Irène-Monique, quand je parle ces "canons cachés", je parle de la collection des textes qu'on appelle
Les canons sacrés de l'Église orthodoxe. C'est un livre qui devrait être largement diffusé dans l'Église orthodoxe, mais que les orthodoxes francophones n'ont jamais voulu traduire parce que ce livre est la bête noire des orthodoxes modernistes. Il devrait cependant être entouré du même respect que les livres liturgiques.
Au moment du concile catholique "Vatican II", une traduction française en a été diffusée auprès des évêques qui y participaient. C'est ce qu'on appelle l'édition "Joannou". Elle donnait côte à côte le texte grec, en général le texte latin (dans l'Église orthodoxe antique ces deux langues étaient utilisées pour que les canons soient reconnus par l'autorité civile) plus une traduction française. L'édition du texte latin et grec est très bonne. La traduction française est très inégale, elle contient de purs contre-sens et des interprétations catholiques erronées. On trouve cette traduction sur Internet sur le site du moins VCO du père Cassien. En fait il semble que cette édition est composé d'un travail sérieux d'édition scientifique du texte, complété par des traductions hâtives et inégales commandées précipitamment à des auteurs divers. J'espère qu'une traduction française pourra rapidement voir le jour.
Il existe aussi un livre intitulé en grec "le Pédalion" qui est en quelque sorte un recueil des canons commenté par divers auteurs ancienc et moins anciens. Il est traduit en anglais.
Dieu voulant, j'espère qu'une traduction française des canons pourra prochainement voir le jour. Mais vous comprendrez qu'il s'agit là d'un énorme travail...
En ce qui concerne les canons sur la réception des hétérodoxes, je me permets de reprecdre ici ce que j'avais déjà écrit, il y a quelque temps dans un autre fil, et qui vous a peut-être échappé :
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Un certain nombre de canons concernent le mode de réception des hérétiques dans l’Église orthodoxe. Le premier d’entre eux est le Canon 46 des Canons apostoliques : « Nous voulons que soit déposé l'évêque, ou le presbytre, ou le diacre, qui ont accepté le Baptême ou le sacrifice des hérétiques, Car quel accord y a-t-il entre le Christ et Béliar, et que partage lefidèle avec l'infidèle ? », ce canon cite la 2nde épître aux Corinthiens 6:15. Le deuxième texte est celui de la Lettre synodique du synode provincial de Carthage de 255, généralement cité sous le nom de canon de saint Cyprien :
[…] C’est pourquoi il faut baptiser et renouveler celui qui arrive à l’Église à l’état brut, afin qu’à l’intérieur il soit sanctifié par les saints, puisqu’il est écrit : Soyez saints, car moi je suis saint, dit le Seigneur . Que celui donc qui a été entraîné vers l’erreur et baigné à l’extérieur puisse se dépouiller par le vrai Baptême, celui de l’Église, de ce sacrilège même dans lequel il était tombé lorsqu’en venant vers Dieu il cherchait un presbytre.
C’est ce canon qui est généralement cité par les orthodoxes qui pensent que les hérétiques (ici ils pensent en général d’abord aux catholiques) devraient être accueillis par le Baptême, et qu’on ne doit même pas parler de re-baptême. Certains de ceux qui veulent citer ce canon utilisent parfois une autre phrase: « L’eau des hérétiques n’est que de l’eau » qui se trouve ailleurs dans les œuvres de saint Cyprien, pas dans la Lettre synodique, mais va bien dans le même sens.
Cependant nombre d’autres canons, postérieurs au Concile de Carthage, parlent de la manière dont l’Église orthodoxe doit recevoir les hérétiques qui retournent en son sein, ou bien de la réception des fidèles qui ont été baptisés par leurs communautés, en faisant une tripartition dans l’éventail très diversifiés de ces groupes. Ces canons distinguent entre les hérétiques, les schismatiques, et d’autres groupes auxquels on donne le nom de parasynagogues ou encore de conventicules. En fait ils forment la quasi-totalité des canons que l’Église orthodoxe a consacrés à cette question.
Avant d’en citer certains, je voudrais faire une remarque. On pourrait considérer que le canon 46 des Canons Apostoliques et le canon de saint Cyprien ne concernent que la première branche de cette tri-partition, celle précisément des “hérétiques”, comme les nomme saint Cyprien, cependant que tous les autres canons du Corpus canonum envisageraient l’ensemble des groupes hétérodoxes des trois catégories. Dans ce cas il n’y aurait pas de difficulté à concilier entre eux les canons concernant la réception des hérétiques.
Cependant le canon 1 de saint Basile, et nous savons de quelle autorité saint Basile a été investi par l’Église dans le domaine canonique, ne craint pas d’évoquer la difficulté causée par le canon de Cyprien, car Cyprien l’applique même à ceux qui ne sont “que” des schismatiques. Ce canon 1 est le premier de ceux que saint Basile a formulés dans la première de ses trois célèbres Lettres canoniques adressées à son ami saint Amphiloque d’Iconium (elle a été écrite vraisemblablement vers 374). Dans l’exposé de ce canon il expose les motifs qui lui font rejeter la position de Cyprien :
Les cathares font eux aussi partie de ceux qui se sont séparés [donc des schismatiques]. Il a cependant été décidé par nos Pères, c’est-à-dire par Cyprien et chez nous [en Cappadoce] par Firmilien, de les soumettre, tant cathares qu’encratites et hydroparastates, à cette même sentence [c’est-à-dire de leur imposer le vrai Baptême] parce que leur séparation avait pris naissance à propos d’un schisme, et que [c’est l’argumentation de Cyprien] la grâce du saint Esprit ne repose plus sur ceux qui se sont séparés de l’Église en sorte que la continuité a été interrompue et que la transmission fait donc défaut. Ceux qui ont été les premiers à se séparer de nos Pères portaient l’imposition des mains, et par cette imposition des mains, ils avaient possédé le don de l’Esprit. Mais redevenus laïcs du fait de leur séparation, ils n’avaient plus le pouvoir, ni de baptiser, ni d’imposer les mains, car ils en avaient déchu. C’est pourquoi ces Pères [Cyprien et Firmilien] ont décidé de purifier par le vrai Baptême, celui qui est donné par l’Église, ceux qui ont été baptisés par eux lorsqu’ils viennent se joindre à l’Église.
Mais [maintenant Basile expose sa position] puisque les Églises d’Asie ont décidé de recevoir globalement leur baptême [celui des cathares] pour des raisons d’économie, que ce Baptême soit reçu.
C’est bien ce qu’il avait exposé d’entrée en commençant ainsi sa lettre :
Puisque l’on a déjà évoqué le cas des cathares, tu as bien raison de rappeler qu’il convient de suivre l’usage de chaque contrée, étant donné que ceux qui ont alors pris une décision en ce qui les concerne ont statué différemment sur leur Baptême […]. Lorsque les Anciens jugèrent en effet qu’il faut recevoir le Baptême, il s’agissait bien du Baptême qui ne s’écarte en rien de la foi. De là vient qu’ils parlaient pour certains “d’hérésies”, pour d’autres de “schismes” ou encore de “para-synagogues”. [saint Basile souligne ici que la Tradition qu’il a reçue de nos Pères dans la foi, ne coïncide pas avec la position de Cyprien. Il faudrait ici rappeler toute l’extrême importance que Basile accorde à la Tradition non-écrite dans la transmission de la Révélation].
Pour les hérétiques, il s’agit de ceux qui se sont complètement séparés et sont devenus comme des étrangers ; les schismes concernent ceux qui se sont séparés des autres pour des raisons de vie ecclésiale ou pour des causes que l’on pourrait éventuellement régler ; les parasynagogues sont des partis regroupant des gens sans instruction autour de presbytres ou d’évêques insoumis. Par exemple si quelqu’un, convaincu de faute, s’obstine à exercer ses fonctions tout en refusant de se soumettre à la règle et revendique de pouvoir présider et d’exercer son service, et si quelques personnes délaissaient l’Église catholique pour se joindre à lui, on aurait là une “parasynagogue”. Un schisme serait par exemple un désaccord au sujet de la pénitence qu’il convient d’imposer à ceux qui ont quitté l’Église. Les hérésies sont par exemple celle des manichéens, des valentiniens, des marcionites ou justement celle des pépuziens, car la différence qui sépare ces groupes de l’Église porte directement sur la foi en Dieu elle-même.
Dès le début nos Pères ont décidé de rejeter complètement le baptême des hérétiques, mais d’accepter le baptême de ceux qui ont fait schisme, parce qu’ils sont encore de l’Église. Quant à ceux qui sont dans les parasynagogues, lorsqu’ils se sont amendés par une juste pénitence et par un sérieux repentir, il est décidé de les réunir de nouveau à l’Église, si bien qu’il arrive fréquemment que des personnages qui ont un certain rang dans le clergé mais se sont joints aux insoumis, dès lors qu’ils se sont repentis de leur faute, soient réadmis dans leur rang.
Le critère décisif qui sépare l’hérésie du schisme réside donc dans la foi en Dieu elle-même, telle qu’elle est exprimée dans la règle de foi, c’est-à-dire la formule trinitaire du Baptême (dont le “Symbole de la foi” est le développement). S’il y a modification de la formule baptismale (on peut penser que c’était par exemple le cas de ces prêtres catholiques qui dans les années de l’après-Vatican II baptisaient “au nom de la Puissance, de l’Amour et de la Sagesse”), on montre qu’on s’est écarté de la foi trinitaire, et donc qu'on est devenu étrangers à l’Église et à la Tradition qui lui a été remise par nos saints Pères. Un tel Baptême n’a aucune valeur, il est nul et non avenu. Mais il faut bien croire, si l'on suit saint Basile, que les schismatiques, soit ne sont pas tout à fait sortis de l’Église, soit que leur geste baptismal imparfait doit être respecté et complété par la chrismation.
Tous les canons qui ont été édictés depuis lors ont repris cette tri-partition des groupes hétérodoxes, et écarté le maximalisme préconisé par saint Cyprien. C’est pourquoi le canon 2 du Quinisexte Concile de 691, faisant l’énumération des collections canoniques apostoliques, conciliaires et patristiques qui s'imposent à l’Église (qui comprennent une demi-douzaine de canons exposant la tri-partition des hétérodoxes), leur ajoute :
de plus le canon édicté par Cyprien, qui était archevêque du pays de l’Afrique, et par le synode qui l’entourait, canon qui n’a eu de force que pour les lieux de ces sièges, selon la tradition qui leur a été transmise.
et nous allons voir que le concile provincial d'Afrique de 419 l'a déjà omis.
Dès 325 le 1er Concile œcuménique de Nicée I parle dans son canon 8 d’une reconnaissance des schismatiques par l’Église orthodoxe (avec leurs évêques) dans le cas des “cathares” :
Le grand et saint Concile a estimé que si jamais ceux qui se donnent le nom de “cathares” [purs] désirent se joindre en groupe à l’Église catholique, on doit les toucher de la main [chirothésie ; il s’agit donc de la procédure de réconciliation des pécheurs repentants avec l’Église] et ils pourront rester dans le clergé. Mais ils doivent préalablement déclarer par écrit qu’ils acceptent les dogmes de l’Église catholique et qu’ils promettent de les suivre, c’est-à-dire que pour observer les décisions de l’Église catholique et apostolique ils devront accepter de communier avec les remariés ainsi qu’avec ceux qui ont failli lors des persécutions et auxquels une durée a été déterminée et un délai fixé [ce sont là les points sur lesquels les “cathares” reprochaient à l’Église son laxisme].
150 ans après saint Cyprien, en 419, le concile provincial de Carthage réuni cette fois sous la présidence de l’évêque Aurélien, rappelle dans son canon 57 que c’est dans l’unique Église (qu'il appelle "catholique" et qui garde la foi "orthodoxe") que l’on peut recevoir tous les Mystères du salut.
Pour ceux qui persistent dans l’hérésie, ces Mystères ne peuvent procurer qu’un plus grand châtiment de condamnation, car ce qui eût été pour eux l’horizon le plus lumineux à rechercher pour la vie éternelle s’ils étaient restés dans la vérité, est devenu pour ceux qui sont dans l’erreur un horizon d’obscurité et d’encore plus grande condamnation. Mais certains d’entre eux ont cherché à échapper à ce sort, et parce qu’ils avaient su reconnaître les voies très droites de l’Église catholique notre Mère [rappelons que pour l’Église ancienne, l’unique Église de foi orthodoxe est appelée “Église catholique”], ils ont cru que ces Mystères sacrés seraient pour eux un remède de vérité et ils les ont reçus.
Il est cependant interdit de réitérer le Baptême donné par les donatistes. Le concile de Carthage ne pense même plus à rappeler la position de Cyprien, et promulgue toute une série de décisions visant à favoriser habilement le retour des donatistes et de leurs évêques dans l’Église catholique, c’est-à-dire orthodoxe.
Le synode de Carthage reproche même aux Églises d’Italie, et à un récent synode, d’avoir refusé de recevoir les clercs donatistes en leur conservant leurs titres et leurs fonctions, même lorsque cela ne gêne pas les évêques locaux de l’Église catholique (orthodoxe). Le synode de Carthage craint que les obstacles posés au retour des donatistes par la rigueur des décisions italiennes ne fassent obstacle à leur retour à l’unité de l’Église.
Il en résulte que, tant dans les campagnes que dans les villes, là où ils se trouvent les seuls à avoir été ordonnés, ceux qui font partie du clergé [donatiste]pourront rester dans cet état ; Mais si certains se présentent là où il y a un évêque ou un presbytre de l’Église catholique, il est évident que l’évêque de l’Église conservera la dignité épiscopale tandis que celui qui est appelé “évêque” parmi ceux qui se disent “cathares” n’aura plus que la dignité presbytérale, à moins que l’évêque ne juge bon de le laisser jouir de l’honorariat de ce titre ; mais si cela ne convient pas à l’évêque, qu’il lui ménage une place de chorévêque ou de presbytre afin que l’on puisse bien voir qu’il fait complètement partie du clergé, mais afin aussi qu’il n’y ait point deux évêques dans une même ville.
D’autres conciles développent la même tripartition. Voici par exemple le texte du canon 7 du IIème Concile œcuménique de Constantinople de 391 :
Ceux qui reviennent de l’hérésie à l’Orthodoxie et à l’héritage des sauvés doivent être reçus selon la procédure requise selon l’usage. Les ariens et les macédoniens, les sabbatiens et les novatiens qui se qualifient de cathares, les aristeriens de même que les tétradites et les apollinaristes ne doivent être admis que sur présentation de déclarations anathématisant par écrit toute hérésie qui ne pense pas ainsi que pense la sainte Église de Dieu, catholique et apostolique ; ils doivent tout d’abord recevoir le sceau, c’est-à-dire être oints du saint Chrême sur le front, sur les yeux et sur les narines, sur la bouche et sur les oreilles ; et lorsque nous les oignons nous disons : Sceau du don du saint Esprit.
Quant aux eunomiens, ceux qui ne baptisent qu’avec une seule immersion, aux montanistes, à ceux que l’on appelle ici les phrygiens et aux sabelliens qui enseignent la doctrine du Père-Fils et commettent d’autres choses abominables (et il en existe ici un certain nombre, surtout parmi ceux qui viennent du pays des Galates), tous ceux qui veulent passer à l’Orthodoxie, nous ne les recevons qu’en tant que païens, et le premier jour nous faisons d’eux des chrétiens, le second jour nous les faisons catéchumènes, le troisième jour nous les exorcisons en leur soufflant trois fois sur le visage et sur les oreilles, et ensuite nous les instruisons en les laissant venir à l’Église durant une année pour entendre les Écritures et après cela nous les baptisons.
Le Quinisexte Concile œcuménique de 691 modifie et complète dans son canon 95 le texte que nous venons de citer, récapitulant ainsi ainsi la procédure de réconciliation des hétérodoxes :
Ceux qui reviennent du parti des hérétiques à l’Orthodoxie et à l’assemblée des rachetés, nous les recevons conformément au rite et à l’usage qui suivent : Les ariens, les macédoniens, les novatiens qui se disent “purs”, les aristeriens, les quatordécimans ou tétradites et les apollinaristes, nous les recevons en leur faisant signer un libelle d’abjuration et anathématiser toute hérésie qui ne pense pas comme la sainte Église de Dieu, catholique et apostolique, nous les signons, c’est-à-dire que nous les oignons d’abord du saint chrême au front, aux yeux, aux narines, à la bouche et aux oreilles tout en disant ; Sceau du don du saint Esprit.
En ce qui concerne les sectateurs de Paul de Samosate qui décident de retourner dans l’Église catholique, il a été décidé qu’il est absolument nécessaire de les rebaptiser. Quant aux eunomiens qui sont baptisés par une unique immersion, et aux montanistes, qu’on nomme aussi Phrygiens, aux sabelliens, qui admettent l’identité du Père et du Fils et accomplissent aussi d’autres rites abominables et à tous les autres hérétiques, et ils sont fort nombreux, surtout ceux qui viennent du pays des Galates, tous ceux parmi eux qui veulent revenir dans l’Orthodoxie, nous devons les recevoir comme des païens. Le premier jour nous les signons du signe de la Croix, le second nous les admettons parmi les catéchumènes, le troisième jour nous les exorcisons en leur soufflant par trois fois sur le visage et sur les oreilles, et alors nous les instruisons et nous les admettons à assister dans l’église durant une année pour écouter la lecture des saintes Écritures, puis nous les baptisons. De même nous rebaptisons les manichéens et les marcionites et ceux qui viennent de semblables hérésies, les recevant comme des païens.
Tandis que les nestoriens et les eutychiens et les sévériens et ceux de semblables hérésies doivent présenter une déclaration écrite d’abjuration et anathématiser leur hérésie et Nestorius, et Eutychès, et Dioscore, et Sévère et les autres hérésiarques et leurs sectateurs et toutes les hérésies que nous avons citées, et alors seulement ils seront admis à la sainte communion.
On notera que ce dernier paragraphe vise essentiellement ceux que l’on appelle maintenant “les anti-chalcédoniens”.
Il y a deux interprétations théoriques possibles à l’attitude des canons de l’Église concernant la réconciliation des schismatiques : soit que l’Église estime que les groupes schismatiques, puisqu’ils continuent de pratiquer le Baptême au nom du Père, et du Fils et du saint Esprit, n’ont pas totalement rompu avec l’Église et que, puisque le Baptême peut être donné, en cas de nécessité, par quelqu’un qui n’a pas reçu la grâce du sacerdoce, les schismatiques n’ont pas pu rompre la transmission du Baptême; soit que leur Baptême est nul et non avenu, mais que l’Église doit respecter la forme sacrée de ce geste accompli sans valeur par les hérétiques, et lui conférer la validité dont il était dépourvu, par l’onction du saint Chrême faite sur le schismatique lorsqu’il est reçu dans l’unique Église, car la Grâce que confèrent les saints Mystères, et celui-ci parmi d’autres, n’est pas une énergie unifonctionnelle. La Chrismation est alors l’activation d’un Baptême ineffectif.
Les canons ne comportent pas d’analyse doctrinale. Ce n’est pas leur objet. Ils se contentent de rappeler ce qu’était la Tradition transmise à l’unique Église par les Apôtres. Ils ne nous permettent donc pas de trancher entre deux interprétations possibles, ils se contentent d’affirmer que c’est bien là la pratique inspirée qui s’impose à l’Église orthodoxe.
Aucun canon bien entendu, ne mentionne le catholicisme et le sort qui doit être réservé aux catholiques lorsqu’ils demandent à être reçus dans l’Église orthodoxes. Les canons inclus dans le Corpus canonum de l’Église orthodoxe sont antérieurs à 1054. Le problème est donc de savoir dans quelle catégorie il faut classer l’Église catholique. L’adjonction du Filioque dans le Symbole de la foi, dont il a été longuement question dans un autre fil, doit-elle conduire à classer le catholicisme parmi les hérésies? Cependant il est certain que l’Église catholique n’a pas modifié la règle de foi que représente la formule batismale : Au nom du Père, et du Fils et du saint Esprit. Les prêtres catholiques qui avaient tenté à une certaine époque de la modifier ont vite été rappelés à l’ordre.
Il est certain que l’adjonction du
Filioque a constitué le verrouillage, le point de rupture définitif entre le catholicisme et l’Orthodoxie. Je crois d’ailleurs qu’il n’a été que l’étape décisive, irréversible dans une évolution beaucoup plus ancienne qui l’avait préparée, et que par la suite l’orgueil occidental, dont la force et la violence avaient été décuplées par cet égarement de la foi, a multiplié ses méfaits, engendrant un monde “nouveau” qui court maintenant à la folie auto-destructrice.
Mais je crois aussi qu’on ne doit pas prendre à la lettre la fausse cohérence systématique du catholicisme. La transmission, fût-elle formelle, de la formule trinitaire baptismale doit être considérée comme suffisante pour que nous considérions les catholiques comme "schismatiques". Les hérétiques seraient je crois les mormons, témoins de Jéhovah, salutistes, quakers, unitariens, New Age, etc, etc... et tous ceux qui ne pensent même pas à se référer même formellement à la foi trinitaire.
Mais aussi longtemps que la formule baptismale du catholicisme restera inchangée, nous devons ne considérer l’adjonction du Filioque qu’au niveau du commentaire, pêle-mêle avec les nombreuses affabulations et aberrations spirituelles et les élucubrations théologiques dont le catholicisme se rend coupable.[/i]
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J'ajouterai deux nouveaux commentaires : d'abord qu'on ne peut pas considérer que le monde spirituel se divise purement et simplement en orthodoxes et en païens. Il faut bien admettre qu'il existe diverses catégories de chrétiens non-orthodoxes. On doit donc adopter diverses pratiques à l'égard de diverses pratiques.
La deuxième remarque est que l'Église catholique n'a pas seulement créé un schisme, et adopté une hérésie, tout en continuant à transmettre le Baptême
correct, elle a, par-dessus le marché
pollué les sources de la vie spirituelle en créant un type d'homme nouveau, qui se veut a-spirituel, mais qui n'est en réalité qu'un auto-muyilé.