas être dissociées, comme si l'une n'existait pas sans l'autre.

Dans son premier sens, le djihad connote donc l'effort que le musulman doit accomplir pour être fidèle aux préceptes du Coran et ainsi manifester sa "soumission" (islam) à Allah. Dans son second sens, le djihad connote l'effort que le musulman doit entreprendre pour "combattre sur le chemin d'Allah", ce qui implique de lutter contre les infidèles et de répandre l'islam dans le monde entier.

Le djihad est une obligation de la plus haute importance, à tel point qu'il est souvent répertorié parmi les préceptes fondamentaux de l'islam comme "sixième" pilier.

L'obéissance au précepte de la guerre sainte explique pourquoi l'histoire de l'islam est une interminable entreprise guerrière pour conquérir les territoires infidèles. En particulier, toute l'histoire islamique est dominée par l'idée de la conquête des pays chrétiens de l'Europe occidentale et de l'Empire romain d'Orient, dont la capitale était Constantinople. Ainsi, durant plusieurs siècles, islam et chrétienté se sont affrontés dans de terribles combats, à la suite desquels eut lieu, d'une part, la conquête de Constantinople (1453), de la Bulgarie et de la Grèce, et d'autre part la défaite de Lépante (1571).

Mais l'esprit conquérant de l'islam ne s'est pas éteint après la défaite de Lépante. La progression islamique en Europe ne fut vraiment stoppée qu'en 1683, lorsque Vienne, assiégée par les Ottomans, fut libérée par les armées chrétiennes sous le commandement de Jean II Sobieski, roi de Pologne. En réalité, pendant environ mille ans, l'Europe a été sous la menace permanente de l'islam et a vu sa survie constamment menacée.

Effectivement, durant toute son histoire, l'islam a montré un visage belliqueux et un esprit de conquête à la gloire d'Allah, à l'égard des idolâtres qui n'ont pour choix que la conversion ou la mort. C'est le cas des "peuples du livre" (Juifs, Chrétiens, Sabéens) que les musulmans doivent "combattre jusqu'à ce que leurs membres paient le tribut et soient humiliés" (Coran 9.29).


Le régime de la Dhimma

Selon la loi islamique, les Juifs et les Chrétiens qui vivent dans un Etat musulman sont d'un rang social inférieur, en dépit de leur éventuelle appartenance aux mêmes race, langue et origine. La loi islamique ne reconnaît pas le concept de nation et de citoyenneté, mais uniquement la [i"oumma"[/i], l'unique communauté islamique. C'est la raison pour laquelle tout musulman, en tant que partie de la oumma, peut vivre dans tout pays islamique comme il le ferait dans son pays natal, étant sujet des mêmes lois, usager des mêmes coutumes et bénéficiaire de la même considération.

Mais les "peuples du Livre" (ahl al kitab) deviennent les "peuples sous protection" (ahl al dhimma). En échange de cette "protection", les peuples du Livre doivent payer un impôt (djizia) à l'Etat islamique.

Concernant la liberté de culte, les dhimmis se voient interdire toute manifestation religieuse extérieure, comme le fait de sonner les cloches, de faire des processions avec une croix,de solenniser les services funèbres, ou même de vendre des objets cultuels prohibés pour les musulmans. Ils ne peuvent construire de nouveaux lieux de culte, car cela signifierait occuper une terre islamique qui ne peut jamais être cédée à quiconque, étant devenue, de par la conquête islamique, territoire sacré d'Allah.

Dans la sourate 9.29, le Coran affirme que les "peuples du Livre", en plus du fait d'être contraints à payer les taxes, ont l'obligation de se vêtir d'une manière distinctive, et ne sont pas autorisés à porter des armes, ni à avoir une selle sur leur cheval. A plus forte raison, est-il impossible à des dhimmis de servir dans l'armée, d'être fonctionnaires de l'Etat, d'être témoins lors de procès impliquant des musulmans, de prendre pour épouses les filles de musulmans, d'avoir des domestiques musulmans et d'hériter de musulmans.

Les dispositions de la dhimma tombent lorsqu'il y a conversion à l'islam; mais, dans les premiers temps, les musulmans ne voyaient pas d'un bon oeil ces conversions à l'islam, car elles représentaient une sérieuse perte financière, le trésor islamique étant florissant pour autant que de nombreux [/i]dhimmis[/i] paient les taxes personnelles et territoriales.


Conséquence : érosion de la chrétienté

Il est évident que la condition de dhimmi, prolongée durant des siècles, a, lentement mais sûrement, conduit à l'extinction de la chrétienté dans de nombreux pays islamisés. La condition d'infériorité citoyenne, en empêchant les chrétiens d'obtenir des postes officiels - leur condition d'infériorité religieuse les condamnant à vivre en vase clos et leur interdisant tout développement -, a placé les chrétiens dans une position intenable qui les incitait à l'émigration ou à la conversion à l'islam.

Il y avait également le fait qu'un chrétien ne pouvait épouser une musulmane sans devenir lui-même musulman, en partie parce que les enfants devaient obligatoirement être éduqués dans cette religion. En revanche, les chrétiens devenus musulmans pouvaient divorcer très facilement alors que le christianisme refuse le divorce.

Plus grave encore, les chrétiens vivant en territoires islamisés étaient très divisés entre eux, parfois même ennemis, et appartenaient à des dénominations différentes (Eglises chalcédoniennes et non-chalcédoniennes), à des rites différents (syro-oriental, antiochien, maronite, copte, arménien, byzantin). L'assistance mutuelle était rendue pratiquement impossible.

Le régime de la dhimma a perduré plus de mille ans, même s'il n'a pas été appliqué, toujours et partout, dans les formes extrêmes dites du pacte d'Omar, selon lequel les chrétiens n'avaient pas le droit de construire de nouvelles églises, ni de réparer celles déjà existantes, même si elles risquaient de tomber en ruines (et, s'ils avaient l'autorisation de construire selon le bon vouloir du gouverneur musulman, elles ne devaient pas être de grandes dimensions: leur taille devait rester inférieure à celle des édifices religieux musulmans environnants); mais les plus grandes et les plus belles églises ont été transformées, de force, en mosquées. Cette transformation rendait donc impossible leur restitution aux chrétiens, puisqu'un lieu devenu mosquée ne peut plus être affecté à un autre usage.

La conséquence de ce régime de la dhimma fut l'érosion des communautés chrétiennes et la conversion à l'islam de nombreux chrétiens, pour des raisons économiques, sociales et politiques: pour trouver un emploi correct, pour jouir d'un meilleur statut social, pour participer à la vie administrative, politique et militaire et pour échapper à une condition de perpétuelle discrimination.

Dans les siècles récents, le système de la dhimma a connu quelques modifications, en partie à cause des idées de citoyenneté et d'égalité de tous les citoyens. Toutefois, en pratique, la conception traditionnelle est toujours en vigueur. Le chrétien, bon gré malgré, se retrouve ramené au statut de dhimmi, même si le terme n'apparaît plus comme tel dans les lois actuelles de nombreux pays à majorité musulmane.

Pour comprendre la condition présente de ces chrétiens, il faut faire référence à l'histoire des XIXe et XXe siècles. Dans l'empire ottoman du XIXe siècle, alors que le système des millet était omniprésent, des assouplissements de caractère libéral furent introduits.

De la seconde moitié du XIXe siècle à la fin de la Première Guerre Mondiale, un mouvement de réveil (nahda) eut lieu dans le monde arabe, sous l'influence de l'Occident, dans les domaines de la littérature, du langage et de la pensée. De nombreux intellectuels furent séduits par les idées libérales. Sur un autre front, les chrétiens créèrent des liens solides avec les puissances occidentales (France et Grande-Bretagne, en particulier) qui leur octroyèrent, après la défaite de l'empire ottoman, le protectorat sur ces pays ayant appartenu à ce dernier. Ce qui a permis aux chrétiens à la fois d'acquérir une plus grande liberté civile et religieuse, et de faire des progrès culturels.

C'est surtout dans la première moitié du XXe siècle qu'apparurent divers partis politiques de tendances nationaliste et socialiste, ainsi que laïques, tels que le Baath, le parti socialiste du Renouveau arabe, fondé à Damas, à la fin des années 30, par le professeur syrien Michel Aflak, grec-orthodoxe (converti à l'islam à la fin de sa vie, Note du Traducteur). En 1953, ce parti fusionna avec le parti populaire syrien, fondé en 1932 par Antoine Saada, un grec-orthodoxe du Liban. Cela veut dire que divers programmes politiques inspirés par les idées libérales et laïques de l'occident se développèrent dans différents pays islamiques.


L’apparition de l’Islam radical

Ces événements provoquèrent de fortes réactions dans le monde musulman, suscitant la crainte de voir les idées séculières et les coutumes "corrompues" de l'Occident - identifié avec le christianisme - altérer la pureté de l'islam et menacer son existence.

Cette réaction s'appuyait sur un fort ressentiment envers les puissances occidentales ayant cherché à imposer leur système à l'islam "la meilleure communauté jamais édifiée par Allah parmi les hommes" (Coran 3.110).

Ainsi s'est manifesté l'islam radical, présenté comme l'interprète des frustrations des masses musulmanes. Hassan el Banna, Sayyd Qutb, Abd el Kader Uda, en Egypte, avec les Frères musulmans : abu Al Mawdudi, au Pakistan, et l'ayatollah Khomeiny, en Iran, en sont les plus importants témoins, et leurs disciples ont essaimé partout, de Dakar à Kuala Lumpur…


La condition actuelle des chrétiens dans le monde islamique

L'islam radical, qui propose d'instaurer la sharia [Loi religieuse,NDLR] dans chaque Etat musulman, gagne du terrain dans de nombreux pays musulmans où sont présentes également des communautés chrétiennes. Il est évident que le régime de la sharia va rendre la vie des chrétiens extrêmement difficile, et que leur survie sera constamment menacée.

C'est bien là la cause de l'émigration massive des chrétiens des pays musulmans vers les pays occidentaux - Europe, Etats Unis, Canada et Australie. Il existe une estimation du nombre de chrétiens ayant émigré d'Egypte, Iraq, Jordanie, Syrie, Liban, Palestine, et d'Israël dans la dernière décennie: elle dépasse les trois millions, c'est à dire de 26.5 à 34 % du nombre global présumé des chrétiens vivant habituellement au Proche-Orient.

Il ne faudrait pas non plus sous-estimer de graves agressions contre les chrétiens, récemment perpétrées dans certains pays à majorité islamique. En Algérie, l'évêque d'Oran, Mgr Claverie, (1996) sept moines trappistes de Tibérine (1999) et six religieuses de diverses congrégations ont été brutalement assassinés par des islamistes, même si les meurtres ont été condamnés par un certain nombre d'autorités musulmanes. Au Pakistan, où vivent 3.800.000 chrétiens, parmi 156 millions de musulmans (96% de musulmans), des musulmans sont entrés, le 28 octobre 2001, dans l'église St Dominique à Bahawalpur et ont abattu 18 chrétiens. Le 6 mai 1998, l'évêque catholique, John Joseph, s'est tué en plein tribunal pour protester contre la loi du blasphème qui punit de mort toute offense envers Mahomet, même par simple allusion. Ainsi, dire que Jésus est Fils de Dieu est une offense envers Mahomet, qui a déclaré que Jésus n'est pas Fils de Dieu, mais son serviteur. Avec ce type de loi, les chrétiens sont en danger de mort permanent.

Au Nigéria, où 13 Etats ont introduit légalement la sharia, plusieurs milliers de chrétiens ont été victimes d'incidents. De sérieux conflits se sont produits au sud des Philippines et en Indonésie, où 212 millions d'habitants constituent la plus grande population musulmane du monde, au détriment des chrétiens de Java, du Timor oriental, et des Moluques. Mais la plus tragique situation – hélas ! oubliée par l'Occident - est celle du Soudan, où le nord est arabe et musulman et le sud, noir et chrétien, et en partie animiste. Depuis la période du président Nimeiri, la guerre civile fait rage entre le nord, qui a proclamé la sharia pour tenter de l'imposer partout, et le sud, qui aspire à préserver son identité chrétienne. Le nord fait usage de tout sa puissance militaire, financée par l'exportation de pétrole vers l'Occident, pour détruire les villages chrétiens; empêcher l'arrivée de l'aide humanitaire; tuer le bétail, qui est le seul moyen de subsistance pour la population; mener des raids contre les chrétiens, enlever des jeunes filles, qui sont ensuite vendues comme esclaves ou concubines à de riches soudanais. Selon le rapport 2001 d'Amnesty International, la guerre commencée en 1983 a fait plus de 2 millions de morts et 4 millions et demi de déportés. Dans la région du Nil supérieur, riche en pétrole, des dizaines de milliers de personnes ont été contraintes par la terreur à abandonner leurs maisons, après bombardements aériens, exécutions massives et usage de la torture.

Il faut enfin rappeler une situation de fait souvent oubliée: l'Arabie saoudite est le fournisseur de pétrole le plus important pour le monde occidental et certains ont intérêt à ne pas perturber les relations avec ce pays. En réalité, en Arabie saoudite, où règne le wahhabisme, non seulement il est impossible de construire une église ou d'aménager le moindre lieu de culte, mais tout acte de foi chrétienne est sévèrement interdit et réprimé par de rigoureuses sanctions. De ce fait, un million de chrétiens travaillant en Arabie saoudite sont violemment privés de toute pratique ou de tout signe extérieur lié à leur foi. Ils ne peuvent prendre part à la messe ni à un culte – avec le risque de perdre leur emploi - qu'à l'intérieur de périmètres appartenant à des compagnies étrangères. De plus, l'Arabie saoudite dépense des milliards de pétrodollars, non pas au bénéfice de ses citoyens pauvres ou de musulmans pauvres dans d'autres pays islamiques, mais pour construire des mosquées et des écoles coraniques en Europe, et payer des imams dans tous les pays occidentaux.

Rappelons que la mosquée romaine du Mont Antenne, construite sur un terrain offert par le gouvernement italien, a été principalement financée par l'Arabie saoudite et a été édifiée pour être la plus grande mosquée d'Europe, au cœur même de la chrétienté.

Giuseppe de Rosa s.j.

© La Civiltà Cattolica, pour la version originale, et upjf.org avec A.R. Arbez, pour la traduction française.
Axel
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Inscription : jeu. 25 sept. 2003 23:28

Message par Axel »

Sur le phénomène de la dhimmitude voir les articles en français Bat Ye'or proposés ci-dessous:
http://www.dhimmi.org

Cliquer dans la section: En français: Livres, articles et conférences sous Bat Ye'or
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